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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 mai 1995

.1130

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Je m'excuse auprès de nos témoins pour notre retard. C'est l'un des risques de la vie parlementaire; d'autres devoirs nous appellent parfois. En l'occurrence, nous avons été retenus par un vote. Maintenant que c'est fait et, à moins qu'il n'y ait d'autres interruptions, nous devrions pouvoir continuer notre étude du projet de loi C-224 pendant au moins 90 minutes.

Aujourd'hui, nous avons le privilège d'accueillir des représentants de l'Association des hôpitaux du Canada, de la Conférence canadienne des arts et de B'nai Brith Canada. Les représentants de ces organismes sont devant nous. Je crois savoir qu'ils feront leur exposé dans l'ordre suivant: l'Association des hôpitaux du Canada, puis la Conférence canadienne des arts et enfin B'nai Brith. Je crois que chaque représentant fera un exposé d'environ cinq minutes puis, comme d'habitude, nous passerons à la période de questions.

Nous commençons donc par Laurent Isabelle, de l'Association des hôpitaux du Canada. Bonjour.

[Français]

M. Laurent Isabelle (membre du conseil de l'Association des hôpitaux du Canada et vice-président de l'Association des hôpitaux de l'Ontario): Merci, monsieur le président. Je m'appelle Laurent Isabelle. Je vous présente Carol Clemenhagen, la présidente de l'Association des hôpitaux du Canada. Je représente le conseil d'administration en tant que membre du conseil.

L'Association des hôpitaux du Canada a pour mission de promouvoir des soins humanitaires dans un système canadien de services de santé intégrés, efficaces et de la plus haute qualité, et donc d'améliorer la prestation des services de santé au Canada par son leadership en élaborant des politiques d'envergure et en offrant des services éducatifs à ses membres.

[Traduction]

Il semble que le projet de loi C-224 a été présenté parce que certains s'inquiètent du fait que les organismes de charité et les organismes sans but lucratif ne sont pas suffisamment responsables des fonds publics qui leur sont versés et qu'ils livrent une concurrence déloyale aux organismes à but lucratif et que les actions de leurs dirigeants et agents seraient motivées par leur intérêt personnel, c'est-à-dire leur rémunération et avantages.

.1135

L'Association des hôpitaux du Canada comprend que vous veuillez vous assurer que les organismes financés à même les impôts des contribuables utilisent à bon escient les fonds publics qui leur sont versés. En effet, tant la philosophie que la pratique de l'administration des services de santé reposent depuis longtemps sur l'obligation des conseils d'administration des hôpitaux, des fondations et des organismes de services de santé de veiller à ce que l'hôpital ou l'organisme de services de santé dispense des soins de qualité, soit géré avec efficience, protège les biens de l'organisation - tant financiers que non financiers - et s'inquiète de ses responsabilités - qu'elles soient financières, juridiques ou professionnelles.

De nombreux conseils d'aministration d'organismes de santé ont déjà élaboré des politiques concernant la divulgation publique des échelles de salaires de leurs cadres supérieurs. L'Association des hôpitaux du Canada est de l'opinion que toute décision prise en vue de la divulgation de ces renseignements et ses modalités d'application devraient relever des conseils d'administration ou des organismes de services de santé.

En 1992, par exemple, l'Ontario Hospital Association - dont j'étais vice-président à l'époque - l'organisme membre le plus nombreux de la l'AHC, a élaboré des lignes directrices à l'intention des hôpitaux ontariens sur la divulgation de la rémunération de leurs dirigeants. Dans l'agitation créée par la réduction des effectifs dans les hôpitaux, les syndicats, et en particulier les administrations municipales ont exercé d'intenses pressions pour obtenir la divulgation de renseignements sur la rémunération des administrateurs. Les médias ont non seulement reflété ces pressions, mais les ont exacerbées.

Les travailleurs semblaient vouloir s'assurer que tous les employés des hôpitaux, y compris la haute direction, seraient également touchés par la réduction. À notre avis, la question de la divulgation de la rémunération des dirigeants a servi de paratonnerre.

Les lignes directrices de 1992 de l'Ontario Hospital Association restent tout à fait pertinentes: (1) elles encourageaient les conseils d'administration à établir une politique adaptée à leur institution sur la confidentialité des échelles de salaire; (2) l'information sur les échelles de salaire devait être divulguée en réponse à des demandes précises avec le consentement des personnes intéressées.

Au moment où le Conseil du Trésor fait des progrès considérables en vue de réduire la bureaucratie et les réglementations inefficaces par des mesures législatives novatrices et utiles comme le projet de loi C-62, Loi sur l'efficacité de la réglementation, le projet de loi C-224 propose l'imposition d'un nouveau fardeau réglementaire dont les avantages sont loin d'être évidents.

D'après notre interprétation du code d'équité en matière de réglementation, que le gouvernement appuie et sur lequel le Conseil du Trésor se fonde pour examiner tous les règlements, tant ceux qui sont proposés que ceux qui existent déjà, il faut que chaque règlement procure un avantage clair qui compense le coût de son application et qui ne pourrait être réalisé par d'autres moyens. L'Association des hôpitaux du Canada estime que le projet de loi C-224 ne respecte pas ces critères.

Des règlements exigeant que plus de 1 000 hôpitaux et installations de soins de santé qui sont des organismes de charité enregistrés fournissent un complément d'information à l'adresse du ministre du Revenu national, en sus des exigences actuelles en matière de communication d'informations financières, telles les états financiers dûment vérifiés et la déclaration annuelle de renseignements des organismes de charité enregistrés requise par le ministère du Revenu, ne feront qu'alourdir le fardeau administratif des organismes de santé au moment où les gouvernements fédéral et provinciaux réduisent considérablement les transferts pour les services de santé.

L'Association des hôpitaux du Canada est d'avis que nous devons utiliser toutes les ressources disponibles pour fournir des soins directs aux patients et que nous ne devrions pas être obligés de les réaffecter inutilement pour assumer un nouveau fardeau réglementaire. La nouvelle réglementation proposée dans le projet de loi C-224 impose au gouvernement de recueillir et de tenir de nouveaux renseignements, puis de surveiller la conformité aux règles établies, ce qui semble aller à l'encontre des efforts actuels que le gouvernement déploie pour réduire ses dépenses et ses lourdeurs réglementaires.

.1140

Si vraiment il y a une bonne raison - qui nous a peut-être échappé - pour que le gouvernement recueille les renseignements sur la rémunération des dirigeants d'organismes de charité, il serait certainement moins coûteux et probablement plus efficace d'obtenir ces renseignements en ajoutant simplement une question sur les échelles de salaire à la formule de déclaration annuelle que les organismes de charité fournissent déjà au ministère du Revenu.

[Français]

Nous vous remercions, monsieur le président et membres du Comité, pour l'attention portée à notre présentation.

[Traduction]

Le président: Nous entendrons maintenant Keith Kelly, directeur national de la Conférence canadienne des arts.

M. Keith Kelly (directeur national, Conférence canadienne des arts): Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion d'exprimer notre avis sur le projet de loi C-224.

La Conférence canadienne des arts est un organisme impartial sans buts lucratifs qui défend les intérêts des artistes et des travailleurs culturels du Canada. Nous comptons parmi nos membres des particuliers et des organismes. Ainsi, le Ballet national du Canada, les orchestres symphoniques, les galeries d'art, les théâtres ainsi que des artistes individuels comptent parmi nos membres et représentent plus de 200 000 personnes qui travaillent dans les industries artistiques et culturelles au Canada.

Depuis plus de 50 ans, nous avons concentré nos efforts sur l'élaboration de politiques fédérales et sur la prestation de services d'information et d'aide aux organismes et personnes membres. Nous ne sommes pas un organisme de charité, mais notre organisme de services artistiques enregistrés nous permet de jouir des mêmes privilèges qu'un organisme de charité enregistré depuis la modification apportée il y a quelques années à la Loi de l'impôt sur le revenu dans le cadre de l'initiative politique sur le statut de l'artiste.

Dans l'exercice de leurs fonctions quotidiennes, les six personnes rémunérées qui constituent notre personnel s'occupent d'une grande diversité de questions qui intéressent directement les artistes et les travailleurs du secteur culturel comme la réforme du droit d'auteur, la Loi sur le statut de l'artiste, le traitement fiscal des artistes et des arts, la liberté d'expression, les institutions culturelles nationales, la réglementation et la politique relative à la radiodiffusion, les nouvelles technologies comme l'autoroute de l'information et la radiodiffusion directe par satellite. Non seulement nous prenons l'initiative d'exprimer les opinions de nos membres dans l'arène politique, mais souvent ce sont les gouvernements qui nous demandent de leur fournir des conseils précis sur les questions de politique culturelle et nous participons à toute une gamme d'activités relatives aux politiques gouvernementales, comme ces audiences, où nous représentons les opinions et les aspirations du secteur culturel du Canada dans les discussions sur les mesures d'intérêt public.

Dans notre mémoire nous disons que la Conférence canadienne des arts appuie sans réserve l'ouverture, la transparence et la responsabilité qui doivent caractériser la gestion des organismes sans but lucratif et des organismes de charité. Dans notre cas, et pour la majorité des organismes semblables du secteur culturel, c'est une norme qu'exigent tout naturellement nos membres. Chaque année, la CCA prépare un rapport annuel qui comprend des états financiers vérifiés, une liste de tous les organismes, sociétés et personnes qui nous appuyent financièrement.

Les membres de notre conseil d'administration, élus par l'ensemble de nos membres, reçoivent des états financiers trimestriels que plusieurs d'entre eux partagent avec d'autres personnes dans leur domaine d'intérêt. Sans cette reddition de comptes, nous ne pourrions pas compter sur la confiance et l'appui de nos membres et sans eux, nous n'aurions plus d'organisation. L'obligation de rendre des comptes aux membres de telles organisations est essentielle et l'une de nos premières responsabilités. Ce sont nos membres qui sont les mieux placés pour veiller constamment à ce que l'organisation soit gérée de façon responsable et il n'est pas nécessaire que le gouvernement reproduise ce mécanisme en créant de nouveaux systèmes d'enregistrement.

L'idée que ces organismes ne seraient pas responsables n'est tout simplement pas conforme à la réalité. Toutefois, si c'est le genre d'instrument que le gouvernement décide d'adopter pour renforcer l'obligation de rendre compte, la CCA aimerait beaucoup mieux qu'il soit intégré aux procédures que nous avons déjà mises en place pour la présentation de rapports. Toutefois, certains éléments du projet de loi nous inquiètent.

