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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 23 novembre 1995

.1528

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous allons entamer l'étude du rapport de la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve.

Aujourd'hui encore, j'ai le plaisir de présenter un groupe de témoins: le colonel à la retraiteA. Craig Cameron, du «Gang of Two Plus Five», association dont il va nous parler dans un instant; M. Rossetto, qui représente le «Edmonton United Services Institute»; et M. Robert Gibson de l'«Alberta Militia Society».

Toutes ces organisations ont présenté des mémoires à la Commission spéciale, et je suis sûr que nous écouterons avec intérêt ce que leurs représentants vont nous dire aujourd'hui. J'invite donc chacun des témoins à faire un bref exposé, après quoi les députés leur poseront des questions.

Monsieur Cameron, veuillez commencer.

Le Lieutenant-colonel A. Craig Cameron (retraité), (membre, Gang of Two Plus Five): Monsieur le président, mesdames et messieurs, bon après-midi.

Je représente ici aujourd'hui un groupe de Vancouver connu sous le nom de «Gang of Two Plus Five». Je précise d'emblée que nous n'avons aucun rapport avec le «Gang of Seven»du Conseil des ministres de la Colombie-Britannique, dont on dit qu'il a précipité la démission de notre premier ministre.

Notre groupe a été créé en 1979 pour comparaître devant la Commission Fyffe sur l'unification.

Même si la composition de notre groupe a changé au fil des ans, nos membres actuels ont servi sous les drapeaux pendant la Seconde Guerre mondiale et la Guerre de Corée, dans la force régulière et dans la réserve. En ce qui concerne l'expérience civile, il y a un juge de la Cour provinciale de la Colombie-Britannique et des gens d'affaires.

Même si nous ne sommes pas nombreux, nous nous efforçons continuellement de mettre à jour nos connaissances en dialoguant avec d'autres organisations et d'autres personnes qui s'intéressent aux questions relatives à la défense.

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Nous apprécions beaucoup cette occasion de comparaître devant vous pour commenter les recommandations et le rapport de la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve. Dans l'ensemble, nous sommes réconfortés par les recommandations de la Commission et nous considérons que bon nombre de ces propositions viennent à point nommé. Toutefois, il existe quelques points sur lesquels il faudrait insister davantage ou qui n'ont pas été examinés entièrement dans le rapport. Nous commencerons par là.

Nous partageons sans réserve la recommandation de la Commission selon laquelle un plan national de mobilisation doit être élaboré et mis en oeuvre très rapidement. Cependant, nous estimons qu'il est impératif que le plan gouvernemental porte sur tous les aspects de la mobilisation nationale. Il faudrait mentionner notamment les ressources, l'industrie et la main-d'oeuvre, et préciser les modalités de la participation et la responsabilité de chaque ministère. Si l'on ne procède pas de cette manière et si l'on envisage la mobilisation en dehors de tous les autres facteurs, le travail de la Commission et celui du comité n'auront plus de sens.

La Commission a recommandé une structure idéale pour la milice, qui serait composée de brigades et de divisions. En faisant travailler des brigades composées d'éléments de la force régulière et de la milice sous l'égide des mêmes quartiers généraux, avec un personnel intégré, nous contribuerons à mettre fin aux attitudes discriminatoires. Nous appuyons sans réserve les critères que la Commission a recommandés pour déterminer la viabilité des unités de la milice existante, mais nous sommes également d'accord avec les jeunes sous-officiers qui veulent servir dans des unités composées uniquement d'éléments de la milice.

Afin de maintenir l'efficacité opérationnelle, de profiter au maximum de l'instruction, de donner de l'expérience aux officiers et aux sous-officiers et de développer des qualités de dirigeants chez ces derniers, les niveaux d'effectifs autorisés par unité ne devraient pas être inférieurs à 80 p. 100 de l'établissement opérationnel. Cependant, étant donné que le plafond rémunéré pour les réserves a été fixé dans le Livre blanc de 1994 qui réduit l'effectif de la milice à 14 500, les sept brigades dont la création a été recommandée par la Commission ne peuvent être dotées qu'à 33 p. 100 environ de l'effectif opérationnel. Cela donne un effectif d'environ 240 personnes par unité importante.

Nous recommandons que le plafond rémunéré soit accru pour rendre les unités de la milice plus efficaces. Nous recommandons aussi que le nombre de brigades de la milice soit porté à 8 afin d'accroître la participation dans l'Ouest.

Pour maintenir la solidarité au sein des unités, il est essentiel que tout le personnel de la réserve et de la force régulière affecté dans une unité de la réserve porte les insignes et l'uniforme de cette unité. De plus, toutes les sous-unités, peu importe leur emplacement géographique, doivent appartenir à la même unité ayant le même nom et la même identification. Cette unité doit être étroitement liée à la population de la ville ou de la région dans laquelle elle est située, et elle doit participer, dans la mesure du possible, à des fonctions civiques afin de se faire bien connaître comme étant la première unité de réserve de la ville ou de la région.

La Commission propose que certaines unités de la première réserve soient transférées à l'ordre de bataille supplémentaire. Elle fait aussi l'excellente recommandation que tout le personnel quittant la force régulière ou la première réserve soit tenu, par contrat, de s'inscrire dans la réserve supplémentaire. Actuellement, la réserve supplémentaire est essentiellement une liste d'anciens officiers et de militaires d'autres grades placés par catégorie ou par profession.

Le personnel militaire canadien, qu'il appartienne à la marine, à l'armée de terre ou de l'air, à la force régulière ou à la réserve, est une famille très axée sur l'unité. Le rapport du soldat avec son unité est primordial et dure souvent toute la vie. Par conséquent, il serait plus important pour une personne d'appartenir à une unité sur la liste supplémentaire au lieu d'être tout simplement un numéro dans un ordinateur. Nous recommandons par conséquent que la liste supplémentaire soit maintenue sous forme de véritables unités, éléments spécialisés et formations. Il serait également plus efficace à tout moment, si cela est nécessaire dans le cadre d'une mobilisation, et à condition que l'équipement soit disponible, que les unités soient transférées de façon ordonnée et progressive de la réserve supplémentaire à la première réserve et à la force active.

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À l'instar des unités de la première réserve, les unités de la réserve supplémentaire doivent être étroitement associées à une ville ou à une région du pays. Nous comprenons la nécessité de maintenir la réserve supplémentaire sans aucun coût. Cependant, il faudrait encourager les unités à former des associations et, s'il y a lieu, parrainer des corps de cadets et des orchestres d'unité. Cela les aiderait à maintenir une présence dans leur ville ou leur région. Pour aider les unités de la réserve supplémentaire à maintenir une association, on pourrait donner à chacune un bureau dans un édifice de la Défense nationale ou d'un autre ministère fédéral pour les activités de l'association.

En parlant du déploiement de la réserve aérienne, la Commission justifie dans son rapport la nécessité d'un escadron d'hélicoptères de la réserve en Colombie-Britannique, car une partie de la province est située sur les failles géologiques. Toutefois, la Commission hésite à en recommander la création à cause du coût. Apparemment, si l'on en juge par la formulation du rapport, la Commission a mal compris la question. Il ne s'agissait pas de créer un autre escadron d'hélicoptères; il s'agissait plutôt de transférer en Colombie-Britannique de six à huit des 24 hélicoptères Griffon actuellement destinés à l'escadron 408 à Edmonton. Cela permettrait de créer une unité de la réserve aérienne dans la région d'Abbotsford-Chilliwack, à l'extérieur de la région des failles.

Il y a un grand nombre de pilotes civils et d'agents d'entretien dans la région, de même que des sociétés qui pourraient effectuer des travaux supplémentaires d'entretien sous contrat. Ainsi, l'unité d'hélicoptères serait en mesure d'appuyer les autorités fédérales et provinciales dans des cas d'urgence; appuyer la formation des unités de la milice en Colombie-Britannique; appuyer le 3PPCLI si, comme on l'a recommandé, on le garde à Chilliwack comme bataillon d'infanterie légère; et assurer une présence de la force aérienne dans la région.

Dans son rapport, la Commission dit que parmi les officiers supérieurs, presque personne n'était intéressé par la remise sur pied de divers programmes de formation universitaire des officiers. Cependant, les commissaires ont estimé que dans l'intérêt des forces canadiennes, la présence militaire sur les campus doit être accrue et plus visible.

À cet égard, nous avons proposé à la Commission l'idée d'un surcroît de réservistes qui seraient recrutés dans les collèges communautaires pour compléter les unités de la force régulière dans les établissements opérationnels.

Notre proposition était la suivante: en échange d'une formation militaire à temps plein pendant les quatre mois de vacances d'été, ils signeraient un contrat pour servir pendant deux ans comme réservistes. Il ne s'agirait pas d'une formation d'officier, mais l'on pourrait choisir ultérieurement certaines personnes pour une telle formation. Nous pourrons en parler davantage au cours de la période de questions.

En conclusion, disons que la plupart de nos politiques antérieures en matière de défense étaient dénuées de la volonté politique de passer aux actes. Si vous pouvez remédier à cette situation, vous aurez accompli beaucoup plus que tout autre comité parlementaire chargé de la défense.

Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs.

Le président: Merci, monsieur Cameron. Nous allons entendre les trois autres témoins et passer à la période des questions.

Monsieur Gibson.

M. Robert Gibson (membre, «Alberta Militia Society»): Monsieur le président, honorables députés, je représente l'«Alberta Militia Society», dont les membres sont des éléments actuels et retraités de la milice et de la force régulière, ainsi que des citoyens ordinaires. Nous nous occupons surtout de maintenir le lien entre la milice et les collectivités.

Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de comparaître ici aujourd'hui. Nous vous avons soumis un mémoire écrit; je vais simplement en résumer les points saillants. Notre mémoire porte essentiellement sur la milice.

La «Alberta Militia Society»tient à féliciter les membres de la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve pour leur analyse approfondie et pour leurs recommandations concises. Nous appuyons la plupart de ces dernières.

Nous recommandons que le gouvernement du Canada autorise la mise en oeuvre des décisions relatives à la restructuration de la milice en fixant des objectifs en matière de coûts, au lieu de limiter le nombre de soldats à 14 500.

À notre avis, la question fondamentale à poser devrait être de savoir quel est le moyen le moins coûteux de restructurer la réserve tout en maintenant au maximum sa capacité de remplir son mandat? Le gouvernement du Canada doit revoir les coûts et les mesures de restrictions relatifs non seulement à la réserve mais aussi à l'ensemble de l'armée.

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Le système actuel de comptabilisation et de budgétisation des coûts annuels de la réserve est à la fois trompeur et inexact. Avant la rédaction du rapport de la Commission, le chef des services d'examen préconisait que l'on réduise le budget de la réserve de 153 millions de dollars, en partie à cause des discussions relatives aux allocations. Pour mettre cette réduction en perspective, cela équivaut à la rémunération annuelle de 38 250 réservistes environ. En raison de l'incapacité à estimer les coûts de façon plus précise, le plafond rémunéré cesse assurément d'être une démarche légitime pour définir la nouvelle structure.

