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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 23 novembre 1999

• 1305

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je remercie les témoins d'avoir bien voulu venir nous faire part de leurs commentaires et de leurs opinions dans le cadre de nos délibérations sur le rapport que nous présenterons au ministre des Finances afin de l'aider à préparer le budget de la prochaine année.

Nous demandons à chaque témoin de s'en tenir à un exposé de cinq minutes, après quoi nous permettrons aux membres du comité de poser des questions.

Aujourd'hui, nous entendrons les représentants du Centre canadien de politiques alternatives, de Consulting Engineers of British Columbia, de la David Suzuki Foundation, du Greater Vancouver Chambers Transportation Planning Panel, de la Health Association of B.C. et de la Corporation de la ville de Vernon. Bienvenue à tous.

J'aimerais commencer par entendre M. Seth Klein, directeur du bureau de la Colombie-Britannique, et M. Marc Lee, recherchiste en économie du Centre canadien de politiques alternatives.

Bienvenue, messieurs.

M. Seth Klein (directeur, Bureau de la Colombie-Britannique, Centre canadien de politiques alternatives): Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs du comité. Merci de nous donner l'occasion de comparaître, une fois encore, devant le Comité des finances de la Chambre des communes.

Je suis heureux d'être accompagné cette année de Marc Lee, économiste qui s'est joint à notre bureau l'an dernier et qui a fait d'excellents travaux dans le domaine de la productivité des impôts. Nous sommes heureux de présenter encore une fois les idées qui ressortent du contre-budget fédéral.

Selon le ministre des Finances Martin, les aspects fondamentaux de l'économie du Canada ne se sont jamais mieux portés. Nous demandons: quels aspects fondamentaux?

Le chômage et le sous-emploi continuent à nous empoisonner l'existence, la pauvreté a augmenté, l'injustice économique prend de l'ampleur, l'assurance-chômage et l'assistance sociale ont été réduites, les municipalités ont déclaré l'itinérance une urgence nationale, l'assurance-maladie est en crise, les universités et les collèges sont victimes de sous-financement grave et l'endettement des étudiants grimpe en flèche, et l'environnement est presque disparu de la scène politique.

Cette année marque le 10e anniversaire d'une résolution de tous les partis fédéraux demandant l'élimination de la pauvreté chez les enfants d'ici l'an 2000. Il va sans dire que les chances ne sont pas très grandes. Demain, dans les villes et les villages du Canada, il se tiendra des manifestations silencieuses pour marquer le 10e anniversaire de cette motion de la Chambre des communes.

Non seulement nous n'avons pas réussi à éliminer la pauvreté chez les enfants, mais celle-ci s'est aggravée. Nous utilisons la norme de faible revenu de Statistique Canada comme notre mesure de la pauvreté. On peut le contester, mais l'essentiel est de noter que les tendances sont claires: la pauvreté augmente. Et il faut également noter qu'au cours des 10 dernières années nous avons vu une escalade du nombre de sans-abri et la prolifération des banques alimentaires.

À notre avis, il n'est pas exagéré de dire que même parler de réductions d'impôt qui bénéficient de façon disproportionnée aux riches alors que la pauvreté chez les enfants demeure à près de 20 p. 100 et que l'itinérance est devenue une urgence nationale, c'est tout simplement immoral.

Quelque chose ne va pas. Nous sommes un pays riche. Nous sommes plus riches que nous ne l'étions lorsque nous prenions mieux soin les uns des autres. Le ton du débat porte à penser que quelque chose ne va vraiment pas dans nos priorités.

Nous évaluons l'excédent budgétaire fédéral de l'an prochain à près de 12 milliards de dollars. Les sondages nous disent, encore et encore, que les Canadiens veulent beaucoup plus un réinvestissement dans l'infrastructure sociale qu'une réduction de la dette ou des réductions d'impôt. La plupart des gens comprennent qu'il faut que le gouvernement compense les échecs du marché, tels que le manque de logements abordables et de services de garderie. Plutôt que de viser des réductions d'impôt, nous devons nous fixer des objectifs clairs qui réduiront le chômage, la pauvreté et l'itinérance, et il nous faut tenter d'atteindre ces objectifs sociaux avec la détermination dont nous avons fait preuve pour éliminer le déficit.

Comment s'y prendre? Il faudrait doubler les paiements de transfert aux provinces dans les domaines de la santé, de l'éducation et de l'assistance sociale au cours des deux prochaines années et réinvestir dans de nouveaux services publics tels que les soins à domicile, créant ainsi quelque 100 000 emplois dans le secteur public. Cela signifie donner suite à la Campagne 2000 des défenseurs des enfants qui vivent dans la pauvreté, qui demandent une augmentation de 2 milliards de dollars par année sur les cinq prochaines années pour les enfants du Canada sous forme d'une prestation fiscale pour enfants accrue, assortie de la garantie que cette prestation ne sera pas recouvrée auprès des plus pauvres parmi les pauvres, ceux qui touchent l'assistance sociale, comme cela se produit dans toutes les provinces, sauf deux. Cela signifie un programme national de garderies et un nouveau programme de dépenses dans les domaines de l'éducation de la petite enfance et le logement social. Cela signifie restaurer les prestations et la couverture de l'assurance-emploi, et, comme on l'a proposé dans le discours du Trône, cela signifie augmenter la période de congé parental payé disponible.

Bien que les promoteurs des réductions d'impôt tentent de nous convaincre du contraire, les familles en santé valent beaucoup plus que leur revenu après impôts.

Je vais maintenant céder la parole à Marc.

• 1310

M. Marc Lee (économiste chargé de recherches, Centre canadien de politiques alternatives): Merci, Seth, et merci, madame la présidente. Je vais parler très brièvement de la productivité et des impôts.

On a fait valoir que des réductions d'impôt, encore une fois, rehausseraient la productivité, mais il y a de bonnes raisons de croire que ce ne serait pas le cas. Le lien entre les impôts, d'une part, et l'investissement et la croissance, de l'autre, est peu probant, au mieux, selon la recherche. En fait, la productivité a connu ses meilleurs taux de croissance dans les années 90 dans des pays où l'impôt était élevé, comme la Norvège et le Danemark. Au Canada et aux États-Unis, le taux marginal supérieur d'impôt sur le revenu des années 50 était d'environ 90 p. 100 et correspondait à une période de croissance élevée de la productivité et de croissance élevée du PIB réel.

Le gouvernement fédéral peut faire la différence en ne restant pas passif, en faisant des investissements publics accrus dans les domaines où le secteur privé n'est guère enclin à investir lui-même. En raison des compressions, on constate un déclin marqué des investissements publics ces dernières années. Les investissements publics actuels suffisent uniquement à compenser la dépréciation du capital public existant. Les investissements publics dans des domaines comme l'infrastructure, la R-D, le transport en commun, les soins de santé et l'éducation contribuent à une augmentation soutenue de la productivité et, bien souvent, facilitent ou complètent les investissements du secteur privé. Toutefois, cela exige des gouvernements qu'ils aient une vision à long terme. Ainsi, les avantages d'un encadrement stimulant dès la petite enfance ne seront visibles dans l'économie, ou le Trésor, que dans plusieurs décennies.

En ce qui concerne les impôts, bien que nous appuyions un réinvestissement dans l'infrastructure sociale, cela ne signifie pas qu'il n'y a pas lieu de changer quoi que ce soit à la situation fiscale. Le régime fiscal est manifestement injuste et n'est pas progressif. En fait, lorsqu'on considère tous les impôts fédéraux et provinciaux, le Canada a déjà un impôt uniforme sur toute la gamme des revenus.

Des réductions d'impôt généralisées ne sont pas la solution. L'excédent fédéral découle essentiellement de réductions de dépenses, dans certains cas très pénibles et bien inutiles, qui ont nui aux pauvres, aux chômeurs, et aux étudiants. Prendre maintenant cet excédent pour payer des réductions d'impôt qui avantagent disproportionnellement les biens nantis, c'est Robin des Bois à l'envers, et c'est tout simplement mauvais.

Plus que jamais, avec le marché qui élargit l'écart croissant entre les nantis et les non-nantis, il nous faut un régime fiscal progressif qui aplanisse cette inégalité. Il nous faut des modifications qui réduisent les impôts versés par les contribuables à faible et moyen revenu, tout en augmentant les impôts de ceux qui gagnent plus de 100 000 $.

J'ai quelques idées en ce qui concerne une réforme juste de l'impôt...

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Lee, vous avez dépassé le temps alloué. Avez-vous presque terminé?

M. Marc Lee: Oui, presque.

Il nous faut imposer les gains en capital au même taux que le revenu. Nous devons considérer un dollar gagné comme un dollar gagné, ce qui élimine la nécessité d'accorder un statut spécial à l'impôt versé sur les revenus d'investissement par rapport aux revenus touchés pour le travail.

Il faudrait remettre en place les deux tranches d'impôt supérieurs pour les revenus de 100 000 $ et de 150 000 $, comme on le fait aux États-Unis, où il y a deux tranches supplémentaires d'impôt sur le revenu.

Il faut mettre en oeuvre une taxe sur le transfert de la richesse correspondant à celle qui est en vigueur aux États-Unis pour les transferts de plus d'un million de dollars, ce qui permettrait d'aller chercher trois milliards de dollars de recettes.

Il faut élargir l'assiette de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés en éliminant diverses échappatoires, telles que la déduction pour repas et divertissements, ainsi que la déduction pour contribution politique.

Il faut plafonner la déduction des salaires des dirigeants de sociétés qui font 10 fois le salaire moyen.

Il faut un impôt sur le revenu minimal des sociétés de façon à ce que celles-ci ne puissent pas accumuler leurs déductions pour éliminer leur revenu imposable.

Il faut créer de nouvelles taxes vertes, telles que la taxe sur les émissions de carbone, tout en éliminant les subventions que représente le traitement fiscal spécial offert à la production du pétrole et du gaz.

Par ailleurs, il faudrait augmenter le crédit d'impôt pour TPS à l'intention des adultes et les crédits d'impôt pour invalidité. Il faudrait accroître considérablement la prestation fiscale pour enfants, de 2 000 $ par enfant par an, et s'assurer que toutes les familles à revenu faible et modeste, les assistés sociaux autant que les travailleurs pauvres, en profitent.

Nous devrions augmenter l'exemption personnelle de base et indexer les tranches de revenu à l'inflation, ce qui mettrait fin aux changements insidieux de tranches d'imposition qui touchent de façon disproportionnée les personnes à revenu faible et moyen

Enfin, nous ne sommes pas que de simples consommateurs. Le gouvernement devrait rappeler à ses citoyens pourquoi nous payons des impôts. C'est le prix à payer pour une société civilisée et pour avoir droit à des biens et services que nous avons décidé de nous fournir les uns aux autres de façon collective.

Merci, madame la présidente.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, messieurs.

Nous allons maintenant entendre le témoignage des représentants de Consulting Engineers of British Columbia, M. Kerry Rudd et Mme Kate Cockerill.

M. Kerry K. Rudd (président, Consulting Engineers of British Columbia): Bonjour, et merci.

Je m'appelle Kerry Rudd, et je suis président de Consulting Engineers of B.C. Je suis accompagné aujourd'hui de Kate Cockerill, notre directrice générale.

L'organisme Consulting Engineers of B.C. est le porte-parole d'une centaine d'entreprises d'ingénieurs-conseils très connues de la province. Nous employons environ 5 000 personnes en Colombie-Britannique et près de 10 000 dans l'ensemble du pays et à l'étranger.

Notre organisme remercie le Comité permanent des finances de l'avoir invité à donner son avis sur la façon d'assurer la santé, la sécurité et le bien-être économique des Canadiens. Ce ne sera possible que grâce à un système d'infrastructure solide et sain.