C'est à chaque organisation que doit revenir la responsabilité de présenter ces renseignements et non pas à Revenu Canada ou à un autre ministère. L'élargissement des fonctions de Revenu Canada ou de tout autre ministère entraînera des coûts supplémentaires au moment même où le gouvernement fédéral n'a pas les moyens de les assumer. La CCA est également d'avis que l'obligation de divulgation ne doit s'appliquer qu'à l'aide financière directe.

Les renseignements sur la rémunération des directeurs et des dirigeants devraient comprendre l'échelle de rémunération que chaque organisme attache à l'exposé de fonctions de chaque position. Cette divulgation serait conforme à l'esprit de transparence tout en assurant dans une certaine mesure la confidentialité des revenus personnels. Ces échelles sont largement utilisées par le gouvernement fédéral et ses organismes.

.1145

Les organismes sans but lucratif indépendants qui agissent en tant qu'entités autonomes contribuent grandement à la société canadienne. Ces organismes fournissent des services plus rapidement et à un coût inférieur que la plupart des gouvernements.

L'exploitation politique de tels renseignements pourrait amener certains à envisager de nouvelles directives législatives pour plafonner la rémunération des directeurs et des cadres supérieurs ou d'autres mesures qui porteraient atteinte à l'autonomie des organismes de charité sans but lucratif, ce qui aurait pour effet de les priver de l'indépendance dont ils ont besoin. Les membres de votre comité devraient évaluer le tort réel que ces organismes pourraient subir si ces renseignements étaient exploités à des fins politiques.

En tant que représentant des industries artistiques et culturelles, je suis convaincu que notre secteur montrera encore une fois que nous faisons collectivement preuve de responsabilité dans la gestion de nos ressources en ce qui concerne la rémunération des directeurs et des cadres supérieurs et tous les autres aspects de nos activités. Merci.

Le président: Merci, monsieur Kelly. Nous entendrons maintenant M. Rubin Friedman, directeur de B'nai Brith Canada.

M. Tom Gussman (vice-président national, président du comité des relations gouvernementales, B'nai Brith Canada): Merci, monsieur le président. Je suis Tom Gussman, vice-président national.

Le président: Je m'excuse.

M. Gussman: Je vais faire une courte introduction et ensuite M. Friedman présentera un exposé plus approfondi.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant le Comité permanent des opérations gouvernementales pour parler du projet de loi C-224.

En guise d'introduction, je vais vous donner un bref aperçu de B'nai Brith Canada et de son rôle dans le secteur du bénévolat.

Notre organisme est un organisme national de bénévolat qui existe au Canada depuis plus de 120 ans et qui constitue la principale organisation juive au pays. Nous faisons partie d'un organisme international créé il y a 150 ans et qui compte un demi-million de membres dans 54 pays.

À l'origine, B'nai Brith Canada est un organisme de secours mutuels au service des Juifs et de l'ensemble de la collectivité. Par l'entremise de plus de 60 sections locales dans tout le Canada et par l'entremise de ses bureaux régionaux, B'nai Brith Canada mobilise les bénévoles pour des causes méritoires, comme la préparation de paniers de provision de Pâques pour les personnes dans le besoin, de l'aide pour des activités des camps d'été pour les jeunes, l'établissement de liens avec la collectivité générale par l'organisation de dîners de Noël à l'intention des personnes âgées, etc.

B'nai Brith Canada et ses sections locales joue un rôle de premier plan dans la collecte de fonds en recevant les cotisations de nos membres, en donnant des dîners en hommage à certaines personnes, en organisant à des fins charitables, par les activités de la Fondation B'nai Brith et par d'autres moyens. Nous cherchons continuellement de nouvelles façons de lever des fonds à des fins charitables.

B'nai Brith dirige des ligues de sport récréatif, de quilles, de balle-molle, de hockey et de basket-ball auxquelles des milliers de Canadiens participent chaque année.

En plus de 30 ans, la Ligue des droits de l'homme de B'nai Brith Canada s'est mérité une réputation enviable pour son rôle dans la surveillance de l'éducation publique, dans la défense des droits de l'homme en général, pour sa lutte contre le racisme, l'anti-sémitisme et la discrimination au Canada. B'nai Brith a également lancé de nombreuses initiatives pour engendrer la tolérance et le respect mutuel entre tous les Canadiens.

L'Institut des affaires internationales s'efforce de promouvoir les droits de la personne à l'échelle internationale, de défendre les collectivités juives menacées, d'encourager de meilleures relations entre les Juifs et les autres peuples du monde entier et veille à ce que l'État d'Israël soit traité de façon équitable dans les tribunes internationales.

Nous dépendons lourdement de la contribution financière de nos membres et de leur participation bénévole à nos activités, et c'est dans cette perspective que s'inscrivent nos observations sur le projet de loi C-224.

Je demanderais maintenant à Rubin Friedman, notre directeur national des relations gouvernementales, de vous parler du projet de loi.

M. Rubin Friedman (directeur, Relations gouvernementales, B'nai Brith Canada): Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de nos observations sur cette question.

Comme plusieurs témoins l'ont dit avant nous, l'objectif de ce projet de loi n'est pas clair. Nous pourrions formuler de nombreuses hypothèses. Certains ont dit qu'ils supposaient que l'objectif du projet de loi est de faire en sorte que les organismes rendent des comptes.

Mais à quoi cela servira-t-il? Le projet de loi mentionne les organismes qui jouissent directement ou indirectement d'avantages fiscaux. En fait, tous ceux qui font un don à un organisme de charité obtiennent un avantage fiscal. De nombreuses entreprises bénéficient d'avantages fiscaux. Pourquoi a-t-on ciblé ce groupe en particulier à ce moment précis?

Tous les organismes de charité enregistrés doivent déclarer les sommes qu'ils reçoivent et leurs dépenses. Ils doivent, dans les formules qu'ils remplissent, indiquer leurs frais d'administration. Je suis d'accord pour dire qu'il ne devrait pas être difficile d'utiliser ces formules pour obtenir des renseignements sur les échelles de salaires, mais il doit appartenir à chaque organisation et organisme de charité enregistré de décider si ces renseignements doivent être rendus publics. Si le Parlement du Canada et le gouvernement décidaient de procéder autrement, ils s'ingéreraient à outrance dans la gestion des 70 000 organismes de charité qui sont tous des organismes bénévoles sans but lucratif. Je n'ai pas pu, en me fondant sur ce projet de loi, déterminer ce que coûterait une telle tâche.

.1150

Nous ne devrions pas oublier que les organismes bénévoles sont dirigés par des conseils d'administration dont les membres offrent volontairement leurs services. Ceux-ci sont juridiquement responsables pour le fonctionnement et les activités de l'organisme. Ils doivent obtenir une assurance responsabilité pour se protéger contre la faillite personnelle, dans l'éventualité où l'organisme dépenserait trop, ne s'inquiéterait pas de ses dettes envers ses créanciers ou ferait l'objet d'une poursuite. Il y a donc déjà de nombreux mécanismes intégrés pour assurer la reddition des comptes sans qu'il soit nécessaire de prendre d'autres mesures.

La plupart des organismes sont déjà transparents et démocratiques. Il est évident que les organismes qui ont des mandats et des structures transparents et démocratiques doivent rendre compte à leurs conseils d'administration, qui à leur tour rendent compte aux membres.

En général, le conseil d'administration est élu tous les deux ans. N'oubliez pas que les élections au Parlement ont lieu tous les cinq ans. Les membres des conseils d'administration qui ne s'inquiètent pas de leurs responsabilités se le font rappeler rapidement, puisqu'ils ne conservent pas leur poste. Lorsque l'organisme ne rend pas compte à ses membres, ceux-ci l'abandonnent et l'organisme disparaît.

Comme bien d'autres organismes, nous avons été obligés, au cours des cinq dernières années, de faire des choix difficiles en ce qui concerne nos programmes et nos employés. Nous croyons avoir agi de façon très responsable. Les membres du conseil d'administration rendent pleinement compte de leurs décisions aux membres. L'irresponsabilité financière dans un tel milieu est vite découverte et sanctionnée.

Nous ne comprenons toujours pas très bien quel effet aura la divulgation de la rémunération des cadres supérieurs ni quel intérêt public cela pourrait servir. À certains égards, cette mesure semble être une ingérence et elle s'ajoute à d'autres mesures semblables que divers gouvernements ont pris depuis quelque temps.

Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ont créé des entités qui ont le droit de recevoir des dons de charité. Ils l'ont fait en adoptant des lois dans leurs assemblées législatives respectives. Ces organismes jouissent de nombreux avantages que n'ont pas les associations populaires. Voilà une mesure que le gouvernement a déjà prise pour introduire une asymétrie dans le secteur des oeuvres de charité et du bénévolat.

Le gouvernement s'est également lancé à fond dans les lotteries comme moyen de lever des fonds. Le gouvernement de l'Ontario dirige maintenant un casino et nous nous demandons si les bingos ne suivront pas. Essentiellement, il devient difficile de voir la différence entre les organismes populaires bénévoles et certaines activités du gouvernement, sauf en ce qui concerne la nature de l'organisme et la rémunération que les employés reçoivent dans un cas et l'absence de rémunération des bénévoles, dans l'autre cas.

Nous pensons que ce projet de loi ne tient pas compte du contexte général. Nous nous demandons pourquoi un tel projet de loi autonome a été présenté. A-t-on entrepris un examen général de l'aide que reçoivent les organismes bénévoles ou les organismes de charité? Quels chiffres pourriez-vous nous fournir pour nous aider à comprendre le contexte général dans lequel cette mesure précise est censée s'inscrire?

Il faut savoir que bon nombre des difficultés auxquelles nous faisons face dans le secteur du bénévolat sont attribuables au fait que l'élaboration des programmes de subventions, du statut des organismes de charité, etc., a été faite de façon improvisée et fragmentaire sans faire le moindre lien entre ces diverses mesures. Voulons-nous reproduire ce genre de processus en prenant une mesure à la fois?

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant commencer la période de questions. Les représentants des trois organismes resteront à la table et les membres du comité pourront ainsi interroger n'importe lequel d'entre eux. Vous n'êtes pas obligés d'adresser vos observations ou vos questions à une personne en particulier.

Nous commencerons par le Bloc Québécois.

[Français]

M. Deshaies (Abitibi): Bonjour, chers amis.

.1155

J'aimerais poser ma première question à la présidente de l'Association des hôpitaux du Canada. Croyez-vous qu'il y a des organismes de charité financés par le public en général, ce qui n'est pas nécessairement votre cas, et qui peuvent frauder les gens par de la fausse publicité?

