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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 15 juin 1995

.0932

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Nous accueillons aujourd'hui, de la Commission nationale des libérations conditionnelles, M. Willie Gibbs, président.

Ce matin nous examinerons des questions découlant du budget principal 1995-1996, ainsi que l'exposé de mission ou les perspectives ministérielles pour la Commission nationale des libérations conditionnelles.

Comme vous le savez, nous n'avons pas pu convoquer la Commission nationale des libérations conditionnelles pendant les audiences habituelles sur le budget principal à cause de notre programme très chargé découlant de notre examen de la Loi sur le contrôle des armes à feu. Nous avons terminé nos travaux sur ce projet de loi et nous avons presque terminé le projet de loi C-72; et nous avons donc le temps d'entendre la Commission nationale des libérations conditionnelles avant la relâche d'été.

La réunion de ce matin a lieu conformément aux articles 108(2) et 81(7) du Règlement.

Je demanderais à M. Gibbs de nous présenter les gens qui l'accompagnent et de faire une déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions. Pendant la période de questions, monsieur Gibbs, si vous voulez demander à vos fonctionnaires ou à d'autres personnes dans cette salle de répondre à certaines questions, sentez-vous à l'aise de le faire.

M. Willie Gibbs (président, Commission nationale des libérations conditionnelles): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci de me donner l'occasion de vous présenter mes collègues.

[Français]

Ce sont Mme Denise Walter, qui est conseillère juridique pour la Commission;

[Traduction]

Mme Nancy L. Stableforth, première vice-présidente de la commission; et M. Peter Callahan, directeur, Gestion organisationnelle.

.0935

[Français]

Lorsque j'ai comparu devant votre Comité pour la première fois, en octobre dernier, je vous ai déclaré que mon rôle de président allait comporter des difficultés et des défis et que j'aimais l'idée de pouvoir apporter une contribution importante au système de justice pénale. Je puis vous assurer que, neuf mois plus tard, je suis décidé, plus que jamais, à améliorer ce système.

Les tâches qui m'incombent se sont révélées exigeantes, mais assurément très intéressantes, tant en raison de leur nature qu'en raison du fait que nous vivons une époque de grande activité et de grand changement. Je suis de plus en plus conscient de la nécessité de bien faire comprendre aux Canadiens et aux Canadiennes le système de justice pénale et le processus de mise en liberté sous condition.

La population a peu confiance, malheureusement, dans les différentes commissions des libérations conditionnelles. En cette période où la charge de travail augmente et où les ressources diminuent, la Commission nationale des libérations conditionnelles a non seulement dû se doter d'une stratégie pour améliorer sa crédibilité et mieux rendre compte de ce qu'elle fait, mais elle a aussi cherché à accroître son efficience. La Commission a compris il y a longtemps que des changements radicaux et une toute nouvelle orientation s'imposaient.

Depuis mon arrivée à la Commission, grâce à l'excellent travail d'une bonne équipe de commissaires et de fonctionnaires, j'ai assisté à un certain nombre de changements dont plusieurs étaient internes. Vous avez reçu nos «Perspectives ministérielles», où sont décrits bon nombre de ces changements. J'éviterai aujourd'hui de répéter le contenu de ce document; je tenterai plutôt de développer certains de ses aspects et de vous en exposer de nouveaux.

[Traduction]

La révision de notre Énoncé de mission et la rationalisation subséquente de nos opérations et de notre structure nous ont engagés dans une voie nouvelle. Par ailleurs, nous avons participé à l'examen des programmes et nous tâchons de donner suite aux recommandations qu'a soulevées le vérificateur général. Comme vous le savez, certains des changements nécessitent des modifications législatives, et ces modifications sont incluses dans le second projet de loi omnibus et dans le projet de loi C-45.

Dans son rapport, le vérificateur général formulait des recommandations sur le processus de nomination des commissaires, la qualité du processus décisionnel et l'information servant de fondement aux décisions. Nous avons communiqué notre plan d'action au vérificateur général et avons depuis réalisé beaucoup de progrès dans ces trois domaines clés, avec la collaboration, pour certains aspects, de nos collègues du Service correctionnel du Canada.

Ainsi, nous avons cherché ensemble à améliorer la qualité des renseignements sur lesquels nous sommes appelés à fonder nos décisions, en insistant particulièrement sur l'analyse et l'évaluation des risques, et nous travaillons actuellement à l'établissement de mesures de rendement qui serviront dans le cadre du programme des mises en liberté sous condition.

Comme M. Edwards vous l'a expliqué en avril dernier, nos organismes ont collaboré étroitement à la simplification de la gestion des cas, et ce, dans le but de recueillir sur les délinquants des renseignements plus précis et plus pertinents qui permettront aux commissaires de prendre des décisions plus éclairées.

Nous avons récemment accepté de déléguer au Service correctionnel du Canada une partie de notre pouvoir décisionnel associé aux permissions de sortir sans surveillance, et ce, pour améliorer l'efficacité et l'efficience des deux organismes sous le régime de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

C'est en avril dernier, lors d'une réunion conjointe du comité de direction du Service correctionnel et de la Commission nationale des libérations conditionnelles, que les membres ont convenu à l'unanimité de déléguer au SCC une partie du pouvoir décisionnel de la CNLC à l'égard de ce type de mise en liberté. La date cible d'entrée en vigueur a été fixée au 1er juillet 1995. À partir de ce moment, le SCC se chargera des demandes de permission de sortir sans surveillance pour des raisons médicales et des demandes émanant de tous les délinquants, à l'exception de ceux qui purgent une peine à perpétuité ou une peine d'une durée indéterminée, des agresseurs sexuels d'enfants et des criminels qui ont causé un dommage grave ou la mort.

Nous avons maintenant un nouveau processus de sélection pour les commissaires, et lors des entrevues j'ai été très impressionné par les qualifications des aspirants que nous avons rencontrés ces derniers mois. J'ai moi-même présidé la plupart des entrevues de sélection des nouveaux membres dans les différentes régions du pays, et, en mon absence, la première vice-présidente, Nancy Stableforth, a présidé celles-ci en tant que membre du jury. Je dois avouer que ce nouveau processus m'a rendu très optimiste quant à l'avenir de la Commission nationale des libérations conditionnelles.

.0940

En date de la première semaine de juin, toutes les régions avaient été soumises au processus de sélection. Nous avons maintenant une liste de candidats qualifiés, liste valide pour une période d'environ un an. Le 28 avril, huit nouveaux commissaires ont été nommés, trois en Ontario et cinq en Colombie-Britannique, et le 9 juin cinq autres ont été nommés pour le Québec.

[Français]

En plus d'améliorer le processus de nomination, nous avons également développé d'autres procédés. Au mois d'avril, on a mis sur pied un système d'évaluation du rendement qui a permis de veiller à ce que les commissaires possèdent les compétences et les connaissances nécessaires pour prendre les décisions difficiles qui leur incombent.

Les principaux objectifs de ce système sont les suivants: évaluer les forces et les faiblesses de tous les membres de la Commission; identifier les besoins en formation et les actions à prendre pour en corriger certains; et s'assurer que le suivi sera fait.

Ce système d'évaluation du rendement est une étape essentielle pour appuyer et améliorer la qualité des décisions et la responsabilisation de celles-ci. En dernier ressort, dans des cas très rares, je l'espère, lorsque le rendement d'un membre ne pourra atteindre les standards professionnels exigés, le processus d'évaluation du rendement mènera aux mesures disciplinaires proposées dans le projet de loi C-45.

Nous avons institué un cadre de formation à l'échelle nationale qui assurera une initiation complète ainsi qu'une formation et un perfectionnement continus aux commissaires, pour les tenir au courant des changements apportés aux divers textes législatifs, politiques, procédures et règles relatifs à l'évaluation du risque et, de façon générale, améliorer leur rendement. De plus, on offre déjà une formation accrue en matière d'évaluation du risque, qui se concentre sur les recherches, les théories et les opinions qui ont cours dans le domaine des sciences du comportement humain et des sciences sociales.

Nous avons tenu en mars dernier une assemblée générale, la première depuis quatre ans, et donné ainsi l'occasion aux commissaires de tout le pays de reprendre le dialogue. En trois jours, les membres ont pu partager leurs expériences, consulter les praticiens, des chercheurs et autres, et tirer profit des connaissances de chacun.

Il existe maintenant une méthode plus structurée pour analyser de façon approfondie les résultats des vérifications de cas et des enquêtes nationales. Ces analyses servent en effet d'outils didactiques et nous permettent en même temps de garantir que les procédures sont respectées et que les tâches sont accomplies de façon cohérente et conforme à la loi. Ces outils se sont avérés une source précieuse d'information sur l'expérience acquise dans toutes les régions du pays.

Depuis le 26 avril, la Commission nationale des libérations conditionnelles perçoit un droit de 50$ pour les services de réhabilitation, qui sont connus sous le thème «Pardon». Après de longues consultations avec les gouvernements et les organismes, il a été convenu que l'imposition de frais d'utilisation serait une solution réaliste qui nous permettrait de respecter nos priorités et d'accroître notre efficience. L'an dernier, nous avons traité quelque 25 000 demandes de réhabilitation. En nous basant sur ce chiffre, on prévoit recouvrer quelque 1,2 million de dollars par année. Au mois de mai, par exemple, nous avons reçu 2 423 demandes, représentant un montant de 121 150$.

[Traduction]

Nous venons d'aborder en résumé les derniers changements que la commission a apportés à son mode de fonctionnement. Permettez-moi maintenant de vous parler brièvement de deux autres sujets.

Les améliorations constantes qu'apporte la commission sont étroitement liées au maintien de bonnes relations avec les victimes et leurs porte-parole. La consultation ouvre la voie à la connaissance et nous sensibilise aux différents points de vue; c'est pourquoi les décisions ne sont prises que lorsque les divers points de vue ont été attentivement pris en considération. Notre tâche ultime consiste à protéger la population, et nous essayons de nous en acquitter de la façon la plus sensée et la plus sensible possible.

.0945

Soit dit en passant, deux de nos dernières recrues commissaires ont déjà travaillé auprès de victimes d'actes criminels. De concert avec le Service correctionnel du Canada, nous nous efforçons aussi d'améliorer nos services de liaison avec les victimes en nous inspirant des résultats d'une enquête approfondie sur les victimes et sur leurs besoins.

Le Canada s'est doté d'un système de libération conditionnelle qui est basé sur des valeurs fondamentales; il se compare avantageusement aux systèmes de nos voisins du Sud et au rôle qu'ils donnent aux commissions des libérations conditionnelles, lorsque celles-ci existent. Plus tôt cette année, la Commission nationale des libérations conditionnelles a assisté à une conférence organisée aux États-Unis par l'Association of Paroling Authorities International. Tous les participants, moi y compris, ont eu l'occasion de prendre conscience du véritable impact d'un régime de mise en liberté sous condition et des conséquences auxquelles est vulnérable une société qui en est dépourvue.

Le Canada, il est vrai, subit l'influence des États-Unis à bien des égards, mais je pense que notre système de justice pénale est de loin supérieur à celui des Américains. Je suis reparti de la conférence avec l'impression qu'il y avait d'importantes leçons à en tirer, notamment celles-ci: dans les États qui ont aboli la libération conditionnelle, on libère les détenus en se fondant uniquement sur la portion de la peine qu'ils ont purgée, et non sur une évaluation minutieuse du risque, de l'opportunité et des conditions de mise en liberté. Cette situation a poussé des groupes de défense des droits des victimes à réclamer le rétablissement ou le maintien de la libération conditionnelle afin d'être en mesure de faire part de leurs récriminations à un organisme officiel chargé de veiller à ce que les conditions de mise en liberté soient dûment examinées.

J'ai avec moi un résumé des délibérations sur l'abolition des libérations conditionnelles aux États-Unis. Si cela vous intéresse, faites-moi signe. Je n'en ai qu'un exemplaire.

Enfin, il ne faut pas oublier que la Commission nationale des libérations conditionnelles est un organisme chargé de mettre en liberté, et non de maintenir en incarcération. Si nous sommes parfois appelés à libérer des délinquants qui purgent des peines pour avoir commis des crimes violents, nous ne sommes pas pour autant appelés à libérer des délinquants violents. Les membres de la commission et bon nombre de leurs principaux partenaires sont profondément convaincus de la valeur de la mise en liberté sous condition dans le processus de réinsertion sociale des délinquants.

Merci beaucoup, mesdames et messieurs, pour votre attention. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Gibbs.

[Français]

Monsieur St-Laurent.

M. St-Laurent (Manicouagan): Je vous remercie pour votre exposé, monsieur Gibbs. Je me permettrai d'en citer une phrase importante:

Vous parliez plus tôt des détenus qui ne sont pas admissibbles à recevoir une libération conditionnelle et de ceux qui le sont. De quel ordre de grandeur parle-t-on en ce qui a trait à la population carcérale à l'heure actuelle, qui se chiffre à plus de 10 000 dans les prisons du Canada?

