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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 7 novembre 1995

.1536

[Français]

Le président: Bonjour. Je souhaite la bienvenue à tous. Aujourd'hui, conformément à l'alinéa 108(3)d) du Règlement, nous allons étudier le chapitre 6 du Rapport de mai 1995 du vérificateur général concernant les subventions fédérales au transport, et plus précisément le Programme de subventions au transport des marchandises dans la région atlantique.

Nous recevons le président de l'Office national des transports, M. Gilles Rivard. Monsieur Rivard, je vais vous céder la parole. Pourriez-vous nous présenter les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui?

Nous recevons également, du Bureau du vérificateur général, M. Hugh McRoberts, qui va pouvoir répondre à vos questions dans un deuxième temps.

Monsieur Rivard, la parole est à vous.

[Traduction]

M. Gilles Rivard (président, Office national des transports): Bonjour. Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de pouvoir m'adresser aujourd'hui au Comité permanent des comptes publics. J'aimerais faire quelques brèves remarques préliminaires.

Auparavant, je voudrais vous présenter les deux membres du personnel qui m'accompagnent aujourd'hui. M. Doug Rimmer est directeur général du Transport maritime, du Camionnage et des Bureaux régionaux, et est directement chargé de l'application du programme faisant l'objet de l'étude d'aujourd'hui. Il y a également M. Ron Ashley, avocat-conseil principal à l'Office.

[Français]

Le 6 juin, les membres du Comité des comptes publics ont eu l'occasion de discuter avec les représentants de Transports Canada, du Bureau du vérificateur général ainsi que de l'Office national des transports du chapitre 6 du rapport trimestriel du vérificateur général déposé auprès du Parlement relativement aux subventions au transport.

[Traduction]

Plus précisément, les discussions ont porté sur le Programme de subventions au transport des marchandises dans la Région atlantique créé en vertu de la Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la Région atlantique et de la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces Maritimes.

Le 22 juin, le Comité permanent des comptes publics a émis un rapport sur cette question dans lequel il demandait au gouvernement de lui faire part d'une réponse officielle.

Alors que nos homologues à Transports Canada jouent le rôle clé en ce qui a trait à la réponse officielle du gouvernement, à titre de président de l'Office national des transports, j'ai transmis une missive au comité le 5 juillet dans laquelle j'offrais les renseignements précis qu'exigeait le comité dans son rapport relativement à l'administration par l'Office du Programme de subventions susmentionné.

Plus particulièrement, j'ai informé le comité que j'avais entrepris les démarches visant à donner suite aux deux recommandations contenues dans le rapport du vérificateur général. Ces recommandations portaient sur ce que le vérificateur général qualifiait de «risques particuliers inhérents à la dissolution d'un programme».

Suivant les recommandations, l'Office devait adopter une procédure spéciale visant les demandes de subventions déposées par les transporteurs et dans lesquelles on trouvait, soit des états de frais pour des mouvements qui n'avaient pas réellement été effectués, soit des frais de transport de marchandises établis en fonction de taux excessifs ou déraisonnables.

.1540

[Français]

Tels étaient les risques que le vérificateur général avaient identifiés et, comme je l'ai mentionné auparavant, j'ai enjoint au personnel de l'Office national des transports de prendre des mesures appropriées afin de minimiser ces risques.

Du même coup, j'ai également cherché à obtenir des précisions de la part des avocats de l'Office, à savoir si l'Office avait compétence en matière d'examen des taux de transport de marchandises qu'exigent les transporteurs pour les mouvements visés par les demandes de subventions et en matière de remise en question de ces taux. Comme vous le savez, sur la question de compétence en matière d'examen des taux de transport des marchandises, la position de l'Office a toujours été qu'il n'a aucune compétence en la matière, comme je l'ai indiqué clairement dans ma lettre du 5 juillet adressée au comité. Cette position repose sur des opinions juridiques successives émises depuis de nombreuses années par des avocats de l'Office national des transports. Cependant, vous n'êtes pas sans savoir que dans une lettre que le ministre des Transports m'a transmise le 11 mai 1995, les conseillers juridiques de Transports Canada étaient d'avis contraire.

[Traduction]

Face à toutes ces opinions juridiques, j'ai choisi de prendre des mesures qui nous permettraient de tirer le maximum de notre capacité à protéger les deniers publics. J'ai donc enjoint au personnel de l'Office de mettre en oeuvre la procédure d'examen des taux et des activités. À mon avis, il s'agit là de la façon la plus sûre de protéger les derniers publics.

Si toutefois l'Office décidait de rejeter une demande de subventions en raison de taux excessifs, le transporteur touché serait libre de contester la décision de l'Office devant les tribunaux. La décision d'un tribunal relativement à cette question servirait d'indication définitive et absolue.

Dans ma lettre du 5 juillet adressée au comité, je décrivais sommairement la nouvelle procédure de l'Office en matière d'examen des taux et des activités qui est entrée en vigueur le 6 juillet.

[Français]

À ce jour, nous avons identifié 2 500 demandes de subventions qui seront assujetties à de nouvelles procédures, soit environ 30 p. 100 des demandes qui ont été déposées. Parmi ces 2 500 demandes, quelque 600 ont été examinées; les autres sont en cours de traitement.

[Traduction]

L'Office n'a pas encore décelé d'éléments pouvant laisser croire que les états de frais auraient été falsifiés ou que les demandes de subventions auraient été fondées sur des taux excessifs ou déraisonnables.

Permettez-moi d'insister, monsieur le président, sur le fait que la procédure d'examen des taux et des activités est nouvelle et qu'elle vient s'ajouter à la procédure normale de vérification et d'examen exhaustifs qui est en place à l'Office depuis déjà de nombreuses années. L'Office ne fait pas que recevoir les demandes de subventions pour ensuite verser les montants qui sont réclamés. Selon le type de demande de subventions et les demandes de subventions antérieures du transporteur, les demandes sont soumises à un examen minutieux, qui peut varier en degré. L'Office va même jusqu'à se rendre sur place, dans les bureaux des transporteurs, afin de vérifier leurs dossiers.

[Français]

En 1994, à la suite de ces diverses vérifications, l'Office a rejeté des demandes de subventions se chiffrant à 2,01 millions de dollars. Compte tenu du fait que les débours relatifs au programme se chiffrent à environ 100 millions de dollars, ceci démontre notre efficacité en matière d'examen des différentes demandes.

Je termine donc, monsieur le président, ces quelques remarques préliminaires. J'espère que j'ai pu fournir aux membres du comité des indications utiles sur l'engagement de l'Office national des transports à prendre des mesures visant à amoindrir les risques qu'avaient identifiés le vérificateur général. Nous les prenons très au sérieux et travaillons diligemment en vue de nous assurer que seules les subventions légitimes seront octroyées.

.1545

Le président: Je vous remercie, monsieur Rivard. Nous allons maintenant passer à la période des questions.

Monsieur Fillion.

M. Fillion (Chicoutimi): À la page 1 de votre déclaration, monsieur Rivard, vous nous dites ceci:

Vous nous dites aussi que vous aviez entrepris des démarches visant à donner suite aux deux recommandations contenues dans le rapport du vérificateur général.

Est-ce que ces démarches ont porté fruit relativement à l'ensemble du programme? Est-ce qu'aujourd'hui, trois ou quatre mois après l'émission de ces directives, vous pouvez nous dire si vous avez réalisé des progrès?

M. Rivard: Je suis accompagné aujourd'hui par M. Doug Rimmer, directeur général à l'Office national des transports et responsable de l'administration du programme. Je vais lui céder la parole pour qu'il puisse répondre à vos questions.

[Traduction]

M. Doug Rimmer (directeur général, Transport maritime, Camionnage et Bureaux régionaux, Office national des transports): Comme le président de l'Office vient de le dire, nous avons terminé notre examen de quelque 600 demandes. Jusqu'à présent, nous n'avons pas trouvé de demande qui aurait pu nous sembler établie selon des taux excessifs et non admissible au versement de la subvention. Nous n'avons pas trouvé de demande, non plus, qui aurait pu nous paraître fondée sur de fausses factures, des factures qui ne correspondraient pas à des transports réels.

L'exercice n'en demeure pas moins valable. Le vérificateur général a décelé un risque. Le but du programme et de notre nouveau processus de vérification est de nous assurer que ce risque ne se concrétise pas. Les transporteurs savent que nous effectuons cette vérification. Nous les en avons informés, comme le comité l'avait d'ailleurs recommandé. Comme pour tous les autres programmes de vérification du gouvernement, l'effet de dissuasion est important et il est possible qu'il se fasse sentir. Voilà cependant quels ont été les résultats de l'exercice jusqu'à présent.

Comme le président de l'Office l'a souligné, en 1994, dans le cadre de notre programme régulier de vérification, nous avons refusé des demandes de subventions pour un montant de plus de 2 millions de dollars; jusqu'à présent, en 1995, nous en avons refusé pour plus de 1,3 million de dollars. Notre processus de vérification est très actif et nous permet de refuser le versement de la subvention lorsque, à notre avis, les demandes ne sont pas conformes à la réglementation.