• 1315

La création et le maintien d'un système d'infrastructure solide à l'échelle nationale ont été d'une importance cruciale pour le développement de notre pays. Notre réussite repose sur notre aptitude à transporter les marchandises d'une province à l'autre, à desservir les collectivités éloignées et à avoir accès à des débouchés d'exportation cruciaux. Les liens qui relient nos deux côtes en passant par les Prairies sont essentiels à notre sentiment d'unité. La santé des Canadiens et notre environnement dépendent essentiellement de la distribution d'eau potable propre dans tous les foyers canadiens et du traitement des déchets avant leur élimination.

Par le passé, la qualité de notre infrastructure a énormément contribué à l'excellente qualité de vie dont jouissent les Canadiens. Cette qualité, combinée à la beauté naturelle de notre pays, a incité 1,2 millions de touristes à visiter la Colombie-Britannique en 1997, ce qui a représenté un apport de 4,1 milliards de dollars pour notre économie. À l'échelle nationale, cela représente 47 milliards de dollars.

Dernièrement, les investissements dans l'infrastructure de bas sont tombés au-dessous des niveaux nécessaires pour répondre à nos besoins fondamentaux. Cela ne peut plus durer. Nous demandons donc votre appui pour que le gouvernement réinvestisse dans les plus brefs délais et de façon importante dans notre infrastructure. En formulant cette demande, nous appuyons celle faite par d'autres intervenants, et notamment l'Association des ingénieurs-conseils du Canada, la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Canada et les gouvernements provinciaux.

Il importe d'adopter une stratégie d'investissement à long terme pour notre réseau routier national et l'infrastructure municipale; de calculer la valeur totale de l'infrastructure nationale et de l'indiquer sur le bilan du gouvernement fédéral pour que les éléments de l'infrastructure du Canada puissent être gérés de manière efficace; d'élaborer, avec l'aide de l'industrie, des normes relatives au niveau et au calendrier des dépenses d'entretien nécessaires pour soutenir cette infrastructure; de cibler les dépenses fédérales dans le budget de l'an 2000 vers les secteurs d'infrastructure les plus menacés; et d'élaborer, de concert avec le secteur privé, une stratégie en matière d'infrastructure qui soit de nature intermodale et municipale.

Tout le monde fait les frais d'un investissement insuffisant. Vos objectifs en vue d'accroître notre compétitivité et notre productivité nationales, de soutenir une économie durable du point de vue environnemental et d'améliorer la santé, la sécurité et la qualité de vie des Canadiens, sont étroitement liés à l'existence d'une infrastructure moderne et efficace. De nombreuses études font ressortir un déficit de près de 60 milliards de dollars au titre de l'infrastructure nationale.

L'énergie et la productivité sont gaspillées lorsque l'infrastructure est défaillante. L'énergie requise pour faire bouillir l'eau de façon à ce qu'elle soit potable est gaspillée en pure perte. La consommation de carburants et la pollution augmentent avec les embouteillages sur les routes. Les routes dangereuses sont cause d'accidents et de dépenses supplémentaires pour nos services de santé. Ce ne sont que trois exemples de ce que coûte à notre économie et à la santé et à la sécurité des Canadiens une infrastructure négligée.

Tous les jours nous perdons du terrain. D'après les estimations de l'OCDE, l'investissement nécessaire pour maintenir l'infrastructure de transport dans les pays membres de l'organisation varie de 2 p. 100 du PIB à 17 p. 100 dans les pays moins développés. Au Canada, ces dépenses représentent 0,68 p. 100 du PIB.

En 1995, les États-Unis ont dépensé 42 p. 100 de plus par kilomètre de route que nous au Canada. Aux termes de la Transportation Equity Act des États-Unis, 198 milliards de dollars sont consacrés aux réseaux de transport entre 1998 et l'an 2000. Le réseau routier canadien est en concurrence avec les routes américaines pour des milliards de dollars par an de trafic commercial. Il semble normal d'accroître l'investissement dans notre infrastructure pour regagner notre avantage concurrentiel.

Contrairement aux autres provinces, l'infrastructure de la Colombie-Britannique a depuis toujours du retard sur la croissance démographique. Cela s'explique par le fait que de nombreuses villes se trouvent tout près de cours d'eau et de lacs et de montagnes. En conséquence, l'eau potable subit souvent un traitement minimum. En outre, de grands centres urbains sont situés sur la côte. Cela a permis aux gens d'éliminer les déchets municipaux dans l'océan. Les connaissances actuelles nous prouvent que ces méthodes sont à la fois inacceptables et dangereuses. Une eau transparente n'est pas nécessairement une eau propre.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Rudd, je m'excuse de devoir vous interrompre, mais j'aimerais vous demander de conclure, car votre temps de parole est écoulé.

M. Kerry Rudd: Bien sûr.

Pour conclure, notre association appuie la recommandation de l'Association des ingénieurs-conseils du Canada, dont nous faisons partie, relativement à une stratégie d'investissement à long terme dans l'infrastructure. Dans le dernier discours du Trône, le gouvernement fédéral s'est engagé à mettre sur pied un nouveau programme quinquennal d'infrastructure au niveau national. Il faut également signaler que l'on ne pourra pas répondre à nos besoins en une période de cinq ans et que cet investissement doit donc s'inscrire dans un plan à long terme. En outre, nous estimons que le gouvernement ne devrait pas attendre l'an 2001 avant de débloquer des fonds nécessaires pour combler le déficit de 60 milliards de dollars au titre de l'infrastructure nationale.

• 1320

Je vous remercie.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup. J'incite les membres du comité à lire de bout en bout les mémoires si tout n'a pas été dit dans les exposés.

Nous allons maintenant donner la parole à M. Gerry Scott, directeur du changement climatique, à M. Jim Fulton, directeur administratif, et à M. Dermot Foley, directeur de l'énergie, représentant la David Suzuki Foundation.

Soyez les bienvenus, messieurs.

M. Jim Fulton (directeur administratif, David Suzuki Foundation): Merci beaucoup, madame la présidente.

[Français]

Je m'excuse de vous présenter ce document uniquement en anglais,

[Traduction]

mais les personnes qui visitent notre site Web pourront obtenir les documents dont nous allons parler en français et en anglais.

Je suis sûr que les membres du comité remarqueront le titre de notre mémoire: «De la crise à l'occasion à saisir: Changement climatique, viabilité écologique et sécurité économique», et réfléchiront au fait que notre actuel ministre des Finances, M. Martin, a déclaré publiquement qu'il voulait que, d'ici à l'an 2005, les émissions de dioxyde de carbone diminuent de 20 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990. Votre comité peut sans doute exercer plus d'influence que les autres comités de la Chambre sur les mesures que peuvent prendre le ministre des Finances et le Canada pour atteindre cet objectif. Je vous demande donc de prendre bien note des recommandations que nous faisons dans notre mémoire d'aujourd'hui.

À la partie intitulée «Survol», page 1, nous faisons valoir l'argument suivant:

    Une consommation énergétique efficiente alliée à une dépendance croissante vis-à-vis des ressources renouvelables durables peut augmenter la productivité, créer des emplois de haute technologie et promouvoir une économie fondée sur le savoir. Dans cette quête d'une stratégie énergétique viable, les multiples menaces liées au changement climatique sont réduites et notre économie globale se trouve renforcée. Sans compter qu'elle comporte de nombreux avantages corollaires: moins de pluies acides et de pollution atmosphérique, une meilleure santé publique, la conservation de ressources hydriques précieuses et un relèvement de la qualité de vie dans les collectivités canadiennes.

Comme les membres du comité le savent déjà:

    Cette transition est déjà en cours dans bon nombre des économies les plus vigoureuses du monde: l'Allemagne, le Japon, les Pays-Bas et certaines parties de la Scandinavie.

Même les États-Unis et la Grande-Bretagne réagissent plus rapidement que le Canada.

À la page 2, sous le titre «Le Canada et le changement climatique», nous disons ce qui suit:

    Le bien-être social et économique des Canadiens est intimement lié à notre climat et aux systèmes météorologiques qui composent notre environnement. Parmi les activités et les secteurs économiques qui dépendent de la température, citons la production d'énergie hydroélectrique, les services d'utilité publics, la pêche, l'agriculture, le tourisme, l'industrie du bâtiment et l'exploitation forestière. Ces secteurs représentent annuellement 130 milliards de dollars du PIB du Canada.

À la page 3, à la rubrique «Énergie durable et sécurité sociale et économique, on lit»:

    [...] en moyenne, les investissements dans l'efficience énergétique créent quatre fois plus d'emplois par opposition à de nouvelles sources énergétiques. En outre, deux fois plus d'emplois sont créés grâce aux investissements dans les technologies énergétiques renouvelables comparativement à des investissements analogues dans l'énergie conventionnelle. À cela s'ajoutent quantité d'avantages corollaires [...]

...qui sont énumérés ici.

Il est peut-être encore plus important pour les membres de ce comité et les députés de la Chambre de réfléchir au fait suivant: «Des études récentes menées par Santé Canada révèlent montrent que 16 000 Canadiens meurent prématurément tous les ans à cause de la pollution atmosphérique». Nous avons récemment publié une série de documents sur les pertes de vies canadiennes causées par notre inaction dans le domaine des changements climatiques et de la pollution de l'air.

À la page 5, à la rubrique «Initiatives fédérales relatives au transport durable», nous notons:

    Le gouvernement fédéral tire environ 3,8 milliards de dollars de la taxe sur l'essence alors que les dépenses de transport sont inférieures à 400 millions de dollars. Le Canada est le seul pays de l'OCDE qui n'offre aucun soutien au transport en commun.

Ce soutien devrait exister, et nous formulons quelques suggestions à cet effet.

À la page 5, à la rubrique «Fonds d'amélioration du transport communautaire», nous pensons que vous devriez tout particulièrement reprendre ces recommandations:

    Il convient de gérer un fonds d'amélioration communautaire en y injectant 25 p. 100 (ou 1,5 milliard de dollars) des recettes annuelles que tire le gouvernement fédéral de la taxe sur l'essence, assorti d'une contrepartie des gouvernements provinciaux. Ce fonds serait géré collectivement avec les gouvernements régionaux et municipaux [...] Le fonds canadien devrait servir à améliorer et à étendre l'infrastructure du transport en commun. Une partie du fonds devrait être consacrée, sur la base d'un partage des frais, à une infrastructure pour modes de transport alternatifs comme les pistes cyclables intra-urbaines, les services de jumelage pour banlieusards et la multiplication des voies réservées aux véhicules à fort achalandage comme les autobus et les véhicules de covoiturage.

Vous êtes nombreux à vous rappeler, j'en suis persuadé, que Paul Martin a augmenté de 1,5c. la taxe sur le litre d'essence dans son budget de 1995. Cela représente 500 millions de dollars par année qui ont servi à réduire le déficit. Nous vous encourageons à exhorter le ministre des Finances à utiliser maintenant cette somme pour combler le déficit environnemental, qui, comme nous l'ont dit M. Klein et d'autres, continue à augmenter au Canada.

Au paragraphe 2.2, «Incitatifs à l'efficience dans le secteur de l'automobile» nous vous prions de formuler une recommandation sur:

    [...] programme de taxation avec remise, neutre sur le plan fiscal, [qui] offrirait aux Canadiens des remises pour l'achat de nouveaux véhicules à haute efficience, surtout les hybrides, et serait financé à partir des droits imposés aux véhicules consommant davantage de carburant.

• 1325

Cette mesure est neutre et représente une approche intelligente. De nombreux pays l'ont adoptée, et donc nous demandons simplement les mêmes possibilités. Cesser de simplement subventionner les routes, le transport des marchandises et l'infrastructure pour adopter des approches plus intelligentes qui nous placeront dans une situation où nous serons gagnants sur toute la ligne.

À la partie 3, «Nouvelles orientations fiscales et incitatifs économiques»:

    [...] bon nombre de pays industrialisés se tournent vers certains principes économiques fondamentaux: les impôts compriment certains aspects d'une économie alors que les allégements fiscaux encouragent la croissance de certains autres.