M. Gibbs: Je n'ai pas compris la dernière partie de votre question.

M. St-Laurent: À l'heure actuelle, dans les prisons du Canada, il y a environ 10 000 détenus. Parmi ces gens-là, il y en a une partie qui sont violents, qui ne sont pas admissibles à une libération conditionnelle. Quelle est le pourcentage de l'un et de l'autre?

M. Gibbs: La population carcérale, d'après les dernières statistiques, est d'à peu près 14 500, et environ 65 p. 100 de cette population, d'après les statistiques du Service correctionnel, sont là pour des offenses violentes prévues à l'Annexe I: vols à main armée, meurtres, etc.

D'abord, tous les détenus sont admissibles à la libération conditionnelle après avoir purgé un tiers de leur sentence. On traite du risque et on traite de tous les cas, cas par cas. Combien sont prêts à sortir? Cela dépend de chaque cas. Le pourcentage de détenus condamnés pour crimes avec violence est d'environ 65 p. 100.

.0950

M. St-Laurent: Donnez-nous un aperçu des statistiques avant et depuis votre entrée en fonction. Sur quoi peut-on se baser? Selon les chiffres approximatifs que nous avons, il y en aurait 20 p. 100 que je qualifierais, de façon péjorative, d'irrécupérables pour la société. Cela dépend du langage qu'on emploie évidemment.

Selon mon expérience personnelle et celle de gens que je côtoie souvent, on parle d'environ 20 p. 100. Est-il vrai que ces 20 p. 100 de la population carcérale, soit environ 3 000 détenus sur 14 500, ne seront pas mis en libération conditionnelle, tandis que les 11 500 autres détenus pourraient être admissibles selon leur comportement à l'intérieur des murs? En vous fondant sur les statistiques, sur votre expérience personnelle et sur l'état actuel du milieu correctionnel, cette évaluation est-elle juste?

M. Gibbs: De toutes les demandes de libération que nous recevons, on en accorde à peu près le tiers. D'après nous, ces personnes sont capables de fonctionner sans présenter de risques indus pour la société. En ce qui a trait au pourcentage de ceux qui sont récupérables, j'aime mieux répondre de cette façon plutôt que d'essayer de deviner ou de donner une opinion personnelle.

M. St-Laurent: Vous parliez plus tôt d'une somme de 50 $ qu'il fallait débourser. Si je comprends bien ce que vous dites, cela veut dire qu'une personne incarcérée doit débourser 50 $ lorsqu'elle fait une demande de librétation conditionnelle.

M. Gibbs: Cela s'applique aux pardons. Lorsqu'une personne a expié toute sa peine, elle peut, cinq ans plus tard, faire une demande de pardon pour que son dossier soit effacé.

M. St-Laurent: Vous parliez également des nominations de commissaires et de l'embauche de nouveaux commissaires, ainsi que de la formation. Dès que les nouveaux commissaires sont nommés, on leur donne une formation pour éviter les erreurs qui, trop souvent, sont catastrophiques à ce niveau-là. N'y a-t-il pas, sur le marché de l'emploi, des gens qui pourraient, à l'heure actuelle, être embauchés de façon non politique et qui posséderaient déjà ces compétences?

M. Gibbs: C'est exactement ce que nous faisons. Nos offres d'emploi sont annoncées dans la Gazette et nous sommes assez précis sur les caractéristiques et les habiletés dont nous avons besoin. L'expérience de ces derniers mois nous a démontré que les gens qui faisaient une demande d'emploi avaient des antécédents de justice pénale, correctionnelle ou autre. Ce n'est qu'à la suite des entrevues d'évaluation que le gouverneur en conseil procédera aux nominations de ceux qui se sont qualifiés.

M. St-Laurent: Il n'en reste pas moins que ce sont des nominations politiques.

M. Gibbs: Ils sont tous qualifiés avant de passer à l'étape du Cabinet.

M. St-Laurent: Disons qu'il y a une amélioration.

.0955

Suite au projet de loi C-45, vous avez délégué au Service correctionnel du Canada une partie de votre pouvoir décisionnel associé aux permissions sous surveillance, notamment aux directeurs des centres de détention. Depuis quand est-ce en vigueur? Depuis le 1er avril?

M. Gibbs: Non. Cela entrera en vigueur à compter du 1er juillet.

Cette pratique existait déjà sous l'ancienne Loi sur les libérations conditionnelles. Le taux de succès, en ce qui a trait aux absences temporaires, a toujours été de plus de 99 p. 100, que ce soit décidé par les directeurs d'établissement ou par la Commission. Les recommandations proviennent du Service correctionnel. Nous pensons que l'idée d'envoyer des commissaires dans des établissements pour rendre les décisions portant sur des absences de trois jours est un peu exagérée.

Nous l'avons conservée pour les cas les plus sérieux, lorsque la vie ou la violence est en jeu.

M. St-Laurent: Vous n'avez noté aucune réticence, soit de la part des administrateurs en général, soit des administrateurs de pénitenciers, quant à cette délégation des responsabilités que vous venez d'effectuer? C'est une responsabilité supplémentaire que vous confiez aux directeurs de pénitenciers. Vous n'avez eu vent d'aucune réaction de ce genre?

M. Gibbs: Pas du tout. Je crois plutôt que cela a été reçu favorablement. Les directeurs d'établissement s'étaient sentis un peu froissés d'avoir perdu ce pouvoir en 1992. Maintenant, cela revient à ce que c'était auparavant.

M. St-Laurent: Vous avez proposé plusieurs changements quand vous êtes entré en fonctions. Comment ont-ils été introduits? Comment les appliquez-vous? Vous devez avoir un calendrier de mise en oeuvre. Y a-t-il du retard ou de l'avance? Est-ce que cela achoppe sur certains points? Y en a-t-il d'autres où cela va mieux? Dans l'ensemble, comment vont les choses depuis les neuf mois que vous travaillez là?

M. Gibbs: Très bien. Je dois vous dire que je ne pourrais exiger de mon ministre ou du gouvernement un appui plus grand que celui que nous avons eu. Les progrès dont on rêvait dans le passé commencent à devenir réalité, que ce soit en ce qui a trait à la sélection des commissaires, à l'évaluation, etc. Les évaluations et le rendement étaient des notions inexistantes dans le passé. On a mis cela en place. On a complété tout cela en avril et en mai.

À deux ou trois reprises, les nominations que nous avons recommandées au Cabinet pour certaines régions ont pris un peu plus de temps que je l'aurais aimé. Nous avons fait les évaluations et les entrevues en un mois et demi à peu près. Il faut parfois plusieurs mois avant que les nominations soient faites. C'est le seul point de frustration. Sur tout le reste, on ne peut pas se plaindre.

M. St-Laurent: Merci, monsieur Gibbs.

[Traduction]

Mme Meredith (Surrey - White Rock - South Langley): Bonjour. J'aimerais profiter de mes dix minutes pour parler du rapport publié cette semaine par le Service correctionnel au sujet de l'affaire Butler. De cette manière, on pourra s'attaquer tout de suite à la question avant d'avoir cédé la parole à quelqu'un d'autre.

Selon le rapport, en 1983 Butler a été condamné à purger une peine totale de 13 ans pour vol, séquestration, tentative d'évasion et d'autres condamnations relatives aux armes à feu. À cette époque, les données psychologiques disaient qu'il s'agissait bel et bien d'un psychopathe ayant des antécédents de comportement antisocial de longue durée.

Toujours selon ce même rapport, il semble qu'on n'a pas réussi à établir le profil psychologique ou psychiatrique de Butler pendant la durée de sa peine parce qu'il a refusé de collaborer. Pendant son séjour en prison, il a également commis d'autres infractions à l'intérieur de l'établissement et n'a jamais vraiment participé aux programmes offerts.

.1000

Étant donné ce qu'on savait de ses antécédents, je me demande si on a pris des mesures spéciales à l'égard de Butler ou si on l'a traité comme n'importe quel autre contrevenant.

M. Gibbs: À notre connaissance, le cas de Butler n'a pas été porté à l'attention de la commission avant sa libération d'office. Mme Stableforth me corrigera si je me trompe, parce que cette information nous a été transmise après le dépôt du rapport du SCC. On n'a pas demandé à la commission d'approuver son maintien en détention, ce qui explique qu'elle ne soit pas intervenue.

Avant de le libérer, la commission a imposé trois ou quatre conditions spéciales à M. Butler. Au mieux de nos connaissances, ces conditions ont été transmises par notre bureau de Moncton au pénitencier de Dorchester, dont les autorités connaissaient ses projets et ses coordonnées. Le bureau des libérations conditionnelles du Yukon ou de la Colombie-Britannique devait veiller à sa surveillance.

Malheureusement, le bureau de surveillance n'a jamais reçu ces conditions. Il a cependant été établi au moment de la suspension de sa libération conditionnelle que M. Butler n'avait enfreint aucune des conditions qui lui avaient été fixées, de sorte que la non-communication de ces conditions n'a pas eu d'impact. Jusque-là, le seul rôle joué par la Commission des libérations conditionnelles a été de fixer les conditions régissant la libération du contrevenant.

Mme Meredith: Quand la Commission des libérations conditionnelles a-t-elle jugé bon d'imposer ces conditions? Si aucune demande en ce sens ne vous avait été transmise, qu'est-ce qui vous a amenés à imposer des conditions au moment de la libération d'office?

M. Gibbs: Je ne sais pas quelle est la pratique dans les autres bureaux, mais le bureau de l'Atlantique aurait demandé à voir le dossier si la commission, après avoir interviewé un détenu, avait décidé de lui refuser la semi-liberté ainsi que la libération conditionnelle totale avant sa libération d'office. Le bureau de Moncton n'attendait pas pour le faire que le SCC lui demande de fixer des conditions à la libération de ce détenu comme c'est la pratique courante. Le bureau de Moncton prenait les devants. Après avoir consulté le dossier, si le personnel avait des préoccupations au sujet d'un contrevenant, il fixait des conditions à sa libération.

Mme Meredith: Vous venez de dire que les conditions fixées n'ont pas été transmises au bureau pertinent et que le contrevenant ni ceux qui étaient chargés de sa surveillance n'étaient donc au courant de l'existence de ces conditions. Cela se produit-il souvent?

M. Gibbs: J'espère que non. C'est le premier cas de ce genre dont j'ai connaissance. Nous ne savons pas ce qui explique que les conditions ne soient pas allées plus loin qu'au pénitencier de Dorchester. Nous ne savons pas si les postes ont perdu le document ou s'il a été acheminé à la mauvaise adresse.

Mme Meredith: Lorsqu'il a été dirigé vers le centre communautaire de libération de Prince George, le plan de libération établi par les services correctionnels prévoyait qu'il y demeurerait pendant six mois. M. Butler a changé d'idée et n'a pas respecté cette condition de sa libération.

Est-ce possible? Cela survient-il? Un détenu peut-il modifier son plan de libération? Ne prend-on pas les mesures voulues pour s'assurer que l'ex-détenu respecte les conditions de son plan de libération?

M. Gibbs: Lorsque cela s'est produit, on aurait dû suspendre sa libération et voir s'il ne convenait pas de révoquer ou de modifier sa libération d'office.

Mme Meredith: Mais la semi-liberté lui permettait...

M. Gibbs: Il ne jouissait pas de la semi-liberté à ce moment-là.

Mme Meredith: Oui, mais il a fini par l'obtenir.

M. Gibbs: C'est juste.

Mme Meredith: Même s'il a quitté le centre et n'a pas respecté les conditions qui lui avaient été fixées, on lui a tout de même accordé la semi-liberté, ce qui lui permettait de pouvoir demeurer dans un centre semblable.

.1005

Lorsqu'un contrevenant enfreint les conditions régissant la semi-liberté, ne devrait-on pas revoir la décision de lui permettre de vivre dans un centre communautaire de libération? Puisque M. Butler l'avait fait, n'aurait-on pas dû se rendre compte que ce genre de surveillance ne lui convenait pas? Lorsqu'on a révoqué sa libération d'office, n'aurait-on pas dû automatiquement le placer dans un autre type de centre de détention, et non pas dans un centre correctionnel communautaire?

M. Gibbs: La commission a jugé qu'il s'agissait effectivement d'une décision inhabituelle. Il n'arrive pas très souvent qu'on révoque une libération conditionnelle comme la libération d'office et qu'on permette au contrevenant de demeurer dans un centre communautaire de libération. Je m'en suis assuré.

Mme Meredith: C'était ma question suivante. Est-ce très inhabituel?

M. Gibbs: Cela n'arrive pas souvent. C'est une décision très inhabituelle, en particulier dans un cas comme celui-ci. C'était quelqu'un au passé assez lourd et qui avait déjà commis des actes de violence.

Je vous rappelle que le projet de loi C-45 vise à permettre de fixer certaines conditions touchant le lieu de résidence à ceux qui bénéficient de la libération d'office. À l'heure actuelle, il est impossible de le faire.