Par exemple, je suis fumeur et je décide de créer une association pour la protection des fumeurs. Je pourrais donc recevoir des cotisations importantes, empocher une bonne partie de ces revenus en tant qu'administrateur, directeur général, etc. et faire une petite campagne de publicité pour recommencer le même manège l'année suivante. Pensez-vous que ce scénario soit possible?

Mme Carol Clemenhagen (présidente, Association des hôpitaux du Canada): Oui, c'est possible. Je crois qu'il y a des cas documentés de cette façon de procéder. La fraude existe dans toutes sortes de domaines. Je ne sais pas si c'est une question plutôt sociale, mais ce n'est certes pas dans le cadre conceptuel de ce projet de loi.

M. Deshaies: Si vous acceptez qu'il existe des contrôles dans d'autres types d'entreprises - il y a, par exemple, des contrôles financiers au niveau de l'impôt sur le revenu pour les sociétés - , pourquoi n'y aurait-il pas un minimum de contrôle pour éviter que les gens se fassent frauder par une fausse publicité bien gentille? Il pourrait s'agir, par exemple, des enfants de l'Afrique, des sans-abri du Tiers monde, etc. où on envoie des sommes d'argent.

Mme Clemenhagen: Il n'y a pas de mesures contre la fraude; il y a cependant des pénalités une fois que la fraude a été découverte.

M. Deshaies: Comment diagnostiquer cette fraude si on n'a pas d'information?

Mme Clemenhagen: Il faudrait le demander à la GRC et non à l'Association des hôpitaux du Canada.

M. Deshaies: Je vous pose la question parce que les trois intervenants ici présents disent qu'il ne devrait pas y avoir de contrôle parce qu'ils s'autocontrôlent déjà. D'ailleurs, le problème n'est pas chez vous et je me demande pourquoi vous craignez l'ingérence alors que vous êtes très bien contrôlés. Je me pose également des questions afin de savoir si on reçoit l'argent directement ou indirectement. Le problème n'est pas tellement le projet de loi. Il s'agit de savoir jusqu'où les gens sont prêts à avoir un certain contrôle.

Je pense que M. Friedman voudrait répondre à ma question.

M. Friedman: J'aimerais ajouter qu'aucune étude n'a été faite pour savoir s'il y a plus de fraudes commises par l'entreprise privée que par les organismes de charité ou les gouvernements. Il y a plusieurs vérifications.

M. Deshaies: À ce moment-là, étant donné que le gouvernement, les fonctionnaires ou autres peuvent faire de la fraude, on va laisser faire les organismes bénévoles.

M. Friedman: Non. Tout ce que je veux dire, c'est que dans la société, il y a des manières de découvrir la fraude et d'obtenir l'information nécessaire pour conclure qu'il y a un problème. Les gens commencent à se plaindre. Comment peut-on savoir si quelqu'un n'a pas reçu un service qu'il a commandé? On le sait seulement lorsqu'il se plaint à la police. Alors, il existe dans notre société des mécanismes pour découvrir la fraude.

M. Deshaies: Le ministre du Revenu vous a-t-il suggéré d'ajouter certains renseignements à la déclaration annuelle que vous produisez, surtout dans votre cas, qui n'est pas le même que pour les hôpitaux? Par exemple, il pourrait s'agir de l'ensemble des rémunérations versées par rapport au total des revenus, ce qui serait assez explicatif. Si vous versez 150 000$ en salaires sur un revenu maximum de 200 000$, il y a des problèmes.

Pensez-vous que ce serait simple, que ça n'exigerait pas beaucoup d'effort et que ce serait aussi pertinent que d'y mettre des noms?

M. Friedman: Le défi dans ce que vous proposez, c'est que, par exemple, au niveau du travail de la Ligue des droits de la personne, il y a des avocats qui formulent plusieurs propositions et qui le font sans rémunération. Tout ça n'est pas reflété dans les ressources de l'organisme.

M. Deshaies: D'autres organismes disent la même chose que vous. Je sais que les gens qui font de l'intervention sur le suicide sont presque tous des salariés et qu'il n'y a pas de produit. Ce ne sera pas publié car il s'agit d'information confidentielle, mais j'aimerais bien savoir où va l'argent que je vous envoie chaque année. Je veux savoir si je me fais voler ou si c'est pour une bonne cause. Est-ce que je pourrais demander cette information? Est-ce que ce serait acceptable ou non?

.1200

M. Friedman: Je pense qu'il n'y aurait pas de problème si on trouvait une façon de refléter la participation des bénévoles dans ce rapport. Pour beaucoup de nos activités, on dépend tellement des bénévoles que le simple fait de faire état des salaires et des montants récoltés va fausser l'impression qu'on a de l'organisme.

M. Deshaies: Mais n'est-ce pas votre rôle que de montrer aux gens à qui vous donnez des services et où va l'argent, comme les hôpitaux doivent le faire?

M. Friedman: Oui. Comme je l'ai dit auparavant, on est assujettis à une vérification à chaque année.

M. Deshaies: Si on vous demande de mettre le total des salaires et des revenus et que vous pouvez le prouver, il n'y a pas de problème.

M. Friedman: Il est possible de le faire. Tout ce que je dis, c'est qu'il y a d'autres renseignements qui ne sont pas demandés dans ce formulaire et qui vont fausser l'information.

M. Deshaies: Mais on pourrait le faire simplement, pour ne pas vous surchager d'information. J'ai été bénévole pendant 20 ans et à la fin de l'année, je n'avais pas envie de remplir 18 000 formulaires en plus d'être bénévole.

M. Friedman: Évidemment.

M. Deshaies: Premièrement, je souhaiterais qu'on le fasse pour les entreprises qui ont suffisamment de fonds, pour que cela vaille la peine. Pour un montant de 200 000 $, il ne vaut même pas la peine de remplir un formulaire. Les gens qui reçoivent 350 000 $, 400 000 $ ou un million de dollars par année doivent être capables de remplir quelques petits formulaires.

[Traduction]

M. Kelly: Je vous signale que nous avons déjà des systèmes comptables en place. Revenu Canada vérifie fréquemment et au hasard les comptes des organismes de charité enregistrés et si on constate des irrégularités dans leurs comptes, on leur retire leur statut d'organisme de charté.

Pour ce qui est des organismes à but non lucratif qui reçoivent une aide financière d'un palier ou l'autre de gouvernement, l'aide qui leur est accordée, que ce soit pour un projet ou pour leur fonctionnement même, est tributaire d'une vérification annuelle de leurs comptes, et parfois même d'une vérification de projets précis.

On voit donc que les gouvernements étudient déjà de près les comptes des organismes de charité avant de leur donner de l'aide financière ou de leur accorder le statut d'organisme de charité. Aucun organisme ne s'opposerait au fait de devoir fournir des états vérifiés à Revenu Canada.

Le président: Êtes-vous sûr que ces états financiers sont toujours vérifiés, monsieur Kelly?

M. Kelly: C'est une exigence absolue dans le cas de notre organisme.

Le président: À ma connaissance, il ne s'agit cependant pas d'une exigence absolue pour tous les organismes de charité. Ils doivent produire des états financiers, mais ceux-ci n'ont pas nécessairement à être vérifiés.

M. Kelly: Le ministère auquel nous nous adressons pour obtenir de l'aide financière, soit le ministère du Patrimoine canadien, exige des états financiers vérifiés.

Le président: Vous avez dit que des mesures sont prises contre tout organisme qu'on soupçonnerait de malversation, mais est-ce bien vrai?

Disons que les organismes de charité ou les organismes à but non lucratif paient en moyenne leur directeur général 75 000$ par année. Supposons qu'un organsime soit dirigé par un homme ou une femme influent qui se verse comme salaire le double de cette somme, soit 150 000$. Nous dites-vous que le gouvernement pourrait faire remarquer à cet organisme qu'il verse un salaire trop élevé à son directeur général et le menacer de lui enlever son statut d'organisme de charité s'il ne réduit pas ce salaire?

M. Kelly: Pas vraiment.

Le président: Dans ce cas, qu'est-ce qui empêche l'organisme d'agir ainsi?

M. Kelly: Ses membres.

Le président: Mais si l'organisme ne s'oppose pas à verser un salaire deux fois plus élevé que le salaire moyen à son directeur général, le gouvernement n'y peut rien?

Mme Clemenhagen: Non, absolument rien.

Le président: J'avais cru comprendre que M. Kelly disait qu'on pouvait prendre des mesures contre l'organisme. Maintenant il semble dire le contraire.

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M. Kelly: Non. Ce que je disais, monsieur Harvard, c'est qu'il est tentant pour les dirigeants politiques d'essayer de réglementer les organismes à but non lucratif et les organismes de charité. Certains aimeraient certainement le faire. Personne ne s'oppose cependant à ce qu'on demande des comptes aux organismes de charité. Je crois que c'est très clair.

Je sais cependant ce qui va se produire si on demande aux organismes de charité de divulguer ce genre de renseignements. On va constater qu'il y a un grand écart dans les salaires qui sont versés à leurs directeurs généraux. Supposons qu'un organisme verse 150 000$ par année à son directeur général. Il serait peut-être possible de prévoir d'autres mesures de contrôle dans une autre mesure législative.

B'nai Brith soulève certainement un point très important. Si l'on veut vraiment se pencher sur la question du contrôle et de la reddition des comptes dans le secteur des organismes à but non lucratif et des organismes de charité, on devrait s'y prendre autrement qu'en adoptant les demi-mesures prévues dans cette loi.

M. Epp (Elk Island): Je vous remercie tous d'être ici. Comme je l'ai dit à d'autres groupes, je crois fermement aux organismes de charité et au bénévolat. J'ai moi-même oeuvré dans ce domaine toute ma vie. Je considère que je fais maintenant un autre type de bénévolat.

J'aimerais vous demander à tous quelles sont les sources de revenu de vos organisations?

Mme Clemenhagen: L'Association des hôpitaux du Canada est une fédération composée de 11 associations d'hôpitaux provinciales et territoriales dont nous recevons des cotisations chaque année. Environ 24 p. 100 de notre budget provient de ces cotisations. Les 75 p. 100 qui restent proviennent de nos programmes d'éducation et de nos publications pour lesquelles il y a recouvrement de coûts. Voilà d'où nous vient notre budget. Nous générons donc nous-mêmes certains revenus et nous percevons des cotisations auprès de nos associations provinciales.

M. Epp: Vos membres sont financés par les contribuables.

Mme Clemenhagen: Les associations provinciales perçoivent des cotisations des différents hôpitaux qu'elles représentent ainsi que des établissements de soins de longue durée du pays.