L'armée doit calculer le coût de la milice de bas en haut, c'est-à-dire de l'unité au groupe-brigade et du groupe-brigade au commandement de secteur. D'après la structure proposée, le commandement de secteur est le niveau le plus élevé où il doit y avoir une différenciation entre la milice et les forces régulières. L'allocation des budgets de la milice au delà de ce niveau doit être inutile. Si l'objectif réel est de réduire les coûts de 25 p. 100, on doit commencer l'analyse en déterminant la valeur en dollars et non en effectifs.

J'ai fait une analyse des sept groupes-brigades et de dix groupes-brigades entiers, en supposant que le centre et l'est du pays voudraient un groupe supplémentaire si l'ouest en recevait un. Cela augmente le plafond rémunéré de l'unité, y compris des quartiers généraux des brigades et des commandements de secteur d'environ 24 millions de dollars par an. Cela correspond à près de 9 p. 100 des salaires des réservistes prévu dans le budget révisé de 1994-1995. Comparez ce montant au 30 p. 100 des budgets salariaux actuels - au moins - qui sont alloués au delà des quartiers généraux de secteur.

La Commission a constaté que, de toute évidence, le budget salarial de la réserve est lourdement amputé avant d'atteindre les manèges. L'analyse de l'efficacité relative de la réserve doit être faite en fonction de l'augmentation des coûts. Combien en coûte-t-il à la force régulière pour remplir son mandat, s'assurer qu'elle est bien équipée et bien formée pour s'acquitter efficacement de ses missions?

Une fois que l'on aura répondu à ces questions et qu'on sera parvenu à la conclusion que la réserve doit jouer un rôle unique et complémentaire, nous devrons déterminer le montant qui est nécessaire pour que le mandat soit bien rempli. Si nous adoptons cette démarche, les décisions qui sont essentiellement motivées par la réduction des coûts seront fondées sur des hypothèses beaucoup plus valables qu'actuellement.

En examinant le coût de la milice, nous devons commencer à la base, c'est-à-dire avec les soldats qui font partie de l'unité. Il est évident qu'idéalement, il faudrait assurer la plus grande représentation possible des réservistes dans toutes les régions du pays. Les meilleurs avantages ne peuvent être obtenus qu'à l'échelle des manèges, car c'est là que l'on peut vraiment augmenter le nombre de soldats. C'est là que les rapports entre l'armée et la collectivité sont le plus solides. C'est là que l'on peut aider l'autorité civile en cas de désastre naturel. C'est là que l'on peut tirer le meilleur parti des sommes investies.

L'équipement est le deuxième poste de dépenses important dans la milice et l'armée. Le coût des articles de prix unitaire élevé ne va pas changer considérablement. La plupart de ces articles sont achetés pour les missions et la formation de base de la force régulière et de la milice. Par exemple, les transports de troupes blindés, les chars d'assaut et les hélicoptères sont nécessaires pour effectuer les tâches de l'armée, qu'il s'agisse de la milice ou de la force régulière.

Les installations constituent le troisième élément de coûts. Les manèges sont essentiellement utilisés par la milice. Les principaux centres de formation comme Wainwright, en Alberta, ne seront probablement pas réduits même si la milice disparaît.

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Enfin, il y a les frais généraux. La Commission a noté que pour 100 jours de rémunération, il n'y a que trente jours qui arrivent au manège. Cela n'est pas pratique et ne reflète pas l'allocation des coûts. La pyramide est inversée.

Permettez-moi de commenter quelques recommandations de la Commission spéciale.

En ce qui concerne la recommandation 6, nous proposons que le nombre de groupes-brigades ne soit pas fixé tant qu'on n'aura pas effectué un examen approfondi de la méthode de détermination des coûts. Nous avons l'impression qu'il faut au moins trois groupes-brigades dans l'ouest du pays pour des raisons géographiques. On pourrait estimer qu'il en faut huit, neuf ou dix. Ces groupes pourraient être plus petits qu'ils ne devraient l'être, mais ils ont laissé une marque dans la collectivité.

J'ai déjà abordé les recommandations 8 et 10.

Pour ce qui est des recommandations 34 et 35, même si nous croyons que les réservistes travaillant à temps plein doivent recevoir un salaire et des avantages sociaux équivalant à ceux du personnel de la force régulière, nous ne jugeons pas nécessaire que cette équivalence s'applique aux tâches normales liées à la formation. Il est beaucoup plus essentiel de régler les questions concernant l'accès à la formation et la certitude des exercices de formation en été.

En ce qui concerne la recommandation 41, les opinions divergent beaucoup en matière de législation. La question est de savoir, non pas si les droits des réservistes doivent être définis, mais s'ils doivent être exercés volontairement. D'aucuns craignent qu'une mesure législative ait des répercussions négatives à court terme.

Même si nous appuyons la plupart des recommandations de la Commission, certaines d'entre elles méritent une attention particulière.

En ce qui concerne la recommandation 10(5), si la milice était responsable de l'entretien et de l'efficacité des manèges, nous croyons que le montant nécessaire pour administrer ces installations diminuerait considérablement.

Pour ce qui est de la recommandation 26, l'harmonisation des tarifications civile et militaire permettra que l'on consacre une plus grande partie des budgets de formation à des activités productives. Il faudrait accroître la capacité de la milice de recruter et de fournir des spécialistes.

Le rapport de la commission se termine sur une observation qui mérite certainement notre appui, même si elle n'est pas une recommandation en tant que telle:

Le président: Merci beaucoup, monsieur Gibson.

Monsieur Rossetto.

Major Luigi Rossetto (retraité), («Edmonton United Services Institute»): Merci beaucoup.

À l'évidence, une enquête doit se concentrer sur les éléments qui peuvent être améliorés. Par conséquent, certains rapports, y compris le nôtre, qui vous a été distribué, semblent décrire une situation relativement morose, et manquent peut-être d'ampleur.

Cependant, nous ne pouvons contester le fait que le Canada dépense de 750 millions de dollars à 1 milliard de dollars pour une force de réserve qui a été conçue pour combattre les Fenians. Certains aimeraient la laisser intacte pour toujours, et ses partisans n'hésitent pas à user de leur influence pour obtenir des avantages personnels et locaux au lieu de militer pour le bien-être d'un système qui est censé être au service de tous les Canadiens.

Étant donné les sommes énormes qu'on y a consacrées et le fait que 50 ans ont passé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et étant donné que toute une série de commissions, d'analyses et de rapports ont déjà parlé de la question, on devrait être choqué que la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve puisse encore décrire la réserve, et en particulier la milice, comme n'ayant pas vraiment de plan de mobilisation, ajoutant qu'il y a beaucoup plus d'officiers et de sous-officiers supérieurs que ne le justifient les effectifs sous leur commandement, c'est-à-dire qu'on y voit trop souvent plus de chefs que d'Indiens. On ajoute que le nombre d'unités est bien inférieur au plafond permis et insuffisant pour former une compagnie ou même un peloton, que ces forces reçoivent un niveau d'instruction collective douteux et inadéquat, que le cadre de commandement n'a pas d'expérience dans le commandement de forces d'une taille appréciable, de sorte qu'il ne serait probablement pas à la hauteur de la tâche en cas d'urgence nationale. On dit aussi que l'administration est lourde, inefficace et coûteuse, trop fortement dotée à tous les niveaux, ayant une structure organisationnelle dont on a fréquemment dit qu'elle donnait un pauvre rendement de l'investissement, une opinion appuyée par le vérificateur général.

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Ce n'est pas moi qui dis tout cela, mesdames et messieurs, ce sont les membres de la Commission.

Le tableau n'est pas tout à fait sombre, car en général, la réserve a reçu la note A plus plus, pour le renfort qu'elle a apporté à la force régulière, en particulier au cours de missions des Nations Unies. On ne peut cependant pas dire la même chose de la capacité de la réserve de recruter, de former et de constituer des sous-unités entraînées. Pour ces fonctions, même l'âme la plus charitable leur accorderait probablement un D.

Ces deux aspects distincts du service dans la réserve ne sont pas nécessairement compatibles et il est facile de tomber dans le piège que la Commission spéciale sur le restructuration de la réserve n'a pu éviter et de recommander que durant les deux premières étapes du plan de mobilisation, la réserve fournisse des troupes de renfort sur une base individuelle, tandis que durant les étapes trois et quatre, la mobilisation se ferait sur la base d'unités. On néglige le fait que cette dichotomie fondamentale demeure non résolue, car vous pourriez vous demander qui restera pour combler le rang des unités requises durant les étapes deux et trois, si le Canada met en oeuvre les deux premières étapes de cette mobilisation en cas d'urgence en appelant les réservistes sur une base individuelle - car on doit présumer qu'il s'agira des gens les mieux entraînés et les plus facilement disponibles.

Le Canada pourrait-il se fier à un système comme celui qu'on vient de décrire pour constituer des formations de combat sans qu'une longue période d'entraînement supplémentaire soit nécessaire, étant donné également que les hommes de troupe sont en général des jeunes du niveau secondaire et postsecondaire? Ces gens seraient-ils disponibles, étant donné que le Parlement n'a même pas encore jugé bon d'établir un cadre législatif pour l'appel des réservistes, sauf en cas de déclaration de guerre?

En réalité, une levée de troupes complètement nouvelles ne serait-elle pas nécessaire, avec un ensemble complet de nouveaux dirigeants et soldats?

Dans notre mémoire, nous contestons l'opinion - et la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve l'a acceptée - selon laquelle la réserve permanente a joué un rôle important dans la mobilisation au cours de la Seconde Guerre mondiale, par exemple. De nos jours, comme durant cette guerre, la majorité des militaires ne seraient pas des réservistes, mais plutôt des gens qu'on aurait recrutés dans la rue et qui devraient être entraînés et constitués en de nouvelles organisations. Bien qu'en fin de compte ces gens pourraient finir par former des unités portant les noms des groupes actuels ou des régiments réguliers, cela serait relativement accidentel et après coup.

Comme je l'ai mentionné, la Commission a déjà reconnu que la perception selon laquelle ce sont les membres de la réserve permanente qui sont allés sous les drapeaux dès l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale est essentiellement inexacte. Il semblerait donc imprudent de se fier à un système fondé sur cette fausse prémisse.

Une deuxième opinion que nous contestons en ce qui concerne la réserve est celle selon laquelle la réserve coûte moins cher que les membres des forces régulières. Il est vrai que la solde individuelle et les avantages versés aux réservistes sont moins élevés, mais le coût véritable doit être mesuré en fonction du nombre de personnes disponibles en fonction du coût du maintien de l'ensemble du système. Comme on l'a déjà déclaré, le Canada y consacre entre 750 millions de dollars et 1 milliard de dollars - et il y a des gens qui n'en sont même pas certains. Il est reconnu que la plus grande partie de cet argent, et de loin, est consacrée à l'infrastructure et à un système trop hiérarchisé, inefficace et d'une fiabilité douteuse, et sert à maintenir tout un groupe de personnes, généralement des hauts gradés, qui ne peuvent pas vraiment être disponibles pour le service militaire.