Tout ce que les membres de la commission pouvaient faire, c'est soit ordonner qu'il soit réincarcéré pendant deux ans, ou jusqu'à la date de sa prochaine libération d'office, soit imposer des conditions à sa libération comme la semi-liberté. Ils ont opté pour la deuxième solution, qui, de toute évidence, n'a pas fonctionné.

Mme Meredith: J'ignore si vous serez en mesure de répondre à ma dernière question.

On a donc décidé de modifier les conditions de sa libération en lui imposant la semi-liberté. Je regrette qu'on ait retranché de grandes parties de ce rapport, les parties mêmes qui auraient probablement répondu à ma question. On laisse entendre que M. Butler était un informateur de la GRC.

Est-il possible que le fait que ce contrevenant très dangereux et posant des risques élevés pour la société ait pu collaborer avec la GRC explique qu'on ait décidé de lui accorder la semi-liberté ainsi que le droit de vivre dans un centre correctionnel communautaire?

M. Gibbs: C'est possible, mais je ne peux pas vous dire quel poids on a accordé à ce facteur.

Le président: Je me demande si cette question est bien recevable. Pensez-vous pouvoir y répondre?

M. Gibbs: J'ignore l'importance qu'on a attachée à ce fait. La Commission nationale des libérations conditionnelles est chargée d'évaluer les risques que pose un contrevenant pour la société. Peu importe qu'il soit un informateur ou non. Nous évaluons les risques qu'il pose à la société. Nous nous demandons aussi si la collectivité est en mesure de gérer ces risques.

Le président: Madame Meredith.

Mme Meredith: Je crois que je suis tout à fait en droit de demander quelle influence peut exercer un organisme indépendant sur les décisions prises par la Commission des libérations conditionnelles. Je ne vois pas pourquoi ma question serait jugée irrecevable.

Le président: Je n'ai pas dit qu'elle l'était. Je me posais simplement la question.

Monsieur Bodnar.

M. Bodnar (Saskatoon - Dundurn): Je vous rappelle que le fait de divulguer l'identité d'un informateur - et j'ignore s'il s'agit bien ici d'un informateur - constitue une infraction en vertu du Code criminel. Je crois donc qu'il vaudrait mieux faire preuve de prudence.

Le président: Je m'en remets à cet égard au comité. Nous devrions peut-être tenir des séances à huis clos à l'occasion. De cette façon, les membres du comité pourraient poser ce genre de questions.

Voulez-vous toujours qu'on réponde maintenant à votre question, madame Meredith?

Mme Meredith: Je crois que M. Gibbs a dit qu'il pense qu'aucune influence n'a été exercée. C'est tout ce que je voulais savoir.

.1010

Le président: Madame Phinney, vous avez 10 minutes.

Mme Phinney (Hamilton Mountain): Bien que je sache que vous n'avez pas demandé à comparaître devant le comité, je vous remercie d'être ici. Je suppose que vous ne pouviez pas faire autrement.

J'aimerais d'abord vous poser une question au sujet du système des pardons. Je ne m'oppose pas vraiment aux frais de 50$ qui sont exigés. On lit cependant dans ce document que l'imposition de ces frais vous a permis de devenir plus efficaces. Faut-il comprendre que vous n'avez pas eu de cette façon à faire de mises à pied parmi votre personnel, ce qui ne devrait cependant vous permettre que de maintenir votre efficacité, ou ces frais de 50$ font-ils en sorte que votre personnel travaille plus fort? Arrive-t-on à percevoir ces 50$? En quoi cela rend-il vos services plus efficaces?

Le président: Monsieur Gibbs, pourriez-vous nous dire ce qu'il en coûtait autrefois pour obtenir un pardon?

M. Gibbs: Rien.

Le président: Et maintenant il en coûte 50$?

M. Gibbs: En effet. Cette somme ne représente cependant que 20 p. 100 du coût total d'un pardon.

Mme Nancy L. Stableforth (première vice-présidente, Commission nationale des libérations conditionnelles): Cela représente environ le tiers du coût.

M. Gibbs: En effet, environ le tiers du coût total.

Il ne s'agit que d'une question d'argent. Si le budget de la Commission nationale des libérations conditionnelles est de 22 ou de 22,5 millions de dollars, l'imposition des frais de 50$ nous permet de générer des recettes de 1 million de dollars qui nous permettront d'être plus efficaces.

Mme Phinney: Très bien. Je m'interrogeais simplement à ce sujet.

Je ne vois pas d'objection à ce qu'un pardon puisse être offert aux citoyens canadiens, puisque cela peut leur permettre de trouver plus facilement un emploi. À quoi sert ce pardon cependant aux Canadiens qui veulent traverser la frontière? À rien du tout. Les autorités américaines peuvent simplement décider de ne pas reconnaître un pardon. Dans ce cas, le Canadien visé doit se rendre à Washington pour tenter d'obtenir un pardon des autorités américaines. Et même s'il obtient ce pardon, on n'en tient pas toujours compte.

Ne pourrait-on pas améliorer nos relations avec les États-Unis dans ce domaine et obtenir qu'ils reconnaissent nos pardons? Que fait-on en ce sens?

Mme Stableforth: Je peux certainement me renseigner davantage là-dessus, mais de façon générale nos lois ne sont évidemment pas applicables aux États-Unis. Les autorités américaines ne sont pas tenues de reconnaître un pardon qui a été accordé au Canada. Aucune entente internationale cadre ne porte sur cette question.

Dans le passé, tant le directeur actuel du service de la clémence et des pardons que son prédécesseur ont veillé à informer les autorités américaines de tout changement apporté à nos lois pour qu'elles comprennent bien le sens de notre procédure de pardon. Des efforts continus dans le sens que vous proposez ont donc été faits.

Je ne pense pas qu'on ait essayé de conclure un accord général dans ce domaine, mais je peux vous assurer que la section de la clémence et des pardons n'a pas ménagé ses efforts pour bien faire comprendre aux autorités de l'immigration des États-Unis ce que signifie un pardon au sens du droit canadien.

Mme Phinney: Je vous remercie.

Je suis très heureuse qu'on semble grandement avoir amélioré le processus de recrutement ainsi que la formation des membres de la commission.

Vous avez dit que pour la première fois depuis quatre ans tous les membres de la commission s'étaient réunis. Cette réunion a-t-elle répondu à vos attentes ainsi qu'à celles des membres de la commission?

Enfin, j'aimerais savoir si vous comptez tenir une telle réunion chaque année.

M. Gibbs: Permettez-moi d'abord de répondre à votre dernière question, qui est la plus facile. Oui, nous tiendrons une réunion générale chaque année.

Cette année, par souci d'économie, nous n'avons invité à cette réunion que les membres à temps plein de la commission. En raison de l'indemnité journalière que nous aurions dû payer aux membres à temps partiel, leur participation à la réunion aurait été assez coûteuse.

Mme Phinney: Les membres à temps plein sont tenus de participer à ce genre de réunions dans le cadre de leurs fonctions, n'est-ce pas?

M. Gibbs: C'est juste. La commission se compose à moitié de membres à temps plein qui touchent un salaire.

Étant donné que la commission connaît actuellement de grands bouleversements, la réunion nous a permis de bien communiquer nos intentions à tous les membres. J'estime que ce genre d'échange de vues revêt une grande importance. Autrement, on se retrouverait avec cinq commissions régionales des libérations conditionnelles au lieu d'une seule commission nationale.

.1015

Les évaluations qui ont été faites à l'issue de la réunion nous ont permis d'établir qu'elles avaient été très utiles.

Mme Phinney: S'agit-il de l'évaluation des membres ou de la vôtre?

M. Gibbs: Il ne s'agissait pas d'une évaluation du rendement, mais plutôt de la teneur de la réunion générale. À la fin de la réunion, nous avons demandé aux participants d'évaluer l'utilité des différents ateliers. Ces évaluations ont été très positives. Je pense que nous avons atteint tous nos objectifs.

En cours d'année, nous comptons évaluer l'ensemble de notre programme de formation. Nous évaluons régulièrement les programmes de nos différents services. Cette année, nous évaluerons la formation donnée aux membres de la commission. Nous espérons pouvoir vous communiquer les résultats de ces évaluations le printemps prochain.

Mme Phinney: J'ai mal compris. Avez-vous dit que les membres à temps partiel de la commission participeraient à ce week-end de formation l'an prochain?

M. Gibbs: Nous verrons si nous pouvons payer les frais de déplacement et d'hébergement des membres à temps partiel, mais nous ne leur verserons pas nécessairement d'indemnité journalière. Cette indemnité est de 400$ à 470$ par jour. Quand on ajoute à cela les dépenses, cela représente une somme importante dans le cas de 55 personnes.

Mme Phinney: En retour, pour le privilège de toucher environ 400$ par jour pour leur travail, ne pourrait-on pas s'attendre à ce que les membres à temps partiel de la commission acceptent de consacrer un week-end par année à leur formation?

M. Gibbs: Nous y songerons.

Mme Phinney: J'aimerais maintenant vous parler d'une question qui a déjà été soulevée deux ou trois fois. Dans son rapport de 1994, le vérificateur général s'interroge sur le temps que la commission consacre à l'étude d'un cas avant de prendre une décision. Il s'agit parfois de quelques heures, de quelques jours ou de quelques semaines. Ce temps vous paraît-il suffisant? Que faites-vous pour vous assurer que les membres de la commission ont suffisamment de temps pour étudier chaque cas?

M. Gibbs: Ce n'est pas une question qui suscite de véritables préoccupations.

Mme Phinney: Il semblerait cependant qu'on ait libéré des gens qui n'auraient pas dû l'être. Peut-être aurait-il convenu qu'on consacre plus de temps à l'étude de ces cas.

M. Gibbs: Je ne pense pas qu'on puisse attribuer ce problème au manque de temps, mais plutôt aux lacunes en matière d'examen et d'analyse. Nous accordons de une demi-journée à une journée complète de préparation pour chaque jour d'audience. Cela me semble suffisant. D'ordinaire, nous tenons six audiences par jour. Je ne vois pas pourquoi il faudrait plus de temps pour revoir six dossiers.

Mme Phinney: Cela revient à deux ou trois heures de préparation par audience.

M. Gibbs: Il y a d'abord la préparation en vue de l'audience, et ensuite l'audience elle-même.

Mme Phinney: Oui. Combien de temps accorde-t-on aux membres pour se préparer?

M. Gibbs: Si vous devez revoir six cas et que vous travaillez pendant huit heures, cela vous donne une heure et demie par cas. On n'a pas à passer autant de temps sur le cas de quelqu'un qui a commis une infraction contre la propriété que sur le cas de quelqu'un qui a commis un crime plus grave avec violence. On organise son temps en conséquence.

Quant aux audiences elles-mêmes, elles peuvent durer de 40 minutes à plus de trois ou quatre heures. L'étude des cas de détenus à perpétuité prend beaucoup plus de temps que les autres.

À mon bureau, on ne se plaint pas vraiment du manque de temps.

Mme Phinney: Nous vous avons déjà signalé le fait que beaucoup de personnes participent à la rédaction de ces dossiers que les membres de la commission doivent étudier en une heure et demie. Si leur journée est très chargée, il se peut qu'ils ne puissent consacrer qu'une heure à chaque cas.

M. Gibbs: On résume l'information figurant dans les dossiers.

Mme Stableforth: Monsieur le président, puis-je donner quelques précisions?

Premièrement, nous n'empêchons pas les membres qui le souhaitent de travailler un peu sur le dossier le week-end ou en soirée, et bon nombre d'entre eux le font. Ils recevront tous les cas qu'ils doivent revoir au cours de la semaine suivante. Ainsi, ils pourront se fixer une horaire en fonction de cela. Quelques dossiers sont très épais, et les commissaires passeront plus de temps à les examiner. D'autres dossiers contiennent une quantité limitée de renseignements et nécessitent moins de temps de préparation de la part des commissaires.

.1020

L'autre point, évidemment, c'est que les commissaires peuvent voir les délinquants qui passent plus de temps dans le système à plus d'une reprise. Souvent, lorsqu'un commissaire est à la commission depuis un certain temps revoit un dossier, il constate qu'il s'agit du dossier d'un délinquant qu'il a déjà vu. Il connaît déjà certains renseignements.

À titre de président, M. Gibbs a également mentionné que, bien qu'ils reçoivent toute la documentation originale dans le dossier à revoir, ils reçoivent aussi des rapports sommaires du Service correctionnel qui soulignent tous les aspects clés de ces documents.

Le président: Avant de céder la parole à M. St-Laurent de nouveau, j'aimerais vous poser une question à propos de quelques documents auxquels vous avez fait référence.

À la première page de votre déclaration, vous avez mentionné le second projet de loi omnibus. À quel projet de loi faites-vous allusion? S'agit-il d'un projet de loi à présenter ou d'un projet de loi qui a déjà été présenté?