[Français]

M. Fillion: Monsieur le président, à la suite de la réponse que je viens d'obtenir, je me pose cette question au sujet des opinions juridiques. L'Office national des transports et le ministère des Transports sont d'avis contraires; vos avocats sont opposés à la façon de mener ce dossier-là. Est-ce que cette opposition-là ne fait pas en sorte que vous n'essayez pas trop de trouver des gens qui seraient en difficulté en ce qui a trait à ces subventions-là? Votre recherche ne se limite-t-elle pas à examiner des factures pour savoir si le transport a réellement été effectué? Pour ce qui est des distances ou de la main-d'oeuvre, par exemple, est-ce que les choses correspondent?

J'ai l'impression que vous avez intérêt à ne pas aller trop loin, puisque vous dites que vos opinions juridiques sont contraires à celles du ministère des Transports. Selon l'Office, de ce fait, le transporteur aura toujours la porte ouverte pour aller contester la décision. Donc, par crainte de faire contester vos décisions, vous préférez ne pas trop aller loin dans l'étude de chacun des dossiers.

M. Rivard: Premièrement, permettez-moi de vous dire que je suis moi-même avocat et que j'ai assumé mes fonctions de président de l'Office national des transports en 1993. Avant d'assumer mes fonctions à l'Office national des transports, j'ai présidé la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux, et c'est nous qui avions demandé au ministère des Transports de procéder à une vérification du programme.

.1550

Cela étant dit, lorsqu'on arrive à un poste quelconque, on vérifie certains aspects. À un moment donné, je me suis interrogé sur les subventions qui étaient données dans la région des Maritimes, à l'est de Québec, y compris les quatre provinces Maritimes.

Mes avocats m'ont dit que nous n'avions pas compétence pour examiner les taux imposés par les différents transporteurs. Ceci résulte de la déréglementation du camionnage qui a eu lieu en 1988. Si vous prétendez que nous n'avons pas intérêt à contester les réclamations, je vous dirai que c'est exactement le contraire que j'ai fait, parce que, nonobstant l'avis de mes avocats, j'ai donné instruction de procéder selon les recommandations de ce comité et selon celles du ministre.

Vous comprenez que je n'ai pas à juger ce qui a été fait au cours des 25 ou 30 dernières années, ou même des sept dernières années. Étant donné que j'ai donné instruction à mes avocats, à l'Office, de procéder selon les recommandations, je n'ai pas besoin de vous dire que les opinions demeurent encore quelque peu controversées.

L'Office national des transports est allé consulter l'expert en matière de droit administratif du ministère de la Justice du Canada, et l'avocat principal en droit administratif du ministère de la Justice nous a fait parvenir un projet d'opinion.

Ce projet d'opinion est semblable à la position qu'avait prise l'Office national des transports il y a de nombreuses années, à savoir que nous n'avions aucunement compétence en ce qui a trait à la justification des tarifs. Je sais qu'il s'agit d'un projet d'opinion et qu'il y a différentes étapes, mais je serai très heureux de faire parvenir l'opinion définitive que le ministère de la Justice va émettre à ce sujet.

En ce qui concerne votre question, la réponse est que, nonobstant les opinions des avocats de l'Office national des transports, j'ai donné instruction à l'Office de se conformer aux instructions reçues, non seulement du ministre, mais aussi de ce comité.

M. Fillion: Monsieur Rivard, admettez-vous que vous avez adopté cette position à la suite de l'évaluation qui avait été faite par le vérificateur général et à la suite également des discussions qui se sont tenues ici, au Comité des comptes publics?

Qu'est-ce qui vous a empêché d'agir? On ne peut pas dire que, dans l'administration d'un programme comme celui-là, il n'y a pas de cas douteux. Il y en a, et on peut le confirmer. Comment se fait-il que vous n'ayez pas pris des mesures avant que le vérificateur général ne se penche sur le dossier ou fasse des recommandations?

M. Rivard: Monsieur, le seul reproche qu'on peut m'adresser, c'est d'avoir suivi les opinions de mes avocats.

M. Fillion: Monsieur le président, je pose des questions; ce ne sont pas des reproches.

M. Rivard: Non, c'est correct.

M. Fillion: Je ne fais pas de reproches à qui que ce soit. Je pose des questions. Vous n'avez qu'à répondre aux questions. Je ne fais de reproches ni à l'Office ni au ministère des Transports. On essaie simplement de clarifier une situation qui est évidente et qui existe. Alors, je vous demande pourquoi vous avez attendu que le vérificateur général se penche sur le problème pour essayer d'apporter des correctifs.

.1555

C'est un programme qui existe tout de même depuis une trentaine d'années. Depuis 30 ans, il y a certainement eu, à un moment donné, des cas douteux. Qu'est-ce qu'on fait pour corriger cela et pour protéger les deniers publics?

M. Rivard: En toute humilité, je n'assume pas de blâme pour cela. Je ne pense pas devoir accepter des reproches pour ceux qui m'ont précédé dans l'administration de ce programme.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, j'ai présidé la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux. Le rapport en question recommandait au ministre des Transports de procéder à une évaluation détaillée de ce programme, et le ministère a bien procédé à cette évaluation. Lorsqu'on nous a dit qu'on procéderait à une évaluation, on nous a demandé de collaborer à l'évaluation complète du programme. Nous avons fourni le personnel nécessaire pour aider le ministère des Transports à mener le tout à bonne fin.

Lorsque j'ai appris que l'Office national des transports, à Moncton, avait des dossiers tenus presque «à la mitaine», pourrait-on dire, j'ai immédiatement demandé un rapport. Lorsque j'ai constaté que les renseignements que nous avions relativement à l'application de ce programme étaient insuffisants, j'ai demandé immédiatement qu'on mette tout ça dans un système informatique. J'ai même signé un contrat avec une société pour procéder à la mise en place d'un système informatique, justement pour permettre l'obtention des différents détails quant à la marchandise transportée, aux distances parcourues et aux prix imposés.

Lorsque l'abolition du programme a été décrétée, on avait presque fini d'installer le système et on a annulé cela.

Cela étant dit, depuis que je suis arrivé en poste, j'ai procédé avec diligence et constaté que notre méthode de tenue des livres était quelque peu archaïque. En fait, elle n'était pas archaïque, mais on ne travaillait pas selon les données modernes. J'ai octroyé un contrat afin qu'on sache ce qui se passait dans cette région.

M. Fillion: Vous êtes en poste depuis quand, monsieur?

M. Rivard: Je suis arrivé en mai 1993.

Le président: Vous pourrez revenir plus tard, monsieur Fillion.

[Traduction]

Monsieur Williams.

M. Williams (St-Albert): Merci, monsieur le président.

Je remercie les témoins d'avoir accepté de comparaître. Je m'inquiète beaucoup de la pression sur les deniers publics exercée par ce programme, comme l'ont souligné les témoins à la dernière réunion du comité et le vérificateur général dans un chapitre de son rapport.

À mon avis, l'Office national des transports aurait dû défendre avec plus de vigueur l'intérêt des contribuables. Il semble penser que son mandat, son rôle se bornent à faire des chèques sans vérifier si les montants d'argent versés sont raisonnables.

J'ai noté la déclaration de M. Rimmer selon laquelle pas un cas de paiement en trop n'avait été décelé parmi les 600 vérifications effectuées au cours des derniers mois.

Voici mes questions a) avez-vous examiné des situations où il s'agissait de transactions entre entreprises ayant des liens de dépendance ou quelque chose d'approchant; et b) avez-vous comparé les taux soumis actuellement aux taux exigés par le passé?

.1600

M. Rimmer: Monsieur Williams, notre programme de vérification spécial, qui s'ajoute à notre programme régulier, a été conçu spécifiquement pour régler les problèmes relevés dans le rapport du vérificateur général. À la demande du président de l'Office, le programme a été soumis au vérificateur pour qu'il fasse connaître sa réaction. Un comptable judiciaire a également été invité à donner son opinion. Leurs observations ont été prises en compte.

Le programme permet de vérifier précisément ce dont vous parlez. Pour les transporteurs affiliés, les demandes actuelles sont comparées aux demandes précédentes. Les taux exigés depuis le 1er janvier 1995 sont comparés aux taux des années précédentes. Lorsque nous constatons une augmentation, nous vérifions plus avant.

Cette vérification approfondie peut s'attacher à plusieurs choses, selon ce que nous trouverons. Lorsqu'il y a eu augmentation du nombre de transports, lorsque nous soupçonnons que les factures auraient pu être falsifiées, j'ai mentionné cette possibilité plus tôt, nous poussons notre vérification plus loin.

Nous vérifions donc ces éléments, et jusqu'à présent les résultats ont été ceux que je vous ai indiqués.

M. Williams: Je ne songeais pas tellement à une augmentation; je songeais plutôt à une réduction si votre vérification ne relevait pas d'irrégularités. J'examine le rapport du vérificateur général. Au paragraphe 6.14, je lis que de 25 p. 100 à 30 p. 100 des subventions sont versées à de grands transporteurs qui font affaire avec de grandes entreprises ayant des liens de dépendance. Au paragraphe 6.15, je constate que leurs factures sont beaucoup plus élevées que celles des transporteurs qui n'effectuent pas de transactions avec des entreprises ayant des liens de dépendance.