La pollution ne figure pas dans le coût des biens en ce moment au Canada; c'est un coût externe. Nous vous exhortons à cesser d'accepter que l'atmosphère soit un dépotoir gratuit. On ne peut plus tolérer cela. Les meilleurs chercheurs du monde s'entendent sur ce point, et nous vous encourageons à prendre des mesures à cet égard.

    [...] le Canada devrait ajouter un droit d'utilisation de l'atmosphère au prix des combustibles fossiles utilisés directement par les consommateurs ou à titre d'intrant dans les marchandises qu'ils achètent. Une réduction d'impôt équivalente dans d'autres aspects de l'économie—la taxe de vente, l'impôt sur le revenu, les charges sociales ou diverses industries propres de haute technologie—encouragerait l'emploi, la création d'emplois, la croissance d'un certain secteur de l'économie ou une hausse du revenu personnel.

Le dernier point que je tiens à souligner, à la page 6, à la rubrique «Droit sur les émissions de dioxyde de carbone», concerne le principe du pollueur-payeur:

    Un droit sur le gaz carbonique, de toute évidence neutre sur le plan fiscal, serait un outil très efficace pour réduire les émissions de dioxyde de carbone. Cela enverrait aux Canadiens le message que le Canada est déterminé à lutter contre le changement climatique. Un sondage mené par la firme Environics en juillet 1999 [...]

—que nous avons mené—

    montre que 7 p. 100 des Canadiens appuient l'imposition d'un droit sur le carbone comme moyen de s'attaquer au problème du changement climatique.

    Sur une période de huit ans, les recettes annuelles totales grimperaient à 7,5 milliards de dollars si la consommation demeurait aux niveaux de 1995.

On voit donc que le potentiel est très grand dans ce domaine.

Enfin, j'attire votre attention sur un dernier point qui est abordé à la page 8, à la rubrique «Diminution des incitatifs à l'exploration des combustibles fossiles»:

    Le secteur pétrolier et gazier bénéficie à l'heure actuelle du taux d'imposition le plus bas sur l'investissement marginal—5,5 p. 100 (comparativement à 37 p. 100 pour le secteur du bâtiment et 27,6 p. 100 pour le secteur tertiaire).

Nous réclamons donc un traitement égal. Pourquoi accorder un traitement spécial au secteur des combustibles fossiles, lequel est déjà très lucratif, lorsque d'autres secteurs de l'économie aident à réparer les dommages environnementaux qui ont été causés, à améliorer la santé des Canadiens, à créer plus d'emplois et à stabiliser l'économie, d'autant plus que c'est dans ce sens que s'orientent les économies performantes du reste du monde?

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie, monsieur Fulton.

Si je ne m'abuse, vous avez ces documents avec vous. Si certains membres du comité souhaitent les voir, vous pourrez leur en fournir un exemplaire, n'est-ce pas?

M. Jim Fulton: Oui, nous les avons remis au greffier, auquel on peut s'adresser pour les obtenir. Ceux qui liront la transcription des délibérations du comité sur le Web peuvent accéder aux versions anglaise et française des documents Solutions canadiennes et À couper le souffle. Je crois comprendre que les comités n'annexent plus à leurs délibérations les mémoires reçues comme ils le faisaient auparavant, mais les gens peuvent avoir accès à cette information en consultant notre site Web, dont l'adresse est www.davidsuzuki.org.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie beaucoup.

J'accorde maintenant la parole à M. Robert Milbourne, président du Greater Vancouver Chambers Transportation Planning Panel. Bienvenue.

M. Robert Milbourne (président, Comité de planification des transports de la Greater Vancouver Chambers): Je vous remercie. Je m'appelle Bob Milbourne et je suis directeur pour la région du Pacifique de Hatch, l'une des plus importantes organisations du Canada qui oeuvrent à l'échelle internationale dans le domaine de la gestion des grands travaux et des services-conseils en ingénierie. Notre organisme se spécialise dans les secteurs du transport, de l'infrastructure civile, des mines et de la métallurgie.

Je comparais aujourd'hui devant le comité à titre de président du Greater Vancouver Chambers Transportation Planning Panel, organisme créé sous les auspices de la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique avec l'appui de la majorité des chambres de commerce de la région du Grand Vancouver, y compris celle de Vancouver. L'organisme a été mis sur pied surtout en réponse à la création de TransLink, la nouvelle administration chargée des systèmes de transport, y compris les transports rapides et le réseau des autoroutes dans le district régional du Grand Vancouver.

Bien que TransLink ait sollicité et continue de solliciter l'avis des divers groupes d'intérêts touchés par ses activités dans la région, ses conseils consultatifs comportent des représentants d'une vaste gamme d'organismes et, à ce titre, ne reflètent pas la position du milieu des affaires. Avec des organismes comme TransLink et Gateway Council, nous estimons qu'il existe au moins un cadre permettant d'évaluer de façon cohérente les questions liées au transport qui touchent la région.

Les chambres de commerce qui participent à ce comité sont toutes convaincues que l'essor économique de la région et la qualité de vie des habitants du Grand Vancouver reposent sur des services de transport efficaces et efficients qui tiennent compte des besoins tant dans le domaine du transport des personnes que dans celui du transport des biens et des services. Le comité tient des discussions avec TransLink et d'autres organismes de transport à l'échelle régionale, provinciale et fédérale pour veiller à ce que la planification, le financement et l'exécution des projets dans le domaine du transport tiennent compte des préoccupations du milieu des affaires.

• 1330

Permettez-moi de vous exposer les principes que partagent les gens d'affaires de notre région: que les organismes publics sont redevables de l'optimisation des investissements économiques et sociaux; que les revenus provenant de taxes et de prélèvements touchant les marchandises et les services du domaine du transport doivent être réaffectés dans le domaine des transports et de l'infrastructure; que les projets de transport doivent être financés à même les revenus gouvernementaux actuels provenant de la collecte des taxes et des impôts, revenus qui devraient d'ailleurs décroître avec le temps.

Le district régional du Grand Vancouver a bénéficié récemment d'importants investissements dans le domaine de l'infrastructure qui lui permettront de vraiment jouer son rôle de grand centre côtier, de grand centre commercial ainsi que de porte d'accès à l'étranger. Je songe notamment au complexe Deltaport, à l'agrandissement de l'aéroport, au prolongement du Sky trains et à la mise en service de nouveaux traversiers. Chacun de ces projets a sans doute paru logique à leur promoteur. Or, il est devenu évident, après leur mise en oeuvre, qu'en l'absence d'investissements consentis pour créer l'infrastructure qui permettrait d'en assurer l'intégration, soit ils n'ont pas atteint leur objectif, soit, dans le pire des cas, ils ont contribué à accroître la congestion sur les routes, à gaspiller davantage de ressources et à dégrader encore plus la qualité de l'air, maux que malheureusement on associe avec la vallée inférieure du Fraser.

Pour que le Grand Vancouver continue d'être un moteur économique pour la Colombie-Britannique en général ainsi que pour d'autres provinces et régions, par l'intermédiaire des politiques de redistribution du revenu, il doit demeurer compétitif et être relié à des centres comparables dans les régions américaines avoisinantes. Aux États-Unis, les revenus provenant du transport des marchandises et des services sont réinvestis dans l'infrastructure nécessaire. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a fait un petit pas dans cette direction en décidant d'attribuer une partie des taxes sur le carburant recueillies dans la région à TransLink. Or, compte tenu du fait qu'on n'a pas suffisamment investi depuis des décennies dans l'infrastructure des transports dans la région du Grand Vancouver alors qu'on a investi des milliards de dollars dans ce domaine à Seattle, à Portland, etc., notamment dans le cadre du programme américain TEA-21, cette décision est presque sans importance. À notre avis, il est nécessaire que les gouvernements fédéral et provinciaux mettent en oeuvre un programme permanent visant à réinvestir dans le domaine des transports les revenus tirés des transports.

Enfin, ce programme doit être mis en oeuvre au moyen des revenus totaux actuellement tirés des taxes directes et indirectes et des prélèvements recueillis par tous les niveaux de gouvernement. La région du Grand Vancouver en particulier, et la Colombie-Britannique en général, illustrent de façon éloquente la façon dont des économies autrefois florissantes peuvent être asphyxiées en raison de l'effet combiné des impôts, de la réglementation et des poursuites judiciaires. Cette situation mène à la stagnation économique et éventuellement au déclin économique. Non seulement il faut alléger les impôts des particuliers et des entreprises pour qu'il soit possible de générer des capitaux et des investissements, mais il faut aussi reconnaître que la prétendue privatisation de services gouvernementaux autrefois monopolistiques revient simplement à augmenter les impôts, puisque ces services sont maintenant dispensés par des organismes quasi publics qui sont financés grâce à des frais d'utilisateur établis sans tenir compte des impôts déjà versés.

Dans le même contexte, si l'on ne peut pas dire que tout est parfait dans le système américain qui régit nos compétiteurs, on ne peut non plus dire qu'il ne comporte pas de bons éléments. En particulier, on peut dire que le fait que les recettes fiscales tirées des transports soient réinvesties dans les transports et que les obligations municipales et les obligations visant les projets d'infrastructure soient exonérées d'impôts favorisent des investissements continus dans la modernisation des ports, des aéroports, des autoroutes, des routes, des ponts, des tunnels et des systèmes de transport ferroviaire. Si les mesures voulues ne sont pas prises, la région du Grand Vancouver ne pourra plus jouer son rôle de moteur économique traditionnel de la Colombie-Britannique, et elle ne pourra plus aider les régions moins favorisées du Canada.

Nous aimerions vous recommander d'adopter un programme innovateur reposant sur le réinvestissement dans le domaine des transports des impôts provenant des transports et sur les obligations exonérées d'impôt pour les projets d'infrastructure, auquel s'ajouterait un programme visant à réduire l'ensemble des impôts de façon systématique, concrète et cohérente. Cette initiative permettrait non seulement d'assurer l'essor de centres comme celui du Grand Vancouver, mais permettrait aussi de mettre en oeuvre des programmes qui revêtent beaucoup d'importance pour nous, comme la stratégie nationale d'investissement dans le domaine des transports.

Je vous remercie de nous avoir permis de vous exposer nos vues.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie, monsieur Milbourne.

• 1335

J'accorde maintenant la parole à M. Larry Odegard, chef de la direction de la Health Association of British Columbia. Bienvenue.

M. Larry Odegard (chef de la direction, Health Association of B.C.): Je vous remercie, madame la présidente.

La Health Association of B.C. est un organisme non gouvernemental à but non lucratif qui représente les fournisseurs de soins de santé ainsi que les organismes de santé de la province. Nous aidons nos membres à soumettre au gouvernement des suggestions quant à la façon d'améliorer la qualité et la prestation des services de santé dans la province.

Notre association est également membre de l'Association canadienne des soins de santé, qui regroupe diverses associations provinciales. Nous aimerions vous faire part de notre appui pour la position que l'ACS vous exposera dans exactement une semaine, mais nous voulons également vous entretenir de certaines questions qui revêtent une importance toute particulière en Colombie-Britannique.

Les recommandations qui vous seront soumises par l'ACS ne pourront jamais vous être trop répétées. Des gens nous expriment tous les jours leurs préoccupations au sujet de l'avenir du système de soins de santé au pays, et il est évident que le gouvernement fédéral doit s'engager à créer pour le nouveau millénaire un système national de soins de santé durable, accessible, intégré et financé publiquement qui repose sur le principe de la reddition de comptes.

Nous nous empressons de reconnaître que le gouvernement fédéral s'est déjà engagé à créer ce genre de système et qu'il a notamment reconnu la nécessité, dans le dernier budget, d'accroître les fonds dans le domaine de la santé, mais nous pensons qu'il convient de lui demander de réaffirmer cet engagement. La population croît et vieillit. Les effets de l'inflation se font sentir. Nous devons aussi remplacer l'équipement que nous avons négligé de remplacer, comme je vous en parlerai plus tard, et il convient aussi de tenir compte de facteurs comme les progrès technologiques, les attentes du public ainsi que l'augmentation des coûts découlant notamment d'augmentations salariales.