M. Gibbs: C'est un projet de loi qui sera présenté.

Dans le cadre du vaste examen des organismes, des offices et des commissions entrepris par le ministre Massé, il y a toutes sortes de questions législatives touchant les tribunaux administratifs, etc., qu'on veut faire adopter. On a créé un projet de loi omnibus, appelé le premier, et ensuite il y en aura un deuxième.

Le président: Donc ce projet de loi ne traitera pas uniquement de la justice pénale?

M. Gibbs: Non.

Le président: Mais vous croyez qu'il traitera de questions touchant la Commission des libérations conditionnelles?

M. Gibbs: C'est exact. Il portera sur la structure, etc. Par exemple, le nombre maximal de commissaires à temps plein est fixé à 45. Nous espérons éliminer ce plafond dans la loi pour que nous puissions avoir le nombre de commissaires à temps plein dont nous avons besoin.

Le président: Donc cette initiative relève de M. Massé? Le greffier n'est pas ici pour l'instant, mais je demanderai au personnel de communiquer avec M. Massé et de nous tenir au courant de ce projet de loi.

Vous avez également mentionné un plan d'action que vous avez fourni au vérificateur général. Sera-t-il possible d'obtenir une copie de ce plan d'action pour que nous puissions le distribuer aux membres du comité?

M. Gibbs: Nous pouvons certainement vous donner une copie.

Le président: Enfin, à la dernière page de votre déclaration liminaire, vous avez mentionné un rapport américain qui indique que quelques États ont aboli la libération conditionnelle. On libère les détenus qui ont purgé leur peine sans supervision. Vous avez dit que des groupes de défense des droits des victimes ont réclamé le rétablissement de la libération conditionnelle. Avez-vous ce rapport?

M. Gibbs: Oui, nous en avons apporté une copie. De plus, à la conférence que j'ai mentionnée, l'APAI, un groupe d'experts, qui comprenait des victimes, a très fortement encouragé le rétablissement ou le maintien de la libération conditionnelle. Nous vous laisserons une copie de ce rapport.

Le président: Veuillez laisser une copie au greffier également.

Je demanderai au greffier d'envoyer un avis au cas où des membres voudraient en obtenir une copie.

[Français]

M. St-Laurent: Plus tôt, vous avez partiellement répondu à la question. Le volume des cas entendus augmente-t-il ou diminue-t-il? Vous dites vouloir demander bientôt un plus grand nombre de commissaires. Est-ce parce que le nombre de cas augmente?

M. Gibbs: Les demandes augmentent probablement un peu, parce que la population carcérale augmente un peu. Mais, d'après notre expérience, les commissaires à temps partiel sont moins efficaces parce qu'ils ne vivent pas ordinairement près du bureau régional ou des établissements.

.1025

Nous les faisons venir pour deux jours d'analyse de cas et d'audiences, et nous devons les payer pour trois jours. Les commissaires à temps plein peuvent faire ce travail en deux jours.

Je pense sincèrement qu'on a besoin de gens à temps partiel non seulement pour le fédéral, mais aussi pour les sept provinces et les deux territoires que nous couvrons. Cela coûte un peu plus cher.

M. St-Laurent: Malgré les frais de 50$ qui sont ajoutés?

M. Gibbs: Encore là, les 50$ n'ont rien à faire avec la demande de libération conditionnelle. C'est une demande de pardon, de réhabilitation.

M. St-Laurent: Il faut me le répéter. Excusez-moi.

Quelles ressources financières la Commission consacre-t-elle à la question de la violence familiale? Vous devez avoir un secteur particulier attitré à la violence familiale.

M. Gibbs: Je crois que le Conseil du Trésor nous avait accordé 140 000$ pour la violence familiale, il y a deux ou trois ans. On n'a plus cette somme. C'est un projet qui n'a duré que trois ou quatre ans. Cependant, lors de la formation, l'aspect violence familiale entre toujours en ligne de compte. Les fonds qu'on affecte à la violence familiale viennent de plusieurs sources. Donc, nous n'ignorons pas cela. Que ce soit lors de la formation ou dans les analyses de cas, cela fait partie de nos préoccupations.

M. St-Laurent: Quant aux autochtones, les traitez-vous de façon différente? Dans les milieux autochtones, on avait une approche que j'aimais bien et qui faisait qu'on retournait les détenus dans leurs communautés. Est-on plus près des communautés dans les milieux autochtones?

En ce qui a trait aux libérations conditionnelles, a-t-on plus de facilité auprès des communautés autochtones que parmi les populations non autochtones?

M. Gibbs: Le Service correctionnel a mis beaucoup plus de ressources dans ce domaine-là dernièrement. Deux nouveaux établissements sont en construction à Hobbema: un pour les femmes et un autre pour les hommes.

On me dit aussi qu'il y aura plus de ressources de la part des communautés autochtones pour faciliter la réintégration des autochtones. Nous invitons des aînés à toutes les audiences où un autochtone doit être évalué, surtout dans les Prairies, et le détenu peut décider lui-même s'il veut la présence d'un aîné. Les aînés reçoivent un per diem pour le temps qu'ils consacrent à cette activité.

M. St-Laurent: Quant au travail des commissaires, lorsqu'ils ont pris une décision, l'individu est relâché ou est en libération conditionnelle. Y a-t-il un processus en place pour informer les commissaires du succès ou de l'échec de la décision qu'ils ont prise? Dans un an, ils prennent un grand nombre de décisions et rencontrent un grand nombre d'individus. Y a-t-il un processus informatisé ou autre qui tient compte de cela?

.1030

M. Gibbs: Dernièrement, on a mis en place un système qui tient compte de ceux qui tournent du mauvais côté, des cas qui tournent mal. C'est dommage, parce qu'ils rendent de très bonnes décisions. Seulement 13 p. 100 des libérations conditionnelles sont révoquées parce que l'individu a récidivé. Lorsque le crime est très sérieux et accompagné de violence ou qu'il s'agit d'un meurtre, il y a enquête. Non seulement en donnons-nous les résultats à ceux qui avaient pris part à la décision - ce serait grave s'ils avaient failli à des politiques ou à des procédures qu'ils devaient suivre - , mais nous partageons ces résultats avec les autres régions du pays.

Je souhaite, et c'est ce qu'on essaie de mettre en oeuvre, faire une étude des bonnes décisions. On ne peut examiner toutes les décisions parce qu'on n'a pas les ressources suffisantes. Mais nous essayons de faire connaître ces résultats, plus particulièrement les plus positifs, aux gens d'autres régions afin de leur faire partager l'exemple de bonnes décisions. C'est la voie dans laquelle on s'engage.

[Traduction]

Le président: Avant de céder la parole à M. Bodnar, j'aimerais rappeler aux membres du comité que cet après midi nous entreprendrons l'étude article par article du projet de loi C-72, qui porte sur l'intoxication extrême comme moyen de défense. J'ai déjà reçu un amendement.

Je voulais juste vous rappeler que si vous avez des amendements à proposer, vous devriez nous les donner le plus tôt possible pour que le greffier puisse les traduire. Vous n'êtes pas obligé de le faire, mais c'est toujours très utile.

Je ne sais pas si le gouvernement en aura ou non. Le projet de loi n'est pas long, mais ce serait mieux si nous étions tous bien préparés pour cet après-midi.

Monsieur Bodnar, vous avez cinq minutes.

M. Bodnar: Dans votre exposé, vous avez parlé d'un arrangement visant à déléguer au Service correctionnel du Canada une partie du pouvoir décisionnel associé aux permissions de sortir sans surveillance. Cela veut donc dire que chaque prison pourra autoriser les PSSS.

J'ai un problème avec cela, car on est en train de remettre le pouvoir décisionnel non pas aux mains d'un organisme indépendant, mais aux mains de quelqu'un qui y a des intérêts. Ce sont des gardiens de prisons. On laisse la porte ouverte aux abus. En d'autres mots, la décision de donner la permission de sortir ne sera pas fondée sur la performance ou le bon comportement de la personne, mais plutôt sur les renseignements spéciaux que cette personne fournira lorsqu'elle est en prison, etc.

Avez-vous tenu compte de cet aspect en préparant l'accord?

M. Gibbs: Ayant travaillé comme directeur d'établissement, je peux vous dire que nous savions que c'était possible, mais il incombe à chaque directeur de prendre une décision en fonction des risques.

J'aurais les mêmes préoccupations que vous si on déléguait aussi le pouvoir d'autoriser la semi-liberté ou la libération conditionnelle totale, car à mon avis il y aurait un conflit. On pourrait s'en servir pour vider une partie des prisons. Mais des permissions de sortie pour deux ou trois jours ne réduisent pas la population carcérale.

C'est un privilège comme tant d'autres qu'ils ont à l'intérieur. Lorsque j'étais directeur d'établissement, des détenus m'ont approché à plusieurs reprises, que ce soit pour obtenir une permission de sortie ou un autre privilège, pour «négocier». Mon approche - et je crois que le directeur actuel a adopté la même - c'était de dire: je ne négocie pas, mais j'écoute.

M. Bodnar: C'est là le problème. La commission est structurée comme un organisme indépendant, un organisme indépendant qui prend des décisions qui sont en fait des décisions quasi judiciaires.

Vous accordez maintenant ce pouvoir, ou du moins une partie de celui-ci, à un groupe de gens qui, à mon avis, ne sont pas indépendants. Cela pourrait donner lieu à des abus.

.1035

Je me demande si les prisons provinciales accordent elles-mêmes des permissions de sortir sans surveillance. De qui relèvent ces décisions dans les centres correctionnels provinciaux?

M. Gibbs: Les établissements provinciaux ont une autonomie presque complète dans ce domaine. Ils peuvent décider de libérer un détenu dès son premier jour d'incarcération.

M. Bodnar: C'est ce qui se produit dans certaines prisons qui ne peuvent accueillir pendant 15 ou 30 jours des gens condamnés pour conduite en état d'ébriété. Il est rare que ce genre de contrevenants passent plus d'une journée en prison. La population finit par perdre confiance dans le système de justice lorsqu'elle constate que certains contrevenants ne purgent pas leur peine d'emprisonnement parce que les prisons ne sont pas en mesure de les accueillir.

M. Gibbs: J'aimerais replacer le problème dans son contexte. Premièrement, je ne suis pas ici pour vous parler du système provincial. Que la décision soit prise par le directeur de la prison ou par la Commission nationale des libérations conditionnelles, les conditions régissant les permissions de sortir ne changent pas. Il faut que le détenu purge six mois ou le sixième de sa peine, ou quel que soit le temps qu'on lui a fixé.

Deuxièmement, qu'il s'agisse d'il y a 10 ans ou 20 ans, lorsque la décision relevait exclusivement du directeur de la prison, les résultats obtenus sont toujours de 99 p. 100 et plus. De ce point de vue, rien n'a changé.

En outre, les directeurs de prison jouissent aujourd'hui de pouvoirs étendus en ce qui touche les placements à l'extérieur, qui peuvent s'étendre sur une période allant jusqu'à 60 jours. La nouvelle loi leur permet de faire participer certains détenus à ce programme. Une permission de sortir de trois jours ne change donc pas grand-chose à la situation. Ils peuvent autoriser les permissions de sortir avec escorte.

Je ne pense pas qu'on leur accorde trop de pouvoir, mais que c'est plutôt une façon plus efficace pour la commission de remplir son mandat.

Mme Meredith: J'aimerais revenir sur la question de la nomination des membres de la commission et sur leur évaluation. Vous avez mentionné le fait qu'on a nommé récemment un certain nombre de nouveaux membres de la commission: cinq en Colombie-Britannique, trois au Québec et trois ailleurs. Tous les nouveaux titulaires ont-ils été choisis parmi une liste de candidats qualifiés? Les candidats ont-ils tous les mêmes qualifications, ou certains d'entre eux sont-ils mieux qualifiés que les autres? Évaluez-vous les qualifications des requérants lorsque vous proposez des candidats aux postes de membres de la commission?

M. Gibbs: Oui. Premièrement, tous les membres sont nommés à partir de la liste des candidats qualifiés. La décision finale revient cependant au ministre et à ses collègues. Il s'agit d'une nomination du gouverneur en conseil. Le ministre et ses collègues choisissent les candidats à partir de la liste, mais c'est à eux de décider s'ils vont choisir la personne qui occupe le deuxième ou le cinquième rang sur cette liste.

Mme Meredith: Très bien. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez fait état du fait que la commission avait entamé le processus d'évaluation en avril de cette année.

Avez-vous pu évaluer tous les membres à temps plein et à temps partiel de la commission?

M. Gibbs: Tout le monde a été évalué. Seuls les membres dont le mandat expire sous peu, soit dans les prochains mois, n'ont pas été nécessairement tous évalués.... Certains ont été évalués par des cadres supérieurs et d'autres pas, mais tous ceux qui devaient demeurer au service de la commission pendant encore au moins six mois ont été évalués.