Si vous ne trouvez pas d'écart, c'est que votre méthode de vérification est mauvaise ou que vous ne cherchez pas au bon endroit. Ces gens continuent-ils de réclamer des taux plus élevés que les taux concurrentiels?

M. Rimmer: Ce que nous essayons de voir, c'est si le danger relevé par le vérificateur général...

M. Williams: Ce n'est pas ce que je vous demande. Je veux savoir si les transactions avec les entreprises ayant des liens de dépendance coûtent beaucoup plus cher que les transactions avec les entreprises qui recherchent des taux concurrentiels?

M. Rimmer: Ce que nous tentons de déterminer, à la suite des observations du vérificateur énéral, c'est si les transporteurs ont essayé d'augmenter leurs taux au moment de la dissolution du programme. Nous essayons de voir si les transporteurs concernés, les transporteurs affiliés dans la plupart des cas... nous mettons l'accent sur ces derniers, mais nous examinons un certain nombre de transporteurs non affiliés. Nous vérifions s'il y a eu augmentation des taux et, le cas échéant, nous comparons ces taux aux précédents.

M. Williams: Je crains que vous n'ayez pas bien saisi, monsieur Rimmer. J'essaie simplement de dire que le vérificateur général a signalé que ces taux étaient artificiellement élevés auparavant; donc, si vous comparez les demandes de subventions d'aujourd'hui à celles de l'année dernière par exemple, qui étaient artificiellement élevés, vous ne verrez peut-être pas de différence.

Je veux savoir si vous comparez les taux des transporteurs avec liens de dépendance à ceux des transporteurs indépendants et si vous avez constaté qu'il existait une différence?

M. Rimmer: Nous ne procédons pas à cette comparaison.

M. Williams: Pourquoi pas?

M. Rimmer: Parce que les risques identifiés par le vérificateur général dans son rapport sont ceux qui sont associés aux transporteurs avec liens de dépendance; on voulait savoir en fait si ces transporteurs demanderaient des tarifs plus élevés ou augmenteraient leurs tarifs pendant la période de dissolution du programme. En fait, s'ils changeraient de comportement. Et c'est ce que nous étudions.

M. Williams: Ça me renverse, monsieur Rimmer.

Ce n'est que maintenant que vous étudiez le «caractère raisonnable»; et j'ai cru comprendre que vous ne payez pas les subventions demandées si vous jugez qu'elles sont déraisonnables; il semblerait que vous dites à ces gens que s'ils ne sont pas contents ils peuvent s'adresser aux tribunaux... D'aucuns se demandent si vous devez respecter certains paramètres lorsque vous faites un paiement.

Vous avez suivi les conseils du comité, vous refusez de payer les montants demandés, mais d'après ce que dit votre directeur, ça ne s'est pas encore produit. Est-ce exact?

M. Rivard: On m'a dit que dans un cas, nous avons refusé d'accorder les montants demandés. Je vais demander à M. Rimmer de répondre à votre question.

M. Rimmer: Oui, dans plusieurs cas que nous étudions actuellement nous retenons les montants demandés jusqu'à ce que nous ayons terminé notre vérification.

Nos fonctionnaires essaient de déterminer si les transporteurs ont, comme je l'ai signalé tantôt, changé leur comportement. Nous essayons de déterminer si le taux est raisonnable et non pas si l'augmentation était raisonnable. Quand nous devons prendre une décision, nous évaluons si le taux est raisonnable.

.1605

M. Williams: Si j'ai bien compris votre explication, je crois que l'Office national des transports a tort de procéder de cette façon. Le vérificateur général a dit bien clairement dans son rapport que les taux établis dans les transactions avec liens de dépendance sont beaucoup plus élevés que les taux des transporteurs indépendants; cependant, tout semble indiquer que lors de votre vérification, vous ne comparez même pas ces taux pour déterminer si nous payons plus que nous le devrions dans le cas des transporteurs avec liens de dépendance. Je n'arrive vraiment pas à comprendre pourquoi vous ne faites pas cette comparaison quand le vérificateur général dit clairement dans son rapport qu'il existe un problème. Je demanderais au président de répondre à cette question.

M. Rivard: Tout cela nous ramène encore une fois à l'interprétation de notre politique, et de l'autorité qui nous est conférée. De toute façon, j'ai demandé à mes employés de respecter deux de vos recommandations ainsi que la recommandation du ministère.

Lorsque j'ai commencé à travailler à l'Office, je me suis renseigné sur ce programme. Les employés m'ont dit que lorsqu'il y avait eu fraude, «fraude» au sens commercial, ou un changement de tarif, ils ont rejeté les demandes. J'ai demandé à mes employés de procéder exactement comme vous l'avez recommandé. Par conséquent, je m'attends à ce que l'augmentation des taux demandée par les transporteurs avec liens de dépendance... Je ne vois pas comment on pourrait contester ces taux.

M. Williams: Si vous le permettez, monsieur le président, j'aimerais signaler qu'on parle ici de deux choses. Le vérificateur général a clairement indiqué qu'il existait une différence de 40 p. 100 entre les taux exigés par les transporteurs avec liens de dépendance et les taux des transporteurs indépendants.

Je reconnais que d'aucuns se demandent si vous aviez l'autorité nécessaire pour refuser de verser les montants demandés; cependant, je crois qu'à titre de représentant de la Couronne, d'organisme qui dépense quelque 100 millions de dollars dans le cadre de ce programme, il vous incombait de refuser le paiement ou de signaler au ministère des Transports qu'il existait un grave problème. Vous n'avez rien fait. Peut-être fait-on quelque chose maintenant, mais votre politique a changé depuis que le Comité des comptes publics a mis le doigt sur ce problème. Nous constatons maintenant que les mécanismes de vérification ne permettent toujours pas de s'attaquer à la racine du problème.

Vous continuez donc d'émettre des chèques et de payer des montants trop élevés, provenant des deniers publics, à des transporteurs avec liens de dépendance, parce que vous comparez les taux de l'année dernière à ceux de l'année en cours, et que vous ne constatez aucune différence; cependant, c'est aux taux des transporteurs indépendants que vous devriez comparer les taux prélevés cette année par les transporteurs avec liens de dépendance. D'après le tableau, vous constaterez qu'il existe une différence de 40 p. 100.

D'après le vérificateur général, cette différence est déraisonnable et injustifiable, et à titre de président de l'Office national des transports, un groupe qui dépense les deniers publics, il vous incombe de mettre un frein à cette pratique et de rendre des comptes. C'est pourquoi - et je calcule assez rapidement - 10 millions de dollars par année, sont empochés par des grands transporteurs, des transporteurs avec liens de dépendance, avec les compliments du contribuable canadien. Je veux savoir pourquoi ce genre de chose se produit.

M. Rimmer: Monsieur Williams, j'aimerais faire quelques commentaires sur le tableau présenté par le vérificateur général. M. McRoberts pourra me reprendre si je me trompe.

Si j'ai bien compris ce tableau, on y compare deux indices. Les deux indices commencent à une ligne-niveau 100; l'un monte à 140 et l'autre à 108. Je ne sais pas s'il est juste d'en conclure que les taux d'un groupe sont de 40 p. 100 plus élevés de ceux de l'autre. Si les indices ne commençaient pas au même point...

M. Williams: Mais ils commencent au même point.

.1610

M. Rimmer: Oui, les deux indices partent de la ligne 100, mais cela ne veut pas dire que les taux sont tous égaux. De plus, vous comparez ici les taux de transporteurs affiliés bien précis à un indice plus général des prix associés au camionnage dans la région Atlantique, des taux qui pourraient changer pour diverses raisons.

Je ne dis pas que ces indices sont faux. Je suis disposé à accepter ces chiffres. Cependant, je ne partage pas tout à fait votre interprétation de ces chiffres; je ne suis pas convaincu que cela veut dire que les transporteurs affiliés prélèvent des taux 40 p. 100 plus élevés.

M. Williams: Posons la même question au représentant du Bureau du vérificateur général.

Le président: Il ne vous reste que quelques secondes, monsieur Williams.

M. Williams: Peut-être, mais j'aimerais avoir une réponse à ma question, monsieur le président.

M. Hugh McRoberts (directeur principal, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, cette pièce démontre une augmentation relative par opposition à une augmentation absolue. C'est exact. Ce tableau compare les taux de transporteurs particuliers à un indice général. À partir d'une base de 100, sans déterminer si les taux sont plus élevés ou plus faibles que cette base, on peut noter un taux d'accroissement relatif au fil du temps; cette différence porte donc sur le taux d'augmentation plutôt que sur une différence qui existerait entre les taux.

Quant à la différence qui existe entre les taux, il faut consulter l'analyse présentée par le ministère des Transports dans son document. Les représentants du ministère des Transports ont tiré certaines conclusions sur les différences absolues des taux chez les transporteurs avec liens de dépendance.

Le président: Monsieur Shepherd.

M. Shepherd (Durham): Merci beaucoup.

J'aimerais dire d'entrée de jeu qu'à mon avis votre système de vérification vise simplement à ne pas trouver de problèmes.