Notre association presse donc le comité de mettre en oeuvre les recommandations qui figurent dans le mémoire de l'ACS. Je vais maintenant vous parler des cinq points qui nous semblent revêtir une importance particulière en Colombie-Britannique, et je vous expliquerai quelle peut être la contribution du gouvernement fédéral à cet égard.

Je suis conscient du fait que le domaine de la santé est un domaine de compétence fédérale-provinciale partagée, mais je pense que les questions dont je vais vous parler ont une incidence nationale.

L'efficacité et l'efficience du système de santé intégré en Colombie-Britannique se sont dernièrement considérablement améliorées. Les systèmes de santé intégrés ont eu les mêmes résultats positifs dans l'ensemble du pays.

Si l'intégration des services de santé a eu des effets positifs, elle a nécessité des années d'efforts de la part des fournisseurs de soins de santé et des ministères de la Santé de tout le pays. Comme on a voulu avant tout restructurer le système, on a négligé un certain nombre de questions importantes liées à la réforme de la santé et à l'exploitation des services, questions sur lesquelles il faut maintenant se pencher.

La première question dont je voudrais vous parler est celle de l'aide au logement. Le nombre de personnes âgées en Colombie-Britannique continue de croître, et toutes les collectivités font face au défi qui consiste à leur trouver des logements adéquats. L'aide au logement, qui n'est pas suffisante en Colombie-Britannique, constitue un élément fondamental des soins communautaires. Je sais qu'il existe une situation analogue dans l'ensemble du pays.

L'aide au logement permet de répondre aux besoins des personnes âgées en leur offrant des logements collectifs abordables où ils peuvent vivre de façon autonome en toute sécurité. L'aide au logement profite à l'ensemble de la société, et pas seulement à ceux qui en bénéficient. Ce concept permet de réaliser d'importantes économies dans le domaine de la santé. En outre, il permet aussi d'aider les familles et d'atténuer le stress que ressentent les personnes qui doivent s'occuper chez elles d'un membre âgé de leur famille.

Le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle dans le domaine de l'aide au logement en favorisant la conception d'immeubles spécialement conçus pour répondre aux besoins des personnes âgées, en fournissant les fonds de démarrage nécessaires à l'exécution de projets, en construisant des logements de rechange à de nombreux endroits, en assumant une part des coûts d'immobilisations ou en aidant les organismes de santé à avoir accès à des capitaux et en participant à l'élaboration de programmes de santé destinés à aider les personnes âgées frêles à vivre dans des résidences communautaires.

J'aimerais aussi vous parler de l'information dans le domaine de la santé. Il n'existe pas de système d'information national interactif complet fournissant des données à jour sur les personnes qui reçoivent actuellement des services de santé.

L'Institut canadien d'information sur la santé constitue un excellent point de départ. Or, l'information dont dispose l'institut n'est pas aussi à jour ou complète qu'elle pourrait l'être, étant donné que les fournisseurs de services ne sont pas en mesure de transmettre immédiatement des renseignements exacts à l'ICIS. Le système de santé canadien ne dispose pas de l'information voulue sur les services offerts, sur le coût de ces services et sur les résultats qui en découlent.

• 1340

Essentiellement, nos données portent sur les soins de malades aigus et les services de médecin et peu sur les services communautaires, la promotion de la santé et la prévention des maladies. Nous ne pouvons pas non plus ventiler ces données par tranches de population et par groupes sectoriels cibles. Si nous avions une base de données, une fondation et des données améliorées, nous serions en mesure de mieux planifier la prestation des services et d'obtenir des résultats améliorés. Nous exhortons le gouvernement fédéral à financer l'établissement de ce système en collaboration avec l'ICIS et les responsables provinciaux et régionaux de la santé de façon à ce que nous puissions élaborer des mesures normalisées de rendement, partager les meilleures pratiques et attribuer des notes non seulement dans Maclean's, mais aussi par d'autres moyens à nos localités.

Dans un troisième temps, il y a l'équipement tertiaire. Plus tôt cette année, nous avons effectué un sondage local et nous avons découvert qu'aucun centre régional de santé dans la province ne décrivait comme adéquate la situation en ce qui concerne les gains d'équipement. En fait, nous souffrons depuis longtemps d'une grave négligence en ce qui concerne l'équipement nécessitant des dépenses importantes. Dans nos hôpitaux tertiaires, c'est encore plus grave. On doit s'adresser à des organismes de charité pour financer la plupart des acquisitions d'équipement afin de fournir des services. La tendance au sous-financement des biens d'équipement a entraîné une accumulation de la demande d'équipement de nouvelle technologie disponible un peu partout dans d'autres provinces. Et nous n'avons pas non plus vraiment remplacé l'équipement dépassé.

À titre d'exemple, à quelques rues d'ici, l'hôpital Saint-Paul a une liste d'équipements essentiels de 12 millions de dollars qui comprend de l'équipement de contrôle cardiaque et d'affichage de diagrammes, des défibrillateurs, de l'équipement pour le coeur et les poumons, de l'équipement de dialyse rénale et de l'équipement de contrôle chirurgical.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Odegard, il ne vous reste plus de temps. Pourriez-vous vous peut-être conclure?

M. Larry Odegard: Nous pensons qu'il faut faire quelque chose en ce qui concerne l'infrastructure. En ce qui concerne la santé rurale, je tiens à féliciter le gouvernement fédéral de son appui à l'institut de recherches en santé rurale, qui s'est réuni récemment à Prince George. Il faut accroître l'investissement dans ce domaine afin de soutenir le réseau.

Le dernier domaine dont je veux parler, et non le moindre, c'est la santé des Autochtones. Les Autochtones dans tout le pays sont en mauvaise santé, particulièrement en Colombie-Britannique, où nous considérons que la situation est grave. Il nous faut de l'aide pour mettre en place des programmes afin de concerter nos efforts en vue d'améliorer la santé des Autochtones.

Je tiens à vous remercier, et je m'excuse d'avoir pris plus de temps. Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, et inutile de vous excuser.

Maintenant, nous accueillons le maire Wayne McGrath, de la ville de Vernon. Bienvenue, monsieur le maire.

M. Wayne McGrath (maire de Vernon): Merci, madame la présidente. Je suis, comme vous le dites, le maire de la ville de Vernon, du moins pour deux semaines encore. Je n'ai pas obtenu de bons résultats aux élections de samedi. Je suis ingénieur sanitaire en environnement. Toutefois, je suis ici aujourd'hui pour le compte de la ville de Vernon. Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant votre comité.

Mon exposé portera essentiellement sur le nouveau programme national d'infrastructure proposé. Je suppose que je pourrais m'arrêter là et dire que j'appuie M. Kerry Rudd et le mémoire des Consulting Engineers of B.C. De façon générale, j'appuie également l'idée que la grande partie de l'excédent du gouvernement fédéral devrait servir à rembourser la dette selon des échéances précises et à réduire les impôts.

L'objectif consiste à répartir l'excédent de la façon la plus propre à renforcer notre économie. Le gouvernement fédéral doit résister à la tentation de se lancer dans toute une gamme de nouveaux programmes de dépenses, quels que soient leurs mérites respectifs. Il doit y avoir, à mon avis, une définition claire des rôles et responsabilités des divers paliers de gouvernement; c'est-à-dire entre les gouvernements fédéral et provinciaux et provinciaux et municipaux. Il existe beaucoup de double emploi aujourd'hui. Je pense néanmoins qu'il faut encourager une augmentation des dépenses dans notre réseau national d'autoroutes. Un pourcentage plus élevé de la taxe fédérale sur les carburants doit être assorti des contributions des provinces afin d'améliorer nos principaux réseaux routiers nationaux ainsi que d'autres réseaux de transport plus innovateurs, tels que ceux recommandés par M. Fulton, qui est assis à côté de moi.

• 1345

Du point de vue municipal, j'appuie l'engagement du gouvernement fédéral à mettre en place un nouveau programme national d'infrastructure. Les programmes de 1993 et de 1997, à mon avis, ont atteint avec succès, d'une façon générale, les objectifs fixés à l'époque, mais il y avait quelques lacunes et quelques frustrations, surtout chez les municipalités qui tentaient d'obtenir des subventions dans le cadre de ce programme. Je pense que le programme doit être assorti de critères mieux définis. Notre ville a transmis ces recommandations par le passé au gouvernement fédéral par l'entremise de l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique et de la Fédération canadienne des municipalités.

Pour revenir à ces critères, il y en a quatre. D'abord, tous les projets doivent être financés à parts égales par la municipalité, la province et le gouvernement fédéral, essentiellement comme par le passé et, peut-on espérer, dans l'avenir.

Deuxièmement, le niveau de financement donné aux municipalités doit reposer essentiellement sur la population, et la répartition de ce financement doit se faire de façon équitable.

Troisièmement, les priorités du projet doivent être déterminées par les municipalités, l'approbation de la province et du gouvernement fédéral ne servant qu'à assurer qu'il y a conformité avec les critères prédéterminés. À titre d'exemple, la dernière fois, ou la première fois en 1993, notre ville avait une liste, je pense, de 12 projets très importants, énumérés par ordre de priorité. Nous avons reçu le financement nécessaire pour le 12e. C'était un projet important, et nous ne nous plaignons pas, mais il semble plutôt bizarre que les fonctionnaires fédéraux et provinciaux disent à une municipalité quel devrait être son projet prioritaire. Il devrait suffire, comme je l'ai dit, de respecter les critères prédéterminés.

Et quatrièmement, je pense que les projets admissibles devraient être limités à des projets d'infrastructure de base: eau, égout, routes et ponts. Dans le cadre des programmes précédents, on s'était permis d'augmenter la liste de façon assez libérale.

De plus, je pense qu'il faut un programme continu afin d'assurer une source prévisible de revenus qui permette une planification à long terme des projets d'immobilisations par les municipalités. Si une province en particulier choisit de se retirer de ce programme—ce qui est plus ou moins la situation ici en Colombie-Britannique—il faudrait prévoir un programme fédéral-municipal, à coût partagé entre le gouvernement fédéral et les municipalités.

Je sais qu'au cours de la dernière ronde de projets, en 1997, la Colombie-Britannique était plus ou moins limitée à des projets de circulation et de transport qui, bien qu'importants pour de nombreuses municipalités—probablement pour la grande majorité—n'étaient pas nos projets prioritaires. Pourtant, nous avons essentiellement été forcés d'investir notre propre argent dans des projets que nous ne considérions pas comme prioritaires tout simplement pour avoir accès au financement provincial et fédéral.

J'ai appris en parlant à David Anderson qu'il était question d'agir seul, sans la province. Je peux certainement comprendre le désir de faire participer toutes les provinces, mais lorsqu'il y a dix provinces, qui pensent différemment, il est parfois difficile de mettre en place un programme dont tous peuvent accepter les critères. Je suggère donc que si cela se reproduit, on mette en place un programme à frais partagés entre le gouvernement fédéral et les municipalités.

En conclusion, j'aimerais dire que la situation excédentaire actuelle du gouvernement fédéral vous place dans une situation unique pour influencer positivement les finances du Canada. Je vous exhorte à mettre en place un nouveau programme national d'infrastructure dans le budget de l'an 2000.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, monsieur McGrath.

Je vais maintenant céder la parole aux membres du comité pour les questions. Si vous n'êtes pas parfaitement bilingues, vous voudrez peut-être prendre vos écouteurs, et ceci n'est pas un écouteur. Voici de quoi ça a l'air, et je pense qu'il faut le canal 1.