Mme Meredith: Quelle a été l'issue de ces évaluations? Je sais que la loi future vous permettra d'y donner suite. Si ces évaluations révèlent que certains membres de la commission ne s'acquittent pas comme ils le devraient de leur mandat, que pouvez-vous faire en l'absence d'une loi qui vous permettrait de révoquer leur mandat? Devez-vous attendre que la loi vous confère ce pouvoir avant de prendre une décision à ce sujet?

M. Gibbs: Malheureusement, tant que le projet de loi C-45 n'aura pas été adopté, nous n'y pouvons pas grand-chose. Nous devons suivre la procédure en vigueur. Pour les quelques cas où nous avons des difficultés, nous nous occupons plus du commissaire, nous lui donnons une formation supplémentaire, et nous suivons ses décisions de plus près, etc. C'est ce que nous pouvons faire de mieux pour le moment. Lorsqu'il s'agit de commissaires à temps partiel, nous les affectons simplement beaucoup moins, ou pas du tout.

.1040

Mme Meredith: Vous essayez donc tous les moyens possibles pour veiller à ce que les gens qui siègent lors des audiences soient plus que qualifiés.

J'ai fait moi-même une expérience tout à fait intéressante, comme vous le savez, lorsque j'ai assisté à une audience mardi. J'aimerais aller un petit peu plus loin et vous demander si, d'après ce que vous avez pu constater, permettre à des témoins d'intervenir - puisqu'ils sont maintenant autorisés à suivre les audiences - peut avoir un effet positif sur le déroulement de celles-ci. Est-ce à votre avis une évolution positive du système?

M. Gibbs: Oui, dans la mesure où cela nous sensibilise au sort de l'autre partie. Comme vous le savez, pendant longtemps, le Service correctionnel du Canada et la commission accordaient une grande importance, sans doute pas exclusive, mais néanmoins considérable, au sort du contrevenant. Au cours des dernières années... Maintenant que nous avons également affaire à la victime, nous sommes beaucoup plus sensibles aux épreuves qu'elle peut parfois traverser et aux conséquences de tout ce processus; nous en tenons donc compte dans notre décision.

Le président: Monsieur Wappel, vous avez cinq minutes.

M. Wappel (Scarborough-Ouest): Merci, monsieur le président.

Bonjour. Excusez-moi d'être arrivé un petit peu en retard; avant de poser mes questions je vais m'assurer que cela n'a pas déjà été fait. Avez-vous déjà discuté du cas de Paul Butler?

M. Gibbs: Oui. Nous avons consacré environ 10 minutes à cette question avec Mme Meredith.

M. Wappel: Parfait. Je pense que cela mériterait plus que 10 minutes, mais très bien.

Monsieur Gibbs, j'aimerais que nous parlions de votre visite aux États-Unis pour la conférence de l'Association of Paroling Authorities International. Dans votre exposé vous avez dit quelque chose d'important concernant la différence essentielle qu'il pouvait y avoir entre le Canada et certains États américains où l'on a complètement abandonné la libération conditionnelle.

Moi, évidemment, je suis député d'une circonscription. Je sais qu'il y a des gens au Canada - M. Bodnar y a fait allusion - qui sont très mécontents de la Commission des libérations conditionnelles et de tout ce système. Pour ces gens-là la libération conditionnelle ne devrait tout simplement pas exister. Il est intéressant de constater qu'il y a maintenant des États sans libération conditionnelle, comme vous l'avez indiqué. Vous avez constaté - c'est ce que vous avez dit tout à l'heure - que cela ne semble pas donner de bons résultats.

Puis-je alors supposer que les États qui n'ont pas de système de libération conditionnelle n'étaient pas représentés à la réunion de l'Association of Paroling Authorities International, ce qui semblerait logique?

M. Gibbs: Si je me souviens bien, il y avait un ou deux représentants d'États qui ont aboli la libération conditionnelle. Je pense qu'ils étaient là parce qu'ils gardent la foi et veulent d'une certaine manière se battre pour essayer de rétablir... Donc, oui, il y en avait.

M. Wappel: S'agissait-il de représentants officiels de l'État, ou simplement de personnes qui étaient mécontentes de la décision de l'État?

M. Gibbs: Il s'agissait de toute évidence de gens qui désapprouvaient cette décision parce qu'ils avaient été soit agents des libérations conditionnelles, soit commissaires. L'un avait même été président de la commission, par exemple.

Si vous vous reportez aux conclusions indiquées ici, vous verrez quelles difficultés surviennent lorsqu'il n'y a plus de libération conditionnelle.

M. Wappel: Vous avez brandi un document en disant «ici».

M. Gibbs: Oui, j'en ai déjà parlé avant que vous n'arriviez. Ça s'intitule Abolition of Parole: Why the Emperor Has No Clothes. J'en donnerai un exemplaire au président. Il coûte 12$ américains. Nous en avons acheté quelques-uns.

M. Wappel: Vous n'aurez qu'à faire payer plus cher la prochaine fois qu'on vous présentera des demandes de libération conditionnelle!

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Mais dites-moi un peu: qu'en est-il du taux de récidive dans les États qui n'ont pas de libération conditionnelle, et pouvez-vous faire une comparaison avec le Canada? Je parle de crimes graves, de crimes violents. A-t-on des chiffres?

M. Gibbs: Je ne pourrai pas répondre à cette question.

M. Wappel: Y a-t-il quelque chose dans ce livre à ce sujet?

M. Gibbs: On y parle surtout des problèmes graves qu'ont les États-Unis en matière d'incarcération. Ils en sont maintenant à 550 détenus pour 100 000 habitants. De ce fait, on est obligé de les relâcher avant qu'ils aient complètement purgé leur peine.

C'est là que les fonctionnaires du système correctionnel, mais également les victimes, se plaignent de ce qu'on n'a plus aucun contrôle; et dans certains cas le détenu qui est relâché, par une porte dérobée pour ainsi dire, peut être cinq fois plus dangereux que la personne que l'on vient d'incarcérer. La seule chose que l'on maîtrise, c'est le temps d'incarcération.

M. Wappel: Oui, mais vous dites qu'il y a beaucoup de groupes de défense des droits des victimes qui demandent que l'on rétablisse ou que l'on conserve le système de libération conditionnelle, pour au moins conserver la possibilité d'une certaine surveillance, etc. Certains évidemment pourront dire que là où il n'y a pas de libération conditionnelle le taux de récidive est inférieur, et peut-être que le raisonnement se tient.

Mais comment comparer les deux systèmes si l'on ne peut pas comparer les taux de récidive? Et dans ce cas - et je vois que vous opinez - pourquoi n'avons-nous pas ces statistiques pour pouvoir faire ces comparaisons?

M. Gibbs: Vous avez tout à fait raison. Nous avons notre système de libération conditionnelle, nos statistiques, avec une évaluation du taux de réussite, etc.; mais il serait bon effectivement de pouvoir comparer avec un système où l'on incarcère tout simplement les gens, et où on les relâche sans autre forme de procès, etc., et voir ce que ça donne.

M. Wappel: Qui en aurait la charge? Est-ce que c'est à vous, comme président, de rassembler ces statistiques, ou faudrait-il faire une recommandation au solliciteur général pour qu'il contacte les États concernés et obtienne les chiffres?

M. Gibbs: Le matériel de recherche auquel nous avons accès est celui du Service correctionnel et du secrétariat du solliciteur général. Ils ont une division de la recherche correctionnelle. Ce serait donc à ces deux administrations de s'en occuper, mais nous avons accès à ces services et nous vérifierons. C'est une question intéressante.

M. Gallaway (Sarnia - Lambton): J'aimerais personnellement vous poser une question, à laquelle M. Wappel a déjà fait allusion. Il parlait de faire payer plus cher et d'augmenter les droits de dossier. Vous dites que 50$ pour un pardon représente un tiers du coût de l'opération.

M. Gibbs: Oui, cela nous coûte environ entre 150$ et 200$. Je parle de la GRC.

M. Gallaway: Si vous vouliez procéder à un recouvrement complet des coûts, vous auriez environ 10 p. 100 de plus dans votre budget. Celui-ci est d'environ 25 millions de dollars, un peu plus ou un peu moins.

M. Gibbs: Peut-être. Notre comptable est-il ici?

M. Peter Callahan (directeur, Gestion organisationnelle, Commission nationale des libérations conditionnelles): Je ne pense pas que nous augmentions les droits. D'ailleurs, cela n'ajoute pas à nos frais. Cela nous permettrait simplement d'avoir des recettes supplémentaires.

M. Gallaway: Oui, c'est exactement ce que je dis. Mais si vous facturiez plus cher pour une demande de pardon...?

M. Callahan: Cela n'entre pas dans notre caisse; c'est reversé au Trésor.

M. Gallaway: Très bien; c'est de toute façon la même caisse. Qui a décidé du droit perçu? Je suppose que c'est le ministère, mais sur recommandation de la commission, ou s'agit-il d'un chiffre complètement arbitraire?

M. Gibbs: Vous voulez savoir dans quels cas ce n'est pas payé, par exemple lorsque le demandeur n'obtient pas son pardon?

M. Gallaway: Non. Je veux savoir qui a fixé ces 50$ par demande de pardon?

M. Gibbs: C'est la somme à verser, un point, c'est tout. Si vous faites une demande vous envoyez 50$ avec votre dossier.

M. Gallaway: Qui a décidé que ce serait 50$?

M. Gibbs: Qui a décidé?

M. Gallaway: Je suppose que c'est une recommandation de la commission.

Mme Stableforth: Cela a été décidé après consultation entre la commission, le secrétariat, évidemment, et la GRC. Le gouvernement précédent, si je ne me trompe, avait estimé qu'il serait bon de commencer par un droit fixé assez bas. Il avait expliqué, à l'époque, que cela ne correspondait pas à un plein recouvrement du coût de l'opération. Mais puisque pour la première fois on faisait payer l'usager, le gouvernement a décidé de ne faire procéder qu'à un recouvrement partiel du coût. Évidemment cela pourra être changé, je suppose.

M. Gallaway: Mais un Canadien avec un casier judiciaire qui demande de pouvoir entrer aux États-Unis peut effectivement en obtenir l'autorisation pour un an, et cela lui coûte tout de suite 100$ canadiens, et cela ne dure qu'un an; tout cela pour vous dire que 50$, dans ce qui nous intéresse ici, c'est vraiment une affaire.

.1050

En ce qui concerne votre crédibilité et votre obligation de rendre des comptes, vous parlez dans votre déclaration d'un nouveau cadre national de formation. Qu'aviez-vous avant cela? Puisque vous avez lancé ce cadre national de formation pour tous les membres de la commission, comment faisiez-vous avant?

M. Gibbs: Je vais vous en parler rapidement, car je crois que Mme Stableforth était là à l'époque. Par le passé, c'est-à-dire jusqu'à il y a un an environ, il n'était absolument pas nécessaire que les commissaires soient initiés immédiatement. Cela s'est traduit plusieurs fois par des difficultés. C'est-à-dire que le commissaire pouvait quand même participer à des audiences. Nous avons maintenant exigé qu'il en soit autrement. Il fut également une époque, il n'y a pas encore très longtemps, où cette initiation n'était que d'une semaine; elle est passée maintenant à deux semaines.

Il y avait donc une formation, mais nous avons réorganisé et rationalisé cette formation en faisant intervenir tous les facteurs, tels que l'évaluation du risque, qui nous servent à nous prononcer. Nous avons donc perfectionné notre méthode.

Mme Stableforth: À ce sujet, comme l'a dit M. Gibbs, nous avons depuis de nombreuses années un conseiller principal à plein temps spécialiste des questions de formation et de perfectionnement professionnel, qui est là au moins depuis que je fais partie de la commission, soit depuis 1988. Nous avons toujours offert une formation aux membres de la commission, et notamment aux nouveaux commissaires.

Comme l'a dit M. Gibbs, nous nous sommes engagés, dans ce document qui a été publié l'an dernier, à soumettre les commissaires à une solide formation et initiation, avant qu'ils n'aient à prendre une décision, même s'ils ne disposent que d'une deuxième voix, ou sont simplement troisièmes commissaires de l'audience. Nous avons donc fait passer cette initiation et formation de départ de une à deux semaines, avec plus tard une formation de rappel.

D'une certaine manière nous reprenons les principes de la formation qui par le passé était donnée aux commissaires. À la différence que nous veillons maintenant à ce que cette formation ait lieu immédiatement pour les nouveaux commissaires, avec ensuite à intervalles réguliers des stages de perfectionnement.

M. Gallaway: Si je ne me trompe, certaines personnes se sont plaintes auprès du comité de certaines disparités entre régions, et là, évidemment, c'est l'impression qui compte. Autrement dit, on a le sentiment qu'une demande qui serait faite en Nouvelle-Écosse, et une demande similaire faite ailleurs.... Je comprends bien qu'on ne peut jamais comparer de façon absolue. Certaines décisions prises dans certaines régions du pays semblent plus accommodantes que d'autres prises ailleurs.