M. Epp: Et ceux-ci sont financés par les contribuables.

Mme Clemenhagen: Vous avez raison.

M. Epp: Recevez-vous directement des fonds du gouvernement fédéral?

Mme Clemenhagen: Seuls certains de nos projets de recherche sont financés par le gouvernement.

M. Epp: Aux termes d'une entente contractuelle.

Mme Clemenhagen: Oui.

M. Kelly: Nos revenus proviennent des cotisations de nos membres et de la vente de nos publications. Nous recevons aussi certaines subventions du gouvernement provincial. Nous concluons aussi des ententes contractuelles d'achat de services avec le gouvernement fédéral.

M. Epp: Vous recevez donc de l'argent des contribuables même si vous fournissez des services en retour.

M. Kelly: Et les contribuables reçoivent des services à un coût que le gouvernement ne pourra jamais offrir.

M. Epp: On peut supposer que les contribuables reçoivent des services à hauteur des impôts qu'ils versent. C'est vrai qu'ils se demandent parfois s'ils en ont pour leur argent. Mais je crois que c'est habituellement le cas.

M. Gussman: Nos revenus proviennent des cotisations de nos membres, des jeux de charité et des dons de nos membres et de la population dans son ensemble. Le gouvernement nous accorde des fonds pour certains projets spéciaux, mais pas de façon permanente.

M. Friedman: Nos revenus sont assez modestes.

M. Epp: Vous ne recevez vraiment aucune aide financière directe du gouvernement?

M. Friedman: Comme Tom l'a expliqué, ces fonds nous sont accordés pour des activités précises. Nous avons déjà touché des fonds de ce genre dans le passé.

M. Epp: Ces fonds sont versés pour des activités précises. Est-ce comme un contrat?

M. Friedman: Oui.

M. Epp: De toute évidence, vos membres appuient vos activités. Les milieux culturels nous ont dit que la meilleure façon d'exiger des comptes des organismes à but non lucratif, ce serait par l'intermédiaire des rapports annuels qu'ils envoient à leurs membres.

Les informations que contiennent ces rapports annuels suffisent-elles, à votre avis, pour régler le problème auquel le projet de loi de John Bryden s'attaque?

.1210

Aucun des organismes de charité pour lesquels j'ai travaillé ne comptait d'employés rémunérés. Nous étions tous des bénévoles. En fait, notre bénévolat nous coûtait quelque chose. Les gens font souvent 200 kilomètres pour se rendre à une réunion et ne réclament aucuns frais. Voilà donc ce qu'il en est pour la plupart des organismes de charité, mais certains d'entre eux ont le statut d'organisme de charité enregistré et soit reçoivent des fonds directement du gouvernement, soit en reçoivent indirectement en pouvant émettre des reçus aux fins d'impôt, ce qui revient à une autre façon de dépenser l'argent des contribuables puisque pour chaque mille dollars de reçus émis, cela coûte 290$ au contribuable.

Nous estimons donc que le contribuable a le droit de savoir où va cet argent. Je crois que les directeurs généraux de 6 à 8 p. 100 des organismes de charité touchent un salaire de plus de 75 000$ par année, ce qui représente beaucoup d'argent pour ceux qui ont du mal à boucler leur budget. John Brydon aimerait savoir pourquoi ceux qui appuyent les organismes de charité n'auraient pas le droit de connaître ce genre de renseignements.

Qu'en pensez-vous?

M. Kelly: Premièrement, j'aimerais faire remarquer que les organismes de charité ne sont pas les seuls à obtenir un traitement spécial aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu. Je songe au fait que les partis politiques peuvent aussi émettre des reçus pour fins d'impôt. Les partis politiques vont-ils divulguer les salaires qu'ils versent à leurs employés? Les contribuables ont-ils d'autres moyens que lors des élections générales ayant lieu tous les cinq ans de demander des comptes aux partis politiques au sujet de leurs opérations quotidiennes et des décisions qui sont prises quant à la façon dont ils dépensent leurs fonds...

M. Epp: Puisque vous avez posé la question, permettez-moi de vous dire que notre parti imposerait des exigences beaucoup plus poussées aux partis politiques. Nous vous demandons de divulguer certains renseignements vous concernant. Si ce n'était que de nous, les partis politiques n'auraient pas le droit d'émettre des reçus pour fins d'impôt.

M. Friedman: Vous supprimeriez le...

M. Epp: Oui, le gouvernement fédéral ne devrait pas financer d'aucune façon les activités politiques. La situation actuelle est tout à fait inacceptable, mais c'est une autre affaire.

M. Kelly: En effet. Je dis seulement qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé. Ainsi, la Loi de l'impôt sur le revenu permet aux associations d'athlétisme amateur enregistrées de percevoir des dons de charité et d'émettre des reçus aux fins d'impôt. Il est cependant vrai que la plupart de ces organismes sont sans doute des organismes à but non lucratif qui seraient donc visés par ce projet de loi.

M. Epp: Oui.

Mme Clemenhagen: Permettez-moi de dire quelques mots. On peut peut-être se demander la raison pour laquelle les hôpitaux et l'organisme qui les représente, soit l'Association des hôpitaux du Canada, sont considérés comme des organismes de charité? C'est évidemment parce que nous jouons un rôle dans le domaine de la promotion de la santé et que nous offrons des services éducatifs dans ce domaine. C'est notre raison d'être. Voilà pourquoi nous avons le statut d'organisme de charité à l'heure actuelle et pourquoi nous espérons continuer à l'avoir dans l'avenir.

Prenons le cas des hôpitaux et de l'AHC. Ils sont administrés par des conseils d'administration que la loi oblige à s'occuper non seulement des finances de l'organisation, mais aussi de la qualité des services qu'elle offre. Il existe toutes sortes de mécanismes de reddition des comptes qui vont de la comptabilité administrative et des états financiers vérifiés aux programmes d'accréditation en passant par les examens menés par le conseil d'administration et les comptables professionnels.

La divulgation des salaires versés aux administrateurs des hôpitaux ou au président de l'Association des hôpitaux du Canada est un faux problème. Beaucoup de conseils d'administration ont déjà des politiques en place à cet égard. Ce ne sont pas des renseignements que les gens cherchent normalement à cacher.

Nous soutenons que le projet de loi proposé ne favorisera en rien un meilleur processus de reddition des comptes au sein des organismes qui offrent des services de santé. Le fait de rendre publics les salaires des administrateurs des hôpitaux n'est pas la façon de veiller à ce que l'argent des contribuables soient dépensés comme il convient dans le domaine dans la santé. Il s'agit essentiellement de renseignements sans importance qui pourraient figurer dans une base de données quelconque de Revenu Canada. Peut-être que ce renseignement peut être utile, mais j'estime que le fait de créer une autre structure administrative pour recueillir ces renseignements et pour veiller à l'application de cette loi, ne constitue pas, à l'heure actuelle, la meilleure façon de gérer des ressources gouvernementales rares.

.1215

Le président: Monsieur Epp, vous dites que 6 p. 100 des employés des organismes de charité gagnent au moins 75 000$ par année, mais je ne vois pas quel sens on peut donner à ce renseignement à moins qu'on ne sache quelles sont les personnes en cause.

Ainsi, ce projet de loi s'appliquerait de la même façon aux présidents d'universités qu'aux présidents des hôpitaux. Je ne pense pas que qui que ce soit s'étonnerait que le président d'un important hôpital qui compte des centaines et des centaines d'employés et dont le budget s'élève à plusieurs millions de dollars touche un salaire de 75 000$ ou de 80 000$ par année. Ce chiffre de 6 p. 100 est donc très trompeur si nous ne savons pas à qui il s'applique.

M. Epp: On pourrait le savoir.

[Français]

M. Duhamel (Saint-Boniface): Je vous remercie tous d'être venus ainsi que pour les présentations que vous avez faites.

Je vais vous demander votre point de vue sur les commentaires que je ferai. Il me semble que ce projet de loi a suscité beaucoup d'intérêt et a soulevé bon nombre de préoccupations. Si j'ai bien compris, non seulement d'après les exposés d'aujourd'hui, mais aussi d'après ceux qui ont été présentés précédemment au Comité, les gens sont d'accord sur les points suivants: il doit y avoir une plus grande transparence et une plus grande imputabilité. Mais soyons raisonnables. N'allons pas jusqu'à créer une nouvelle bureaucratie et à écraser ces organismes.

Il y a des gens qui ont aussi indiqué qu'il pourrait y avoir une ingérence allant au-delà de ce qui est juste. Quelle est la solution?

[Traduction]

Je ne pense pas que ce projet de loi recueillie beaucoup d'appui. Il a été question de le modifier légèrement, mais cela sera peut-être difficile. Je pense qu'il n'est pas non plus possible de simplement le laisser tomber. Quelle est donc la solution?

J'aimerais savoir ce que vous pensez de ceci. Quand quelqu'un se lance en affaires, on lui permet pendant un certain temps d'accuser des pertes, mais dès qu'il commence à faire des revenus, on ne lui permet plus de le faire. Il existe donc des mécanismes de contrôle dans le secteur privé.

Je crois que vous avez tous une idée de ce qui pourrait constituer une solution acceptable. Je ne sais pas dans quel ordre les témoins devraient intervenir à ce sujet, monsieur le président, mais j'aimerais que nous nous penchions sur une solution. Le projet de loi ne suscite pas beaucoup d'appui et soulève certains problèmes que les organisations que nous avons entendues ont d'ailleurs soulignés. Quelle est la solution qu'on nous propose?

Mme Clemenhagen: Les mécanismes administratifs voulus existe déjà. Tous les organismes de charité remplissent une déclaration annuelle.

L'AHC vous recommande de modifier ce formulaire pour qu'y figurent les renseignements dont vous pensez avoir besoin. Nous ne savons pas exactement de quels renseignements il s'agit, mais peut-être que certains renseignements utiles pourraient être ajoutés à ce formulaire qui seraient traités par les structures administratives déjà en place.

M. Kelly: Nous sommes aussi de cet avis, mais nous irions probablement encore plus loin. Comme M. Harvard l'a souligné, les organismes à but non lucratif ne font pas tous vérifier leurs états financiers. Le comité pourrait peut-être recommander que les états financiers de toutes les sociétés à but non lucratif enregistrées fassent l'objet d'une vérification annuelle et que cette vérificationn soit rendue publique.