• 1350

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): J'aimerais d'abord vous remercier d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Vos propos sont importants pour nous et votre opinion sur les divers sujets nous aide à éclairer nos propres réflexions. Nous sommes heureux que vous ayez pris le temps de venir nous voir et de mettre par écrit ce que vous avez à nous dire.

Bien sûr, vous nous parlez de santé, d'éducation, de services sociaux et de logement social. Vous nous parlez également de taxation. Je ne vous poserai pas de questions là-dessus parce que vous parlez à un convaincu. Je laisserai à ceux de mes collègues qui ont des préoccupations plus particulières à cet égard le soin de creuser ces sujets.

Par ailleurs, on parle d'infrastructures et en particulier du réseau routier. Je sais qu'ici, en Colombie-Britannique, et plus particulièrement dans la région de Vancouver, vous avez une problématique, celle du voisin américain et d'une circulation de plus en plus intense de nos amis américains. Évidemment, qui parle circulation parle routes. Si on a besoin de routes, mieux vaut qu'elles soient en bon état, sinon c'est toute l'économie qui risque d'en subir les conséquences et éventuellement les individus.

Il y a une chose qui m'a particulièrement frappé parce qu'on en entend rarement parler, et j'aimerais avoir des précisions sur cet aspect. Monsieur Milbourne, c'est vous qui avez traité de ce sujet que vous avez appelé les tax-exempt bonds. Vous avez associé cela à la possibilité de percevoir une taxe spéciale pour le réseau routier.

Vous pourriez peut-être éclairer le comité sur le concept que vous proposez ici. Quelle est la différence entre cela et ce qu'on a fait, par exemple, au nord de Toronto, où il y a une autoroute à péage? Quelle est la différence entre cela et les autoroutes à péage que l'on retrouve au Nouveau-Brunswick? Bref, essayez de nous expliquer un peu ce concept de manière à nous éclairer.

Merci.

[Traduction]

M. Robert Milbourne: Merci.

Aux États-Unis, on émet des obligations non imposables afin de financer de nouveaux projets d'infrastructure sur une période de plus de 30 ans. En outre, les sommes avancées par le gouvernement fédéral conformément à la Loi sur l'équité dans les transports pour le XXIe siècle peuvent être versées sous forme d'obligations. Cela signifie que les contributions fédérales à de nouveaux projets d'infrastructure peuvent être utilisées à l'échelle locale pour garantir les obligations émises pour les projets d'accès.

Il y a une différence entre le programme que nous proposons ici et le programme des autoroutes privées qui existe actuellement en Ontario et au Nouveau-Brunswick. En effet, il est possible de se rendre de Vancouver à San Diego, tout le long de la côte Ouest, sans péage, et d'utiliser un réseau d'autoroutes de première catégorie. Il est également possible de se déplacer entre les aéroports, de première catégorie, ou les installations portuaires, toujours de première catégorie, sans payer d'autre frais que les droits de départ, comme à l'aéroport de Vancouver.

Afin d'être compétitif et de maintenir la position du Vancouver métropolitain comme port d'accès, cette ville et cette région doivent fonctionner. Il doit y avoir des interconnexions.

Dans le port de Seattle et dans la ville située entre Seattle et Vancouver, Bellingham, on s'est engagé à dépenser plus de 30 milliards de dollars pour améliorer les installations portuaires, aéroportuaires, ferroviaires et l'infrastructure de porte d'accès, ce qui vise directement le rôle actuel du Vancouver métropolitain.

• 1355

Ce ne sont pas quelques bouts de routes à péage qui apporteront les réponses essentielles au maintien de la réussite économique de cette région.

Nous ne pensons pas que la région métropolitaine de Vancouver a des problèmes uniques. Nous pensons que ces mêmes questions deviendront évidentes dans d'autres régions du Canada et nous suggérons fortement de mettre en place des programmes qui permettront de rediriger les revenus découlant des transports pour régler les problèmes de transport et d'infrastructure.

Merci.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Émettre des obligations, monsieur Milbourne, ce n'est pas créer de l'argent, mais en emprunter, et il faudra un jour rembourser cet argent ainsi que les intérêts. Au Canada, depuis un moment, les questions d'emprunt sont des choses dont on aime moins discuter. On parle plutôt de surplus et d'affecter ces surplus à des projets.

Pourquoi, dans ce cas si particulier, pensez-vous qu'il serait préférable d'emprunter plutôt que d'utiliser les surplus accumulés? Remarquez que si on emprunte, on n'a pas besoin d'utiliser les surplus et les surplus peuvent être utilisés pour rembourser la dette nationale. C'est un jeu de vases communicants. Pourquoi voulez-vous y jouer comme cela plutôt qu'autrement?

[Traduction]

M. Robert Milbourne: Merci.

Nous pensons que la réussite du programme américain découle du fait que les sommes empruntées servent à financer des installations qui génèrent leurs propres revenus en fournissant des services aux expéditeurs et aux utilisateurs du réseau. Les revenus tirés de ces services servent à rembourser la dette, qui n'est pas remboursée à même l'ensemble des recettes fiscales.

M. Pierre de Savoye: Néanmoins, vous comprenez que parce que vous empruntez de l'argent pour émettre ces obligations, le gouvernement fédéral n'a pas à puiser dans l'excédent budgétaire pour vous donner l'argent à investir dans la même infrastructure. En même temps, le gouvernement fédéral peut rembourser une plus grande part de la dette nationale grâce à l'argent que vous n'avez pas reçu.

Cela devient un peu vague peut-être. Ce que vous n'empruntez pas ici, vous allez l'emprunter là; ce que vous ne remboursez pas ici, vous allez le rembourser là. Je ne vois pas la différence. Ce sont les mêmes revenus qui sont produits, que ce soit à même l'argent investi dans des obligations ou que cela provienne des excédents du gouvernement fédéral. Les mêmes revenus retourneront au gouvernement fédéral. Pourquoi vous faut-il émettre des obligations lorsque vous pourriez payer comptant?

M. Robert Milbourne: Grâce aux obligations, il est plus facile de mettre en commun des capitaux à long terme. Actuellement, les obligations destinées au financement des installations portuaires et des investissements en infrastructures sont en général limitées à un terme de dix ans. Par exemple, un investissement de 100 millions de dollars dans un terminal pour transport en vrac dans un port maritime aux États-Unis offre un avantage sur le plan des coûts de fonctionnement de 4,4 millions de dollars par année par rapport à un investissement semblable au Canada.

M. Pierre de Savoye: J'ai une dernière question. Quel montant d'obligations faudrait-il émettre à votre avis—10 millions de dollars, 100 millions de dollars?

M. Robert Milbourne: J'aimerais plaisanter et dire: ce qu'il faudra, mais immédiatement au sud d'ici, nos concurrents investissent environ 30 milliards de dollars dans les transports et les infrastructures portuaires et aéroportuaires.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur de Savoye.

Nous allons passer à l'honorable Lorne Nystrom.

L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Merci, madame la présidente.

Tout d'abord, je tiens à souhaiter la bienvenue à mon ancien collègue, Jim Fulton. Pour ceux qui ne le sauraient pas, Jim a été député de 1979 à 1993, si j'ai bonne mémoire, et a représenté la circonscription de Skeena. Il a toujours été un environnementaliste convaincu à la Chambre des communes, et depuis son départ il a manifestement continué dans la même veine.

J'aimerais commencer par demander à M. Fulton ou à M. Scott s'ils peuvent nous en dire un peu plus long sur cette idée de droit d'utilisation atmosphérique, en ce sens que j'aimerais savoir ce que nous pouvons apprendre des autres pays, et quelles études ont peut-être été faites ici sur la façon d'appliquer cette procédure. Je pense que c'est une nouvelle idée qu'il nous faut considérer sérieusement, et tout renseignement à ce sujet nous serait très utile.

M. Gerry Scott (directeur, Changement climatique, David Suzuki Foundation): Tout d'abord, je pense qu'il y a de nombreux exemples de ce qui se fait dans d'autres pays qui valent la peine d'être examinés par les Canadiens, au gouvernement, dans l'industrie et dans la vie privée.

• 1400

Dans toute l'Europe de l'Ouest en particulier, il y a de nombreux pays qui ont dit: «Nous allons appliquer le principe du pollueur-payeur». C'est fondamental. Qu'il s'agisse de pollution de l'air ou des changements climatiques de plus en plus nombreux, ces nations ont décidé qu'il fallait que les coûts externes soient progressivement internalisés.

Lorsque l'on songe aux coûts énormes des soins de santé par exemple, Environnement Canada estime que les coûts, directs et indirects, de la pollution de l'air se chiffrent maintenant à 10 milliards de dollars. Ces coûts externes sont assumés par tous les contribuables, à titre de particuliers ou de sociétés, et souvent aux dépens d'autres services publics. Je pense que l'on peut invoquer de solides arguments économiques, environnementaux et éthiques pour faire valoir qu'on ne peut plus laisser la pollution de l'air continuer gratuitement.

Avec l'avènement des droits sur les émissions de dioxyde de carbone, nous aimerions que l'on réduise d'autres taxes ou que ces revenus soient consacrés expressément à des investissements et à des pratiques qui réduiront la pollution de l'air. Au cours de l'été dernier, nous avons effectué un sondage, que nous avons joint à notre mémoire à l'intention des membres du comité. Nous avons examiné la possibilité, soit de réduire les impôts, de sorte que les droits sur les émissions de dioxyde de carbone soient neutres sur le plan de la fiscalité, soit de consacrer ces revenus à des investissements précis, tels que le transport en commun. Dans les deux cas, la population était en faveur de ces mesures à plus de 70 p. 100. Nous y voyons l'occasion de prendre de bonnes décisions économiques, puisque l'on récupère les coûts externes et qu'en même temps on améliore de façon générale l'environnement et la santé.

M. Lorne Nystrom: Quelle est la façon la plus logique de procéder? Faudrait-il constituer un petit groupe de travail, un comité parlementaire, un sous-comité, ou un petit groupe de travail au ministère des Finances? Quelle est la meilleure façon d'examiner cette idée afin de formuler une recommandation au ministre des Finances?

M. Gerry Scott: Une mesure prise en Colombie-Britannique, annoncée tout juste hier, c'est la création d'un groupe de travail au ministère des Finances qui examinera des documents de recherche de spécialistes dans le cadre d'un examen de toute cette question des impôts écologiques.

Et s'il y avait des droits précis sur les émissions de dioxyde de carbone, le ministère des Finances serait certainement en bonne posture pour examiner l'expérience d'autres pays. Il existe une masse de renseignements dans le domaine universitaire et environnemental, et de plus en plus dans le monde industriel, où cette expertise s'accumule.

Il y a plusieurs façon de procéder, mais il est très important de faire vraiment participer la population à ce débat, que ce soit sous la forme d'un groupe de travail de la fonction publique ou d'un sous-comité du Parlement, peut-être de ce comité ou de celui de l'environnement et du développement durable. Je pense qu'il est vraiment important de s'inspirer de la documentation et de l'expérience de ce qui se fait ailleurs, car il y a beaucoup d'information.

M. Lorne Nystrom: Que font les autres provinces au sujet des personnes dans les localités rurales—M. Fulton et moi-même venons de localités rurales—des localités agricoles, en ce qui concerne l'utilisation de combustibles fossiles dans les tracteurs et les moissonneuses-batteuses, etc.?

M. Gerry Scott: Dans d'autres nations, on a eu recours à plusieurs programmes d'adaptation, en partie selon le niveau d'utilisation des combustibles et la façon de transposer le fardeau fiscal en fonction de l'utilisation finale. Il y a également des programmes de remise et de modernisation et d'efficience qui visent expressément à abaisser par exemple le coût des intrants pour les agriculteurs. Donc il y a plusieurs façons de procéder, l'objectif étant toujours une utilisation réduite.