La question est donc de savoir comment vous veillez à ce qu'il y ait un minimum d'uniformité. Vous nous parlez de ce cadre national de formation que vous lancez, mais, évidemment, si un commissaire en Nouvelle-Écosse a le droit à deux fois plus de formation, en évaluation des risques par exemple, qu'un commissaire de la Colombie-Britannique, c'est là que l'on va voir qu'il y a des différences entre les décisions qui sont prises d'une région à l'autre. Voilà ce que je voulais dire.

Veille-t-on donc à ce que tous les commissaires aient une formation à peu près équivalente, et peut-on vérifier s'ils retiennent effectivement ce qu'on leur enseigne?

M. Gibbs: De façon générale, la formation - initiation est uniforme. Nous essayons ensuite de permettre aux commissaires de participer à des stages de trois à cinq jours chaque année.

Cela évidemment est décidé au niveau régional, mais c'est suivi sur le plan national. Et effectivement, je l'ai moi-même dit, si nous ne faisons pas attention, si nous ne nous faisons pas comprendre comme il convient, et ne faisons pas parvenir les bonnes directives, on risque alors de se retrouver avec cinq commissions régionales différentes. Nous voulons évidemment que la loi et nos principes et politiques soient appliqués de façon uniforme.

Bien sûr, c'est un combat toujours recommencé. Les Québécois, de façon générale, ne se font pas la même idée de ce que doit être la libération conditionnelle que les Ontariens, etc. Nous expliquons de façon aussi claire que possible à nos commissaires qu'ils ne sont pas là pour prendre des décisions populaires. Ce n'est pas un jeu. Ils sont là pour appliquer la loi, évaluer les risques, cas par cas.

J'ai constaté que dans le cas Lortie... Je trouve que la décision qui a été prise était excellente. Beaucoup de gens n'étaient pas d'accord avec moi ni avec la commission, mais au total on en a beaucoup plus parlé à l'extérieur du Québec qu'au Québec. C'est précisément un exemple de ce que le combat n'est jamais gagné, et que le pays n'est pas uniforme.

.1055

Mme Meredith: J'aimerais parler un petit peu de la libération d'office. Il y a eu un cas, dans ma circonscription, de criminel qui a tué une jeune fille, et qui, alors qu'on lui avait refusé de bénéficier de la libération conditionnelle, a pu quelques mois plus tard bénéficier d'une libération d'office.

J'ai constaté, lors de l'affaire Butler, que celui-ci n'avait pas pu obtenir la semi-liberté ni la libération conditionnelle totale au mois de mai 1992, et que huit ou neuf mois plus tard il a obtenu une libération d'office.

Est-ce que vous estimez qu'il faudrait réviser les dispositions concernant la libération d'office? Est-ce une mesure qui donne satisfaction? Devrait-elle être appliquée différemment? C'est-à-dire, faut-il libérer quelqu'un en fonction du temps qu'il a passé en prison ou plutôt en fonction d'un certain droit qu'il aurait gagné à être libéré?

M. Gibbs: Les dispositions de la loi sur la détention reposent sur trois critères. Si vous ne répondez pas...

Mme Stableforth: Il y a trois critères d'admissibilité à la libération conditionnelle normale.

M. Gibbs: Si vous ne remplissez pas ces conditions, selon le Service correctionnel, le dossier n'est pas transmis à la commission. Lorsque celle-ci en est saisie, elle doit décider si oui ou non les critères sont respectés et si le détenu risque de commettre un autre crime grave, peut-être un meurtre, avant l'expiration de son terme.

Beaucoup de dossiers nous sont transmis, et nous maintenons en prison un nombre très élevé de criminels, particulièrement en Ontario et dans les Prairies, alors qu'au Québec et dans le Canada atlantique il y en a beaucoup moins. Il ne semble pas que cela ait pour ces deux dernières régions des conséquences graves si on les compare à l'Ontario et aux Prairies. Mais c'est le Service correctionnel qui nous transmet les dossiers de demandes; c'est la loi qui l'impose.

Mme Meredith: Mais d'après la loi, même lorsque vous avez refusé la libération conditionnelle à quelqu'un parce qu'il s'agissait de quelqu'un de trop dangereux pour la société, une fois que la peine a été purgée, le détenu doit être libéré, même si la commission, jusque-là, estimait qu'il était dangereux pour la société.

Pensez-vous qu'il faille modifier la loi afin que l'on ait une plus grande marge de manoeuvre, en ce qui concerne notamment ces détenus jugés dangereux pour la société, et qui le sont encore au moment de leur libération, au point que l'on puisse craindre qu'ils ne commettent d'autres crimes violents, meutres...? Pensez-vous qu'il faudrait modifier la loi pour que l'on puisse recommander une détention postpénale?

M. Gibbs: Je pense que c'est ce que prévoit la loi dans l'état actuel des choses.

Mme Meredith: Effectivement.

M. Gibbs: On a donc toujours cette possibilité et ce recours. J'ai l'impression que c'est d'ailleurs trop utilisé dans certaines régions du pays, mais pas que ce ne le soit pas assez ailleurs. De toute façon...

Mme Meredith: Mais c'est au moment où la sentence est prononcée que le criminel est désigné comme dangereux. Or, très souvent la véritable personnalité, notamment s'il s'agit d'un psychopathe, ne se dévoile que lorsque le détenu est sous surveillance, ou disons dans un environnement où l'on peut suivre son évolution. Pourtant, rien ne prévoit que l'on puisse en tenir compte et conserver le détenu incarcéré jusqu'à ce qu'il ne soit plus dangereux pour la société.

Pensez-vous ici que les responsables de la législation que nous sommes devraient modifier la loi pour que le système carcéral ne libère pas les contrevenants dangereux, c'est-à-dire des gens qui risquent de commettre des crimes violents, peut-être des meurtres? La législation sur les criminels dangereux ne prévoit rien à cet effet. Devrions-nous alors modifier la loi?

M. Gibbs: Pour que l'on maintienne le détenu incarcéré au-delà de l'expiration de son terme?

Mme Meredith: Oui.

.1100

M. Gibbs: La question est à l'étude au ministère de la Justice, vous pourriez peut-être donc en parler avec eux.

Mme Stableforth: Oui, madame Meredith sait peut-être qu'il y a eu des discussions là-dessus. Il y a eu même un forum récemment sur les détenus à risque élevé. Ces questions ont fait l'objet de discussions très approfondies au sein de l'administration gouvernementale.

Il ne m'appartient pas de donner un avis personnel, mais pour ce qui est des détentions prolongées, et d'une surveillance postsentencielle, de longue durée, pour certains types de contrevenants... M. Rock et M. Gray ont tous eux indiqué... et de fait ce forum a eu lieu au début de mois de mai. Tout cela pour dire que ces questions sont sérieusement étudiées par le ministère de la Justice.

C'est au ministère de la Justice, bien sûr, de s'occuper d'une nouvelle législation à cet égard. Mais la commission participe à toutes ces discussions.

Mme Meredith: Appuyez-vous l'évolution du ministère de la Justice?

Le président: Vous pouvez répondre, si vous le désirez, mais vous êtes fonctionnaires et non pas politiques.

Vous conseiller directement le ministre, celui-ci décide et le Parlement décide, mais vous pouvez vous abstenir de répondre si vous le désirez.

M. Gibbs: Nous ne sommes pas...

M. MacLellan (Cap-Breton - The Sydneys): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je me demande véritablement s'ils doivent répondre à cette question, car s'ils refusent de répondre à celle qui suivra, ils se retrouvent dans une situation difficile.

Le président: Voilà des questions qu'il faut adresser au ministre.

M. MacLellan: Même si les témoins sont d'accord, il pourrait y avoir ensuite une question sur quelque chose qu'ils n'approuvent pas, et on continuerait à attendre une réponse d'eux.

M. Gibbs: Merci pour ce conseil.

Le président: J'ai moi aussi quelques questions à poser. Je lis dans un éditorial du 3 avril 1995 du Globe and Mail, que la population carcérale a augmenté de 17 p. 100 de puis 1990, et qu'elle connaîtra une croissance de 25 p. 100 dans les cinq années qui viennent.

L'article a fait remarquer que les parlements, et ensuite les tribunaux, imposent des peines de plus en plus longues, et je cite: «Les commissions de libération conditionnelle ont à tel point peur de commettre une erreur qu'elles prennent des marges de sécurité considérables»; ce qui veut dire qu'elles prennent conscience de l'existence d'une opinion publique et se montrent de plus en plus intransigeantes.

Voilà donc ce que dit le journal The Globe and Mail, mais j'aimerais savoir quelle est la part de vérité dans tout cela. Pouvez-vous nous dire quels sont les pourcentages de demande de libération conditionnnelle qui ont été approuvées depuis un an, et les années précédentes? C'est-à-dire: refusez-vous de plus en plus de demandes, ou votre pourcentage reste-t-il à peu près le même? Quel est-il? Avez-vous les chiffres?

M. Gibbs: Oui. C'est environ 33 p. 100. Je l'ai déjà dit tout à l'heure. Le taux de libération conditionnelle depuis 10 ans a varié entre 29 p. 100 ou 30 p. 100 et 38 p. 100 maximum pour toutes les demandes faites.

Lorsque la législation a été modifiée à l'automne 1992, la procédure d'examen expéditif a été mise en place. D'après cette procédure, les détenus dont c'était la première incarcération - dans le cas d'infraction non violente - sont automatiquement libérés, à moins qu'on ait la preuve qu'ils pourraient commettre un crime violent avant l'expiration de leur peine.

Voilà donc les chiffres auxquels nous parvenons, procédure d'examen expéditif et demandes normales réunies. Il ne fait aucun doute qu'il y a un an environ, ou peut-être même quelques mois auparavant, la commission a connu une période difficile, pour dire le moins.

Le président: Nous nous en souvenons.

M. Gibbs: Effectivement. Il est donc tout à fait normal qu'en raison de toutes ces critiques qui ont été adressées à la commission, et celle-ci était composée de personnes humaines, celle-ci se soit montrée plus circonspecte.

Par ailleurs, lorsque moi j'ai commencé à la commission, il fallait vérifier et examiner beaucoup de choses. Naturellement, nous avons examiné bon nombre des dossiers qui avaient causé des difficultés, nous avons posé des questions et nous nous sommes efforcés d'élaborer des politiques et des orientations qui visaient à éviter ce genre d'échecs.

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Voilà ce qui en était et nous avons travaillé dans ce cadre. Maintenant que nous avons, à mon avis, des commissaires plus compétents à la suite de l'arrivée de nouveaux commissaires, d'un système d'évaluation et autres mesures, et maintenant que nos méthodes de prise de décision vont être examinées dans leur ensemble, je crois que nous arriverons à une approche plus raisonnable, conforme au bon sens.

Je signale à nouveau que nos décisions ne seront pas influencées par des considérations politiques ou par l'opinion publique. Notre décision reflétera le fait que la personne est prête pour la libération et que cette mesure ne présente aucun risque évident.

Le président: Ne nous avez-vous pas dit un peu plus tôt ce matin que le taux de succès demeurait plus ou moins constant? Quand je parle de taux de succès, je parle de terminer la période de libération conditionnelle sans infraction d'une loi ou des conditions de libération. Quel est ce taux qui est plus ou moins constant?

M. Gibbs: Il est d'un peu plus de 70 p. 100, soit 72 p. 100 environ. Pour les 28 p. 100 qui représentent un échec avant l'expiration du mandat, ils se répartissent ainsi: révocation parce que les conditions n'ont pas été respectées, 15 p. 100, et nouvelles infractions, 13 p. 100.

Le président: Je voudrais aussi vous poser une question au sujet des peines de détention pour une période indéterminée qui peuvent être imposées aux délinquants dangereux mentionnées à l'article 752 du Code criminel. La loi vous demande d'examiner ces cas à l'expiration de la première période de trois ans, et tous les trois ans par la suite.

Dans quelle proportion ces délinquants sont-ils libérés? Par exemple, combien de délinquants dangereux ont-ils bénéficié d'une libération l'an dernier et combien de cas de délinquants dangereux avez-vous étudiés? Si vous devez chercher ce renseignement, vous pourriez peut-être le communiquer au comité à la fin de notre séance plutôt que d'essayer de répondre immédiatement.

Mme Stableforth: Je vais certainement rechercher ce renseignement, monsieur le président, il n'y a pas tellement longtemps j'ai examiné les statistiques et il me semble que ce nombre de cas était très limité. Je crois qu'il s'agissait...

Le président: Très peu de libérations?

Mme Stableforth: Oui. Moins de 10 ont été libérés.

Le président: Dix libérations sur combien de dossiers examinés? Vous pourriez peut-être essayer d'obtenir ces chiffres et nous les donner à la fin de la séance.

D'autre part, pour reprendre une question posée par M. Gallaway, est-ce que le droit à payer pour les pardons est fixé par décret en conseil ou par règlement? Quel est l'instrument légal qui vous permet de décider qu'il y a un droit à payer, que ce droit sera de tel ou tel montant, que le montant sera augmenté, ou modifié d'une façon quelconque?