M. Friedman: Ce qui ne ressort pas vraiment des histoires qu'on a entendues jusqu'ici, c'est l'importance du problème que vise à régler ce projet de loi. S'agit-il d'un éléphant ou d'une souris? Il est impossible de le dire d'après les renseignements dont nous disposons.

Les gens ont l'impression désagréable qu'un problème se pose peut-être vraiment. C'est vrai qu'il y a eu quelques cas de fraude dans le milieu des organismes de charité. Les gens ont donc l'impression qu'un problème se pose, mais nous ne savons pas vraiment lequel.

.1220

On estime, par exemple, qu'il y a plus de 70 000 organismes de charité enregistrés. Combien d'argent en moyenne ces organismes recueillent-ils vraiment? Peut-être que certains n'en recueillent pas du tout. Nous ne le savons pas vraiment. Sait-on vraiment si certains organismes de charité recueillent des fonds?

Voilà l'un des problèmes que ne règle pas ce projet de loi. Nous ne savons pas vraiment quelle est l'ampleur du problème.

Pour ce qui est du reste, nous appuyons les recommandations qui ont été formulées par d'autres témoins.

M. Duhamel: Cela m'amène à mon deuxième point.

La difficulté, c'est peut-être que nous avons affaire tant à un éléphant qu'à une souris. Ce projet de loi se fixe plusieurs objectifs. Quelques exemples: quel est le salaire de certains particuliers et les mécanismes de reddition des comptes conviennent-ils? Plusieurs autres questions viennent à l'esprit.

Peut-être qu'il nous faudrait démêler les choses, car il nous sera très difficile d'en arriver à une solution avant que nous ne sachions exactement quels sont les objectifs que nous visons. Je crois que c'est ce qui ressort de tout ce qui a été dit.

Le projet de loi vise plusieurs objectifs. Ils ne sont pas nécessairement mauvais, mais ils sont peut-être difficiles à atteindre sans que cela engendre des coûts élevés. Il sera extrêmement difficile de proposer des solutions cohérentes, éclairées, complètes et raisonnables jusqu'à ce que nous sachions exactement quels sont les objectifs visés.

Mme Clemenhagen: Je crois que vous avez absolument raison de dire que les objectifs visés ne sont pas très clairs. C'est comme si on mettait l'accent sur le salaire des administrateurs, mais qu'en fait c'est d'autres renseignements qu'on cherche à obtenir.

Je n'ai pas vraiment beaucoup réfléchi à la question, mais je ne pense pas qu'on s'y prenne de la bonne façon. Je ne pense pas que ces renseignements permettent vraiment d'établir si un orgasnime s'acquitte vraiment de ses responsabilités en ce qui touche la reddition des comptes ou s'il utilise à bon escient les fonds publics qu'il reçoit. On ne peut pas non plus établir s'il y a des abus.

Personnellement, je ne vois aucun intérêt dans le fait de savoir quel est le salaire du directeur général d'un orgnisme donné parce que tout dépend de la taille de cet organisme. Je ne pense pas qu'on puisse dire que 75 000$ par année soit un salaire trop élevé pour une personne qui gère un budget de 900 millions de dollars, ce qui serait le cas de certains organismes régionaux de services de santé. On pourrait se poser des questions sur la compétence d'une personne à laquelle on verserait un salaire aussi bas.

Tout cela dépend de beaucoup de facteurs. Peut-être qu'il s'agirait d'un salaire trop élevé dans le cas d'un autre organisme.

M. Duhamel: Revenons à l'exemple du secteur privé. Je ne prétends certainement pas être un spécialiste de la fiscalité, mais je crois qu'il y a toujours quelqu'un qui compare les revenus d'une entreprise aux déductions qu'elle réclame. On pose toujours des questions à ceux qui réclament un peu trop de déductions.

Je vais maintenant vous poser une question à laquelle je n'ai pas de réponse, ce qui est toujours un peu dangereux en politique. Conviendrait-il de comparer les dépenses engagées au titre des salaires et autres postes aux sommes recueillies? On semble en effet craindre que certains organismes recueillent très peu de fonds si l'on compare ces derniers aux dépenses qu'ils effectuent.

C'est peut-être le cas au début parce que ces organismes doivent mettre en place des mécanismes et se donner des structures, mais après un moment, on est en droit de se demander ce qui ne va pas si cet organisme dépense plus que l'argent qu'il recueille.

Mme Clemenhagen: Sauf dans le cas des fondations, la raison d'être des organismes à but non lucratif est de recueillir des fonds et de réduire au minimum les dépenses administratives.

M. Duhamel: C'est lorsque c'est l'inverse qui se produit que les gens s'inquiètent.

Prenons un exemple tout à fait fictif. Supposons que je sois le responsable des levées de fonds d'un organisme et que je touche un salaire de 60 000$. Si cet organisme ne recueille que 20 000$ en dons, on est en droit de demander des explications.

Dans l'exemple que je viens de vous donner, je suis sûr que quelqu'un aurait demandé des explications il y a longtemps. Voilà pourquoi je pose la question.

Le président: Il est vrai que nous avons peut-être affaire tant à un éléphant qu'à une souris.

M. Duhamel: C'est ce que j'ai dit. Vous ne pouvez pas simplement me voler mes propos.

Le président: Il faudra peut-être faire des calculs et se demander ce qui pourrait être considéré comme un rapport acceptable entre dépenses et sommes recueillies.

.1225

[Français]

M. Bellemare (Carleton - Gloucester): Le député qui a présenté le projet de loi n'est malheureusement pas ici pour répondre aux questions. Il y en a de bonnes qui sont posées, entre autres celles qui concernent les buts et objectifs du projet de loi. J'ai eu l'occasion d'en débattre avec ce député; je soutenais le point de vue opposé au sien. Il a amorcé le débat, mais malheureusement, le travail n'a pas été bien préparé au début.

J'aimerais demander aux témoins s'ils sont d'accord qu'il doit y avoir de la transparence et de l'imputabilité.

[Traduction]

M. Kelly: Oui, absolument.

[Français]

M. Bellemare: J'aimerais maintenant savoir si on doit dévoiler ou publier ces renseignements. À mon avis, ce sont deux choses très différentes. Devez-vous publier, par exemple, toutes vos dépenses, incluant les détails sur les salaires? Entre dévoiler et publier, il y a une différence selon moi. D'après vous, quelle est-elle?

M. Friedman: On a déjà discuté des problèmes que ça peut créer sous l'angle de la concurrence entre les organismes, sous l'angle de la différence qui existe entre les organismes actuels. C'est surtout cela.

M. Bellemare: Très bien. D'autres ont exprimé à peu près la même opinion.

Est-ce que, selon vous, il existe différentes sortes d'organismes bailleurs de fonds? Les groupes de bénévoles qui veulent offrir un service quelconque doivent amasser des fonds. D'après moi, il y a différents niveaux ou différents genres de bailleurs de fonds. Les groupes qui sont témoins aujourd'hui sont d'énormes organismes, et tous les députés et tous les citoyens du Canada seraient d'accord qu'on ne les chicane pas sur des détails parce qu'ils sont bien organisés et que, dans leur cas, l'imputabilité et la transparence existent déjà. Vous êtes bien organisés.

Cependant, le député m'a donné certains exemples, comme celui d'un organisme qui recevait une énorme somme d'argent du gouvernement, qui ne tenait qu'une seule activité visible au cours de l'année, celle où son exécutif se réunissait peut-être une fois par année, disons pour dramatiser, à Jasper. D'après lui, le gouvernement ne devrait pas contribuer ces fonds.

Ce qu'on aimerait savoir, c'est si quelqu'un touche un salaire. J'ai appris qu'aux États-Unis, des gens, pas des gens pauvres ou démunis, mais des gens bien à l'aise, fondent des organismes qui sont dans le vent. Par exemple, vous avez des ligues des droits de la personne. Quelqu'un pourrait s'en inspirer pour fonder la ligue des droits des chats dans sa municipalité, parce que cette dernière veut faire passer un règlement. Toutes les personnes qui aiment les chats vont envoyer des contributions à une personne qui s'annonce dans le journal.

Il peut y avoir pire encore: la ligue des droits des veuves âgées. Il pourrait y avoir un organisme spécialisé dans le repérage des veuves âgées pour pouvoir leur soutirer de l'argent et se payer un bon salaire, pour rendre un service absurde.

Ce que je devine, dans le projet de loi de ce député, c'est qu'il devrait permettre d'identifier immédiatement les gens qui font partie de programmes de bénévolat ou d'organismes bailleurs de fonds qui ne fonctionnent que pour leur propre profit. Les organismes du genre du vôtre sont de ce fait exclus.

Pourriez-vous me faire connaître vos commentaires sur ce point?

.1230

[Traduction]

M. Kelly: La Loi de l'impôt sur le revenu n'accorde pas le statut d'organisme de charité à un groupe dont l'objectif semble essentiellement axé sur l'intérêt personnel. Il s'agit-là d'un principe appliqué à la lettre. On ne peut même pas obtenir de numéro d'enregistrement au titre d'organisme de charité, s'il existe le moindre doute que l'on poursuit des intérêts personnels. Il faut remplir au moins un ou les quatre critères prévus en common law, pour obtenir le statut d'organisme de charité.

Dans notre secteur, par exemple, il existe la Fondation Jean-Pierre Perreault, qui est une école de danse, dont M. Perreault est le chorégraphe. Son organisme n'a pas obtenu le statut d'organisme de charité bien que cela en soit un, car le nom de Jean-Pierre Perreault figurait dans celui de l'organisme et que, selon les responsables, cela témoigne d'une prépondérance d'intérêts personnels. On lui a donc refusé ce statut.

Il existe donc des instruments dans la loi qui sont appliqués et qui empêchent la société de protection ou de promotion des chats quel que soit son objectif, d'avoir droit à des avantages.

Mme Clemenhagen: L'un des problèmes n'est peut-être pas tant de savoir qui est le bénéficiaire des fonds mais plutot quel organisme gouvernemental alloue des fonds à des organismes qui ne se réunissent qu'une fois par an et qui ne donnent aucune preuve concrète de leurs activités. Un organisme de charité en bonne et due forme saura étayer ses arguments en vue d'obtenir des fonds et rendre compte de ses deniers. Il y a peut-être également du travail à faire de l'autre côté.

M. Friedman: Je voudrais simplement dire que j'appuie fortement le principe du premier exemple que vous avez cité, à savoir qu'un organisme recevait des fonds du gouvernement. Je conviens qu'il y a de l'abus, en l'occurrence, et qu'il faut vérifier ce genre de chose. Cet organisme n'aurait pas dû, au départ, obtenir de fonds. Je ne sais pas comment il s'est débrouillé pour y parvenir. Il serait intéressant de le savoir. Il y a peut-être, au départ, une question d'influence politique.