On pense souvent que si l'on demande plus par unité d'énergie, la facture sera plus élevée, mais si nous songeons à tous les outils dont nous disposons, l'idée, c'est de réduire le gaspillage, et dans presque tous les cas, en réduisant le gaspillage, on réduit les coûts. À l'heure actuelle, la plupart des agriculteurs cherchent à réduire le coût des intrants. Peut-être pouvons-nous utiliser certains de ces revenus pour les aider à gagner en efficience. Les coûts unitaires ne sont pas le problème; c'est la facture mensuelle qui est le problème.

• 1405

Nous devons regarder de près ces ajustements, mais si nous disons qu'effectivement, dans dix ans, nous voulons une meilleure efficience, même si les coûts unitaires sont plus élevés, nous pouvons y arriver en nous inspirant de ces expériences conduites ailleurs.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Nystrom, auriez-vous une intervention en guise de conclusion? Ou peut-être M. Fulton?

M. Jim Fulton: Merci, madame la présidente. Je voudrais effectivement ajouter une chose encore.

Il est particulièrement important que le comité fasse au ministre des Finances une recommandation très sérieuse. Nous devons nous souvenir qu'en 1988, puis en 1990 et une fois encore en 1993, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable, dont l'actuel ministre des Finances était membre, avait recommandé à l'unanimité, pour l'an 2005, une réduction de 20 p. 100 des niveaux de dioxyde de carbone enregistrés en 1990. Le Canada a participé à la Conférence de Kyoto et s'est engagé sur la voie d'une réduction de 6 p. 100.

Il est extrêmement important que le comité fasse une recommandation bien sentie. Je vous donne un chiffre qui pourrait vous servir à expliquer pourquoi il faut mettre dans l'équation certaines des recommandations qui vous sont faites. Pendant toutes les années 90, la réduction des subventions au transport en commun a entraîné une augmentation des tarifs, mais également une érosion de l'infrastructure. Depuis 1990, l'utilisation des transports en commun a diminué de 13 p. 100, alors que de 1990 à 1995 le nombre de véhicules de tourisme et de transport sur nos routes est passé de 14,7 à 16,1 millions, soit une augmentation de 9 p. 100. Et bien que la distance moyenne parcourue par les véhicules de tourisme et de transport ait diminué de 6 p. 100 en raison de ces mêmes tendances pendant cette même période de cinq ans, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 10 mégatonnes, soit 12 p. 100.

Il faut bien se rappeler qu'à l'échelle mondiale il faut une réduction de 50 p. 100. À Kyoto, nous avons accepté pour le Canada une réduction de 6 p. 100. Le ministre des Finances et tous les députés ont convenu, en 1993, qu'une réduction de 20 p. 100 était nécessaire d'ici 2005. Pendant cette période de cinq ans, alors que nous étions là à ne rien faire, le nombre de voitures et de camions a augmenté de 12 p. 100.

Il faut que la lumière se fasse. Nous ne pouvons pas continuer à construire des autoroutes de plus en plus larges saturées d'un nombre de plus en plus grand de véhicules de moins en moins économiques, comme les tout terrain de tourisme, qui consomment de plus en plus. Nous devons commencer à agir dans l'autre sens, et c'est précisément le but de nos recommandations. Il faut transporter davantage de marchandises lourdes par le rail, qui est un mode de transport six fois plus efficace. La qualité de l'air et la santé de tous s'en trouveront mieux. Il faut restructurer l'économie, mais si nous voulons respecter les engagements de Kyoto et si nous voulons penser à nos enfants et à nos petits-enfants, nous devons prendre conscience de ce qui se passe dans l'atmosphère. Le Canada n'a pas le choix, il doit s'aligner à nouveau sur le programme des autres pays et réduire ses émissions de gaz à effet de serre.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur Fulton.

Madame Leung.

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

Je voudrais pour commencer vous remercier tous et toutes pour les idées et les exposés que vous nous avez offerts. Comme vous le savez, je suis une députée de Vancouver et je me sens parfaitement chez moi parmi vous.

J'aurais une ou deux questions à vous poser.

Monsieur le maire McGrath, j'ai compris votre préoccupation—que d'autres partagent d'ailleurs—au sujet de l'infrastructure. Je dois vous dire qu'en effet les deux derniers programmes d'infrastructure ont été relativement réussis, mais, j'en conviens avec vous également, la distribution des fonds a effectivement provoqué certaines frustrations. Ce serait en effet excellent si nous parvenions à concrétiser la prochaine fois certaines des idées qui ont été avancées. Nous avons déjà parlé en effet d'une nouvelle édition possible de ce programme d'infrastructure.

Vous nous avez dit que les ressources financières à l'appui d'un tel programme seraient partagées à parts égales entre les trois paliers. D'autres municipalités ont également laissé entendre qu'elles avaient pour leur part moins de ressources que vous, et qu'un partage à parts égales serait trop difficile à assumer. Qu'en pensez-vous?

M. Wayne McGrath: J'ai dit au début de mon exposé qu'il y a en quelque sorte un chevauchement du financement offert à certains projets d'infrastructure du même genre. Pour l'essentiel, l'infrastructure de base d'une municipalité est du ressort exclusif de celle-ci. Pour ma part, je ne suis pas d'accord avec tous ceux qui—simples citoyens et représentants des municipalités—critiquent toujours le gouvernement fédéral en lui demandant de mettre de l'ordre dans ses finances tout en persistant à lui réclamer toujours plus d'argent.

Il faut que les municipalités rendent compte de leurs actes, et je ne veux nullement laisser entendre que la fraction municipale—c'est-à-dire le tiers du financement—devrait être réduite. Les municipalités ont l'obligation d'apporter au moins leur contribution dans la mise en place des éléments d'infrastructure qui sont de leur ressort.

• 1410

Lorsqu'une municipalité reçoit une subvention d'un palier supérieur de gouvernement pour conduire tel ou tel projet, son niveau d'imputabilité diminue d'autant. J'ai travaillé comme consultant et je recommencerai probablement à le faire un jour, et j'ai entendu tant de conseils municipaux dire et répéter: «Oui, si nous parvenons à obtenir une subvention pour tel ou tel projet, nous allons le faire, mais si nous ne parvenons pas à obtenir une subvention du fédéral ou de la province, alors nous ne ferons rien.» Pour moi, si un projet est utile, c'est le palier de gouvernement compétent qui devrait de prime abord être prêt à mettre de l'argent sur la table pour le réaliser.

Pour répondre à votre question, donc, je ne pense pas que les municipalités doivent attendre des paliers supérieurs de gouvernement qu'ils soient plus généreux que ce que prévoit déjà le programme actuel.

Mme Sophia Leung: Je vous remercie. Et le secteur privé? Et les droits d'utilisation?

Peut-être le représentant de Consulting Engineers voudrait-il répondre à cette question.

M. Kerry Rudd: Je vous remercie.

Il y a des cas où les frais d'utilisation sont applicables, et bien souvent nous en exigeons effectivement, que ce soit de façon directe ou indirecte. Par exemple, les taxes municipales servent à payer l'eau là où il y a des usines de filtration. Il y a les taxes sur le carburant, qui servent ou devraient servir à améliorer le système national de transport. Il existe donc bel et bien des frais d'utilisation.

Si tous les frais d'utilisation ainsi perçus allaient véritablement à des projets d'infrastructure, ce serait un grand pas en avant. Je pense qu'à l'heure actuelle seule une fraction des recettes fiscales perçues sous forme de taxe sur le carburant par exemple est réinjectée dans le secteur des transports.

Mme Sophia Leung: Je vous remercie.

Quelqu'un de l'association pour la santé voudrait-il nous dire un mot au sujet des besoins des régions rurales en matière de santé? Il y a eu dernièrement un gros congrès à Prince George. D'ailleurs, à Ottawa, l'organisateur était venu nous trouver, et le gouvernement fédéral a offert son concours. Je pense que c'est de cela que vous avez parlé. Je pense que nous allons continuer à le faire. Auriez-vous d'autres idées à proposer dans ce sens?

M. Larry Odegard: Il y a le nouveau bureau de la santé en milieu rural dirigé par le Dr John Wooton à Santé Canada. Nous travaillons en étroite collaboration avec lui. Il y a dans tout le Canada beaucoup de similitudes dans les régions rurales et isolées, et il faudrait que nous puissions nous faire savoir les uns aux autres quelles sont les solutions que nous avons trouvées.

Il faut que nous sachions comment parer au ralentissement important de l'activité économique dans ces collectivités, qui sont fort vulnérables. Il faut également que nous trouvions le moyen de conserver chez nous les professionnels de la santé que nous avons réussi à attirer, mais qui souvent aussi nous quittent pour s'installer en ville. Nous devons avoir des réseaux d'information et tout ce qui s'ensuit afin qu'ils puissent garder le contact avec leurs confrères.

Enfin, nous devons faire en sorte que les gens aient plus facilement accès aux programmes tertiaires ou spéciaux, que ce soit en mode électronique, via télésanté ou grâce à d'autres formules, mais aussi parfois par une amélioration du transport et des réseaux de référence.

Je vous remercie.

Mme Sophia Leung: J'aurais encore une question pour M. Fulton.

Je vous remercie pour votre exposé. Vous avez demandé au gouvernement de continuer à montrer l'exemple dans le domaine de la santé de l'environnement. Vous savez que nous avons un nouveau ministre, David Anderson, et qu'il est très ouvert à ce genre de choses. Je vous promets que je remettrai personnellement votre brochure à Ottawa en votre nom. Pour ce qui est du caucus de la Colombie-Britannique, je pense que vous pouvez compter sur notre appui.

Je vous remercie.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, madame Leung.

Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je remercie également nos témoins qui ont accepté de venir ici aujourd'hui pour nous faire part de leurs points de vue.

Une question d'abord pour M. Fulton. Je n'ai pas eu l'occasion de lire votre mémoire dans son intégralité, mais en y jetant un coup d'oeil, je n'y ai vu aucune mention de la cogénération. Je me demande si vous croyez que la cogénération aurait un rôle à jouer dans le développement futur de notre potentiel énergétique et si elle a à vos yeux une quelconque qualité positive pour l'environnement.

En second lieu, pour ce qui est de la quantité de gaz à effet de serre, le méthane en particulier, qui provient des décharges, connaissez-vous bien la question et savez-vous comment nous pourrions nous y prendre collectivement au Canada pour atteindre nos objectifs?

M. Jim Fulton: La question est excellente, et je vais demander à Dermot Foley, notre directeur pour les questions d'énergie, d'y répondre.

M. Dermot Foley (directeur pour l'énergie, David Suzuki Foundation): Dans notre mémoire, nous disons quelques mots au sujet des systèmes énergétiques collectifs qui peuvent être—quoique pas toujours—des centrales à cogénération. Nous militons beaucoup pour la cogénération, surtout un peu partout en Alberta, une région qui se prête fort bien à cette formule qui permettrait de réduire la consommation de charbon servant à la production d'électricité.

• 1415

S'agissant du méthane, nous avons examiné une ou deux solutions possibles: on pourrait par exemple procéder simplement par voie de réglementation en faisant en sorte que les ministères provinciaux de l'Environnement imposent la récupération du méthane produit par les décharges. La seconde solution consisterait à offrir un incitatif pour encourager la production d'électricité à partir du méthane ainsi récupéré, ce qui reviendrait en fait à exploiter le marché qui existe pour l'énergie qui serait ainsi produite. Sur un plan général, nous sommes favorables à la production d'électricité par l'utilisation des gaz produits par les décharges, une ressource énergétique verte. Même si cette ressource n'est pas renouvelable, c'est néanmoins une source d'énergie favorable à l'environnement.

M. Jim Fulton: M. Scott aurait également un mot à dire.

M. Gerry Scott: Dans l'état actuel des choses, l'un des éléments que le comité pourrait envisager dans le cadre de la préparation du budget 2000 pourrait être un concours financier offert par les administrations municipales et régionales et les gouvernements provinciaux qui favoriserait des projet pilotes de ce genre, ce qui servirait à prouver aux autorités compétentes en matière de décharges publiques que cette formule est non seulement réalisables, mais aussi utile sur le plan financier et environnemental.