L'essentiel est que tout l'argent consacré à la réserve, environ 10 p. 100 du budget de la défense, permet en réalité au Canada de déployer un bataillon supplémentaire, tout au plus. On peut en juger d'après le nombre de réservistes qui participent à des opérations des Nations Unies. Cela semble être un prix exorbitant pour ce qu'on en retire.

Il y a plusieurs moyens de faire des économies. Premièrement, l'option choisie par la Commission spéciale sur la restructuration de la réserve et celles qui l'ont précédée, est de réduire les dépenses en diminuant simplement la taille de l'organisation. Apparemment, des tentatives semblables n'ont pas réussi dans le passé à améliorer le système ou à le rendre plus efficace. Le rapport même de la Commission en est la preuve.

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Il y a évidemment une autre façon de faire des économies: on peut changer le système même et le rendre plus efficace. C'est dans ce but que nous avons proposé à Edmonton de réorganiser les unités de réserve de manière à refléter la taille et la structure hiérarchique réelle.

Je demanderai peut-être à ceux et à celles d'entre vous que la chose intéresse de vérifier combien de réservistes se sont présentés au camp d'entraînement cet été. Il n'est pas déplacé de ma part de souligner que deux fantassins exactement sont venus d'un district en particulier et que pour toute une région, à peine plus de 500 personnes se sont présentées.

Nous avons également proposé un système de service dans la réserve qui inclurait l'équipement de base complet et une série de périodes de service avec les forces régulières. Nous avons recommandé une année suivie de périodes régulières d'entraînement et de service, de deux à trois semaines sur une période de quatre à cinq ans. Des obligations contractuelles et des encouragements sous la forme de primes en argent comptant ou de crédits d'étude assureraient la participation des réservistes.

Ainsi, le nombre de réservistes disponibles pour la mobilisation deviendrait contrôlable en augmentant ou en diminuant simplement le nombre de participants au programme. L'aspect contractuel permettrait justement de remédier à la faiblesse la plus flagrante de la réserve, un problème que vous, les députés, n'avez malheureusement pas réglé, en adoptant des dispositions législatives relatives au travail régulier des réservistes. C'est un problème qui remonte encore une fois à plus d'une cinquantaine d'années.

On a critiqué notre proposition en disant qu'elle condamnait le régime actuel de la réserve. Ce n'est pas nécessairement le cas. En réalité, nous y voyons peut-être le moyen de le sauver.

L'Australie garde les deux types de systèmes en même temps. La réserve devrait entreprendre une vaste réorganisation pour faire les économies nécessaires au nouveau régime, en vertu duquel la milice coûterait moins de 30 millions de dollars au lieu de coûter 500 millions de dollars. C'est fondé sur des effectifs de 800 personnes recevant un salaire moyen généreux de 30 000$, pour l'équivalent d'une année complète de service à temps plein. Même si l'on double le chiffre pour tenir compte des coûts supplémentaires et du service de suivi, on constate que ces coûts seraient plus que compensés en quelques années par les économies potentielles et qu'on pourrait peut-être même contribuer à résoudre le problème d'équipement auquel les forces régulières et les forces de réserve font face.

Malheureusement, cela ne plaira pas à ceux qui tiennent obstinément à un régime démodé, un régime qui ne répond pas aux exigences de défense du Canada et qui, comme le veulent certains de ces défenseurs, cherche plutôt à fournir un bataillon d'officiers et de sous-officiers à des régiments, qui pourront ensuite se vanter d'avoir des effectifs équivalant à un peloton de soldats. Je crains qu'on ne puisse répondre à ces défenseurs.

Il faut signaler toutefois que l'effectif de la réserve a fréquemment été réduit. On a diminué continuellement les unités de réserve, quand on ne les a pas fait disparaître dans les petites localités du Canada, sans que le système dans son ensemble s'en trouve manifestement amélioré. Si la mobilisation nécessite des unités de réserve, il y aurait peut-être lieu de se demander ce qu'il faudrait dire aux représentants de ces nombreuses petites villes et municipalités que vous représentez et qui ont perdu ou perdront probablement leurs unités. Par contre, nous offrons un système qui met le service de réserve à la disposition de tous les Canadiens, où qu'ils se trouvent.

Nous continuons de croire que ce que nous proposons, c'est-à-dire que de ne payer que pour des troupes qui seront effectivement disponibles est une formule qui répond mieux aux besoins de défense du Canada et d'une société moderne en mouvement. C'est également une formule qui changera la vocation de la réserve, qui n'est plus d'affronter les Fenians.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Richardson): Monsieur Hart, voulez-vous commencer à poser les questions?

M. Hart (Okanagan - Similkameen - Merritt): Merci beaucoup, messieurs, de vos exposés.

Nous essayons actuellement de choisir les recommandations de la Commission que nous allons présenter à la Chambre des communes. J'aimerais parler un instant du mandat ou du document d'orientation que les commissaires ont reçu. L'avez-vous trouvé trop restrictif? J'aimerais que chacun d'entre vous réponde, si possible.

M. Rossetto: Oui. C'est inclus dans notre documentation. Lorsqu'on examine le mandat initial, on s'aperçoit que la Commission n'a jamais été invitée à examiner la réserve à partir de zéro. Les commissaires ont accepté de l'examiner en grande partie sous sa forme actuelle. C'était, je crois, la deuxième ou la troisième chose qu'on leur a demandé d'examiner telle quelle.

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M. Gibson: Pour ma part, ce que j'ai trouvé difficile, c'était de calculer l'effectif, par opposition à trouver les moyens de réduire l'ensemble des coûts tout en améliorant l'efficacité.

M. Cameron: Vous avez dit que la Commission devrait examiner la réserve en fonction des quatre étapes de la mobilisation, mais ces quatre étapes n'ont jamais vraiment servi et il ne semble pas y avoir de lien entre la mobilisation et un plan en bonne et due forme du gouvernement.

M. Hart: Que conseillez-vous au comité de faire? Il nous reste quelques jours pour tenir compte de ces recommandations. Que nous recommandez-vous? Devons-nous jeter tout le rapport? Devons-nous suggérer à la Chambre et au ministre que celui-ci prépare un mandat plus vaste à une nouvelle commission pour qu'elle examine l'ensemble des forces armées canadiennes? C'est ce que vous recommandez?

M. Cameron: Comme on l'a dit, les recommandations ont un effet sur la force régulière et la milice et il devrait y avoir un lien entre les deux. Je ne suis pas convaincu qu'il faut un comité en bonne et due forme pour examiner cette question.

M. Gibson: Je ne pense pas qu'une nouvelle commission doive être créée pour refaire ce qui a été fait à propos de la réserve. Je pense que plusieurs recommandations peuvent être appliquées. Au lieu de plafonner l'effectif, on devrait plafonner le budget. Des instructions très claires devraient être données à ceux qui appliqueront les recommandations - en grande partie dans les forces régulières - à savoir que les grosses dépenses devraient être réduites considérablement et que l'on prévoie des fonds suffisants pour qu'il y ait jusqu'à 20 000 réservistes. J'ignore si le chiffre est juste, mais je ne crois pas que cela doive être un facteur limitatif.

Je crois que cela peut se faire dans le cadre de l'application des recommandations de la Commission, sous la conduite et les instructions du Parlement.

M. Hart: Je crois savoir que la Commission a recommandé un plafond de rémunération - sans donner de chiffre exact - ce qui transformerait la structure des grades dans la réserve.

M. Gibson: Je croyais savoir, et je me trompe peut-être, qu'ils voyaient là une restriction du mandat initial parce que c'était un chiffre tiré de l'examen de la défense de 1994.

Le vice-président (M. Richardson): Le chiffre vient directement du budget.

M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): Ne vous en prenez pas à nous pour ces chiffres.

M. Gibson: Non, je dis qu'on les a simplement repris. Je ne pense pas qu'il y ait eu d'analyse préalable. De fait, je pense que les commissaires ont clairement indiqué qu'avec l'information dont ils disposaient, il ne leur était pas possible de faire une analyse minutieuse des coûts. La structure des coûts, leur répartition, la comptabilité et la budgétisation - ils n'ont pas employé ce mot-là, mais moi je le ferai - c'était tellement confus qu'il n'y avait pas moyen d'en tirer des conclusions utiles.

M. Hart: Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Rossetto: Si vous prenez connaissance de mon texte, vous verrez que j'ai un avis un peu différent. C'était censé être le deuxième essai. Même si cela ne prend pas la forme d'une commission distincte, il y a des choses qui méritent d'être étudiées plus en profondeur sans qu'il soit nécessaire de tout recommencer. Des instructions pourraient peut-être être données. Si certaines des idées que nous avançons sont méritoires, il y a peut-être lieu de les approfondir davantage.

M. Hart: D'autres témoins nous ont dit que l'idée de fusionner deux ou trois unités n'est pas réalisable. Si l'on fusionne deux unités de 100 hommes, on va peut-être aboutir à une unité de 100 hommes et non pas de 200. Qu'en pensez-vous?

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M. Cameron: Je ne vois pas trop pourquoi on aboutirait à une unité de 100 hommes, à moins que vous ne preniez une unité quelque part et que vous lui en ajoutiez une autre d'ailleurs et décidiez que l'une des deux va fermer. Mais si vous fusionnez deux unités de la même région, il y aura peut-être une période au début où l'effectif va baisser, mais il devrait remonter.

M. Hart: D'autres témoins ont dit qu'à cause de l'attachement pour la communauté et la tradition dans le régiment, il n'est pas évident que l'on puisse fusionner les deux et aboutir à une unité de la même taille. L'effectif va baisser avec le temps. Autrement dit, un régiment va assimiler l'autre, qui aura le sentiment d'avoir perdu...

M. Cameron: Je suis d'accord. Il y aura une baisse au début, mais avec le temps cela devrait augmenter.

Il y a lieu d'examiner le cas de l'Angleterre, qui a réussi à fusionner des unités plusieurs fois. À ma connaissance, c'est arrivé deux fois au cours des 30 dernières années, à peu près.

M. Hart: Y a-t-il d'autres observations sur ce sujet?

Je voulais poser une question à propos de la fermeture de bases. Il y en a eu quelques-unes. En Alberta - et vous pouvez parler du cas de la Colombie-Britannique si vous le souhaitez, ainsi que de celui de la base de Chilliwack et de Calgary - quels effets ces fermetures auront-elles sur la réserve dans ces régions?

M. Cameron: La fermeture de la BFC Chilliwack, évidemment, a eu de gros effets sur la milice partout en Colombie-Britannique. La base aidait la milice à s'entraîner et offrait même son périmètre. C'est pourquoi divers groupes ont recommandé de conserver, sinon toute la base de Chilliwack, au moins une partie de la base, en particulier les aires de manoeuvre et d'autres secteurs où la milice pourrait aller s'entraîner.

On souhaite vivement, non seulement dans la région de Chilliwack mais aussi chez certains gradés de conserver le 3e bataillon du PPCLI si celui-ci devient un bataillon d'infanterie légère à Chilliwack.

M. Gibson: À Calgary, la fermeture de la base a suscité beaucoup d'inquiétudes. Cela a accentué les craintes de voir disparaître des éléments considérables de la milice.