M. Rimmer: Je ne suis pas du tout d'accord avec vous.

M. Shepherd: Que doit-on déceler dans le cadre de cette vérification? Comment ce système fonctionne-t-il? On parle ici de taux déraisonnables. Comment les détermine-t-on?

M. Rimmer: Les membres de l'Office se prononcent lorsqu'ils sont saisis de certains dossiers dans lesquels on a décelé une augmentation des taux. Ils décident alors si le taux demandé, et non pas l'augmentation, est raisonnable.

M. Shepherd: Vous ne pouvez pas savoir s'ils sont raisonnables parce que vous n'avez jamais comparé ces taux à ceux des transporteurs indépendants.

M. Rimmer: Je crois qu'il serait très difficile de faire cette comparaison. J'ai vu les demandes présentées par un transporteur indépendant, cinq factures... Les mouvements ont eu lieu dans une période rapprochée, sept jours, des produits semblables ont été expédiés vers des destinations semblables dans des régions géographiques semblables, et on a noté une différence de 50 p. 100 dans les taux. Seriez-vous prêt à reconnaître que le taux plus faible est acceptable et que le taux plus élevé est anormalement élevé? Il s'agit d'un marché très dynamique. Il est très difficile de comparer de façon globale, comme le fait d'ailleurs ce tableau, plusieurs taux pour toute une gamme de produits différents qui sont expédiés dans des circonstances complètement différentes.

Lorsque vous voyagez par avion, et que vous payez le plein tarif, monsieur, vous vous trouvez à payer trois ou quatre fois plus que quelqu'un d'autre qui a pris l'avion au même endroit que vous, qui se rend à la même destination, en même temps. Cet autre passager va sans doute manger le même repas, mais paie trois ou quatre fois moins. Est-ce que cela signifie que l'un des tarifs est excessif et que l'autre ne l'est pas?

M. Shepherd: Je ne pense pas que ce soit la même chose que l'avion. Nous parlons du transport au sol et en dernière analyse, vos coûts fixes sont les mêmes. Il y a un camion, un conducteur, de l'essence, une distance. La comparaison est donc très simple, mais vous ne la faites pas.

M. Rimmer: Je ne dirais pas, monsieur, que la comparaison est très simple. Vous avez des tarifs qui sont déterminés par des contrats à long terme. Il y a d'autres tarifs qui sont déterminés parce que quelqu'un a besoin d'un camion aujourd'hui et est disposé à payer ce que cela coûtera aujourd'hui. Toute une gamme de conditions de marché influent sur les tarifs et il serait donc extrêmement difficile - je pense que lors de leur dernière comparution, les représentants du ministère des Transports se sont dits du même avis - voire impossible, à mon avis, d'effectuer ce genre de comparaison pour pouvoir s'en servir. On peut effectuer diverses analyses, mais quand il faut refuser à quelqu'un le paiement en invoquant le fait que le tarif est excessif, les critères qui s'appliquent sont très différents, à mon avis.

M. Shepherd: Ça se fait constamment. Le CRTC annule les augmentations excessives de tarif. Ce n'est pas inhabituel.

Vous avez dit, monsieur Rivard, que dans un cas, le paiement est en suspens et que vous... Voyons voir si je compare des pommes et des oranges. Vous dites que dans l'échantillonnage que vous avez fait, les paiements ont tous été faits. Il n'y avait pas de problème. Est-ce que vous faites valoir la même chose? Dites-vous qu'il y a un problème ou dites-vous qu'il n'y en a pas? Qu'est-ce que vous dites au juste?

.1615

M. Rimmer: Je pense que nous sommes du même avis. Nous avons dit que nous avions identifié 2 500 demandes et que nous avions terminé l'examen de 600 d'entre elles. C'est-à-dire que dans le cas de ces 600 demandes, nous avons payé. Dans le cas des 1 900 autres, nous les retenons tant que nous n'aurons pas terminé notre vérification, jusqu'à ce que les membres soient satisfaits, jusqu'à ce qu'ils acceptent de payer, puisque c'est eux qui déterminent le paiement final. Comme l'a dit M. Rivard, d'une certaine façon, il y a certainement plus d'une demande. Il y en a 1 900 en attente.

M. Shepherd: Mais vous avez mentionné expressément qu'une demande était erronée à votre avis. N'est-ce pas ce que vous avez dit?

M. Rivard: Au cours de la semaine dernière, on m'a informé qu'il y avait un cas. Il y a eu paiement en trop au cours des derniers mois, et nous retenons le versement de la demande qui a été présentée récemment.

M. Shepherd: Est-ce que c'est dans le cadre de l'échantillonnage?

M. Rivard: Je n'en sais rien.

M. Rimmer: Ces demandes faisaient partie de l'évaluation. Ce transporteur fait partie de l'échantillonnage.

M. Shepherd: Donc, lorsque vous dites qu'il n'y a pas eu de problème, c'est faux, n'est-ce pas?

M. Rimmer: Non, monsieur. Les problèmes relevés dans le cas du transporteur dont parle M. Rivard ne sont pas liés aux risques identifiés par le vérificateur général et que nous traitons expressément dans le cadre de notre examen des tarifs et des activités. Il s'agit de problèmes relevés suite au processus normal de vérification et suite aussi à l'examen des tarifs et des activités.

M. Shepherd: D'après les données statistiques, il y aurait un taux d'erreur d'au moins2 p. 100 - de demandes rejetées. Selon les chiffres de 1994, cela donnerait sur 100 millions de dollars, 2 millions de dollars. Logiquement, donc, on pourrait conclure, n'est-ce pas, que sur 2 500 ou même 600 demandes, vous devriez en rejeter 12?

M. Rimmer: Oui, mais il s'agit de deux examens différents. Il y a le processus habituel de vérification au cours duquel nous rejetons plus de 2 millions de dollars de demandes par année, mais nous avons ajouté un autre processus par suite des recommandations du vérificateur général. C'est ainsi que nous avons identifié 2 500 demandes qui comportent le plus de risque d'abus au cours de la période de dissolution du programme. C'est au cours de cet examen supplémentaire que nous n'avons pas encore trouvé de demande pour laquelle les membres étaient prêts à rejeter la subvention, en se fondant sur les nouveaux critères que nous avons mis en place. Nous apportons d'ailleurs des ajustements à ces demandes dans le cadre de la vérification habituelle que nous faisons.

M. Shepherd: D'après ce que vous avez dit au cours de votre témoignage ici, ces critères supplémentaires constituent une perte de temps, n'est-ce pas.

M. Rimmer: Je ne dirais pas cela, monsieur. Ni le vérificateur général dans son rapport - et je tiens à le rappeler aux membres du comité - ni le rapport du ministère des Transports ne relèvent d'exemples précis d'abus. On dit simplement qu'il y a risque d'abus, que les circonstances se prêtaient à des abus, mais on n'a pas dit: «Nous avons examiné les demandes et nous en avons trouvé une que vous n'auriez pas dû payer». Il y a donc un risque, nous tentons de faire quelque chose à ce niveau. Jusqu'à présent, nous n'avons pas trouvé de situation où il nous a fallu refuser la subvention.

Comme je l'ai mentionné précédemment, les programmes de vérification au gouvernement, que ce soit au ministère du Revenu ou chez nous, exercent un effet de dissuasion qui est le propre de ce genre de programme. C'est peut-être ce qui se produit ici. Les transporteurs savent que nous examinons ces demandes et nous n'avons donc pas relevé d'abus particuliers ou de problèmes comme ceux identifiés par le vérificateur général. Dans le cadre de nos activités habituelles et dans le cadre de l'examen de toutes les demandes, nous trouvons certainement des demandes que nous rejetons, pour diverses raisons. Comme je l'ai dit, jusqu'à présent, en 1995, nous avons refusé de verser plus de 1,3 million de dollars en subventions.

M. Shepherd: Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet de la méthodologie de cette vérification et nous dire si celle-ci respecte les paramètres recommandés par le vérificateur général dans son rapport?

M. McRoberts: Je pense, monsieur le président, que pour l'instant, c'est prématuré. Nous n'avons effectué aucune vérification supplémentaire depuis la rédaction de ce chapitre. C'est d'ailleurs normal. Nous laissons l'organisme ou le ministère où nous avons fait la vérification s'attaquer aux problèmes et prendre les mesures correctives qui s'imposent avant de recommencer une vérification. Je n'ai donc pas eu la possibilité d'examiner ces procédures et de déterminer leur fonctionnement.

.1620

Le président a mentionné, ce qui est vrai, qu'on nous avait fait parvenir une toute première ébauche des procédures envisagées. Nous l'avons examinée et avons fait quelques commentaires. Toutefois, puisqu'il s'agit d'une lettre que nous avons fait parvenir à l'Office, je pense que c'est à l'Office que vous devriez demander de vous faire part de ses commentaires.

M. Shepherd: L'Office a défini le terme «déraisonnable» comme une augmentation par rapport aux tarifs des années précédentes. Est-ce là une bonne définition? C'est en se fondant sur ce critère que l'Office détermine si on vérifiera la demande ou si on limitera les paiements. Le caractère déraisonnable de la demande semble dépendre directement d'une augmentation des tarifs, ce qui n'a rien à voir avec vos premières constatations.