Tout en considérant que le gouvernement fédéral ne devrait pas s'ingérer de façon fonctionnelle dans les champs de compétence provinciaux, mais plutôt travailler en concertation avec les provinces et avec les pouvoirs publics régionaux pour mettre en vitrine de nouvelles technologies et des projets pilotes, il est évident que le domaine des décharges publiques se prêterait parfaitement à une intervention fédérale plus poussée, toujours dans le cadre de projets pilotes en coopération.

M. Roy Cullen: Je vous remercie.

Monsieur Odegard, je me ferai, si vous le voulez bien, l'avocat du diable en vous rappelant qu'il y a peu de temps encore le premier ministre a reçu le rapport du Forum national sur la santé, un groupe d'experts dans ce domaine, assorti d'un certain nombre de conclusions. L'une de celles-là était, si je me souviens bien, que le Canada dépensait par habitant à peu près la même chose que les autres pays du monde industrialisé, et cela avant que nous décidions d'injecter 11,5 milliards de dollars de plus dans le domaine de la santé.

Lorsqu'on songe aux problèmes qui ne cessent d'affliger le système de santé dès lors qu'on souhaite que toute la palette des soins de santé soit au niveau voulu, le problème semble demeurer entier si l'on considère le domaine comme un tout. Les provinces sont chargées de fournir les soins. Si l'on songe à la prévention dont on ne cesse de parler—mais sans joindre le geste à la parole—pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il aller plus loin encore et enrichir les transferts destinés à la santé? Pourquoi ne pas travailler plutôt dans le domaine de la prévention et faire en quelque sorte office de catalyseur?

M. Larry Odegard: Je pense qu'il faut faire l'un et l'autre. Pour commencer, toutes les discussions sur le plan aussi bien national que provincial, sont effectivement axées sur la notion du rétablissement des transferts fédéraux aux Trésors provinciaux. Nous ne sommes pas encore parvenus à revenir au niveau de 1994. Les transferts fédéraux aux provinces à l'appui de tous les programmes ont été radicalement réduits alors même que la population vieillit, que la technologie fait des progrès et que les attentes de la population augmentent. Il y a donc un véritable problème de demande là aussi.

Mais pour ce qui est de ce que vous faites valoir au sujet des activités de prévention pour améliorer la santé publique, je pense qu'on travaille beaucoup dans ce sens un peu partout au Canada. Certains petits progrès ont déjà été réalisés. Mais il a été difficile de faire les investissements voulus dans ce domaine, c'est-à-dire l'amélioration de la santé publique, alors que les pouvoirs publics responsables de la santé et les autres organisations qui dispensent des soins et des services sont déjà bien en peine de joindre les deux bouts. Dans notre province, les files d'attente aux urgences sont de plus en plus longues, et il faut presque un an pour pouvoir obtenir une chambre dans un établissement de soins de longue durée. Par conséquent, lorsqu'on réclame des investissements dans un programme visant à réduire le tabagisme chez les jeunes filles de 15 ans en milieu rural, cela revient à devoir appauvrir d'autant les budgets des services d'urgence.

Ainsi si vous vous proposez d'investir dans certains de ces secteurs de promotion de la santé...

M. Roy Cullen: Je n'offre rien du tout. Je n'ai fait que poser la question.

M. Larry Odegard: ...nous en serions très heureux, mais je sais qu'à l'échelle locale on tente déjà de réaffecter des fonds. Mais la situation reste difficile en cette période de contraintes financières.

M. Roy Cullen: Puis-je poser une dernière question?

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): M. Klein voulait ajouter quelque chose, après quoi je vous permettrai de poser une dernière question.

M. Seth Klein: Nous sommes nous aussi d'accord avec ceux qui affirment que ces priorités ne devraient pas s'exclure mutuellement.

Si l'on compare les dépenses en soins de santé au Canada et aux États-Unis, par exemple, on constate que les dépenses par habitant aux États-Unis sont beaucoup plus élevées qu'ici; mais la différence vient de ce qu'une bonne partie des investissements sont privés. Si l'on regarde la plupart des services de soins de santé que nous avons mentionnés et qu'a mentionnés M. Odegard, il s'agit de besoins qui devront faire l'objet de dépenses. La seule question, c'est de savoir si les fonds seront publics ou privés. Au Canada, notre expérience nous permet de conclure que les résultats sont meilleurs et plus équitables lorsque l'injection de fonds en est une de fonds publics.

• 1420

M. Roy Cullen: Oui, et c'est d'ailleurs ce que prône notre gouvernement. Nous pourrions évidemment discuter des heures durant des soins de santé, mais j'avoue ne pas avoir été surpris d'entendre M. Odegard prôner les deux solutions.

J'ai une petite question à l'intention de M. McGrath.

Soit dit en passant, veuillez transmettre mes salutations à deux de vos résidents, Judd et Kaye Buchannan, lorsque vous les verrez.

M. Wayne McGrath: Je les connais bien.

M. Roy Cullen: Bien.

Je vous comprends bien lorsque vous parlez de l'arrogance, si j'ose dire, de ceux qui établissent pour vous vos priorités. L'un des grands défis qui se posent pour ce qui est des programmes d'infrastructure, c'est justement que les provinces veulent nous convaincre que du point de vue constitutionnel les municipalités sont des créatures des provinces. En Ontario, je sais que Mike Harris a affirmé que si le gouvernement fédéral s'occupait de l'infrastructure—c'est en tout cas ce qu'il a dit au départ—il devrait parler aux provinces, qui, à leur tour, s'occuperaient des municipalités; or, cela pose problème pour nous.

Je ne sais pas quelle pourrait être la solution. Je crois que les municipalités devraient avoir une plus grande voix au chapitre, surtout si le programme prévu est censé être financé au tiers par les trois paliers. Auriez-vous des conseils à nous donner, ou cela fait-il partie des problèmes intransigeants?

M. Wayne McGrath: Si la province refuse de coopérer, je vous conseillerai de faire affaire directement avec les municipalités. Je sais que les deux derniers programmes nous ont donné un mal fou, ici en Colombie-Britannique. J'en ai longuement parlé à M. Anderson, et il nous comprend. Comme je l'ai dit dans mon exposé, M. Anderson aurait fait savoir que le gouvernement était disposé à faire cavalier seul, sans la province.

Je vous suggérerais de serrer la vis aux provinces qui refusent de coopérer, car je ne crois pas qu'elles seront nombreuses à cracher sur les fonds que leur enverrait le gouvernement fédéral.

M. Roy Cullen: J'en prends bonne note. Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Merci beaucoup.

Permettez-moi de prendre la défense de M. Harris. La région de Toronto compte 4,5 millions d'habitants, est représentée par 44 différents députés et comprend beaucoup de municipalités. Si l'on considère que l'infrastructure comprend l'eau, les égouts, les routes et le transport en commun, notamment, on constate que beaucoup de municipalités ont un esprit de clocher et n'ont pas à coeur les intérêts supérieurs de la région métropolitaine. Je crois que c'est ce que le premier ministre avait en tête, et qu'il ne voulait pas nécessairement obliger les municipalités à dépenser l'argent de telle ou telle façon.

Une des choses auxquelles je réfléchissais, et je crois que ce n'est pas... vous nous transmettez le message clairement et vigoureusement. À l'époque où nous percevions une taxe sur l'essence, elle était censée être redistribuée dans le système de transport, que l'on parle du transport en commun, des routes, entre autres choses.

Monsieur Milbourne, est-ce que l'on perçoit aux États-Unis une taxe semblable sur l'essence vendue au gallon? Dans l'affirmative, le gouvernement doit-il redistribuer les recettes de cette taxe dans le système de transport, ou l'argent est-il versé dans un fonds de recettes générales qui sert à toutes sortes de choses en plus du transport?

M. Robert Milbourne: Aux États-Unis, l'argent sert aux investissements destinés à l'infrastructure en matière de transport; il s'agit de taxes ciblées.

M. Jim Jones: Je sais que les camions, lorsqu'ils quittent l'Ouest pour se diriger vers l'Ontario et vers d'autres provinces de l'Est, préfèrent les routes américaines aux routes canadiennes. Quelles sont les conséquences économiques de la négligence que nous démontrons à l'égard de notre système de transport? Les ingénieurs pourraient peut-être...?

M. Kerry Rudd: Merci.

Nous avons vu récemment à Vancouver quelles pouvaient être les conséquences de notre incapacité d'exporter des produits à partir de notre port: il semble que nous avons perdu 89 millions de dollars par jour en revenus lorsqu'il était impossible d'exporter à partir de Vancouver.

Il faut être réaliste: les voies de transport vers Vancouver ne sont pas fiables. Je suis arrivé à Vancouver en 1982, et depuis il est arrivé que nous soyons véritablement emprisonnés, parce que nous ne pouvions littéralement pas sortir de Vancouver en raison des avalanches qui bloquaient les différentes routes et l'autoroute 3, l'autoroute 1 et l'autoroute vers Pemberton. Il est évident que les exportateurs veulent une solution fiable, et vous avez raison de dire que plusieurs expéditeurs choisissent d'aller vers le Sud, aux États-Unis, pour utiliser le réseau routier américain, plus fiable, pour avoir accès à la côte Ouest.

Rien ne les incite, ou presque, à passer à nouveau par Vancouver pour utiliser notre port. Ces expéditeurs préfèrent utiliser les ports de Seattle et de Tacoma, ce qui nous fait un manque à gagner.

M. Jim Jones: Monsieur Milbourne, dans votre exposé, vous avez parlé d'un port américain qui aurait fait une analyse de rentabilité à la suite de laquelle on a décidé de remettre en valeur le port.

• 1425

A-t-on cherché à faire la même chose ici à Vancouver, ou, dans la négative, quels ont été les facteurs qui vous en ont empêchés? Il est possible que ce soit parce que la méthode de financement utilisée dans le port américain n'était pas possible pour vous.

M. Robert Milbourne: La grande différence entre les deux systèmes, c'est que pour pouvoir avoir accès aux fonds du programme TEA-21 et aux fonds correspondants de l'État, il faut qu'il y ait d'abord un plan régional global. Il est tout simplement impossible de choisir entre divers projets, alors que c'est justement le problème qui est survenu dans le Vancouver métropolitain.

Aux États-Unis, on ne peut justifier un investissement ni le financer s'il n'a pas été pris en compte dans un contexte intégré, associé à un plan d'entreprise et inscrit dans les autres installations de soutien existantes. On ne verrait jamais à Seattle une merveilleuse installation comme le Deltaport, qui aurait été construit sans qu'aucune route n'y accède.

Un de ceux qui tiennent le meilleur discours là-dessus, c'est le directeur régional de Transports Canada, qui amène des gens en hélicoptère visiter tous les points d'accès de première classe dans la région de Vancouver. Soit dit en passant, il est impossible d'y avoir accès par la route.

Dans cette région-ci, ce sont toutes les bonnes choses que nous aimions dans la région qui ont fini par nous nuire. Aujourd'hui, étant donné le manque d'investissements et l'absence des moyens financiers nécessaires pour apporter les améliorations et les corrections dont nous avons besoin, nous nous tournons vers une solution comparable à ce dont jouissent nos concurrents.

M. Jim Jones: Très bien.

Monsieur Fulton, j'imagine que vous connaissez assez bien la région de Toronto. Il semble que la seule grande autoroute que l'on ait construite au cours des dernières années, ce soit l'autoroute 407, et pourtant la grande région du Toronto métropolitain croît chaque année de 100 000 personnes. Combien la négligence à l'égard du transport public et du réseau de transport nous coûte-t-elle du point de vue de l'environnement?

M. Jim Fulton: L'étude de Santé Canada est très révélatrice là-dessus. Nous avons publié notre propre étude sur la santé il y a moins d'un an, en nous basant sur les données de Santé Canada. Chaque année, 16 000 Canadiens et plus meurent à la suite de problèmes combinés dus au changement climatique et aux polluants atmosphériques.