Le vice-président (M. Richardson): Monsieur O'Reilly.

M. O'Reilly (Victoria - Haliburton): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci, messieurs, d'être venus comparaître et de nous avoir présenté des idées très intéressantes. Je vais prendre connaissance de toutes vos réflexions et voir comment elles peuvent s'appliquer à notre rapport. Comme vous le savez, on nous a confié la mission spéciale d'étudier la situation et de faire des recommandations sur les changements à apporter.

Pour commencer, je m'inscris en faux contre le mot «empreinte» à la page 33 du document. Pour moi, une empreinte, c'est quelque chose qu'on laisse. Je vais présenter une motion pour faire disparaître ce mot du rapport et le remplacer par quelque chose comme «la présence dans la collectivité». J'aimerais que ce soit porté au compte rendu. Cette histoire d'empreinte m'agace beaucoup parce que, comme je l'ai dit, c'est ce qui reste lorsqu'on est parti. Si je ne fais qu'une seule contribution au comité, ce sera d'avoir supprimé ce mot.

Vous avez dit que le cadre juridique n'existe pas. Je vais vous poser trois questions et vous pourrez ensuite y répondre. Moi, je croyais que le cadre juridique existait, mais que c'est la province et non les militaires qui doivent présenter une demande. À moins qu'il ne s'agisse d'une catastrophe nationale en règle, la seule façon d'appliquer ce cadre juridique, c'est si la province en fait la demande. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

.1610

Le problème de matériel dont vous avez parlé figure dans le rapport et dans le Livre blanc. Il s'agit de matériel acheté à l'intention de la réserve, mais celle-ci n'en voit pas la couleur. Ayant été réserviste moi-même, je connais ce problème. Je pense qu'il a fallu trois camions pour tirer un canon Howitzer de Lindsay à Peterborough, à 23 milles de distance, pour le changer. Je comprends donc ce problème.

Et puis, évidemment, personne n'a demandé ce que le «Gang of Two Plus Five» signifie.

Je vais donc commencer par ces trois questions. Répondez-y dans l'ordre qui vous convient.

M. Cameron: Très rapidement, le «Gang of Two Plus Five», cela signifie seulement qu'il y a sept membres dans la bande. Les deux, ce sont ceux qui sont là depuis le début. Il y a d'abord le lieutenant-colonel Cecil Merritt, décoré de la Croix de Victoria; l'autre, c'est le colonel d'aviation Alfred Watts, qui était colonel d'aviation pendant la guerre et qui est ensuite devenu juge de la Cour de la Colombie-Britannique. Les cinq, ce sont nous, les nouveaux, qui ne travaillent avec eux que depuis quatre ou cinq ans. Nous sommes encore en train d'apprendre.

M. O'Reilly: Donc, le «Gang» ce n'est pas un gang de braqueurs, n'est-ce pas?

M. Cameron: Eh bien, pas encore.

M. O'Reilly: Mes autres questions portaient sur le cadre juridique. Monsieur Rossetto.

M. Rossetto: Ce que vous disiez sous-entendait que l'on allait mobiliser la réserve. Moi, c'était de veiller à ce que le réserviste se présente à l'appel. Actuellement, rien n'oblige le réserviste, quel que soit son degré d'entraînement, de se présenter, que ce soit pour l'entraînement ou pour participer à des opérations.

M. O'Reilly: Vous pensez donc à une sorte de contrat au moment de l'enrôlement?

M. Rossetto: Oui. Ce que les réservistes et les unités de la réserve trouvent le plus exaspérant, c'est que chaque fois qu'il y a un entraînement, ce n'est jamais avec les mêmes gens.

Le problème, c'est que l'on commence déjà par un effectif réduit. Et puis, lorsqu'il y a des absents, ou un changement dans l'organisation, comment le groupe peut-il passer d'un niveau de formation à un autre? De toute évidence, c'est impossible.

M. O'Reilly: Et le problème du matériel?

M. Rossetto: Je ne sais pas vraiment...

M. Gibson: Là, le problème c'est d'avoir accès au matériel pour l'entraînement et de le conserver en état de marche. J'en parle un peu dans mon texte, la possibilité de faire réparer une pièce lorsque l'on se déplace avec un groupe pour un exercice pendant le week-end et qu'une pièce tombe en panne et qu'il faut rester sur place pour attendre qu'une dépanneuse vienne de la base de Calgary. Lorsque la dépanneuse arrive enfin, l'exercice du week-end est gâché pour tout le groupe - j'exagère un peu - alors que l'on aurait dû permettre au membre du groupe qui est mécanicien à Calgary de faire la réparation ou d'amener le véhicule à l'atelier le plus proche pour faire poser une courroie, par exemple.

M. O'Reilly: Pour ce qui est du problème posé par le fait que le budget se calcule uniquement en dollars et non en effectif global, cela veut dire que l'on établit un budget sans plafonner l'effectif ou fixer un seuil. Ne pensez-vous pas que dans un scénario comme celui-là, avec la structure actuelle, vous aboutiriez à un nombre élevé d'officiers bien rémunérés et aucun fantassin?

M. Gibson: Je ne pense pas. D'après ce que j'ai lu, le commandant d'un secteur serait le premier responsable. C'est lui qui doit fournir des produits de qualité à ses supérieurs. Il ne va pas permettre qu'il y ait un nombre exagéré d'officiers à tous les niveaux de l'unité. Si des limites sont imposées et si l'objectif c'est d'assurer la formation et de mettre les hommes sur le terrain, je pense que c'est faisable.

À l'heure actuelle, le commandant de secteur est sans doute responsable d'environ 15 p. 100 de sa portion du budget de la milice. Tout le reste lui échappe. Si une plus grande partie du budget devait lui être confiée, il serait géré beaucoup plus efficacement et avec beaucoup moins de frais généraux.

.1615

M. O'Reilly: Est-ce que la fermeture des salles d'exercice est un problème? La plupart d'entre elles se trouvent en régions rurales; le fait qu'elles soient déménagées dans les villes crée-t-il des difficultés? Est-il plus difficile de recruter entièrement en milieu urbain? Va-t-il arriver ce qui est déjà arrivé par le passé, lorsque ceux qui venaient de la campagne étaient exclus de la réserve parce qu'ils devaient parcourir de trop grandes distances? Les membres réguliers de la force qui prennent leur retraite sont aussi exclus de la réserve à cause de la distance. Est-ce un problème dont il sera question dans les recommandations?

M. Cameron: Je ne sais pas exactement combien il y a d'unités dans ce que vous appelleriez de petites villes. Dans l'ouest du pays, en tout cas, la majorité des unités sont dans les grands centres, et un petit nombre d'entre elles ont des unités secondaires dans d'autres régions. Mais si l'on donne suite à la recommandation de la Commission pour que l'on examine les unités, on décidera si ces unités ou unités secondaires dans les plus petites localités seront conservées ou non.

M. O'Reilly: Par le passé, après les deux réductions, après la Guerre de Corée et à la fin des années soixante-dix, je crois, la plupart des petites salles d'exercice en régions rurales ont fermé leurs portes tandis que l'on a conservé celles des grandes villes.

Pour cette raison, les ruraux ont dû parcourir de grandes distances. S'ils occupent un emploi régulier, font du travail par équipe ou sur rappel, où ils n'ont pas le droit d'être à plus de 50 ou 100 milles de distance pour s'entraîner deux ou trois fois par mois, ils abandonnent la réserve.

Ce problème risque d'apparaître de nouveau à cause des recommandations de ce rapport. Y voyez-vous aussi un problème.

M. Cameron: Ça pourrait en être un.

À quelques occasions, l'aviation a beaucoup collaboré avec les petites villes des Maritimes qui leur offraient des installations en échange d'une unité de la réserve chez elle. C'est une façon de donner de l'emploi à temps partiel à certaines personnes, j'imagine, grâce à leur escadron d'infrastructure ou leur escadron de sécurité.

M. Gibson: Je me demande s'il reste des salles d'exercice à fermer dans la campagne albertaine. Les prochaines victimes seront dans les villes.

M. Rossetto: Il n'y a pas beaucoup de ce que j'appellerais des salles d'exercice rurales. Je ne pense pas qu'il en reste. Mais ce que vous dites est tout à fait juste.

Le revers de la médaille, c'est pourquoi a-t-on besoin de salles d'exercice? Qu'est-ce qui fait qu'un immeuble est si important? La présence d'une unité est bien plus importante que l'endroit où elle se réunit. Il y a sûrement d'autres endroits où les unités militaires peuvent se réunir, surtout quand on connaît la taille des unités. Il ne s'agit pas d'un régiment, ici. Il y a une salle d'exercice à Regina, je crois, qui loge sept unités et je pense qu'à Moose Jaw ils n'ont qu'une seule unité où se réunissent 50 personnes. Elles pourraient sûrement se réunir ailleurs.

M. O'Reilly: Ce sont là toutes les questions que j'avais à poser.

M. Richardson (Perth - Wellington - Waterloo): Je remercie les témoins de leurs témoignages.

Monsieur Rossetto, vous êtes membre de l'Institut interarmées et vous semblez avoir de l'expérience des forces armées. Avez-vous été membre des forces aériennes, terrestres ou navales?

M. Rossetto: J'ai fait partie des forces régulières de l'armée pendant la plus grande partie de ma carrière et j'ai été passé quelques années dans la réserve.

M. Richardson: Dans la Princess Patricia's Canadian Light Infantry?

M. Rossetto: Dans le Royal Canadian Regiment, un bon régiment.

M. Richardson: En effet.

M. Rossetto: Merci.

M. Richardson: Dans vos propositions, vous parlez de l'Australie et de son positionnement. J'en connais un peu sur le sujet, mais vous avez adopté un point de vue différent. En Australie, le système est fondé sur les régiments. C'est un peu comme nos anciennes forces auxiliaires de l'air, dans lesquelles on trouve des troupes d'appoint provenant du corps-école d'officiers canadiens. Là-bas, les universités ont des régiments.

.1620

M. Rossetto: Nous avons reçu le rapport sur leur dernière réorganisation de la réserve. En fait, on y trouve un système à deux paliers, assez semblable au nôtre. Toutefois, au cours des dernières années, l'Australie a mis en oeuvre un régime semblable à celui que nous recommandons. En fait, dans mon mémoire, j'affirme que, tant que nous en resterons à l'ancien système et que nous refuserons d'adopter le nouveau système, nous ne pourrons réaliser d'économies et accroître l'efficacité de notre réserve.

En Australie, il existe des régimes parallèles actuellement, et il ne semble pas y avoir de lien direct entre les deux. C'est peut-être là la seule faiblesse.

M. Richardson: Les mêmes normes s'appliquent probablement aux deux.

M. Rossetto: Je parle du service, de ceux qui remplissent leur engagement au sein des forces régulières pour ensuite passer à la réserve. Je n'ai vu aucun document qui traite du régime parallèle.

Celui que nous avons reçu provient du Haut-commissariat de l'Australie à Ottawa. Vous pourriez sûrement en obtenir un exemplaire.