M. McRoberts: Nous nous sommes préoccupés tout particulièrement, tout comme nous le mentionnons à la recommandation 6.157, des augmentations, mais nous étions également préoccupés par cette question fondamentale de ce qui est raisonnable. Nous nous demandions en fait s'il n'était pas souhaitable d'évaluer les deux éléments.

M. Shepherd: Iriez-vous jusqu'à dire qu'il n'y a aucun concept... En vous fondant sur ce que vous avez entendu jusqu'à présent sur le concept de ce qui est raisonnable, quand il s'agit de tarifs concurrentiels comparables? On ne semble pas avoir tenté de faire cette comparaison.

M. McRoberts: Pour l'instant, sans avoir examiné ce qu'a fait l'Office, monsieur le président, il ne serait vraiment pas très juste que je fasse des commentaires. Je pense qu'il y a de nombreuses façons d'effectuer la comparaison. Sans examiner, d'une façon détaillée, la façon dont l'Office a procédé, je pense qu'il serait injuste envers eux et vous de faire des commentaires.

[Français]

M. Fillion: Monsieur Rivard, pensez-vous que les mesures que vous avez adoptées et mises en marche à compter du 5 juillet vont améliorer le programme? Allez-vous faire des économies? Est-ce suffisant?

M. Rivard: Premièrement, on a dit à l'industrie que ses réclamations seraient examinées à la loupe. Selon les statistiques que nous avons à ce jour, je crois que cela va entraîner des économies. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'au début, j'avais hâte de connaître la réaction, surtout avec les différentes recommandations que nous avons eues du vérificateur général. Le ministre des Transports souhaite également que le programme se termine d'une façon correcte, et non par une avalanche de réclamations.

Selon ce que j'ai pu comprendre, comparativement aux années antérieures, il y a eu des économies.

M. Fillion: Donc, vous affirmez que d'ici la fin du programme, il n'y aura pas de déboursés supplémentaires par suite des mesures que vous avez prises.

M. Rivard: Si on fait une comparaison entre les réclamations sur une même période de temps, je crois pouvoir affirmer cela sans risquer de me tromper, mais il ne faut pas oublier que nous avons des réclamations qui remontent à plusieurs mois. Cela déséquilibre un peu les déboursés qu'on avait prévus. Je crois que M. Rimmer saura mieux vous dire quelle est la situation actuelle.

M. Fillion: Pourrait-on me préciser le montant des réclamations qui sont en suspens actuellement? À combien se chiffrent ces réclamations?

.1625

[Traduction]

M. Rimmer: Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons identifié environ 2 500 demandes qui feront l'objet de cette nouvelle procédure. Sur ce nombre, environ 1 900 sont toujours en attente. Je ne sais pas ce que cela représente en termes monétaires, mais c'est certainement de l'ordre de10 millions de dollars.

[Français]

M. Fillion: Y a-t-il actuellement des cas qui sont contestés devant les tribunaux? Si oui, quel pourcentage représentent ceux qui le sont? L'ensemble du programme, depuis ses débuts jusqu'à maintenant, a-t-il été contesté?

M. Rivard: Selon moi, il n'y en a pas.

[Traduction]

M. Ron Ashley (avocat, Office national des transports): Ce n'est pas tout à fait exact. Dans le cas d'une demande de 100 000$, suite au refus d'effectuer un versement à un transporteur affilié, l'affaire est actuellement devant la Cour fédérale d'appel.

[Français]

M. Fillion: Un seul cas, pour 100 000 $?

[Traduction]

M. Ashley: Oui.

[Français]

M. Fillion: C'est le seul cas qui est devant les tribunaux actuellement?

[Traduction]

M. Ashley: À l'heure actuelle...

[Français]

M. Fillion: Il n'y en pas d'autres?

[Traduction]

M. Ashley: Pas à ma connaissance.

[Français]

M. Fillion: Et vous n'en prévoyez pas pour les dernières années du programme? Je sais qu'il est difficile de répondre à cette question.

M. Rivard: Je ne vous dis pas qu'il n'y en aura pas. Je vous dis que, nonobstant les opinions juridiques qui émanent de différentes sections, nous allons rejeter les réclamations déraisonnables, qui ne sont pas conformes à l'esprit, et aller devant les tribunaux. L'initiative reposera sur les épaules du réclamant. On ne paiera tout simplement pas. S'il prétend avoir des réclamations, il nous poursuivra.

[Traduction]

M. Williams: Si nous avons bien compris le système de vérification qui existe maintenant et que M. Rimmer nous a expliqué, il semblerait y avoir un sérieux problème de reddition de comptes pour l'Office et le programme, monsieur Rivard. Comme l'a signalé mon collègue, M. Shepherd, l'Office ne semble pas vraiment s'efforcer de s'attaquer aux problèmes mentionnés dans le rapport du vérificateur général et de se rendre compte que les transporteurs avec un lien de dépendance exigent plus - et apparemment cela semble être généralisé - que les taux concurrentiels.

La situation ne semble pas raisonnable pour l'instant. M. Rimmer a mentionné qu'un camionneur avait cinq taux différents pour cinq chargements expédiés la même semaine dans les mêmes circonstances.

Il y a bien entendu des négociations vu que c'est un milieu concurrentiel. Je le comprends. Je comprends aussi que le programme a été conçu à une époque où les taux étaient réglementés et fixes. Maintenant que les taux sont concurrentiels, ils varient selon les caprices du marché. Nous aurions peut-être dû fixer un taux uniforme pour la subvention au lieu de prévoir un pourcentage, mais nous ne l'avons pas fait.

C'est pourquoi je pense que l'Office national des transports aurait dû se dire qu'il fallait avant tout être raisonnable et, si vous pensiez que la loi ne vous donnait pas le pouvoir nécessaire, vous auriez dû avertir le ministère des Transports que vous aviez besoin de ces pouvoirs. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait?

M. Rivard: Je pense qu'on l'avait déjà fait les années précédentes.

Pour répondre à votre question, comme je l'ai dit tantôt, nous avions obtenu un avis juridique de l'expert en droit administratif. Je vous ferai parvenir sa dernière opinion, mais je peux vous dire que les dernières lignes de l'opinion provisoire disaient ceci:

.1630

En principe, je conviens donc qu'on aurait dû s'occuper de cela il y a des années lorsqu'on a réglementé l'industrie du camionnage, mais sur le plan juridique...

M. Williams: Je ne suis pas avocat. Vous avez reçu une opinion juridique et le ministère des Transports n'a pas le même point de vue que vous. La Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la Région atlantique stipule que le gouverneur en conseil peut autoriser le versement d'une aide, etc., ce qui signifie que l'Office national des transports peut prendre quand même certaines décisions. Il a le pouvoir de décider si la réclamation est fondée ou non, puisque la loi dit que l'Office peut verser l'argent et non pas qu'il doit le verser.

L'étude a fait ressortir la question de savoir si les taux sont raisonnables ou non. Je sais que vous êtes arrivé à votre poste en 1993. D'après le sous-ministre adjoint, cependant, l'étude a été entreprise en 1992.

Il me semble que le problème aurait dû être signalé plus tôt, mais maintenant qu'il l'a été, l'Office ne semble pas avoir fait quoi que ce soit pour cesser de verser de l'argent à des expéditeurs avec un lien de dépendance. D'après les chiffres, leurs réclamations sont supérieures de 30 à 40 p. 100 à celles des transporteurs indépendants. Cela me semble déraisonnable. Pourquoi n'a-t-on pas mis le holà à ces paiements?

M. Rivard: Comme je l'ai déjà dit, j'ai certainement demandé qu'on installe un système informatique détaillé pour nous fournir tous les chiffres pertinents.

M. Williams: D'après ce qu'a dit M. Rimmer, cependant, même s'il existe apparemment maintenant un système de vérification électronique, il a fixé les mauvais paramètres pour le système et n'a donc pu prendre personne en défaut. S'il n'a pris personne en défaut après avoir examiné 600 réclamations, nous ne pensons pas qu'il réussira mieux pour les 1 900 réclamations suivantes.

M. Rimmer: Le système informatique mentionné par le président n'a pas été entièrement installé vu que le programme a pris fin. Il était presque au point quand le programme a été supprimé. Pour qu'il fonctionne bien, les transporteurs auraient dû présenter leurs réclamations par ordinateur pour qu'elles puissent être transférées dans le système et analysées.

Les transporteurs étaient tout à fait prêts à le faire. D'ailleurs, ils tenaient à le faire. Cependant, cela leur aurait coûté quelque chose. Tant que le programme existait, l'investissement en valait la peine, mais quand le programme a été annulé, ils n'étaient pas d'accord pour continuer et on n'a donc pas pu utiliser le système comme nous l'avions cru pour rassembler les données dont vous avez parlé.

M. Shepherd: Où en sommes-nous maintenant? Savez-vous à combien s'élèvent les réclamations qui n'ont pas encore été payées?

M. Rimmer: Nous ne pouvons pas vous donner le montant. Les 1 900 réclamations passent par le processus de vérification spéciale en plus de la vérification ordinaire. J'imagine qu'il y a plusieurs centaines de réclamations qui passent seulement par la vérification régulière et qui n'ont pas encore été payées. À mon avis, cela représente moins de 2 500 réclamations.