Mme Denise Walter (conseillère juridique principale, Commission nationale des libérations conditionnelles): Il s'agit des règlements d'application de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Le président: La décision est-elle prise au niveau ministériel ou par le président de la Commission nationale des libérations conditionnelles?

Mme Walter: Quelle décision?

Le président: Eh bien, si c'est un règlement qui...

Mme Walter: C'est un règlement...

Le président: Par conséquent, il s'agit d'un décret en conseil.

Mme Walter: Oui c'est exact.

Le président: La mesure doit donc être adoptée par le comité du Cabinet qui traite des décrets en conseil.

Mme Walter: C'est exact.

Le président: Et toute augmentation du droit doit suivre la même procédure?

Mme Walter: C'est exact.

Le président: Parfait.

M. Lee (Scarborough - Rouge River): Je n'ai que deux brèves questions, de nature un peu technique. Monsieur Gibbs, vous avez mentionné dans vos remarques que la commission avait délégué - je ne sais pas si c'est bien le terme qui convient à vos procédures - au Service correctionnel Canada la décision d'accorder des permissions de sortir sans surveillance. Pouvez-vous me dire ce qui donne à la commission le pouvoir de déléguer cette fonction à un autre organisme?

M. Gibbs: C'est la loi qui nous donne ce pouvoir. Je ne sais pas exactement quel article, mais notre conseillère juridique peut peut-être vous donner la référence.

Mme Walter: Il s'agit du paragraphe (1) de l'article 117 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Désirez-vous que je vous lise ce passage?

M. Lee: Pourquoi pas?

Mme Walter: Parfait, c'est d'ailleurs assez bref:

L'article 116 traite des permissions de sortir sans surveillance.

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M. Lee: D'autre part, vous avez aussi indiqué, avec une franchise agréable, que le montant à payer pour demander un pardon comprend un droit de 50$ qui accompagne la demande. Pouvez-vous me dire si le pouvoir de demander un tel droit dérive de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ou de...

Mme Walter: Le pouvoir dérive de la Loi sur la gestion des finances publiques; il s'agit d'un pouvoir général autorisant les ministères à imposer des droits. Il s'agit donc d'un règlement pris sous le régime de la Loi sur la gestion des finances publiques.

M. Lee: Il s'agit donc d'un règlement général sur le recouvrement des coûts pris en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Mme Walter: C'est exact.

M. Lee: Je crois que j'ai bien saisi cela également. Merci.

Mme Torsney (Burlington): Je désire vous poser quelques questions portant spécifiquement sur le budget.

Je crois que c'est l'an dernier que nous avons obtenu quelques renseignements sur le programme concernant la violence familiale et le député bloquiste a déjà posé quelques questions à ce sujet. Si j'essaie de comprendre objectivement, la raison pour laquelle vous n'avez pas de budget pour lutter contre la violence familiale, c'est parce que le Service correctionnel offre déjà ce genre d'éducation aux détenus, est-ce exact?

M. Gibbs: Notre budget à ce chapitre n'était que de l'ordre de 100 000$, mais nous n'avons pas abandonné cette question. Je crois que le Service correctionnel s'en occupe, non seulement en ce qui concerne les détenus, mais aussi à l'égard de leurs familles. Cela fait partie du mandat du service.

Notre rôle se limite aux décisions, comme je l'ai dit, et notre formation et notre étude des différents dossiers font que nous accordons à la violence familiale une grande importance.

Mme Torsney: Il me semble que votre budget de l'an dernier réservait certaines sommes à l'achat de meubles. Qu'en est-il de cette année?

M. Callahan: Quelle année?

Mme Torsney: La plus récente.

M. Callahan: Pour 1994-1995, le montant total des dépenses en capital prévues est d'environ 150 000$. Sur ce montant, seulement 20 000$ sont consacrés à l'achat de meubles, et cela couvre nos six bureaux. Il ne s'agit pas de meubler un bureau particulier, cette somme est répartie sur l'ensemble du pays.

Il y a également l'achat d'automobiles. Nous nous servons d'un véhicule de fonction quand notre commissaire et son personnel se déplacent lors de la tenue d'audiences. Je crois que le montant à ce chapitre est d'environ 50 000$.

Le solde est consacré à la modernisation de notre technologie.

Mme Torsney: Il s'agit de 80 000$.

M. Callahan: Quatre-vingt mille dollars sur un total de 150 000$, et ici encore c'est pour l'ensemble du pays.

Mme Torsney: Bon.

Le président: Notre coutume est toujours de s'adreser à l'ensemble du comité plutôt que d'avoir une conversation particulière dans un petit coin de la salle.

Mme Torsney: À quoi sert le budget pour les communications proactives? S'agit-il de discours prononcés devant les Clubs Rotary, ou s'agit-il peut-être, monsieur Gibbs, de définir quel est le mandat de la commission pour s'assurer qu'elle travaille à éliminer les obstacles?

M. Gibbs: Nous avons un service de communication qui dispose d'un budget. Je n'en connais pas les détails. M. Callahan pourrait vous renseigner à ce sujet.

Dans le cadre de mon propre budget, chaque fois que j'en ai la possibilité - j'essaie parfois de créer ces possibilités - je me déplace dans notre pays pour parler du genre de problèmes dont nous discutons ici aujourd'hui.

Je ne peux malheureusement pas vous donner une explication absolument imperméable au sujet de ces 150 000$ qui seraient utilisés pour prêcher la bonne parole dans notre domaine, mais je peux vous dire que nous n'avons jamais pensé en termes de manque de ressources ou autre chose de cette nature pour ne pas faire ce que nous devons faire. Nous avons accordé beaucoup d'importance à cette activité, mais il ne s'agit pas uniquement de nous. J'estime en effet que ce n'est pas seulement moi qui dois faire ce travail, c'est le travail de tous ici et celui des commissaires et des principaux collaborateurs de tout le pays; cela implique d'ailleurs tout le personnel, s'il s'intéresse à cet aspect et aux dispositions en ce sens.

Je crois également que nous avons des partenaires dans les communautés. Il s'agit des agences s'occupant des ex-détenus, ou des services de libération conditionnelle du Service correctionnel à différents endroits au pays. Nous n'avons que cinq bureaux régionaux et ne pouvons pas être présents partout. Ces partenaires sont tout aussi engagés que nous et peuvent s'exprimer aussi bien que nous pour expliquer pourquoi l'absolution conditionnelle est si importante et c'est pour cela que nous essayons d'obtenir l'aide de ces différents groupes et intervenants.

Madame Torsney, mon dernier commentaire en cette période de contraintes budgétaires est que j'aimerais croire que les employés à temps partiel pourraient certainement recevoir une compensation de leurs frais de séjour quand ils se rendent sur place, mais qu'ils ne devraient pas recevoir de forfaits journaliers pour les séances de formation. Après tout, nous travaillons tous après les heures normales pour améliorer nos compétences et cela devrait être perçu comme un prérequis allant avec l'emploi, et on n'envisagerait pas de payer la personne qui participe à une séance de formation. Cela me semble ridicule. Nous avons tous fait quelque chose à un moment donné pour améliorer notre sort et je vous suggère donc d'examiner cet aspect et vous pourriez peut-être faire une offre en ce sens à vos employés à temps partiel; votre budget servirait alors uniquement à couvrir leurs dépenses.

.1115

Le président: Avez-vous une réponse?

M. Gibbs: Je ne sais pas si nous avons jamais envisagé cela.

Le président: Vous n'êtes pas contraint de répondre, je me demandais tout simplement si vous aviez une observation.

M. Gibbs: Non.

Le président: Parfait.

Monsieur Wappel, vous avez demandé un deuxième tour.

M. Wappel: Oui. Merci, monsieur le président.

Je crois avoir bien été mis au courant de ce qui a été demandé au sujet de l'affaire Butler. Je reviens donc sur cette question.

Voilà donc une personne qui à la fin de janvier 1984 avait été condamnée à 14 ans de prison après avoir commis plusieurs crimes très graves, y compris l'utilisation d'une arme à feu, la possession d'une arme, la séquestration et le vol qualifié. Et il devait bénéficier d'une libération d'office à la fin de février 1993. Nous savons qu'on ne peut rien faire à ce sujet étant donné qu'il s'agit d'une disposition de la loi.

On l'a envoyé dans les Territoires du Nord-Ouest où il a été accusé d'un autre crime.

Je crois que nous sommes tous d'accord pour reconnaître que voilà un individu qui a été décrit comme psychopathe, qui a tenté de s'évader et qui avait commis plusieurs infractions en institution. Les agents responsables de son dossier avaient indiqué qu'il était capable d'actes très graves et présentait un risque de violence élevé.

Quatre mois après sa libération d'office, il a été accusé d'introduction par effraction, un mandat de suspension a été émis et la Commission des libérations conditionnelles s'est réunie le 18 juin 1993 pour discuter de la possibilité de révocation de la libération conditionnelle et, à la même occasion, de la possibilité d'accorder une libération conditionnelle si la libération d'office était révoquée.

Voici donc un individu qui a purgé neuf ans d'une peine de 14 ans d'emprisonnement imposée à la suite de crimes graves commis avec violence. Il s'agit d'un phychopathe, connu comme présentant un danger pour la société, et la Commission des libérations conditionnelles se rencontre pour examiner si la libération d'office devrait être révoquée. Quatre mois après sa libération, cet individu est accusé d'introduction avec effraction; la Commission des libérations conditionnelles se réunit alors pour se demander si on devrait accorder une libération conditionnelle d'un jour. Il n'y a pas eu de décision à ce sujet et la commission s'est ajournée jusqu'à ce que les accusations fassent l'objet d'une décision.

Voici ma première question: s'agit-il d'une procédure normale pour un tel individu?

M. Gibbs: Il me semble que oui. On attend que la personne ait été trouvée coupable ou non avant de prendre une décision.

M. Wappel: Il s'agit donc d'une procédure normale. La libération d'office d'un psychopathe qui présente un risque élevé n'est pas normalement révoquée même s'il est accusé d'un crime, tant qu'il n'a pas été déclaré coupable de ce crime. Est-ce exact?

M. Gibbs: La libération pourrait être révoquée.

M. Wappel: Je sais qu'elle pourrait l'être. Je vous demande quelle est la procédure. Est-ce que, normalement, on ne révoque pas la libération d'office tant que la cause n'a pas été jugée? Quelles sont les lignes directrices de la commission?

M. Gibbs: La commission pourrait aller de l'avant. Cela dépend de la nature de l'accusation et du risque reconnu.

M. Wappel: Il y a plusieurs facteurs.

M. Gibbs: Oui.

M. Wappel: De toute façon, les commissaires estimeraient en général qu'ils ne devraient pas révoquer une libération d'office tant qu'il n'y a pas eu condamnation.

M. Gibbs: Pas nécessairement.

M. Wappel: Pouvez-vous nous éclairer davantage et nous renseigner plus en détail sur les lignes directrices?

M. Gibbs: Il me semble que si la personne est détenue, on peut attendre. Si elle n'est pas détenue, il faut passer un jugement et décider si la personne en cause peut rester en maison de transition jusqu'à ce que l'accusation fasse l'objet d'une décision.

M. Wappel: Savez-vous si M. Butler a été détenu en attendant de comparaître devant un tribunal à la suite de l'accusation d'introduction par effraction?

.1120

M. Gibbs: Oui, je crois qu'il était au Centre correctionnel de Whitehorse en suspension jusqu'à ce que sa cause soit entendue.

M. Wappel: Le 19 juillet, la Commission des libérations conditionnelles a décidé de révoquer la libération d'office, apparemment parce que cet individu n'était pas un bon candidat pour ce statut et parce qu'il présentait un danger pour la société. Est-ce exact?

M. Gibbs: C'est ce que l'on peut croire.

M. Wappel: Bon. C'est ce que je vais croire également. Et pourtant, à cette même date, on accorde une libération conditionnelle de jour. Pour moi cela semble être complètement illogique. Pourquoi cette décision a-t-elle été prise?

M. Gibbs: C'est une décision qui sort de l'ordinaire. Je l'ai déjà dit.

M. Wappel: Je le sais. Mais pourquoi l'a-t-on fait?

M. Gibbs: Comme je l'ai expliqué, il y avait deux possibilités: d'une part, révoquer la libération et renvoyer cet individu au pénitencier pour les deux ans et demi qui lui restait à purger, après quoi il aurait sans doute été libéré à nouveau selon les conditions de libération d'office. L'autre possibilité était de restructurer sa libération. On a recommandé une reformulation plus stricte en accordant une libération conditionnelle de jour et en le renvoyant à cette maison de transition ou à une autre. C'est ce qui a été décidé.

M. Wappel: Bon. Avant de lui accorder la libération conditionnelle de jour, si j'ai bien compris le rapport du Service correctionnel, on lui a accordé une autorisation de déplacement de dix jours. Je pense que cela a été accordé après révocation de la libération d'office. Cette autorisation de déplacement de dix jours était accordée pour lui permettre de régler des affaires personnelles.