Le président: Au cas où vous ne l'auriez pas vu, monsieur Bellemare, je vous signale que les organismes de charité doivent remplir une annexe pour Revenu Canada. L'une des parties s'intitule «Calcul permettant d'établir si un organisme de charité a atteint son objectif en matière de dépenses». Autrement dit, il est impossible qu'un organisme de charité consacre 95 p. 100 de ses revenus au traitement des employés. Il y aurait de toute évidence quelque chose qui cloche et qui ne serait pas compatible avec le quota auquel est assujetti un organisme de charité.

M. Epp: J'ai une première brève question à poser aux représentants de B'nai Brith.

Nos témoins sont accompagnés aujourd'hui de deux personnes qui s'occupent de relations gouvernementales. Pourquoi est-ce nécessaire? Je vous considère comme un organsime de charité. Pourquoi vous faut-il faire appel à des gens qui s'occupent de relations gouvernementales?

M. Gussman: Je ne suis pas certain de bien comprendre votre question. Je suis le président national du Comité des relations gouvernementales. Je suis bénévole et je ne reçois aucune rémunération de B'nai Brith. En fait, je dois même y aller de ma poche, au même titre que vous.

M. Epp: En effet.

M. Gussman: Les relations gouvernementales englobent tous nos secteurs d'activités, qu'il s'agisse des droits de la personne, des affaires internationales, des services communautaires, et autre chose du même genre.

Nous faisons affaire avec des responsables de tous les paliers du gouvernement. Rubin n'est pas bien rémunéré, mais il fait partie des employés rémunérés de l'organisme qui travaille sans doute entre 80 et 90 heures par semaine.

M. Epp: J'ai vu son visage s'éclairer lorsque quelqu'un a mentionné 75 000$.

M. Gussman: Je pense qu'il aimerait cela.

M. Epp: J'aimerais vous poser à tous une question. Qu'il s'agisse de remplir une case dans un formulaire destiné au gouvernement et que cela soit du domaine public ou qu'il s'agisse d'un état produit chaque année, avez-vous des objections précises à l'idée de divulguer les traitements, disons, des cinq employés qui gagnent le plus dans votre organisme ou de toute personne qui gagne plus de 75 000 $? Avez-vous des objections à fournir ce renseignement?

M. Isabelle: En ce qui concerne les conseils d'administration des hôpitaux, nous avons pour politique de dévoiler l'échelle de traitement du directeur général ou des cadres supérieurs de l'organisme. Cela semble être l'usage.

Mme Clemenhagen: Il s'agit donc de l'échelle de traitement et non du traitement exact d'une ou plusieurs personnes.

M. Epp: Oui, et vous n'avez rien contre cette idée?

M. Isabelle: Non.

M. Kelly: Nous n'avons aucune objection car nous n'avons rien à déclarer.

Par ailleurs, nous sommes parfaitement d'accord avec nos collègues au sujet de l'échelle de traitement.

.1235

M. Epp: Dans le mémoire de la Conférence canadienne des arts, il est dit ceci: «La proposition de M. Bryden exigerait une structure bureaucratique très importante qui coûterait des millions de dollars de plus». Voulez-vous dire que cela coûterait des millions de dollars au gouvernement ou à l'organisme?

M. Kelly: Au gouvernement. Si l'on envisage d'établir une nouvelle forme de rapport ainsi que des mécanismes d'application très clairs et stricts, on parle de recevoir des milliers de documents, de vérifier que les dossiers sont complets, d'accuser réception, d'envoyer un deuxième avis aux non-déclarants, d'entreprendre des procédures légales à leur égard au besoin, et d'imposer les sanctions nécessaires. Il est impossible de le faire sans frais dans le cadre du système actuel.

M. Epp: Si nous répondions que l'on pourrait atteindre l'objectif de ce projet de loi en ajoutant une ou deux lignes au formulaire actuel, cela ne coûterait pas aussi cher, et il n'y aurait pas d'objection.

M. Kelly: Aucune.

M. Epp: Les contribuables seraient peut-être également satisfaits.

Mme Clemenhagen: Les contribuables s'inquiéteraient peut-être à l'idée qu'il a fallu saisir un comité d'un projet de loi, tenir des audiences et inviter des groupes à comparaître. Cela coûte de l'argent. Il aurait peut-être été souhaitable d'envisager un peu plus tôt cette solution administrative avant d'entreprendre tout ce processus.

M. Epp: En effet. C'est effectivement une des choses auxquelles il nous faut réfléchir.

J'ai une dernière question au sujet des organismes, conseils d'administration, etc.. Un bon nombre de témoins qui ont comparu nous ont dit: Nous avons un conseil d'administration. Nous rendons des comptes. Nous sommes honnêtes. Tous les témoins qui ont comparu jusqu'ici ont dit qu'ils n'étaient coupables d'aucune erreur. Ceux qui le sont ne se présentent pas devant notre comité, monsieur le président. C'est une possibilité.

Qu'en pensez-vous? M. Bryden et d'autres, outre certains Canadiens qui m'ont parlé parce que je siège au comité, s'inquiètent à l'idée que certaines personnes utilisent le statut d'organisme de charité pour se mettre dans la poche plus de deniers publics que ce à quoi ils ont droit. Qu'en pensez-vous? Est-ce totalement faux et n'existe-t-il personne dans ce cas? S'il y a des abus, dans quelle proportion? Quelle est l'ampleur du problème?

M. Isabelle: Dans le domaine statistique, on dit souvent que les marges d'erreur sont rarement supérieures à 3 p. 100. Autrement dit, 97 p. 100 des organismes, qu'il s'agisse d'hôpitaux ou d'organismes comme le vôtre, sont au-dessus de tout soupçon, font preuve de transparence, etc. Pour ma part, je serais très préoccupé si l'on envisageait de créer toute une bureaucratie en vue d'obtenir des renseignements auprès de ces 97 p. 100 d'organimes uniquement parce qu'un petit groupe de gens se livrent à des abus.

M. Epp: Remarquez, il y a également 98 p. 100 de la population qui n'est pas incarcérée et je ne pense pas que l'on propose de démanteler notre système judicaire et correctionnel pour cette raison.

M. Isabelle: Je ne veux pas me lancer dans une discussion sur le système pénal. J'ai travaillé pendant un certain temps pour Service correctionnel Canada, et je ne suis pas très fier du bilan de notre pays relativement à son approche punitive. Sur les 42 pays de l'OCDE, nous venons au onzième rang quant au nombre de détenus.

M. Epp: Très bien. Je n'aurais jamais dû faire cette dégression.

Des voix: Oh, oh!

M. Epp: Revenons-en au problème. Quelle est son ampleur?

Mme Clemenhagen: Votre remarque est intéressante. Pourquoi met-on des gens en prison? Parce qu'ils se sont rendus coupables d'un acte criminel. Ici, nous essayons de concevoir une loi qui porte sur toute une gamme d'organismes non pas parce qu'on s'est aperçu que ces derniers ont fait quelque chose de mal, mais simplement pour obtenir des renseignements supplémentaires. Si le véritable objectif est donc d'empêcher la fraude et l'activité criminelle, il faut s'attaquer au problème grâce aux mécanismes déjà existants avec l'aide des services de police, qui recherchent les fraudeurs.

M. Murray (Lanark - Carleton): En fait, M. Epp a abordé bon nombre des questions que je voulais poser.

Je vous remercie de votre présence.

.1240

Je ne suis pas certain d'avoir bien compris la remarque faite il y a quelques instants par Mme Clemenhagen au sujet des dépenses liées à la comparution devant un comité. Voulez-vous dire que les contribuables seront mécontents que nous vous ayons invités à comparaître devant notre comité?

Mme Clemenhagen: Ce ne sont pas les contribuables qui vont devoir payer ces frais dans votre cas. Il doit toutefois en coûter assez cher de préparer un projet de loi. Veuillez excuser mon franc-parler, mais je pense que votre comité a d'autre chats plus importants à fouetter. Il existe de véritables problèmes dans notre pays, en tout cas dans le domaine des soins de santé, sur lesquels porter votre attention. Je pense que, en l'occurence, on n'a peut-être pas utilisé à bon escient les maigres ressources dont nous disposons.

M. Murray: Le projet de loi a été adopté à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes parce qu'un nombre de députés suffisant estimaient qu'il y a un problème dans ce domaine. Nous avons suffisamment de preuves de l'existence d'un problème en matière d'obligation de rendre compte. Vous dites que nous devrions nous pencher sur cette question comme s'il s'agissait d'un cas de fraude ou d'activité criminelle. Ce n'est pas notre but. Il s'agit de l'affectation de deniers publics à des organismes.

J'ai trouvé très pertinente la remarque de M. Friedman qui a déclaré que lorsque les membres d'un organisme abandonnent celui-ci, l'organisme disparaît. Je trouve que c'est tout à fait normal. En fait, à mes yeux, c'est là le coeur même du problème. Il existe des organismes qui prétendent représenter de vastes groupes de Canadiens, mais lorsqu'on examine de plus près leurs dossiers, on constate qu'ils comptent très peu de membres et reçoivent peut-être d'importants fonds publics. C'est ce qui a déclenché tout ce débat.

La plupart des Canadiens approuvent l'étude de cette question par le comité. Nous ne sommes pas là pour nous attaquer à des organismes de charité comme ceux que vous représentez, mais il y a des cas d'abus. C'est pourquoi nous avons entrepris cette étude.

Mes collègues ont déjà posé la plupart des questions que j'avais, mais cela revient essentiellement à un problème de protection des renseignements personnels, n'est-ce pas? Je ne vois pas les millions de dollars en frais de rapport. Je pense qu'il s'agit d'un renseignement qui tient sur une ligne d'un document et c'est tout ce qu'on vous demande.

Mme Clemenhagen: Pas si le projet de loi est adopté. Celui-ci exige une structure de rapport précise uniquement pour les traitements des employés, outre ce qui se fait déjà au niveau administratif dans le rapport annuel...

M. Murray: On peut très bien obtenir ce renseignement en remplissant une simple ligne. Cela ne coûte pas des millions de dollars aux cinq employés les mieux rémunérés de certaines sociétés pour indiquer leurs traitements à la Commission des valeurs mobilières et de la bourse, par exemple. À mon avis, ce système ne doit pas nécessirement coûter les yeux de la tête et loin de nous l'idée de recommander une mesure susceptible de coûter près de 1 million de dollars. Il n'en est pas question.