M. Richardson: Nous l'avons déjà.

Voici une autre question: Le commandant de secteur s'est-il entretenu avec l'Institut interarmées?

M. Rossetto: Oui.

M. Richardson: Il a tenu pour vous une séance d'information?

M. Rossetto: Oui. Au sujet de la réorganisation de la réserve?

M. Richardson: Oui.

M. Rossetto: C'est un document que l'Institut a présenté et qui découle de ses propres recherches.

M. Richardson: Vous êtes le seul à avoir parlé d'un coût allant de 800 millions à 1 milliard de dollars. D'où tenez-vous ces chiffres?

M. Rossetto: Les prévisions pour l'année financière 1994-1995 étaient de 1,03 milliard de dollars pour l'ensemble de la réserve et d'environ 0,5 milliard de dollars pour la milice.

C'est en effet une question sur laquelle on ne s'est pas penché directement. La plupart des gens ne se rendent pas compte des sommes d'argent... On a discuté de l'affectation du budget. J'ai entendu tous les arguments selon lesquels l'argent réservé à la réserve se retrouve au bout du compte dans les poches des forces régulières, et que les forces régulières dépensent l'argent de la réserve et, par conséquent, une partie des sommes qui lui sont allouées.

Je ne peux prendre position à ce sujet. Tout ce que je peux vous dire, c'est que les sommes qui sont allouées ou dépensées représentent environ un dixième du budget de la défense.

M. Richardson: Vous nous avez présenté votre suggestion oralement et par écrit, et elle figure maintenant au compte rendu. Vous nous dites que la réserve deviendrait ainsi plus rentable. Comment? Où pourrions-nous accroître la rentabilité? Vous nous en avez donné un aperçu verbal, mais n'avez pas abordé en détail les stratégies de réduction des coûts.

M. Rossetto: Vous n'avez qu'à regarder l'organisation des unités de réserve dans l'ensemble. On a souvent reconnu et signalé qu'il y a une forte concentration de personnel à certains grades, qu'à certains niveaux d'expérience, les réservistes ne peuvent être déployés sur le terrain comme le seraient les troupes des forces régulières.

Disons que vous avez les unités qui ont un effectif complet d'officiers supérieurs mais seulement 50 soldats, par exemple. Ne pourrait-on pas réduire la taille de ces unités de façon à ce que les officiers supérieurs soient moins nombreux?

Je comprends qu'au niveau des officiers... C'est compréhensible, dans une grande mesure, parce que toute organisation qui existe depuis un certain nombre d'années tend à prendre la forme d'une pyramide inversée. Par contre, la réorganisation de la plupart des unités de la milice ne traduit pas les exigences de commandement que présentent des forces de cette taille. Tant que vous serez prêts à accepter qu'il y ait un nombre si important d'officiers, vous devrez assumer ces coûts exorbitants qui ne servent pas nécessairement à ce qui est le plus efficace du point de vue militaire.

M. Richardson: Quel genre de formation donne-t-on aux officiers de la milice?

M. Rossetto: Certains - les meilleurs - suivent une formation d'été comme celle des forces régulières pendant deux ou trois ans. Puis, lorsqu'on les envoie dans les unités... Si votre unité n'a les effectifs que d'un peloton, que commande le major?

M. Richardson: Mais il y a des unités de ce genre dans l'ouest du pays.

M. Rossetto: Il y en a dans toutes les régions du pays, monsieur.

M. Richardson: Eh bien...

M. Rossetto: Il y en a beaucoup.

.1625

M. Richardson: Certaines des unités qui sont représentées au sein de ce comité-ci sont assez solides. Certaines comptent près de 400 réservistes. D'autres se sont rendus au camp d'été avec un effectif de 275. Nous n'avons pas entendu parler d'une unité ne comptant que deux membres, mais c'est possible.

Quelles sont les normes de formation à l'heure actuelle?

M. Rossetto: Voilà précisément où je veux en venir. Vous n'avez qu'à regarder les chiffres. Vous voudrez alors peut-être soulever la question de l'écart entre les effectifs sur papier et les effectifs réels. Vous vous demanderez peut-être combien de réservistes on trouve dans les manèges, qui sont pratiquement toujours disponibles, par opposition à ceux qui ne font que passer ou qui ne font même pas acte de présence. Il y a une grande différence entre les deux.

Pour ce qui est des exercices, ils sont très bien, en général. Mais il n'est pas inhabituel dans la réserve - bien que je ne sois pas un expert à ce chapitre - de trouver aux exercices davantage d'officiers et de sous-officiers supérieurs que de troupes.

On a constaté que pour les missions de l'ONU, tous les soldats étaient nécessaires pour les phases un et deux.

M. Richardson: Une dernière question. Après combien de temps un soldat de la force régulière peut-il s'attendre à être déployé? Combien de temps leur donne-t-on?

M. Rossetto: Pour les missions de l'ONU, on leur donne trois mois.

M. Richardson: C'est exact.

M. Rossetto: On donne aussi trois mois aux réservistes.

M. Richardson: Compte tenu de leurs compétences, y a-t-il une différence à leur retour?

M. Rossetto: Je présume que oui, sinon, on ne ferait pas appel à eux.

On constate qu'il y a une différence entre la formation des soldats par opposition à la formation des unités.

M. Richardson: Mais l'unité n'est rien d'autre qu'un ensemble de soldats.

M. Rossetto: Non, monsieur. À mon avis, il y a une grande différence entre former un marin et former tout l'équipage d'un navire.

Disons qu'on parle de l'infanterie - mon exemple à moi - d'un membre de l'infanterie qui s'acquitte très bien de ses tâches individuelles. Comment se comportera-t-il lorsqu'il devra travailler au sein d'un peloton, d'une compagnie ou d'un bataillon, surtout si le commandant dirige un bataillon pour la première fois?

M. Richardson: Je préfère ne pas m'engager dans ce débat.

M. Rossetto: D'accord.

M. Richardson: Je ne veux pas m'engager dans un débat, mais cela ne signifie pas que j'estime que vous avez raison.

M. Rossetto: On ne peut pas tous avoir toujours raison.

Le président: Merci, messieurs.

Monsieur Bertrand.

M. Bertrand (Pontiac - Gatineau - Labelle): Merci, monsieur le président.

J'ai lu une partie du rapport. En cas de désastre naturel, les autorités locales ont-elles facilement accès à la réserve à votre avis? Dans la négative, que pourrions-nous faire pour rectifier la situation?

M. Cameron: Toute province peut faire appel à la réserve par l'entremise du procureur général qui fait la demande de service. Vous parlez de paliers inférieurs?

M. Bertrand: Oui.

M. Cameron: Vous parlez donc du palier municipal. Je ne crois pas que la ville ait le droit d'exiger les services des forces armées, qu'elles soient régulières ou de réserve, sauf par l'entremise du procureur général.

M. Bertrand: Croyez-vous que ce soit une bonne chose? Disons qu'un désastre naturel se produit à Edmonton. La ville d'Edmonton estime avoir besoin de réservistes, mais le procureur général de la province refuse de faire la demande parce que cela coûterait trop cher. Essentiellement, c'est une question de coûts. Croyez-vous que dans des circonstances exceptionnelles, la ville pourrait demander elle-même l'aide des réservistes?

M. Cameron: Si le gouvernement fédéral était prêt à en assumer les coûts. Il faudra que quelqu'un paie au bout du compte. Disons que la municipalité est prête à payer. Alors, manifestement, si elle le dit au procureur général de la province, il sera probablement d'accord. Il s'agit de déterminer qui paiera la note.

M. Rossetto: À Edmonton, où il y a eu une tornade, c'est le contraire qui s'est produit. L'officier chargé de l'unité de réserve a pris l'initiative de déployer ses troupes. Il a été réprimandé précisément pour avoir pris cette décision.

Premièrement, il n'avait pas le pouvoir de le faire. Deuxièmement, il y avait le problème juridique de la responsabilité des soldats qui avaient été déployés dans de telles circonstances. C'est surtout une question de coûts.

.1630

M. Hart: Puis-je poser une courte question complémentaire?

L'été dernier, il y a eu un incendie tout près de Penticton, et le procureur général a demandé l'aide des militaires. Plutôt que d'envoyer des Dragoons, qui étaient à 60 kilomètres de là, on a fait venir les forces régulières de Winnipeg.

Cela m'amène à me demander pourquoi, dans de tels cas, on n'a pas recours aux réservistes? Ça prouve que quelque chose ne va pas dans la structure et le mandat de la réserve.

M. Cameron: Si vous faites appel aux réservistes dans une telle situation, vous devrez les mobiliser, à moins qu'ils ne se portent volontaires.

À l'occasion des inondations à Winnipeg, vers les années...

M. Richardson: En 1955.

M. Cameron: Non, c'était plus tard, dans les années soixante-dix. Des volontaires de la milice, de Winnipeg et d'ailleurs, sont venus prêter main forte aux unités des forces régulières. Mais il fallait que ce soit des volontaires. Aucune loi ne nous permettait de déployer les réservistes.

M. Hart: Mais puisqu'on envisage de restructurer la réserve, ne pourrait-on pas leur donner un rôle à jouer en matière de protection civile au sein de cette province? Plutôt que de faire venir les forces régulières à Winnipeg, ne pourrait-on pas faire appel à l'unité de la réserve locale?

M. Cameron: Certainement. Mais, encore une fois, les réservistes devraient alors abandonner leur emploi civil pour prendre leur charge de réservistes.

M. Mifflin (Bonavista - Trinity - Conception): Puis-je apporter une précision à mon collègue?

Le procureur général ne s'adresse pas au ministre; il s'adresse au chef d'état-major de la défense à qui il incombe de mobiliser les troupes. S'il estime que la réserve ferait l'affaire et qu'on peut se permettre de la payer, il la mobilise.

Je n'ai pas d'exemple récent de cela, pour les raisons énoncées par M. Rossetto - la solde, la responsabilité et, parfois, honnêtement, parce qu'on ne sait pas si les réservistes se présenteront au service actif.

M. Richardson: C'est ce qu'on a fait à Oka, soit dit en passant.

M. O'Reilly: J'invoque le Règlement, monsieur le président. La parole est à M. Bertrand. On l'a interrompu trois fois. A-t-il encore la parole ou est-ce nous qui...?

Le président: Monsieur O'Reilly, dans ce genre de situation, si quelqu'un veut intervenir sur le même sujet, pour des questions complémentaires, nous le permettons habituellement. C'est ce que fait notre comité. Si vous voulez changer la règle, je peux recevoir une motion et...

M. O'Reilly: C'est seulement que je n'ai jamais siégé à un comité où on pouvait intervenir pendant le temps de parole de quelqu'un d'autre. Je serais ravi d'interrompre mes collègues.

Le président: Seulement si votre question est pertinente au sujet traité.

M. O'Reilly: Il ne faut pas que les règles soient trop sévères.

M. Bertrand: C'est encore mon tour.

J'ignore si vous pourrez me répondre, mais j'ai une question à vous poser au sujet de la Garde nationale des États-Unis. Je sais que, là-bas lorsqu'il y a un désastre naturel, on n'appelle ni l'armée ni la réserve, mais bien la Garde nationale.