Quelles sont les affaires personnelles pour lesquelles M. Butler avait besoin de dix jours avant de bénéficier d'une libération conditionnelle de jour?

M. Gibbs: Je suis désolé, mais je ne peux pas répondre à cette question. Je ne sais pas quelles étaient ses affaires personnelles. J'ai lu le même document que vous, mais je ne sais pas de quelles affaires il s'agissait.

M. Wappel: Qui a pris la décision, monsieur Gibbs, d'accorder cette autorisation de déplacement de dix jours?

M. Gibbs: C'est le Service correctionnel qui a donné cette autorisation.

M. Wappel: Si c'est le Service correctionnel qui est en cause, il est évident que vous ne pouvez pas nous aider beaucoup à ce sujet. C'est bien cela?

Donc, il est allé à cette maison de transition et l'agent des libérations conditionnelles voulait qu'il soit incarcéré, mais il est parti. Est-ce là aussi une procédure normale?

M. Gibbs: Ici encore, il s'agit d'une décision du Service correctionnel. Si une suspension a été justifiée à ce moment-là, c'est l'agent des libérations conditionnelles du Service correctionnel qui doit prendre la décision. Je ne peux pas faire de commentaire à ce sujet.

M. Wappel: J'en suis à ma dernière question, n'est-ce pas, monsieur le président? Ce n'est pas vraiment ma dernière question, mais mon temps de parole est écoulé.

Le président: C'est exact. Mais je ne vois personne d'autre sur ma liste. Désirez-vous poser d'autres questions sur le même sujet? Il me semble qu'il faudrait peut-être les réserver pour M. Edwards.

M. Wappel: J'ai encore une ou deux questions, si vous me le permettez, monsieur le président.

Mme Meredith: J'aimerais également pouvoir prendre la parole.

Le président: Monsieur Wappel, je vous accorde cinq minutes de plus.

M. Wappel: C'est probablement tout ce dont j'ai besoin.

Si je m'en souviens bien, on avait promis d'une façon ou d'une autre que la Commission nationale des libérations conditionnelles ferait enquête sur ce dossier et que certains renseignements seraient communiqués. Service correctionnel Canada a procédé à une enquête interne. Est-ce que la Commission nationale des libérations conditionnelles a également fait une enquête interne, ou une enquête quelconque, à ce sujet?

M. Gibbs: On a procédé à une contre-vérification. Cela fut fait, d'ailleurs, avant que le commissaire et moi-même aient lancé la pratique de faire une enquête nationale chaque fois qu'un incident d'une telle importance a lieu. À l'époque, non seulement la commission n'était pas incluse dans l'ordre de convocation, mais il ne s'agissait pas d'une enquête nationale; c'était uniquement une enquête régionale.

Le président: Ainsi que Mme Meredith, vous avez lu le rapport que vous avez sous les yeux, mais vous êtes les seuls à l'avoir fait. Donc, pour que le procès-verbal soit complet, pouvez-vous nous dire si M. Butler a commis un autre crime odieux?

M. Wappel: Oui, monsieur le président, il l'a fait.

Le président: Il serait peut-être bon d'indiquer au procès-verbal ce qu'il a fait afin de permettre aux lecteurs de savoir ce qui s'est produit et de comprendre les questions que vous posez.

.1125

M. Wappel: La libération d'office a été accordée le 26 février 1993 et le 4 septembre 1993, cet individu a tué une personne qu'il ne connaissait pratiquement pas à coup de couteau. M. Butler a ensuite été arrêté et jugé coupable de ce meurtre. Il a été déclaré coupable d'un meurtre au deuxième degré et a été condamné à l'emprisonnement à vie, la libération conditionnelle étant interdite avant les 13 premières années d'emprisonnement.

Le président: Je vous demande de poursuivre; je veux que le procès-verbal soit complet.

M. Wappel: J'ai terminé. Je voulais tout simplement savoir si une enquête interne a examiné la décision portant sur la première révocation de la libération d'office. Je crois vous avoir entendu dire qu'il n'y a pas vraiment eu d'enquête.

M. Gibbs: Non.

M. Wappel: Merci.

Mme Torsney: Pour le procès-verbal, je signale que M. Gibbs n'était pas le président de la commission à cette époque.

Le président: Je crois que cela est bien connu.

M. Wappel: Excusez-moi, notre conseiller juridique vient de me rappeler quelque chose. Y a-t-il eu contre-vérification? C'est ce que vous avez dit?

M. Gibbs: Oui, nous avons, après coup, procédé à une contre-vérification. Un agent de vérification de la commission a examiné le dossier mais je ne me souviens pas de sa recommandation.

Nancy, vous étiez là.

Mme Stableforth: Je pourrais peut-être éclaircir un peu les choses; peu de temps après cet incident, quand le contrevenant avait été arrêté et accusé du crime commis pendant qu'il était en libération de jour, la personne qui était alors responsable des enquêtes spéciales et des vérifications de dossiers pour la commission avait rapidement examiné la question.

Je tiens à préciser qu'il ne s'agissait pas d'un examen détaillé comme celui qui serait fait par une commission d'enquête et qui prévoit, entre autres, des entrevues avec les personnes intéressées et donne le genre de renseignements que nous trouvons maintenant dans les rapports des commissions d'enquête. Il y a eu un examen et on a préparé un résumé du dossier donnant les différentes décisions et les questions soulevées.

Je crois comprendre qu'à la suite de ce travail, à la fin de 1993 ou tout au début de 1994, on a demandé à la vice-présidente régionale pour la région du Pacifique de procéder, avec les commissaires qui avaient pris la décision en cause, à un examen détaillé du dossier. C'est ce qu'elle a fait et elle a signalé au président à l'époque que l'examen avait été fait et que les questions préoccupantes avaient fait l'objet de discussion avec les commissaires.

Comme M. Gibbs l'a déjà dit, la commission n'avait pas à cette époque adopté la pratique d'organiser une commission d'enquête chaque fois qu'un contrevenant faisait l'objet d'une accusation de meurtre. Cette procédure a été inaugurée l'été dernier pour ce genre d'incidents.

Je pense devoir apporter un autre élément d'information. On parle de deux autorisations. Dans un cas il s'agit d'une autorisation de 24 heures qui a été accordée à M. Butler et ne respectait pas les règles de l'établissement résidentiel où se trouvait M. Butler. Cette autorisation fut donnée par le Service correctionnel. La commission n'était pas au courant.

Je crois cependant que vous avez indiqué que l'autorisation avait été donnée par la commission. Je m'excuse, mais j'essayais de m'y retrouver entre ces deux autorisations. L'autorisation d'accorder dix jours pour régler ce qui a été décrit comme des affaires personnelles aurait été donnée par la commission en même temps que la question de la libération d'office et celle de la libération de jour étaient traitées.

Je n'ai pas ici le texte de cette décision. Je ne peux pas aller plus loin que ce qui est dit dans le rapport que vous avez déjà reçu - il s'agissait d'affaires personnelles. Je n'avais certainement pas l'intention de vous induire en erreur à ce sujet.

M. Wappel: Pouvez-vous donc nous faire savoir quelles étaient ces affaires personnelles et les raisons pour lesquelles l'autorisation de déplacement a été accordée? Deuxièmement, êtes-vous en mesure de nous fournir l'un ou l'autre ou la totalité des rapports qui ont été adressés au président, à l'époque, au sujet de cet incident, compte tenu de ce que vous venez de nous dire?

Mme Stableforth: Je peux certainement examiner le dossier et les rapports en question. De toute évidence, comme dans le cas de ce rapport-ci, nous devrons vérifier toute question concernant les renseignements personnels et ceux concernant les tierces parties. Mais nous pourrons certainement fournir aux membres du comité les documents provenant de nos enquêtes internes.

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M. Wappel: En indiquant les raisons pour lesquelles cette autorisation a été accordée.

Mme Stableforth: Oui, nous pouvons certainement nous engager à le faire. Cela peut prendre un jour ou deux si nous devons retourner à la source au cas où ce renseignement ne figurerait pas dans les rapports que nous avons à Ottawa. Ce dossier a évidemment été renvoyé dans la région où M. Butler est incarcéré; il doit contenir toutes les données. Nous pouvons nous engager à obtenir ces renseignements.

M. Wappel: Merci.

Le président: Avez-vous les renseignements que j'ai demandés plus tôt en ce qui concerne les peines d'une durée indéterminée prononcées en vertu de l'article 752?

Mme Stableforth: Oui, monsieur le président, du moins en partie. Je ne sais pas si ces renseignements vous satisferont entièrement.

Je peux vous informer que 144 criminels dangereux ont été admis depuis 1977. Sur ce nombre, 135 sont toujours incarcérés. Ce chiffre est donc assez près de celui que j'avais indiqué.

Si j'ai bien compris, sur les neuf détenus libérés, quatre sont en libération conditionnelle sous surveillance. Je crois que sur les neuf libérations conditionnelles accordées au départ, deux ont été révoquées, une a été suspendue et deux de ces détenus sont décédés. Je n'ai pas ces chiffres sous la main.

Le président: Ils sont morts en prison?

Mme Stableforth: Non. Sur les neuf qui ont été libérés, je crois que deux sont morts.

Ce sont là tous les renseignements que je peux vous fournir pour le moment. La majorité de ces contrevenants restent en prison.

Quant au nombre de fois où leur cas a été examiné, je pense que c'était...

Le président: Non, je sais qu'ils doivent être réexaminés tous les deux ans. Ce que je voudrais savoir, toutefois, c'est combien de fois ils ont interjeté appel à la Division d'appel de votre commission. Avez-vous ce renseignement? Est-il arrivé que la division d'appel accorde la libération alors que la commission l'avait refusée? Si vous n'avez pas ce renseignement aujourd'hui, j'aimerais l'obtenir.

Mme Stableforth: Je peux voir quels sont les renseignements que nous possédons à cet égard, monsieur le président, mais je ne suis pas certaine que la commission ait des statistiques quant au nombre de contrevenants dangereux qui ont fait appel.

Comme j'ai travaillé à la division d'appel, je suis au courant d'un ou deux cas. Je ne connais pas de cas dans lesquels la division d'appel ait libéré directement les détenus. Je connais au moins un cas où elle a ordonné la tenue d'une nouvelle audience.

Je peux voir quels sont les renseignements que nous possédons à ce sujet, mais je ne peux pas vous assurer que nous en ayons.

Le président: J'aimerais obtenir les renseignements que vous avez, car je sais que certains cas ont été renvoyés à la Cour fédérale.

M. Lee: Monsieur le président, pourriez-vous demander au greffier d'obtenir la copie du rapport du Service correctionnel concernant Paul Butler?

Le président: Au sujet de ces questions?

M. Lee: Oui. Notre service de recherche devrait l'avoir.

On nous le présentera dans sa version expurgée et je ne sais pas si cela satisfera le comité.

Mme Meredith: Monsieur le président, je demanderais au comité si nous ne pourrions pas faire comparaître le Service correctionnel avant l'ajournement d'été. J'ai besoin de nombreuses réponses que la Commission des libérations conditionnelles est incapable de nous donner. Étant donné la gravité de cette affaire, je pense qu'il faudrait faire comparaître le Service correctionnel.

Le président: C'est en notre pouvoir. Le comité directeur se réunit lundi matin. En outre, l'enquêteur du Service correctionnel vient ici mardi matin. C'est la seule réunion que nous avons prévue.

Le comité veut-il prendre une décision à ce sujet immédiatement ou préférez-vous attendre la réunion du comité directeur lundi matin?

Une voix: Attendons la réunion du comité directeur.

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Le président: D'accord, attendons la réunion du comité directeur et nous verrons ce que nous pouvons faire.

Avant que nous ne levions la séance, vous avez dit qu'il y avait eu récemment huit nominations à la Commission des libérations conditionnelles - en avril, je crois - et que plusieurs autres avaient été annoncées récemment. Vous aurez aussi remarqué que le comité n'a pas décidé d'examiner ces nominations même s'il en a le pouvoir. C'est sans doute parce que nous étions extrêmement occupés avec le projet de loi C-41, le projet de loi C-45, le projet de loi C-68 et le projet de loi C-72; c'était très difficile.

Si nous n'avons pas examiné ces dernières nominations, cela ne veut pas dire que nous renoncions à ce droit. Je tiens seulement à préciser que nous continuerons à le faire de temps à autre.

Je crois que vous recevez tous l'avis de ces nominations. Si vous désirez que nous examinions n'importe laquelle de ces nominations faites par le ministre de la Justice ou le solliciteur général, je vous demanderais de bien vouloir en parler au président ou de soulever la question lors d'une réunion.

Monsieur Gibbs, je tiens à vous remercier, vous et les personnes qui vous accompagnent, pour votre comparution et les renseignements que vous nous avez fournis. Si j'ai bien compris, vous allez nous communiquer d'autres rapports et renseignements par l'entremise du greffier.

La séance est levée jusqu'à 15h30 cet après-midi. Nous procéderons alors à l'étude article par article du projet de loi C-72.

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