Je voudrais en revenir encore une fois à ce qui m'apparaît être le coeur du problème. C'est une question de protection des renseignements personnels. Autrement dit, s'il est possible d'adopter une loi qui ne coûte pas les yeux de la tête à mettre en vigueur et qui permette d'obtenir des échelles de traitement plutôt que le montant de traitement précis, vous n'auriez guère d'objection. Ai-je raison de penser ainsi? En fait, c'est une question.

Mme Clemenhagen: Ce n'est pas cet aspect de la question qui me préoccupe. Je ne suis pas contre l'idée de dévoiler les traitements. Si vous voulez connaître le mien, je me ferai un plaisir de vous l'indiquer.

M. Murray: Nous parlons d'échelle de traitement.

Mme Clemenhagen: D'échelle de traitement. La question ne se limite pas à cela. Par exemple, dans le projet de loi récent sur les mesures budgétaires, les paiements de transfert aux provinces au titre de la santé doivent être réduits de 7 milliards de dollars. Lorsque je vous ai entendu dire que cela ne coûtera pas beaucoup plus cher et que nous nous contenterons d'ajouter ce renseignement car il est utile de le connaître, cela m'inquiète un peu, car je crois que nous pouvons utiliser nos fonds publics très restreints à bien meilleur escient.

M. Murray: Lorsque nous constatons que certains organismes profitent des deniers publics qui leur sont alloués, nous supprimons leur financement et économisons cet argent. C'est en gros ce qui se produirait.

Mme Clemenhagen: C'est ce que vous devriez faire.

M. Murray: C'est ce que nous faisons, c'est justement là-dessus que porte le débat. Il existe suffisamment d'exemples d'organismes qui...

Mme Clemenhagen: Je ne vois pas en quoi le fait de demander à un organisme de déclarer le traitement de son directeur général va vous être utile. Il faudra mettre sur pied un processus très complexe pour essayer d'approfondir les choses à partir du traitement que je déclarerai, pour voir si l'Association canadienne des hôpitaux gère convenablement ses ressources globales...

M. Murray: Je le répète, ce ne sont pas les organismes comme le vôtre qui posent des problèmes. Lorsqu'un groupe demande des fonds au gouvernement fédéral, ce dernier examine sa situation financière, voit combien il dépense dans différents postes, et notamment le traitement des employés. S'il s'avère que l'organisme compte dix membres dans le pays et que ces derniers se versent 90 000$ par an, c'est peut-être la preuve que l'organisme ne jouit pas d'un vaste appui dans notre pays. Pourquoi l'ensemble des contribuables devraient-ils donc le financer? C'est à ce genre d'organismes que nous pensons et non aux associations d'hôpitaux ou aux conseils des arts.

.1245

M. Friedman: Tout le monde est d'accord avec vous. Toutefois, il ne suffit pas, pour résoudre le problème, de faire état des traitements par rapport aux recettes de l'organisme; la solution, c'est que les organismes gouvernementaux qui traitent avec les organismes de charité devraient avoir de meilleurs mécanismes à leur disposition, et appliquer des critères qui leur permettent de refuser tout fonds public à un organisme coupable d'abus.

Vous comprenez ce que je veux dire. Nous ne sommes pas en désaccord avec ce que vous dites, mais simplement, nous ne comprenons pas comment cette solution permettra de résoudre votre problème. À notre avis, il faut trouver une solution au problème dont vous parlez.

Le président: Ou alors, cela permettra de résoudre le problème dans les cas où les traitements sont gonflés, mais pas dans ceux où les traitements des employés sont normaux mais que d'autres postes de dépenses sont complètement aberrants.

M. Shepherd (Durham): À mon avis, notre discussion dépasse la portée de la proposition de M. Bryden. Il voulait simplement imposer le principe de l'obligation de rendre compte. Bien des gens ont insisté sur la différence entre l'obligation de rendre compte à leurs membres, disant que c'est ainsi qu'ils procèdent au lieu de rendre des comptes aux contribuables.

À mon avis, même si bon nombre d'organismes bénévoles, ont accès à des états financiers... Bon nombre d'entre eux ne savent probablement pas comment les interpréter. J'ai donc du mal à accepter cet argument.

Bien entendu, il y a le revers de la médaille: le fait que les contribuables y aillent de leur poche, ce qui leur donne collectivement le droit de savoir ce qui se passe.

Quant à savoir ce que nous ferons du renseignement, si nous l'obtenons, c'est tout autre chose. Nous ajoutons tous les ans de nouveaux renseignements à la déclaration d'impôt sur le revenu, mais nous ne prenons pas la peine de nous interroger sur le fonctionnement de ce système réglementaire.

L'argumentation présentée par l'Association canadienne des hôpitaux ne repose pas lourdement sur le coût de mise en vigueur. Avez-vous fait des prévisions quant à ce qu'il en coûtera à vos membres pour se conformer à l'exigence de déclarer le traitement des cinq cadres supérieurs les mieux rémunérés de tous les conseils d'administration hospitaliers, pour voir s'il existe déjà des renseignements de cet ordre, dans vos systèmes comptables?

J'aborde la question d'après mon expérience d'ancien comptable. Il me faudrait deux minutes pour obtenir ce renseignement et l'indiquer sur un formulaire.

Combien cela coûte-t-il pour votre organisme?

Mme Clemenhagen: Vous avez raison. Ce n'est pas un renseignement difficile à fournir.

Il y a plus de 1 000 hôpitaux dans le pays et, si on ajoute le secteur des soins à long terme au secteur des organismes sans but lucratif... Disons que cela fait 1 000 de plus. Supposons, à l'instant, qu'il y a 2 000 organismes dans le pays qui, tous les ans, recevront un formulaire du ministre du Revenu leur demandant ce renseignement. Quelqu'un, dans l'organisme - le vice-président aux Finances, l'agent d'exploitation principal ou le comptable - sera chargé de le remplir et de le renvoyer. Il faut donc tenir compte du coût de cette formalité administrative, multiplié par 2 000.

M. Shepherd: Je vous parie que, dans la structure de votre organisation, il se trouve quelqu'un qui remplit un formulaire différent. Je ne cherche pas à justifier cela, mais je vous parie que les formulaires sont modifiés d'une année à l'autre, et que cette obligation représenterait une tâche supplémentaire minime.

Mme Clemenhagen: Toutes sortes de changements sont apportés au même formulaire. La déclaration d'impôt des organismes de charité a été mise à jour à plusieurs reprises. Nous devrions féliciter Revenu Canada qui a vraiment fait de gros efforts pour rendre le formulaire plus convivial, plus complet.

On peut donc faire valoir de nombreux arguments - et vous, en tant que comptable, le comprendrez peut-être... Pourquoi ne pas inclure ce renseignement supplémentaire sur le formulaire que nous recevons et que nous remplissons déjà. Pourquoi envoyer un deuxième formulaire?

M. Shepherd: Nous sommes sur la même longueur d'ondes.

Monsieur Friedman, vous avez dit que c'était une question de jugement. Vous craignez que la situation ne soit pas la même dans tous les organismes et vous demandez si, dans un cadre réglementaire, nous pourrions porter des jugements sur le montant de la rémunération de certaines personnes, en vue d'établir si celle-ci est excessive ou non. Autrement dit, si toutes vos entrées de fonds servent au traitement de vos employés, cela ne servirait à rien.

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Pensez-vous vraiment qu'il appartient au gouvernement de prendre ce genre de décision?

M. Friedman: Pourquoi recueille-t-on ce renseignement si ce n'est pas pour prendre ces décisions?

M. Shepherd: À mon avis, si d'autres personnes ont accès à ces renseignements, les gens qui font des dons à votre organisme, une fois que les choses seront claires, ils auront peut-être une optique différente.

M. Friedman: J'ai dit plutôt que l'on nous pose déjà ces questions. Elles reviennent continuellement sur le tapis. C'est pourquoi il nous a fallu réduire nos effectifs et nos programmes. C'est parce que les membres du conseil d'administration, dont la grande majorité sont des comptables et des fiscalistes, sont entièrement conscients des problèmes de justification de l'empoi des fonds de responsabilité financière.

Tout ce que j'ai dit, c'est que nous sommes déjà directement touchés. Il m'est difficile d'imaginer un organisme en activité, qui reçoit des fonds, agit de façon transparente, démocratique et représentative, sans toutefois rendre le moindre compte. Cela m'est difficile à imaginer. La seule façon dont cela pourrait être possible, à mon avis, c'est si le gouvernement fédéral finance cet organisme au maximum grâce à des subventions directes.

M. Shepherd: Il en est peut-être ainsi dans votre organisme, mais d'après mon expérience personnelle, les états financiers préparés par bon nombre d'organismes sans but lucratif ne sont pas conformes aux principes comptables généralement reconnus.

Si l'on retient votre argument - en fait, bon nombre de mes collègues seront très impressionnés par votre proposition de les soumettre tous à une vérification - je suppose que cette simple mesure rendra tout le système prohibitif, et que la plupart des gens refuseront d'y adhérer. Mais revenons-en à ce que vous disiez plus tôt, monsieur Friedman. Il serait avantageux pour tous les particuliers et les membres d'organismes sans but lucratif de pouvoir compter sur un système de collecte et de diffusion des renseignments, et ils sauraient ainsi que ce système est en vigueur dans tous les organismes de charité.

Cette idée vous paraît-elle valable?

M. Friedman: Dans quel but?

M. Shepherd: La visibilité, la responsabilité, le fait qu'on puisse connaître les cinq cadres supérieurs de tous les organismes sans but lucratif

M. Friedman: Du pays?

M. Shepherd: Oui.

M. Friedman: Cela représenterait quelque 360 000 personnes.

M. Shepherd: Cela aiderait-il certains de vos membres qui ne sont pas habitués à lire des états financiers s'il leur était possible de trouver au moins ce renseignement? Vous dites que c'est inutile, mais d'autres prétendent...

M. Friedman: Non; comme je l'ai déjà dit, je pense que les gens utiliseraient ce renseignement à d'autres fins. Certains l'utiliseraient pour dire que votre rémunération est excessive ou insuffisante. On utiliserait ces renseignements à diverses fins.

M. Shepherd: Mais n'est-ce pas justement pour cette raison que vous le souhaitez au départ?

M. Friedman: Pour lancer une discussion sur la pertinence... Je n'en sais rien.

Le président: Ne pensez-vous pas que si ce projet de loi s'applique aux cadres supérieurs et aux administrateurs, il va peut-être trop loin dans la mesure où il englobera un tas de gens qui ne sont que de simples employés et n'ont aucun pouvoir sur l'établissement de leur traitement ou de la politique de l'organisme pour lequel ils travaillent? Je suppose qu'on s'intéressera davantage ou l'on exigera plus de transparence de la part de ceux qui sont en mesure d'influer sur leur propre traitement.