En cas de catastrophe naturelle, ne pourrions-nous pas faire jouer aux réservistes un rôle semblable à celui de la Garde nationale, ou s'agit-il encore d'une question de coûts?

M. Gibson: Il y a eu une situation de ce genre récemment à Medecine Hat, où il y a eu des inondations. Les Forces britanniques étaient prêtes à intervenir dès qu'on a constaté le problème. Or, le commandant en poste a dû négocier pendant deux jours avant de pouvoir déployer ses troupes volontaires en uniforme. On a trouvé que c'était l'occasion parfaite pour eux de faire sentir leur présence dans la collectivité. Finalement, le commandant de secteur a accepté d'assumer la responsabilité des troupes qui ont été déployées pendant quelques jours.

Je crois savoir que les provinces hésitent à faire appel aux réservistes, parce qu'on leur facture tous les coûts. Si la solde des soldats est de 10$, la facture sera de 100$ après qu'on lui aura ajouté tous les autres frais. Ce n'est donc plus un coût qu'on peut assumer bien...

M. Bertrand: Une somme astronomique.

M. Gibson: Du moins, c'est ainsi qu'on a décrit la situation. Je n'ai moi-même jamais fait ces calculs.

Le président: Pour ma part, je crois savoir que les provinces ne paient pas. La plupart des provinces ne paient jamais la note.

M. Gibson: Ce n'est pas étonnant.

M. Cameron: Ça, c'est seulement l'Île-du-Prince-Édouard qui fait cela.

.1635

Le président: Non, la Colombie-Britanique...

M. Bertrand: Les provinces refusent de payer?

Le président: Oui. On leur envoie la note, mais elles refusent de la payer.

M. Bertrand: Mais pourquoi hésitent-elles donc à faire appel à la réserve?

Le président: C'est un peu comme dire: «Pourquoi ne posez-vous pas des questions tous les jours pendant la période de questions?» Ce sont les règles. C'est ainsi que ça marche.

M. Cameron: En ce qui concerne la Garde nationale, il y a aussi des gardes nationales d'État que les gouverneurs peuvent, je crois, aux termes de la loi, mobiliser. Lorsque les réservistes sont mobilisés, la loi les oblige à reprendre du service actif. Ce n'est donc pas tout à fait comme ici.

M. Rossetto: Leurs emplois sont aussi garantis. Dans certains cas, on versera peut-être aussi au réserviste la différence entre sa solde de réserviste et sa rémunération habituelle. Cela semble très facile.

Si on adoptait une loi semblable qui obligerait les réservistes à répondre à l'appel mais qui stipulerait aussi que la différence entre leur salaire et leur solde de réserviste leur serait versée, ce serait déjà une amélioration.

Le président: Monsieur Frazer.

M. Frazer: Lieutenant-colonel Cameron, dans votre mémoire - je crois que le Colonel Gibson y a aussi fait allusion - vous dites que le nombre de brigades recommandé par la Commission devrait être non pas de sept, mais de huit à tout le moins afin de tenir compte de la taille de la région de l'Ouest. Est-ce bien là la raison?

M. Cameron: Oui. Compte tenu de la taille de la région de l'ouest, on devrait prévoir un nombre supérieur de brigades pour toutes les régions et toutes les unités de la milice. Comme on l'a déjà fait remarquer, si on augmente ce nombre, il faudra probablement prévoir des augmentations ailleurs pour compenser. Encore une fois, c'est une question d'argent.

M. Frazer: Oui, je comprends. Ce qui me préoccupe, c'est qu'à première vue, le nombre de brigades a été calculé en fonction de la population des quatre régions en cause, c'est-à-dire l'Atlantique, le Québec, l'Ontario et l'Ouest. C'est pourquoi, au lieu d'ajouter une brigade de plus, ne pourrait-on pas répartir davantage les membres de ces brigades? Ils continueraient d'appartenir à la brigade, mais celle-ci serait mieux répartie en fonction de la population de la région.

M. Cameron: Proposez-vous une augmentation de l'effectif ou...

M. Frazer: Non. Je me demande si une troisième brigade est vraiment nécessaire dans l'Ouest. Pourriez-vous vous débrouiller avec deux en les répartissant un peu plus dans la région? Cela semble correspondre à la population de cette région.

M. Cameron: Oui, je comprends que la recommandation se fondait sur la population, mais sans tenir compte des caractéristiques géographiques de l'Ouest.

M. Frazer: Il y a aucune raison pour ne pas avoir une partie d'une brigade à Winnipeg et l'autre partie à Regina, par exemple. Ces soldats pourraient appartenir à la même brigade. Bien sûr, il y a un petit problème de distance, mais grâce aux moyens de transport modernes, les commandants pourraient facilement aller et venir pour établir des normes.

M. Cameron: Oui.

M. Frazer: Si je pose la question, c'est parce qu'à mon avis, la proposition relative aux sept brigades visait sans doute à réduire les frais généraux, en diminuant l'infrastructure qui fait augmenter les dépenses considérablement. J'ai également été frappé de voir que si le nombre de districts était ramené de 14 à sept, cela permettrait d'économiser des sommes très importantes qui pourraient alors être réaffectées aux manèges, dont vous avez parlé à plusieurs reprises.

M. Gibson: Il y aura une brigade en Colombie-Britannique où les Montagnes Rocheuses constituent une séparation naturelle. De là vous iriez directement à Lakehead. C'est cela?

M. Frazer: Oui.

M. Gibson: Cela représente une distance énorme à parcourir pour des gens qui sont censés être des soldats à temps partiel. Il est déjà assez difficile de transporter les gens de Calgary à Wainwright lorsqu'il ne s'agit pas des manoeuvres d'été. Cela représente 5 heures et demie de voyage dans chaque sens, si tout se passe bien. Il est impossible de mettre sur pied un programme d'instruction cohérent à une telle distance.

Les frais généraux ne sont pas vraiment dus au commandement de secteur; il s'agit du minimum de frais généraux divers de 30 p. 100 supplémentaires qui ne sont pas visibles. Les gens savent que ces dépenses existent. On retrouve ces montants dans tous les calculs, mais personne ne peut dire précisément où ils sont dépensés.

.1640

Les commandants de secteur et même certains anciens commandants de l'armée ont dit que la proportion du budget total qui était affectée à des secteurs bien précis, connue d'eux, était très restreinte.

M. Cameron: S'il n'y avait que deux brigades, il coûterait certainement beaucoup plus cher de déplacer les gens sur de grandes distances pour participer à un programme d'instruction collectif que s'il y avait trois brigades devant se déplacer sur une courte distance.

M. Frazer: Ma question était la suivante: où l'entraînement collectif pourrait-il avoir lieu dans l'Ouest si ce n'est à Wainwright?

M. Cameron: À Dundurn.

M. Frazer: Ce n'est pas tellement loin.

M. Cameron: Il y a Dundurn, Suffield, les Chilcotins et Chilliwack, si la base existe encore.

M. Frazer: Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais je pense que nous parlons maintenant d'une autre brigade. Vous avez parlé de l'éventualité d'une brigade en Colombie-Britannique qui utiliserait les installations des Chilcotins, de Chilliwack, etc., mais l'autre brigade, celle des Prairies, recevrait sans doute son instruction à la base de Wainwright. Suffield est une autre possibilité. Je ne veux pas m'attarder sur cette question, mais je me demande si cette troisième brigade est vraiment nécessaire.

Soit dit en passant, messieurs, vous avez certainement compris que vous n'êtes pas ici aujourd'hui par hasard. Nous voulions consulter des gens ayant une divergence d'opinions et grâce à vous trois, nous avons obtenu ce que nous souhaitions. C'est en partie pourquoi nous vous avons invités à comparaître ensemble.

Colonel Cameron, lorsque vous avez dit que la réserve supplémentaire devrait idéalement être divisée en unités et en éléments et formations spécialisés, avez-vous eu l'occasion d'établir ce que cela coûterait en plus du budget actuel?

M. Cameron: Je ne pense pas que cela coûte très cher. Si le programme informatique est en place et qu'un militaire est muté de la force régulière ou de la réserve primaire à la réserve supplémentaire, il s'agit de l'affecter dans une unité le plus proche possible de là où elle va, sur la liste supplémentaire, plutôt que de se contenter de lui donner un numéro dans l'ordinateur.

M. Frazer: Se présente-t-il jamais au rapport? A-t-il une affiliation quelconque avec cette unité ou y est-il simplement affecté, si c'est le cas, à quoi cela sert-il?

M. Cameron: Il est affilié à l'unité et, comme je l'ai dit, idéalement, il faudrait encourager la création d'associations par ces unités. Cela ne coûterait rien, pas plus que le regroupement à l'heure actuelle.

M. Frazer: Je me demande comment on peut créer cette association si la personne en question n'est pas vraiment rattachée à l'unité à laquelle elle est affectée et si elle n'établit pas...

M. Cameron: Il faudra encourager les membres de l'unité à créer des associations. Vous avez raison.

M. Frazer: Cela va entraîner des dépenses, à mon avis.

Major Rossetto, si je ne m'abuse, vous avez proposé que l'on suive un an d'instruction dans la force régulière suivie de deux ou trois semaines par an au cours des cinq années suivantes, sans doute pour mettre à jour son entraînement ou perfectionner ses compétences. Est-ce bien ce que vous voulez dire?

M. Rossetto: Oui. Les détails du programme d'instruction pourront être laissés à ceux qui sont le plus qualifiés dans ce domaine. Toutefois, une instruction de base au sein de la force régulière ou d'une unité...

M. Frazer: Oui.

M. Rossetto: ...qui offre ce programme à plein temps est souhaitable.

Certaines personnes ont vu d'un mauvais oeil l'idée de confier à la force régulière l'instruction auparavant assurée par la force de réserve. On passe à côté de l'objectif essentiel, à savoir s'assurer que tous les réservistes ont acquis un niveau donné après une certaine période d'instruction et déterminer ce niveau de compétence de concert avec la force régulière.

Le suivi peut alors s'effectuer de diverses façons. À notre avis, il faut que le programme soit aussi souple que possible pour permettre aux gens de choisir une autre période continue d'entraînement au sein de la force régulière, ou au contraire la fragmentation en plusieurs étapes. On peut établir à l'avance un programme adapté aux besoins de chacun en tenant compte de ses études ou de son emploi, de façon à ne rien laisser au hasard. Une fois cette entente conclue, s'il est entendu que l'an prochain vous devez suivre l'instruction pendant quatre ou six semaines, vous serez présent et c'est là l'objectif essentiel. Puis, après une certaine période de participation assidue, vous serez dispensé.

M. Frazer: Une fois que ces personnes auront suivi leur année d'instruction dans la force régulière ou auront acquis les compétences requises, seront-elles affectées à des unités ou s'évaporeront-elles dans la nature pour revenir au bout de quelques mois parfaire leur instruction?

M. Rossetto: Là encore, il a été proposé de faire l'un ou l'autre. Ceux qui habitent près des unités de réserve pourront les intégrer et travailler avec elles à n'importe quel moment, et pas seulement lorsqu'ils doivent aller faire leur service. Ou en fait, ces personnes pourront disparaître jusqu'à la date de leur prochaine période de service.