M. Shepherd: Est-ce normal? Nous sommes au milieu de l'année. Il s'agit de réclamations depuis l'élimination du programme?

M. Rimmer: Essentiellement, oui.

M. Shepherd: Comme nous payons 100 millions de dollars par année, nous avons maintenant pour 50 millions de dollars de réclamations. Est-ce une estimation raisonnable?

M. Rimmer: Nous avons reçu cette année des réclamations s'élevant à un peu moins de50 millions de dollars, ou 40 millions de dollars et un peu plus. Entre le 1er janvier 1995 et le1er septembre, c'est-à-dire la date limite pour la présentation des réclamations, nous avons probablement reçu pour 65 millions à 70 millions de dollars de réclamations et bon nombre de ces réclamations sont déjà passées par la vérification. Nous avons rajusté les montants au besoin et payé la réclamation, que le montant ait été rajusté ou non. Il ne s'agissait pas de réclamations qui présentaient des risques élevés d'après le vérificateur général.

.1635

M. Shepherd: Savez-vous à peu près combien il reste encore à payer?

M. Rimmer: Il resterait de 10 à 15 millions de dollars à payer.

M. Shepherd: Ce que vous dites, monsieur Rivard, c'est que, à cause de ce mécanisme plus détaillé, les transporteurs ont réduit le montant de leurs réclamations ou bien encore qu'il n'y a pas eu autant de défauts de paiement. Ce raisonnement ne semble cependant pas s'appliquer au nombre de réclamations. Il semble y en avoir autant que l'année dernière.

M. Rivard: Je dois me fier à ce que me disent mes principaux adjoints. Ils me disent que les réclamations présentées juste avant la date limite comprennent aussi des réclamations qui remontent au dernier exercice financier.

M. Shepherd: Ces réclamations viennent encore pour la majorité de transporteurs avec liens de dépendance. Est-ce exact?

M. Rimmer: Parmi celles qui restent, oui, parce que ce sont les réclamations que nous avons examinées de plus près et que nous avons retenues.

Dans le cadre de la vérification spéciale, nous avons identifié environ 150 transporteurs affiliés sur qui nous allons concentrer nos efforts sur un total de 2 500 transporteurs actifs. Nous prendrons aussi des échantillons au hasard pour tous les autres transporteurs afin de nous assurer qu'ils ne profitent pas de la disparition du programme comme le craignait le vérificateur général.

Nous vérifions donc les réclamations des deux groupes, mais nous nous concentrons surtout sur les 150 transporteurs affiliés dont le nom figure sur notre liste. Il y a encore 1 900 réclamations de ces transporteurs et d'autres qui n'ont pas encore été traitées. Une bonne partie de ces réclamations viennent sans doute de transporteurs qui ont un lien de dépendance quelconque.

M. Shepherd: Si je me rappelle bien, le ministère des Transports avait nommé certains transporteurs dans son rapport. D'ailleurs, la plupart d'entre eux étaient, il me semble, affiliés à Irving et à McCain. Est-ce qu'il s'agit encore des mêmes transporteurs?

M. Rimmer: Je crois savoir qu'il y a trois ou quatre transporteurs qui sont associés à chacun de ces conglomérats, puisqu'ils ont diverses filiales. Ainsi, sur les 150 transporteurs dont je viens de parler, trois ou quatre seraient associés à Irving et trois ou quatre à Day & Ross - ou plutôt à McCain.

M. Shepherd: L'étude que le ministère des Transports a réalisée lui a permis de voir sur les états financiers mêmes de certains de ces transporteurs qu'ils avaient des bénéfices plus élevés, en pourcentage, que n'importe quel autre transporteur parce qu'ils avaient bénéficié de ces subventions.

M. Rimmer: D'après le souvenir que j'ai du document d'information de Transports Canada, c'était effectivement le cas de certains petits transporteurs, mais cela ne valait pas nécessairement pour les gros transporteurs. Je me fie à ma mémoire et il se peut que je me trompe, mais c'est le souvenir que j'en ai, monsieur.

M. Shepherd: Cela vous dit-il quelque chose au sujet du caractère raisonnable des taux?

M. Rimmer: Non, je ne crois pas.

M. Shepherd: Vraiment? C'est par magie qu'il y a ce lien, que ceux qui reçoivent des subventions ont des bénéfices qui sont de 2 p. 100, 3 p. 100 ou 20 p. 100 supérieurs à ceux de tous les autres sur ce marché compétitif?

M. Rimmer: Sauf le respect que je vous dois, je ne pense pas qu'on ait fait de déclarations semblables dans le document de Transports Canada.

M. Shepherd: Un instant. Le vérificateur général l'a dit et Transports Canada l'a dit aussi. Il semble qu'il y a bien des gens qui pensent que ces taux sont déraisonnables.

M. Rimmer: Non, monsieur, je crois que le vérificateur général a indiqué qu'il y avait lieu de croire qu'il pourrait y avoir un risque et qu'une évaluation devrait être faite au regard de ce risque.

Le vérificateur général a vérifié notre programme sur une période de près d'un an. Je suis sûr que ses vérificateurs ont fait un travail très complet, comme c'est leur habitude. M. McRoberts et moi-même avons eu de nombreuses discussions très utiles. Jamais on n'a porté à mon attention quelque demande de subvention que ce soit que je n'aurais pas dû payer parce que le taux était excessif. Le sous-ministre adjoint a lui-même reconnu que ce n'est pas du tout ce qu'on a cherché à faire dans le document de Transports Canada. Il semble, ou il y a des raisons de croire, qu'il pourrait y avoir un risque, et nous avons essayé de tenir compte de ce risque auquel on nous a sensibilisés.

Rien ne permet de conclure, à mon avis, que cette demande était excessive ou qu'elle était fondée sur un taux excessif.

.1640

M. Shepherd: Le programme a maintenant pris fin. Avez-vous pris la peine d'aller vérifier les taux que demandent maintenant ces transporteurs dans le secteur privé? Vous êtes-vous renseigné pour savoir si les taux avaient en fait baissé après que le programme eut pris fin. Avez-vous fait cela? Oui ou non?

M. Rimmer: Non, monsieur, je ne l'ai pas fait.

M. Shepherd: Non. Ainsi, vous n'avez pas vérifié si les taux étaient raisonnables. Quand vous avez parlé de vérifier si les taux étaient raisonnables, c'était ni plus ni moins de la foutaise, n'est-ce pas? Nous n'avons encore rien fait à ce sujet.

M. Rimmer: Non, nous ne contrôlons pas vraiment les taux pour savoir s'ils sont raisonnables. Notre évaluation se fonde, non pas sur ce qu'ils demandent dans le secteur privé, mais sur les taux qu'ils ont exigés l'an dernier.

Le risque dont le vérificateur général a fait état démontre que les transporteurs auraient pu prendre certaines mesures pour profiter du programme avant qu'il ne prenne fin. Voilà le risque dont il était question et sur lequel nous nous sommes penchés.

M. Shepherd: Bon, d'accord. Alors que pouvons-nous faire? Croyez-vous qu'il serait raisonnable - vous dites que certaines demandes n'ont pas encore été examinées - de voir quels sont les taux que demandent maintenant ces transporteurs dans le secteur privé?

M. Rimmer: Monsieur, si ce sont des transporteurs qui exercent leur activité selon les lois du marché, le vérificateur général a confiance qu'ils exigent des taux conformes à ceux du marché. S'il s'agit d'un transporteur affilié, pourquoi modifierait-il ses taux simplement parce que le programme a pris fin? S'il est affilié et, comme l'a laissé entendre M. McRoberts, qu'il a la possibilité de tout mettre en commun au bout du compte, pourquoi modifierait-il sa tarification?

Le président: Monsieur Shepherd, vous pourrez revenir plus tard.

[Français]

M. Fillion: Monsieur Rivard, en juillet 1995, vous avez établi une nouvelle procédure, et il revient maintenant aux clients de déterminer le bien-fondé de leurs demandes de subventions. Tel est votre principe.

Si on en est arrivé à établir cette nouvelle procédure, cela signifie-t-il que, depuis la déréglementation de 1988, le gouvernement canadien a accordé des subventions excessives? Pouvez-vous porter un jugement là-dessus?

M. Rivard: Je ne puis dire si, depuis 1988, le gouvernement du Canada a accordé des subventions excessives. Je pense que Mme Moya Greene, la sous-ministre adjointe au ministère des Transports, a bien décrit tout le système. Je ne suis pas capable de le faire mieux qu'elle. Elle a décrit l'historique de ces subventions qui datent de 1927.

En ce qui a trait aux paiements excessifs que le gouvernement aurait pu faire depuis 1988, je ne suis pas en mesure de dire quoi que ce soit là-dessus. Cependant, une chose est certaine. En 1988, si j'avais été là, il me semble que les tarifs officiels publiés à l'époque par les différentes régies provinciales auraient apporté un meilleur éclairage. C'est peut-être un jugement injustifié de ma part mais, en 1988, je n'étais pas là.