M. Friedman: Si les gens sont en mesure de fixer leur propre traitement, ce renseignement est sans nul doute prévu dans la Loi de l'impôt sur le revenu sous la rubrique Revenu Canada.

Le président: Par ailleurs, lorsque vous parliez à M. Shepherd, cela m'a fait penser à la mouche du coche. Je sais que la transparence, la démocratie, sont des principes sacro-saints. On ne peut jamais s'opposer à l'idée d'obtenir plus de renseignements, et pourtant nous savons tous que si l'on dit tout, cela provoque toujours une réaction de la part d'un tas de gens très occupés, tous animés des meilleures intentions, j'en suis certain, mais qui peuvent à l'occasion compliquer la situation.

Êtes-vous d'accord avec moi?

M. Friedman: Il y a beaucoup de vrai dans ce que vous dites.

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Nous essayons toujours de faire la part des choses. Nous devons agir en organisme démocratique et les responsables de l'organisation, démocratiquement élus, doivent être suffisamment informés pour prendre des décisions.

Le président: Nous sommes tous d'accord avec vous là-dessus, mais c'est parfois le petit détail qui risque de poser des problèmes. Même si le détail en soi n'est pas important, ce sont les gens qui s'en saisissent qui risquent de monter cela en épingle.

M. Epp: Je voudrais vous poser à tous une question. Convenez-vous que les organismes comme le vôtre demandent le statut d'organisme de charité ou sans but lucratif principalement pour des raisons fiscales et deuxièmement parce que cela les aident à obtenir des dons de particuliers ou de groupes? Ce sont cela les deux principales raisons?

M. Friedman: Je répondrais que nous le faisons principalement en raison de ces deux éléments.

M. Epp: Autrement dit, en l'absence de ces deux facteurs, vous poursuivriez tout simplement ces activités?

M. Friedman: Parfaitement. Notre organisme existe depuis 120 ans. Je ne pense pas qu'il ait existé des crédits d'impôt pendant toute cette période et divers...

M. Epp: Non. Notre fiscalité provisoire ne remonte même pas à aussi loin en arrière.

Ma question est donc la suivante. Si nous disions au gouvernement de laisser tomber et de ne plus permettre aux organismes de charité d'émettre des reçus pour fins d'impôt et si un organisme voulait poursuivre ses activités, de le laisser agir et obtenir ses fonds auprès des gens désireux de lui venir en aide mais sans profiter d'avantages aux termes de la Loi de l'impôt, quelles répercussions cela auraient-ils sur vos organismes respectifs?

Mme Clemenhagen: Dans le domaine des soins de santé, étant donné que les paiements de transfert fédéraux et provinciaux ont diminués, les organismes de charité ont un rôle de plus en plus important à jouer pour aider les organismes des services de santé. Les organismes de charité deviennent donc presque une nécessité pour les soins de santé. Nous serions bien inquiets si l'on ciblait le secteur des organismes de charité à des fins de suppression.

M. Epp: Il ne s'agit pas de le cibler à cette fin. Il s'agirait simplement de ne plus leur permettre de fournir de reçus aux fins d'impôt aux personnes qui leur font des dons.

Mme Clemenhagen: Nous pourrions alors nous attendre à ce que le financement public des services de santé augmente...

M. Epp: C'est peut-être ce qui devrait se produire.

Mme Clemenhagen: Pour combler ce manque à gagner.

M. Kelly: Tout d'abord, le statut même d'organisation à but non lucratif que nous choisissons tous vise à donner un caractère juridique à nos activités au nom des groupes que nous représentons et de l'ensemble de la société. D'une certaine façon, cela crée un cadre de responsabilité.

Cela prouve également que nous n'avons pas simplement l'intention de faire des bénéfices ou de gagner de l'argent, mais que l'organisme poursuit des idéaux qui vont bien au delà de l'intérêt financier et qui en fait, visent essentiellement à venir en aide à la collectivité.

En échange, ou pour nous aider à atteindre cet objectif, nous avons droit au statut d'organisme de charité qui nous permet de demander des dons en espèces à des personnes qui partagent nos idéaux et qui nous demanderons également de leur rendre des comptes quant à l'utilisation que nous avons faite de l'argent qu'ils nous ont confié.

Si vous supprimez le statut d'organisme de charité, il n'y aura plus d'organismes sans but lucratif. On verra peu à peu leur nombre s'amenuiser et la situation se prêtera parfaitement au genre de chose qui semble vous préoccuper le plus. Des gens qui se versent d'énormes traitements et consacrent très peu de leurs fonds à la poursuite de leurs objectifs essentiels. Étant donné que l'organisme sera axé sur le marché, il sera motivé par la recherche du bénéfice, lequel est la base de toute obligation de rendre compte.

C'est de cette façon que la société a pu soutenir et reconnaître, tout en exigeant des comptes, des organismes qui se consacrent à la poursuite de vastes objectifs importants pour toute la société canadienne.

M. Epp: En effet. Ma seule question est la suivante: Si 150 personnes souhaitent appuyer votre organisme, comment se fait-il que cela revienne à une sorte d'obligation, ce qui n'est pas indispensable à mon avis, en vue de contribuer à son financement? C'est ce qui se passe dans le contexte actuel où les dons aux organismes de charité sont déductibles de l'impôt. Je sais que, en général, vos organismes font beaucoup de bien dans le pays, mais...

M. Kelly: Il en va de même pour la défense. C'est plus ou moins une fausse piste. Je pense qu'on ne devrait pas dépenser un sou pour la défense et, pourtant, les taxes que je paie servent à acheter de nouveaux sous-marins et hélicoptères - certes moins chers que ceux souhaités par le gouvernement précédent - et je n'ai pas le choix. Pourquoi? Parce qu'il y a un avantage plus large et non discrétionnaire et que cela ferait partie des valeurs qui unissent notre pays.

.1300

M. Shepherd: Monsieur le président, je me demande s'il conviendrait de proposer une motion portant que nous passions à l'examen article par article du projet de loi immédiatement après le congé.

Le président: Quel congé?

M. Shepherd: Le congé qui suit la fin de semaine du 24 mai.

Le président: Nous aurons d'autres témoins au début juin. Par exemple, nous recevons deux groupes le 1er juin. Je crois donc que ce n'est pas possible, monsieur Shepherd.

Y a-t-il d'autres questions?

M. Epp: Monsieur le président, serait-il possible de dire à nos témoins que nous n'avons plus besoin d'eux? Je pense que c'est au comité de décider de recevoir des témoins, et non le contraire.

Le président: À l'une de nos réunions, quelqu'un a demandé que l'on reçoive le commissaire à la protection de la vie privée, ce qui pourrait se faire le 1er juin.

Un autre organisme, la Coalition des organisations nationales volontaires, a demandé à comparaître.

M. Epp: D'une certaine façon, je suis d'accord avec M. Shepherd: je crois que les gens qui sont ici, aujourd'hui, ainsi que les témoins reçus auparavant nous ont donné un bon aperçu de la situation. Il serait peut-être redondant d'écouter d'autres témoins. Ce n'est pas qu'ils soient moins importants, mais il serait peut-être temps de passer à l'examen article par article. Si M. Shepherd propose sa motion, je l'appuie et le comité pourra voter.

Le président: Je pense que ce ne serait pas très courtois puisque c'est l'un de nos membres, M. Bélair, qui a demandé à ce que comparaisse le commissaire à la protection de la vie privée. On a communiqué avec lui et je pense qu'on va avoir de ses nouvelles.

Mme Whelan (Essex - Windsor): C'était une demande du comité?

Le président: Oui.

M. Shepherd: Ma préoccupation, c'est l'ordre des travaux: il faudrait terminer l'étude article par article et faire rapport du projet de loi à la Chambre avant le congé de juin.

Le président: Si c'est possible, je présume que c'est ce que nous ferons. Mais vous devez garder à l'esprit, monsieur Shepherd, que le projet de loi C-224 n'est pas notre seule responsabilité. Nous avons bien d'autres tâches et quand on regarde l'ensemble, je pense qu'il faudra en laisser tomber certaines. Par exemple, nous avons un projet de loi du gouvernement, le projet de loi C-82, qui sera sans doute déposé demain et, habituellement, les projets de loi du gouvernement ont préséance sur ceux des députés. Je pense que nous avons déjà accordé une attention particulière à ce projet de loi émanant d'un député. Nous en avons un autre qui nous a été confié à Noël que nous n'avons même pas regardé.

Monsieur Shepherd, nous avons pu étudier ce projet de loi-ci seulement parce qu'il y a eu quelques annulations qui nous ont donné le temps de le faire. Étant donné notre fardeau de travail, je sais qu'il faudra en laisser tomber une partie, mais je ne sais pas encore laquelle.

Par exemple, nous n'avons pas terminé notre examen de la sous-traitance, non plus que celui des perspectives. Or, après celle d'aujourd'hui, il n'y aura plus que 7 ou 8 séances. Il serait donc bien imprudent de la part de quiconque de s'engager à terminer tout ce que nous avons commencé avant la troisième semaine de juin.

M. Shepherd: Vous dites qu'il faudra laisser tomber certaines choses. Ne serait-il donc pas raisonnable de passer immédiatement à l'examen article par article, sans recevoir les témoins de la commission à la vie privée? Ne serait-ce pas une bonne façon de gagner du temps?

M. Epp: Le seul problème, c'est que, si nous ne recevons pas le commissaire à la protection de la vie privée, tout notre travail n'aura peut-être servi à rien, puisqu'il pourrait aller à l'encontre de la Loi sur la protection des renseignements personnels; alors, tout cela n'aura servi à rien. Je suis d'accord avec le président.

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Le président: Je pense que nous devons aller de l'avant.

M. Murray: Rien ne nous empêche de recevoir le commissaire à la protection de la vie privée et de passer immédiatement après à l'examen article par article.

Le président: Nous allons également recevoir un autre organisme, la Coalition des organisations nationales volontaires. Nous en saurons davantage cette semaine.

Si on nous renvoie le projet de loi C-82, c'est important, monsieur Shepherd, puisqu'il s'agit de la nouvelle pièce de 2$. Il faudra lui accorder une certaine priorité.

Puisqu'il n'y a rien d'autre à l'ordre du jour, la séance est levée.

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