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Le problème pour bon nombre de réservistes et de leur service, c'est qu'ils habitent bien souvent loin des unités de réserve et qu'il leur est donc impossible de participer aux activités ou à l'instruction de la force de réserve. Ce serait une façon de surmonter ce problème.

M. Frazer: Dans votre exposé, vous avez également proposé de modifier le système de façon à tenir compte du rang, du nombre de personnes et des structures. Supposons qu'il s'agit d'une unité ne comptant qu'une seule section, composée de 30 ou 35 personnes. À votre avis, cette unité sera-t-elle commandée par un capitaine?

M. Rossetto: Ou un lieutenant.

M. Frazer: À partir d'où le commandement s'effectuerait-il?

M. Rossetto: Si cette unité, comme nous l'avons dit, équivaut à un peloton, elle fait partie d'une entité plus vaste qui est censée être intégrée à cette brigade. En conséquence, la personne relève de l'officier supérieur en question.

M. Frazer: Il constituerait donc une partie de bataillon.

M. Rossetto: C'est inévitable. Il est impossible d'avoir un peloton qui ne relève de personne, laissé à lui-même. Il faudra qu'il fasse partie d'une unité plus importante, mais au moins il s'agira d'une véritable organisation composée de personnes en chair et en os.

M. Frazer: Parmi ces recommandations, comme vous le constaterez, la Commission a déclaré qu'elle jugeait la question d'une instruction réaliste plus importante encore que celle de la solde; autrement dit, il faut qu'un véritable sergent commande une véritable section et qu'un lieutenant ou un capitaine commande un véritable peloton.

Avez-vous par hasard remarqué la recommandation numéro 33? Vous disiez que les réservistes n'étaient pas disponibles. Dans son rapport, la Commission parle de l'obligation de servir.

Avez-vous lu cette recommandation et l'approuvez-vous?

M. Rossetto: Je l'ai lue et je me suis senti honoré car c'est peut-être la contribution que nous avons faite à ce rapport.

M. Frazer: Je comprends. Vous êtes donc relativement satisfait de cette recommandation.

M. Rossetto: Oui, à condition qu'il s'agisse vraiment d'un contrat de travail.

M. Frazer: À condition qu'il soit appliqué, vous voulez dire?

M. Rossetto: C'est exact.

En fait, il y a des années lorsque je travaillais au quartier général du SOFT à Edmonton, j'ai été choqué de voir un réserviste se faire accuser d'être en absence sans permission, ou en ASP, comme certains le disent. C'est la première fois que cela se produisait depuis des années. Il ne s'agit donc pas simplement du règlement mais de la façon dont celui-ci est appliqué.

M. Frazer: Colonel Gibson, que pensez-vous de cette recommandation? Approuvez-vous cette exigence?

M. Gibson: Elle est claire et logique; je ne vois rien à y redire.

M. Frazer: Est-elle réaliste? Les gens se joindront-ils à la réserve et se plieront-ils à cette discipline?

M. Gibson: Oui, si en échange ils reçoivent ce qui leur a été promis, à savoir une certaine somme et une certaine instruction.

M. Cameron: Oui, je suis d'accord avec vous.

M. Rossetto: Puis-je vous demander pourquoi vous voulez quelqu'un d'autre? Pourquoi voulez-vous d'une personne qui ne sera pas nécessairement là?

M. Frazer: Non, je suis d'accord.

Colonel Gibson, lorsque nous avons discuté avec les membres de la Commission pendant les séances d'information, vous avez dit à deux reprises que, à votre avis, au lieu de se préoccuper de nombres, la Commission devrait s'occuper de coûts. Je croyais avoir compris en discutant avec les membres de la Commission que c'était effectivement le cas.

Ils ont proposé de supprimer certains échelons hiérarchiques, de diminuer les quartiers généraux de district et de réduire le nombre d'officiers supérieurs. D'après eux, pour la même solde, on peut avoir quatre simples soldats pour un seul lieutenant-colonel. Ils étaient donc d'avis que le montant de 14 500$ actuellement prévu pour la milice pourrait en fait être augmenté considérablement, peut-être pas pour atteindre 20 000$ comme vous le proposez, mais pour être au moins porté à 16 000$ ou 16 500$.

M. Gibson: Ce n'est pas l'impression que j'ai eue en lisant le rapport. Si telle était l'opinion des membres de la Commission, nous sommes tout à fait d'accord.

M. Frazer: C'est en tout cas la justification qu'ils nous ont fournie.

N'est-ce pas vrai, monsieur le président.

Le président: Oui.

M. Frazer: La question m'intéresse également parce qu'hier, certains jeunes officiers ont fait une suggestion qui allait un peu dans le même sens que la vôtre. À leur avis, le coût de la réserve devrait être calculé en fonction de son rôle et de ses besoins ou des besoins de la Force régulière. Ils ont proposé également de faire une étude sur toute cette question.

Cela me vexe un peu car je pensais que nous, au Comité spécial mixte, avions passé une bonne partie de l'année à essayer de déterminer le rôle qu'est censée jouer la Force de défense canadienne. Même si nous n'avons pas pu examiner en détail la réserve, nous pensions avoir établi que la réserve était là pour soutenir la force régulière chaque fois que c'était possible. Vous n'êtes pas d'accord sur ce point, je suppose?

M. Gibson: Premièrement, le mandat de la force régulière et l'essentiel du mandat de la réserve sont assez bien définis dans le Livre blanc, à mon avis. Je n'ai rien à y redire. Ce qui me pose un problème, si l'on accorde la priorité à ce mandat, c'est la façon de le financer à tous les niveaux. Une énorme part des dépenses tombe entre les secteurs des crédits pour grandes dépenses en capital et la masse salariale, et on ne semble pas s'en préoccuper. Voilà ce qui me pose un problème.

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M. Frazer: Je le répète, lors de la séance d'information avec les commissaires - j'ai essayé de trouver ce renseignement dans le rapport et je n'ai pas réussi, mais je pense que c'était la citation de Charlie Belzile - ces derniers ont dit que l'on essayait de canaliser les fonds vers le manège militaire pour s'assurer que celui-ci recevait bien la somme voulue. Ils nous ont dit également qu'il faudrait garantir aux réservistes quatre jours d'instruction par mois, de septembre à mai.

M. Gibson: Ils ont apporté des précisions. Je dis simplement que même dix brigades, ce qui représente environ 20 600 personnes, ne représentent quand même pas plus de 80 000$ par an en solde - dix jours de cours, quatorze jours d'entraînement d'été, quarante jours d'instruction régulière et six postes à plein temps pour chaque unité, même s'il y avait soixante personnes - ce qui est une portion infime du budget total. Si vous prenez le montant indiqué, je suis sûr que pour la solde des réservistes il est trois fois plus élevé.

Je dis qu'il faut tout naturellement supprimer les deux autres tiers. Il faut commencer au niveau de l'unité. Il faut laisser le commandant de secteur déterminer ses besoins, et dire ensuite que personne d'autre n'a aucun besoin à moins de pouvoir le convaincre du contraire. Cela vous permettra de faire disparaître d'énormes...

Je ne dis pas que cet argent soit dépensé à mauvais escient, mais en tout cas, il est bien mal justifié.

M. Frazer: C'est vrai. Ces jeunes officiers ont fait pratiquement ce que vous dites. Ils ont fait leurs calculs en partant du manège et en grimpant les échelons et en sont arrivés à ce qu'ils considéraient un coût plus représentatif de la milice, soit 500 millions de dollars par opposition aux 750 millions à 1,03 milliard proposé dans ce rapport.

M. Rossetto: Pour la milice proprement dite, il est prévu 500 millions de dollars. Le montant de 1,03 milliard correspond à toute la réserve, tant navale que terrestre, ainsi qu'aux communications. Il n'y a donc pas une énorme différence entre les chiffres.

M. Gibson: Nous avons fait l'exercice avec un certain nombre de personnes différentes, certains membres de la milice, certains anciens membres de la milice, pour en arriver à la structure de ces dix groupes-brigades hypothétiques et aussi pour les sept. Pour sept brigades, la solde coûte 58 millions de dollars et, pour dix, 82 millions. Ce que je dis, c'est que ces 82 millions représentent à peine plus de la moitié du calcul approximatif fait par la Commission lors de son étude.

M. Frazer: Les commissaires nous ont cité un chiffre approximatif de 0,75 milliard de dollars, et ils n'ont pas pu nous expliquer comment ils en étaient arrivés à ce montant, mais c'est nettement moins que le 1,03 milliard dont vous parlez.

M. Rossetto: C'est simplement la prévision pour cette année, ce qui ne correspond pas nécessairement... Ils parlaient de fonds vraiment dépensés, n'est-ce pas?

M. Frazer: Oui, et il ne s'agissait pas de la milice. Il s'agissait de tout le programme de la réserve, ce qui est assez intéressant.

Je n'ai pas d'autres questions pour le moment.

M. Mifflin: À l'instar de mes collègues, je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins et à les féliciter de l'intérêt qu'ils portent à la question et de la documentation détaillée qu'ils ont préparée. J'ai eu l'occasion d'y jeter un coup d'oeil, même si je n'ai pas tout lu de bout en bout. Je vous remercie beaucoup de votre travail.

Vous êtes là évidemment pour examiner le rapport et nous dire ce que vous en pensez, en bon ou en mauvais. Nous sommes là, et vous le savez certainement, pour déposer le rapport au Parlement ainsi que nos recommandations, ce qui ne sera pas chose facile.

Je tiens à vous expliquer notre position, pour vous mettre au courant. La plupart des députés présents aujourd'hui étaient membres du comité spécial mixte et nous avons été imprégnés de l'importance des forces de réserve. Nous avons constaté que notre intérêt devenait tel qu'il n'y avait plus de place pour le reste dans notre rapport, de sorte qu'il nous a fallu interrompre notre étude et nous décider de nous pencher sérieusement sur cette question.

Comme vous, nous sommes donc, d'une certaine manière, victimes des circonstances, et que nous luttions contre elles ou non, nous allons devoir en décider à huis clos.

Nous devons décider, à mon avis, tout au moins, si le comité a obéi à son mandat et peut-être n'avons-nous pas besoin de beaucoup d'aide sur ce point.

.1655

Certaines de vos observations m'ont rendu perplexe et pour la première série de questions, monsieur le président, je me contenterai de demander quelques éclaircissements.

Je vous ferai d'abord remarquer que je ne suis pas susceptible, et je ne pense pas que mes collègues du comité le soient. Major Rossetto, vous reprochez aux hommes politiques de ne pas avoir proposé de loi, mais nous nous sommes enhardis au cours des séances du comité spécial mixte et étions sur le point, par consensus du comité, de faire cette recommandation sans même attendre l'étude.