M. Fillion: Il est toujours difficile de remonter dans le temps. Existe-t-il à l'Office national des transports des mécanismes qui nous permettraient d'aller faire une certaine vérification jusqu'à ce moment-là? Existe-t-il des mécanismes qui nous permettraient de comparer ce qui s'est fait depuis 1988 et ce que vous avez fait depuis votre arrivée?

Il me semble qu'en y mettant les ressources nécessaires, quelles qu'elles soient, on pourrait vérifier cette information.

M. Rivard: À Moncton, il y avait au-delà de 42 employés. Depuis l'annulation du programme, lorsqu'un employé manifeste le désir d'être muté à un autre poste à l'intérieur de la Fonction publique, nous facilitons sa mutation.

.1645

Toutefois, nous allons vérifier tout ce qui a été fait depuis janvier 1995. Une fois que les avocats se seront entendus sur l'expérience de janvier jusqu'à ce jour, l'Office national des transports prendra une décision.

M. Fillion: Vous remonterez dans le temps. Vous pourriez remonter jusqu'à l'année de la déréglementation.

M. Rivard: La déréglementation s'est faite en 1988, et rien ne force une compagnie à maintenir...

M. Fillion: En ce cas, remontez aussi loin qu'il est légalement possible de le faire.

M. Rivard: Il n'y a pas de prescription contre le gouvernement. Donc, c'est cinq ans. Quoi qu'il en soit, nous avons donné instruction de vérifier le bien-fondé des réclamations de janvier jusqu'à ce jour.

M. Fillion: Quand pensez-vous pouvoir remettre au comité les résultats de cette recherche? Est-ce que vous avez l'intention de les déposer devant le comité afin qu'il assure un suivi?

M. Rivard: Oui. Vous nous avez demandé de vous présenter un rapport ainsi que d'en présenter un au vérificateur général.

M. Fillion: À quel moment avez-vous l'intention de nous remettre cela?

M. Rivard: Nous allons terminer notre travail de vérification et de compilation à la fin de mars. Vous aurez un rapport détaillé au plus tard le 30 juin prochain.

[Traduction]

Le président: Monsieur Williams.

M. Williams: J'ai ici le paragraphe 6.152 du rapport du vérificateur général. Vers la fin du paragraphe, le vérificateur général dit ceci:

Monsieur Rimmer, connaissez-vous le nom de l'expéditeur en question?

M. Rimmer: Non, monsieur. Je connais l'étude, mais je ne connais pas le nom de l'expéditeur en question.

M. Williams: Avez-vous lu le rapport du vérificateur général?

M. Rimmer: Bien sûr.

M. Williams: Vous n'avez jamais pensé à demander qui pourrait être cet expéditeur?

M. Rimmer: Je peux le savoir. Il est nommé dans le rapport et j'ai lu le rapport. Je ne m'en rappelle tout simplement pas, monsieur.

M. Williams: Vous saviez donc de qui il s'agissait?

M. Rimmer: Certainement.

M. Williams: Le vérificateur poursuit en disant:

Dans le cas de cet expéditeur qui paye son transporteur affilié 200 p. 100 de plus que ses transporteurs non affiliés pour expédier les mêmes marchandises et le reste, n'avez-vous pas suspendu le paiement de la demande en disant que le taux semble déraisonnable?

M. Rimmer: Non, nous ne l'avons pas fait dans ce cas-là, monsieur.

J'essaie de me souvenir des modalités de l'étude. L'étude a essentiellement été faite à partir de données historiques, de sorte qu'elle a été réalisée après coup. On ne savait pas à l'époque quelle était la comparaison...

M. Williams: Surveillez-vous de très près cet expéditeur et son transporteur affilié?

M. Rimmer: Parce qu'ils sont affiliés, je crois qu'ils sont soumis au processus d'examen des taux et des activités. Je répondrai donc à votre question par l'affirmative.

M. Williams: Leur demande fait-elle partie des 600 que vous avez déjà examinées ou des 1 900 qu'il vous reste à examiner?

M. Rimmer: Tout dépend, monsieur. Leurs demandes pourraient se trouver dans l'une ou l'autre catégorie. Nous avons des transporteurs dans les deux catégories, et nous avons examiné certaines de leurs demandes, mais pas toutes.

M. Williams: Mais vous ne savez pas? Je veux parler de cet expéditeur dont il était question en particulier. On dit qu'on a dégagé un cas, de sorte qu'il est question d'un expéditeur en particulier dont vous connaissez peut-être le nom et dont vous avez examiné les circonstances. Étant donné qu'on a fait remarquer qu'il était possible que les taux exigés étaient déraisonnables dans ce cas-là, l'expéditeur payant son transporteur affilié deux fois plus que ses transporteurs non affiliés et obtenant une subvention deux fois plus élevée, et étant donné que vous savez de quel transporteur il s'agit, vous n'examinez pas ses demandes à la loupe pour veiller à ce qu'elles soient raisonnables?

.1650

M. Rimmer: Nous examinons les demandes de ce transporteur selon les mêmes critères que je vous ai décrits tout à l'heure.

M. Williams: Qu'avez-vous trouvé?

M. Rimmer: Je vous ai dit ce que nous avions conclu de l'examen de toutes les demandes.

M. Williams: Aucune n'était déraisonnable?

M. Rimmer: L'Office n'a encore jamais déterminé qu'une demande était déraisonnable.

M. Williams: Je croyais que vous aviez indiqué que les 600 premières avaient été jugées raisonnables.

M. Rimmer: Non, nous avons indiqué que, sur ces 600 demandes, nous n'avions pu trouver de taux que nous jugions déraisonnable.

M. Williams: Ainsi, elles sont raisonnables. Si elles ne sont pas déraisonnables, c'est qu'elles sont raisonnables.

M. Rimmer: Si vous voulez.

M. Williams: Je le veux, en effet.

M. Rimmer: Je tiens toutefois à préciser, monsieur, que le vérificateur général s'est intéressé à un type de marchandise en particulier parmi toute la gamme de marchandises expédiées par le transporteur en question. Dans un cas, il a constaté qu'il y avait une différence de 200 p. 100. Si je me souviens bien, l'étude a également permis de dégager des cas d'entreprises de camionnage qui étaient affiliées à un expéditeur et dont le taux était inférieur à celui des transporteurs non affiliés.

M. Williams: Je ne m'inquiète pas...

M. Rimmer: Cela dépendait donc des conditions du marché et de toute une série de facteurs qui ne figuraient pas dans les documents à notre disposition lorsque nous avons fait cette étude.

Il y a donc cet exemple d'augmentation de 200 p. 100, mais il peut y avoir d'autres exemples où c'est le contraire.

M. Williams: Vous avez la responsabilité au nom des contribuables et du Trésor public de ne verser cette subvention que lorsqu'elle est justifiée. Si des demandes ne sont pas raisonnables, vous avez la responsabilité, le devoir, soit de bloquer la subvention soit de vérifier pour vous assurer que vous êtes en droit de la bloquer. C'est tout à fait précis.

Je vois dans ce paragraphe qu'un expéditeur payait - et j'ai l'impression que c'était systématique puisqu'il n'est pas question d'un cas isolé - 200 p. 100 de plus à ses affiliés qu'à ses non-affiliés.

Vous me dites connaître le nom de ce transporteur. Ma question est simple, ce transporteur fait-il partie des 600 dont vous estimez désormais les pratiques raisonnables ou, pour reprendre votre terminologie, non déraisonnables? Fait-il partie des 600 dont vous avez légitimé les demandes?

M. Rimmer: Monsieur, il y a un certain nombre de transporteurs, comme je l'ai dit, une centaine...

M. Williams: Je vous parle de ce transporteur en particulier.

M. Rimmer: Ce que j'essaie de vous dire, monsieur, c'est que toutes les demandes de ce transporteur ne figurent pas forcément dans la catégorie des 600 ou dans celle des 1 900.

M. Williams: Je vous demande s'il est dans la catégorie des 600.

M. Rimmer: Certaines de ses demandes peut-être, ou peut-être pas.

M. Williams: Vous ne savez pas.

M. Rimmer: Pas pour ce transporteur particulier, non. Toutes les demandes de ce transporteur sont dans le système. Dans les 2 500, nous avons toutes les demandes soumises par ce transporteur depuis le 1er janvier 1995.

M. Williams: Et vous allez évaluer les demandes de ce transporteur sur la base de celles qu'il a soumises en 1994 et si elles étaient 200 p. 100 plus élevées en 1994 et 200 p. 100 plus élevées en 1995, vous allez conclure à leur caractère raisonnable et l'approuver. N'est-ce pas?

M. Rimmer: Nous le soumettrons à l'évaluation approuvée.

M. Williams: Vous allez l'évaluer?

M. Rimmer: Pour commencer, nous essayons de déterminer si ce transporteur a augmenter ses tarifs sur la fin du programme. Dans l'affirmative, nous essayons de déterminer si oui ou non ses tarifs sont raisonnables - pas l'augmentation mais les tarifs eux-mêmes.

M. Rivard: Pour répondre à votre question, monsieur, j'interdirais de verser la subvention un point c'est tout.

M. Williams: Merci beaucoup, monsieur Rivard.

M. Rivard: Je suis contribuable et nous avons une responsabilité fiduciaire de ne pas accorder de fonds publics sans justification.