Ce sont les réservistes qui ont insisté qu'il n'en soit rien parce qu'on n'engage ni les réservistes ni les gens de la milice; c'est un vrai problème, et c'est ce que nous continuons à entendre. Certains réservistes prestigieux ainsi que des colonels honoraires nous ont dit qu'ils n'étaient pas sûrs d'être en faveur de cette recommandation, et c'est ce que nous avons entendu depuis que le comité existe. Ne rejetez donc pas la faute sur nous, nous étions disposés à aller dans ce sens mais c'est de vos propres rangs qu'émanent certaines réserves sur cette recommandation finale, l'une des plus importantes de l'étude, à mon avis.

M. Rossetto: C'est vrai.

Il y a deux parties de la loi qui ont été laissés en suspens, à mon avis tout au moins: l'une est l'article qui oblige les réservistes à faire du service, l'autre - celle dont vous parlez - porte sur la garantie de leur emploi.

M. Mifflin: C'est exact.

M. Rossetto: Ce que je disais tout à l'heure en est un exemple, c'est comme cela que les Américains trouvent plus facile de rappeler leurs troupes....

M. Mifflin: C'est exact.

M. Rossetto:...l'une des façons - et je ne sais si vous pouvez résoudre le problème ou non. C'est pourquoi, s'il n'y a rien à cet effet dans la loi, on pourrait tout au moins mettre en place une structure et une structure administrative telles que les réservistes seraient dans l'obligation de faire leur service militaire. Mais je comprends votre point de vue, ils auraient l'impression que leur emploi en serait compromis.

M. Mifflin: N'oubliez pas en effet que si un réserviste fait partie de l'armée, il n'en gagne pas moins sa vie avec son emploi dans le civil, et si nous n'en tenons pas compte nous risquons de nuire aux réservistes et aux miliciens. Nous devons donc procéder prudemment, en tenant compte, dans une grande mesure, de ce que nous disent les témoins quand ils réagissent.

Que pensez-vous tous trois du projet de loi? Vous n'en avez pas parlé en tant que recommandation. Êtes-vous pleinement en faveur de la recommandation numéro 41 du rapport?

M. Rossetto: Au lieu d'une loi on pourrait peut-être mettre en place un système administratif qui obligerait les réservistes à se présenter dans certaines circonstances. Certes, ils ne peuvent s'engager, auprès de leur employeur, tous les mardis ou mercredis soirs, mais ils peuvent garantir que dans certaines circonstances ils se présenteront - ils peuvent accumuler leur propre... Car, à défaut de cela, peut-on encore parler d'une réserve?

M. Mifflin: Mais nous avons le Conseil de liaison des Forces canadiennes qui s'est à présent engagé... j'en ai fait l'expérience moi-même, car j'ai, à plusieurs occasions lors de réunions, remplacé le ministre, la réunion la plus récente ayant eu lieu il y a environ un mois au Nouveau-Brunswick, où Frank McKenna a proclamé un week-end de la réserve et a réalisé des progrès phénoménaux. Je pense qu'ils ont fait des pas de géant. Pensez-vous que leur action atténuerait toutes les réserves que l'on peut avoir sur la recommandation numéro 41?

M. Rossetto: Certainement.

M. Mifflin: Je vais y aller prudemment et ne pas vous demander ce que vous pensez du Conseil de liaison des Forces armées canadiennes, ce ne serait pas juste; je me contenterai de vous demander si c'était bien là la procédure administrative à laquelle vous songiez.

M. Rossetto: La Commission spéciale sur la restructuration de la réserve était elle-même mécontente de ce système.

M. Mifflin: Elle n'a laissé planer aucun doute là-dessus: elle a fourni des statistiques et n'a pas mâché ses mots dans le rapport.

M. Rossetto: Il y a été dit que seulement 175...

M. Mifflin: Absolument.

M. Rossetto: Il faudrait encourager à cette fin d'en faire davantage, mais si c'est là le genre de réactions et d'effets qu'a provoqués ce processus au cours des années, on peut se demander ce qui en réalité... Tout d'abord, d'après ce que je crois comprendre, le gouvernement fédéral est le plus à blâmer.

M. Mifflin: Absolument.

M. Rossetto: À quoi d'autre peut-on s'attendre de la part de l'employeur?

M. Mifflin: Nous pourrions peut-être aider à cet égard. Nous devrons essayer de convaincre notre président d'apporter des recommandations qui vont au-delà de l'objet du rapport, mais pour le moment je ne veux pas importuner le comité avec cette question.

Qu'en est-il des deux autres messieurs? Avez-vous tous la même opinion sur le projet de loi?

M. Cameron: Certains s'en inquiètent, je crois: les employeurs de petites entreprises hésiteront peut-être à embaucher des réservistes qui pourraient être rappelés, et les entreprises ne seraient pas en mesure de fonctionner si on ne leur accorde pas une bonne indemnité.

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C'est là la principale inquiétude, je crois.

M. Mifflin: Si pour votre malheur vous étiez un homme politique, que préconiseriez-vous?

M. Cameron: S'il y avait beaucoup de réservistes travaillant pour le gouvernement, j'approuverais sans tarder.

M. Mifflin: Colonel Cameron, votre silence est fracassant.

M. Gibson: La majorité des employeurs avec lesquels je me suis entretenu de ce sujet - c'était surtout dans l'Alberta du sud - appuient cela d'ores et déjà de leur propre chef. Ce sont eux qui résistent le plus au projet de loi, parce qu'ils pensent que d'autres ne leur en sauront pas gré.

Personnellement je préférerais qu'il soit adopté afin que tous soient sur un pied d'égalité. Il ne sera certainement pas au goût de tous et présentera des difficultés, mais il aura une action certaine. C'est un peu comme lorsqu'on a entrepris d'accorder aux femmes des congés de maternité, là aussi on s'est heurté à une grande résistance.

M. Mifflin: Nous faisons donc un travail de pionnier?

M. Rossetto: Les Australiens accordent bien une indemnité à l'employeur quand le réserviste s'absente, c'est donc un obstacle qui peut être levé.

M. Mifflin: Je vous assure que nous aurons le courage de le faire adopter, mais nous ne pouvons le faire sans que certains témoins nous appuient.

Monsieur Gibson, je vous ai peut-être mal compris, mais vous avez donné l'impression que vous ne pouviez faire le lien entre l'emploi des forces de réserve et un plan directeur de mobilisation. Je sais bien que nous n'avons pas vraiment de plan de mobilisation, c'est sans doute ce que vous voulez dire, mais dans le livre blanc, il est donné une définition claire des quatre phases de la mobilisation. Je peux donc très bien m'en accommoder. Je me demandais seulement s'il y avait quelque chose que je ne comprenais pas.

M. Gibson: C'était le colonel Cameron.

M. Mifflin: Excusez-moi.

M. Cameron: Ce que je voulais dire, c'est que par dessus tout cela, du point de vue du plan général du gouvernement fédéral, il y a...

M. Mifflin: Il n'y a pas de plan de mobilisation général.

M. Cameron: Non.

M. Mifflin: J'avais raison. Rappelez-vous, colonel, qu'une des propositions de ce rapport est précisément d'en avoir un, sur ce point je crois que nous sommes tous d'accord.

M. Cameron: Certes, mais nous voulons insister là-dessus et Dire qu'un tel plan doit comprendre tous les aspects.

M. Mifflin: Certainement.

J'aimerais maintenant vous poser quelques questions précises, et il m'en restera alors une dernière.

Je sais que le temps presse, monsieur le président.

Êtes-vous en faveur de la principale recommandation concernant la structure, à savoir la recommandation 6, selon laquelle les districts seraient éliminés et remplacés par 7 groupe-brigades de Milice?

M. Cameron: Oui.

M. Mifflin: Très bien.

Êtes-vous en faveur de la recommandation 8, qui énonce les critères de priorité pour déterminer la viabilité relative des unités de Milice actuelles?

M. Cameron: Les critères sont tous énoncés, n'est-ce pas?

M. Mifflin: Oui.

M. Cameron: Oui, je suis tout en sa faveur.

M. Mifflin: Très bien.

Je vais devoir revenir au major Rossetto pour poser ma dernière question.

Qu'est-ce que vous avez contre les cadets?

M. Rossetto: Rien, on ne m'a pas consulté.

Vous voulez dire dans le rapport?

M. Mifflin: Oui, dans votre rapport. C'est la première fois que j'ai vu quelqu'un faire ce genre de recommandation. Vous l'avez fait parce que, comme vous le dites dans votre rapport, vous considérez que nous retirons de l'argent de ce qui devrait autrement aller à la réserve.

M. Rossetto: Dans ce sens, certainement, mais je n'ai rien contre les cadets eux-mêmes.

M. Mifflin: Non, certes.

M. Rossetto: C'est mon propre point de vue. Un mouvement qui a été fondé et recommandé pour la jeunesse et la citoyenneté est financé uniquement à partir de fonds destinés à la défense. S'il s'agit d'une entreprise méritante, je propose que l'argent à cet effet devrait être pris ailleurs, à moins qu'il ne soit stipulé quelque part que cet argent s'ajoute au fonds pour la défense. C'est mon seul...

M. Mifflin: Je n'ai pas les chiffres ici, et j'en suis confus, en tant que secrétaire parlementaire, mais je peux vous assurer qu'il s'agit d'une bien petite somme, une somme insignifiante.

Notre propre comité recommande d'étoffer un peu ce fonds. Nous étions tous surpris de trouver, dans le livre blanc, une déclaration d'intention à cet effet. Ce n'est pas encore fait, il est également dit dans le rapport que ce sont les cadets avec lesquels on obtient les meilleurs résultats compte tenu de la modestie des dépenses, et vous devriez suivre ce qui est dit ici.

Nous avons trois rapports qui insistent sur la nécessité de faire davantage pour les cadets, et je serais étonné que vous ne soyez pas d'accord avec cela.

M. Rossetto: Je n'ai jamais dit qu'il ne faudrait pas consacrer de l'argent aux cadets, j'aimerais seulement que cet argent, en quantité suffisante, provienne d'ailleurs.

M. Mifflin: Avez-vous d'autres commentaires à faire sur les points que j'ai soulevés.

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M. Gibson: Je voudrais dire quelque chose en faveur des cadets. Il est essentiel pour toute la structure de ceux-ci, de la Milice et de la force régulière que nous gardions ouverte la possibilité, pour les Canadiens, de participer sous l'une ou l'autre forme au service militaire, même s'ils ne sont pas envoyés en Bosnie. Cela ne pourra que leur être utile dans la vie.

M. Mifflin: C'est vrai, et je vous en remercie.

Avez-vous d'autre chose à ajouter, colonel?

M. Cameron: Je suis tout à fait d'accord.

M. Mifflin: Il fait bon entendre cela, comme point final à votre témoignage.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: S'il n'y a plus d'autres questions, je vais vous remercier, messieurs, d'avoir bien voulu comparaître aujourd'hui. Ce fut certainement un échange fructueux. Vous constaterez que nous avons de nombreuses questions, et de nombreuses solutions à trouver avant de déposer ce rapport à la Chambre, à un moment donné. Comme je le disais à M. Mifflin, nous devrons tenir quelques séances à huit clos pour débattre de certaines de ces questions.

Je vous remercie de votre contribution, fort appréciée, à ce débat. Nous ferons probablement de nouveau appel à vous à l'avenir. Merci beaucoup.

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