M. Williams: Exactement.

M. Rivard: En conséquence, si ce genre de fait est porté à mon attention j'interdirai le paiement. C'est tout.

M. Williams: Avez-vous l'intention de prendre des mesures rétroactives, de remonter dans le passé?

M. Rivard: La question m'a été posée par votre collègue. J'y réfléchirai. Je ne peux pas prendre de décision immédiate sans consulter mes subordonnés immédiats, mais permettez-moi de vous dire une chose. Quels que soient les événements passés, avant même mon arrivée - et peut-être que quand je partirai on me fera des reproches - je condamne tout acte incorrect et inapproprié... et si j'en ai le pouvoir, j'agirai.

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M. Williams: Et si vous n'avez pas ce pouvoir, vous le demanderez au ministère des Transports si vous l'estimez nécessaire.

M. Rivard: Je vous ai lu mon paragraphe de conclusion.

M. Williams: C'est la raison pour laquelle je dis...

M. Rivard: Le gouvernement modifiera-t-il en conséquence une loi non existante pour me donner ce pouvoir? Je ne sais pas. Mais j'en discuterai avec mes conseillers juridiques.

M. Williams: Si vous constatez que vous n'avez pas ce pouvoir, en informerez-vous le ministère des Transports et le Comité des comptes publics?

M. Rivard: J'en aviserais certainement le Comité des comptes publics.

M. Williams: Merci.

M. Rivard: D'ailleurs, comme je vous l'ai déjà dit, je vous enverrai l'avis officiel du conseiller juridique principal en droit administratif du ministère de la Justice sur cette question.

M. Williams: Merci.

Le président: Monsieur Telegdi.

M. Telegdi (Waterloo): Monsieur le président, la question que je veux posée a déjà été en partie posée. Je dois dire que je suis surpris, surtout en ce qui concerne la question de M. Williams, que vous n'ayez pas de réponse définitive et que vous ne vous soyez pas informé avant de venir nous voir.

Je souhaiterais céder mon temps de parole à M. Shepherd qui n'avait pas terminé.

M. Shepherd: Monsieur Rivard, je vous remercie infiniment de votre intervention. Je crois que vous dites à propos de ce transporteur particulier, à 200 p. 100... que vous n'approuvez pas la méthode d'évaluation actuelle selon laquelle, en gros, tant que ce n'est pas une augmentation, c'est acceptable. Vous êtes disposé à examiner de plus près ces demandes qui pourraient être jugées déraisonnables sur la base des paramètres du marché privé. N'est-ce pas?

M. Rivard: Monsieur, j'ai dit que si nous recevions des demandes supérieures de 200 p. 100 aux autres, il serait tout fait inconvenant que j'autorise le paiement. Ils sauront qu'ils font ces demandes à leur risque. Comme je l'ai dit tout à l'heure, s'il est porté à mon attention qu'une demande a augmenté de 200 p. 100, je refuserais le paiement quitte à défendre ma décision devant les tribunaux.

M. Shepherd: Mais pour que cela soit porté à votre attention il faut qu'il y ait eu une vérification. C'est votre office qui a créé cette situation. Il faut des critères de vérification qui vous permettent de déterminer si ces demandes sont raisonnables ou non. N'est-ce pas?

M. Rivard: Oui, monsieur, si nous avons ce pouvoir.

M. Shepherd: Cela fait déjà deux ou trois fois que vous jouez à ce jeu juridique. Vous nous dites que vous n'avez pas ce pouvoir, mais que même si vous ne savez pas si vous avez ce pouvoir vous êtes prêt à imposer certains critères. Supposons que vous allez continuer...

M. Rivard: Non. Vous savez quoi? Je dis que si je pratiquais encore activement le droit, je répondrais non, nous ne payons pas. J'applique dans mon travail les principes que j'appliquais quand je pratiquais le droit.

M. Shepherd: Les principes du droit coutumier. Bien sûr; nous sommes aussi pour le respect de la loi.

Dans le cas de ce transporteur particulier, il y a un critère bien simple une fois le programme terminé... une chute de 200 p. 100 de ses tarifs puisqu'il n'a plus aucun intérêt. Vous avez dit vous-même qu'il n'avait aucune raison de changer ses tarifs quand ce sont des compagnies affiliées. Je suppose que beaucoup de compagnies à propriété dispersée de ce genre créent des centres de profit dans leur propre organisation car, ainsi, elles savent lesquels font des bénéfices et lesquels n'en font pas.

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L'imposition de frais artificiels après la réduction de ces tarifs avantagerait en conséquence certains de ces transporteurs. Il me semble que vous avez le devoir d'examiner cette question avant d'autoriser tout nouveau paiement. N'est-ce pas?

M. Rivard: Si c'est la question que vous me posez, je répondrais que je ferais tout mon possible, après avoir consulté mes subordonnés immédiats, pour satisfaire votre requête.

M. Shepherd: Une autre question. Si dans ces demandes toujours en souffrance pour une valeur de 10 millions de dollars vous constatez dans les dossiers des irrégularités, êtes-vous prêt à appliquer la même philosophie et réclamer le remboursement des trop-perçus depuis le 1er janvier?

M. Rivard: La réponse est oui.

M. Sheperd: Bon.

[Français]

Le président: Messieurs Rivard, Ashley, Rimmer et McRoberts, je vous remercie d'avoir répondu à nos questions.

[Traduction]

Dernière question.

M. Williams: Je croyais que nous en avions encore pour un petit bout de temps, monsieur le président.

Monsieur Ashley, nous ne vous avons pas encore entendu aujourd'hui.

M. Rivard: Peut-être aurait-il dû répondre à certaines de ces questions à ma place.

Des voix: Oh, oh!

M. Williams: J'ai devant moi ce que vous avez dit le 6 juin. J'en cite un extrait pour vous en donner une idée. Quant à l'avenir, les tribunaux en décideront. Je présume que le président en question est M. Rivard:

Nous constatons maintenant que ni le président ni les gestionnaires de ce programme ne semblent s'être s'attaqués à ce problème, ne serait-ce qu'avec un semblant de vigueur. J'ai l'impression que nous avons déboursé encore plus d'argent en remboursement de réclamations déraisonnables.

Aviez-vous parlé au président avant de dire qu'il vous avait dit qu'il ferait preuve d'une extrême vigueur dans ces cas?

M. Ashley: Non, monsieur, je ne l'avais pas fait, mais j'ai quand même souvent eu à traiter avec M. Rivard au cours des ans et je sais le respect dont il fait preuve pour l'argent des contribuables dans le cas des programmes de subventions dont il est responsable.

M. Williams: Monsieur Rivard, je crois que les députés de tous les partis représentés au Comité ont été très déçus d'entendre comment ce programme précis a été administré surtout à la lumière des questions soulevées par le vérificateur général dans son rapport, sans oublier l'évaluation du ministère des Transports. Je ne crois pas que ce programme ait réussi à régler les problèmes soulevés par le vérificateur général et le ministère des Transports.

À mon avis, il faut d'abord et avant tout protéger l'argent du contribuable. J'aurais aimé que vous nous disiez quelles mesures vous prenez pour gérer et rendre compte de ce programme précis et comment vous allez vous y prendre en votre qualité de président de l'Office.

Je ne veux plus voir d'organismes de l'État se présenter devant notre comité pour nous apprendre qu'il ne s'est pas attaqué aux problèmes soulevés, il y a déjà un certain temps, dans un rapport du vérificateur général dont l'organisme en question, comme le vôtre, aurait été saisi avant qu'il ne devienne document public. D'après ce que nous avons entendu ici aujourd'hui, les responsables de l'Office n'ont pas encore saisi l'importance du rapport ni le fait que nous pensons, et vous en convenez, que vous avez peut-être le pouvoir d'étudier les demandes déraisonnables et de les régler en ayant recours aux tribunaux, protégeant ainsi le contribuable.

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M. Rivard: Sauf votre respect, monsieur, j'ai pour le moment toute raison de croire que nous n'avons pas compétence pour juger de l'exactitude des réclamations. Comme je l'ai dit auparavant, c'est un problème.

Nonobstant les problèmes que nous avons pour exercer nos pouvoirs, j'ai ordonné, comme vous l'avez demandé, que vos recommandations soient mises en oeuvre et si nous croyons que certains réclamations ne sont pas justifiées, nous les rejetterons non pas pour nous conformer à un avis juridique, mais bien parce que j'en aurai jugé ainsi. Si l'on conteste ce jugement, que les intéressés en saisissent les tribunaux.

M. Williams: Monsieur Rivard, j'aimerais aussi que vous vous penchiez sur la gestion de ces programmes parce que j'ai l'impression qu'il y a des failles à ce niveau et, en ma qualité de membre du comité, j'aimerais bien que vous m'appreniez quelles mesures vous aurez prises.

M. Rivard: Oui monsieur.

[Français]

Le président: Merci d'être venus et d'avoir répondu à nos questions.

Lors de la séance de demain, en plus de vous demander d'approuver le rapport sur le Bureau du surintendant des institutions financières, nous allons vous soumettre la dernière page du projet de rapport sur les sciences et la technologie qui n'avait pas été adoptée lors d'une séance antérieure.

La séance est levée.

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