Songez un peu aux diverses grandes artères qui sillonnent la région de Toronto et aux centaines de milliers de gens qui habitent de part et d'autre de ces voies rapides. Ajoutez à cela les conclusions tirées d'une grande étude terminée récemment à Los Angeles, dans laquelle on constate une diminution, jusqu'à 5 p. 100, de la capacité respiratoire des petits garçons et des petites filles, de même qu'une tendance à la hausse à long terme des taux de mortalité et de morbidité. Ce sont là des facteurs dont les comités tels que le vôtre, les ministres des Finances, et même les planificateurs des réseaux de transport, ne tiennent pas compte.

Le phénomène de la santé est carrément exclu de ce paradigme-ci. Avant de décider d'élargir les routes pour recevoir plus de camions et construire plus de voies pour le fret et plus d'artères pour les voitures, il faut plutôt réfléchir aux statistiques que je viens de vous signaler.

Presque la moitié des véhicules aujourd'hui vendus au Canada sont de petits véhicules utilitaires et de petits camions dont le rendement énergétique est à la baisse plutôt qu'à la hausse. Le ministre fédéral des Finances ne semble pas vouloir encourager par une formule fiscalement neutre les Canadiens à délaisser leurs gros véhicules à faible rendement énergétique pour des hybrides plus écologiques et plus économiques en carburant.

Nous ne voyons pas non plus à l'horizon le type de politiques fédérales requises pour déplacer de nos autoroutes certains de ces camions lourds à essieux multiples qui détruisent les autoroutes de Toronto, et d'ailleurs au pays, à un rythme six fois supérieur par mille et par tonne que si l'on roulait sur rail. Soixante p. 100 du fret lourd est aujourd'hui transporté par rail, mais une grande partie du fret transporté par les camions devrait être récupéré par le rail: il faut commencer à envisager d'autres solutions aux problèmes du transport par véhicules.

C'est en effet un énorme problème pour le Canada, bien pire que pour la plupart des autres pays au monde. En effet, le Canada est le plus grand consommateur d'énergie par habitant dans le monde. Nous arrivons au deuxième rang dans le monde pour ce qui est de la production de gaz à effet de serre. La diminution de la capacité pulmonaire et les problèmes de santé sont devenus un phénomène chronique à la hausse.

• 1430

Si c'est le moindrement comparable à ce que prédit l'étude de Los Angeles, les grandes villes comme Toronto feront face rapidement à un problème dangereux à cause de ces grandes artères à haute vitesse qui traversent leurs zones résidentielles et qui côtoient les écoles. Il faut réviser notre politique des transports de façon intelligente.

Cela ne veut pas dire que nous n'appuyons pas la construction de routes sûres, comme d'aucuns nous en font le reproche. Ce que nous disons, c'est qu'il faut cesser de dépenser des milliards de dollars pour la construction de ponts, de jetées et d'énormes autoroutes reliant les villes et le pays d'un océan à l'autre. Redonnons au transport ferroviaire le fret lourd, commençons à réduire le nombre de personnes par véhicule, et commençons à inscrire des normes de rendement énergétique dans les lois fédérales.

J'étais à la Chambre des communes en 1980 lorsque nous avons adopté des normes visant le rendement des parcs de véhicules. La Chambre a adopté ces normes, de même que le Sénat, et pourtant, cinq premiers ministres plus tard, ces normes n'ont toujours pas fait l'objet de la sanction royale. Il faudrait pourtant retomber les pieds sur terre.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je m'en veux de vous interrompre ainsi, mais le temps nous manque.

Monsieur Jones, vouliez-vous conclure?

M. Jim Jones: Dans la foulée de vos propos, monsieur Fulton, je dirai que je voyage souvent sur la 401 entre Toronto et Ottawa, et je n'arrête pas de voir des camions circuler. Pour rester éveillé, il m'arrive de compter le nombre de camions que je peux voir avant de trouver une voiture.

Avez-vous des exemples à nous donner d'autres régions du monde qui pourraient nous inciter à remplacer le transport par camions par le transport ferroviaire—entre Toronto et Montréal ou Toronto et Windsor, par exemple—d'une façon qui serait viable et rentable...? C'est parce que la 401 est vraiment devenue une autoroute pour camions!

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Nous comptons sur vous pour nous donner une réponse brève.

M. Gerry Scott: Très brève.

Le CN et le CP travaillent tous deux d'arrache-pied en ce moment pour faire concurrence aux camions sur des distances assez courtes—Montréal-Toronto, Montréal-Windsor, etc. Les deux offrent des services exclusifs conçus pour réduire le nombre de camions sur les routes et assurer une livraison rapide jusqu'au centre des grandes localités.

L'association des chemins de fer et tous les chemins de fer vous diront qu'ils n'ont pas droit à des règles du jeu équitables. À bien des égards, le régime fiscal a sur eux un effet discriminatoire. Ils ne profitent pas d'une infrastructure payée par le contribuable. Sans remonter dans l'histoire canadienne jusqu'aux années 1860 et 1870, époque à laquelle on pourrait dire qu'ils profitaient de l'infrastructure en place, on peut dire qu'aujourd'hui, 50 ans plus tard, ils n'ont plus cet avantage. C'est pourtant un avantage dont jouit le secteur du camionnage.

Deuxièmement, ils n'ont pas accès, et n'ont pas besoin d'avoir accès non plus, à l'atmosphère comme décharge publique gratuite. Ils n'engendrent pas les effets ni les coûts relatifs à la santé qu'occasionnent les camions et les voitures particulières.

Tout ce qu'ils demandent—et je ne suis pas là pour défendre l'intérêt commercial de l'industrie—, c'est d'avoir droit, sur le plan des effets sur la santé, sur la sécurité environnementale et sur l'infrastructure, à des règles du jeu équitables. Nous les appuyons dans leur revendication afin d'obtenir une réduction des émissions et une utilisation plus constructive du terrain.

J'ai un dernier point à vous présenter, en ce qui a trait à l'accès aux fonds publics aux États-Unis. Il est très important de noter qu'aux États-Unis, la région, l'État ou le comté qui n'est pas en conformité avec la Clean Air Act n'a pas droit aux fonds fédéraux qui ont été consacrés à la construction de l'infrastructure routière inter-États. Il n'est pas question de changement climatique dans la Clean Air Act, mais le principe est le même. La loi traite de pollution aérienne. Si donc ces autorités administratives ne sont pas conformes, on ne leur donne pas accès aux fonds fédéraux. C'est là un principe important.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup.

Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence ici aujourd'hui. Vous pouvez avoir l'assurance que nous prendrons en compte vos exposés et vos propos bien réfléchis dans les délibérations qui conduiront à la production du rapport que nous devons faire au ministre des Finances.

Nous faisons maintenant une pause de deux minutes.

• 1435




• 1440

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Nous reprenons nos travaux. Merci beaucoup d'être des nôtres aujourd'hui. Comme on vous l'a indiqué à tous, je crois, vous disposez de cinq minutes chacun pour nous présenter votre exposé. Nous tentons de respecter l'horaire. Nous ne pouvons pas dépasser le temps prévu, parce que nous devons nous rendre ensuite dans une autre localité. Après vos exposés, les membres du comité auront cinq minutes chacun pour vous poser des questions et entendre vos réponses.

Merci beaucoup d'avoir bien voulu contribuer à ces délibérations que nous tenons afin de conseiller le ministre des Finances sur le budget de l'an 2000. Je crois savoir que nous entendrons la Tenants Rights Action Coalition, le Housing and Homeless Network de la Colombie-Britannique, la Union of British Columbia Municipalities, le Greater Vancouver Regional District et le British Columbia Aviation Council.

J'inviterais Mme Vanessa Geary, coordonnatrice de la Tenants Rights Action Coalition, à prendre la parole en premier. Je vous souhaite la bienvenue.

Mme Vanessa Geary (coordonnatrice, Tenants Rights Action Coalition): Merci. La Tenants Rights Action Coalition, ou TRAC, a son siège à Vancouver, même si nous sommes une coalition provinciale regroupant des organismes et des particuliers qui s'intéressent aux droits des locataires et aux logements abordables.

Chaque année, nous avons des contacts directs avec plus de 10 000 locataires de l'ensemble du territoire de la Colombie-Britannique. Nous militons en faveur du renforcement des droits des locataires ainsi que de l'extension et du maintien du parc de logements abordables. Nous cherchons aussi à nous occuper du problème des sans-abri en collaboration avec des groupes des différentes régions de la province et, de plus en plus, du pays tout entier.

Je veux commencer aujourd'hui par vous parler un peu d'une femme que j'ai rencontrée l'an dernier, la semaine avant Noël. C'est son image qui s'est présentée à mon esprit quand j'essayais ce matin de penser à ce que j'allais vous dire. Son expérience m'avait serré le coeur à l'époque et continue à m'émouvoir.

Cette femme a appelé notre ligne téléphonique réservée aux locataires; elle était en larmes. Son mari était décédé le mois précédent, elle restait seule avec deux jeunes enfants. La petite entreprise qu'elle exploitait avec son mari avait fait faillite, elle était au bien-être pour la première fois de sa vie. Malheureusement, la somme prévue par le bien-être pour le logement ne suffisait pas à couvrir le loyer de la maison où elle vivait. Pour la première fois de sa vie, elle faisait l'objet d'un préavis d'expulsion de 10 jours parce qu'elle ne pouvait pas payer son loyer.

Je n'ai pas pu faire grand-chose pour cette femme, sinon l'écouter avec sympathie. La liste d'attente pour les logements sociaux était longue de plus de 10 000 noms. À la fin de l'appel, moi aussi j'étais en larmes.

Vous pensez peut-être que c'est un cas extrême, mais la plupart des cas sont des cas extrêmes. Malheureusement, cet appel-là n'est pas très différent des milliers d'appels que nous recevons chaque année à la Tenants Rights Action Coalition. Nous avons des gens qui nous appellent parce qu'ils vivent dans des logements déplorables, des gens qui consacrent une telle proportion de leur revenu à leur loyer qu'ils doivent se rabattre sur les banques d'alimentation, des gens qui reçoivent des préavis d'expulsion et qui ne savent pas où aller.

Je suis ici aujourd'hui pour vous apporter un message très simple mais d'une importance vitale. Dans tout le pays, le phénomène des sans-abri et le manque de logements à des prix abordables provoquent une véritable crise. Il faut absolument que le prochain budget fédéral accorde une priorité absolue au logement pour que tous les Canadiens soient assurés d'un logement sécuritaire, décent et à un prix abordable.

Je suis entièrement d'accord avec le ministre Martin qui a déclaré récemment: «Si vous voulez réussir, il faut vous attaquer au phénomène des sans-abri. Je ne pense pas qu'il soit possible d'avoir une économie moderne quand de larges segments de la population sont ignorés.» Je le constate quotidiennement dans mon travail, la réalité c'est que l'excédent budgétaire a été constitué, en majeure partie, en coupant dans les programmes sociaux, comme le logement. Le moment est venu de réinvestir dans cet outil précieux entre tous qu'est la population.

J'aimerais vous donner de plus amples détails au sujet de la situation du logement en Colombie-Britannique. Je ne veux pas vous ennuyer avec trop de statistiques, mais j'aimerais bien vous faire comprendre ce qui se passe ici. Environ un tiers de la population, c'est-à-dire 500 000 foyers en Colombie-Britannique, louent un logement. En moyenne, ces locataires gagnent la moitié de ce que gagnent les propriétaires. D'après le dernier recensement, la moitié de tous les locataires de Colombie-Britannique consacrent plus de 30 p. 100 de leur revenu à leur loyer, ce qui rend ce loyer inabordable, d'après les définitions de la SCHL. Cela représente une augmentation de 7 p. 100 par rapport à 1991.

Un locataire sur quatre consacre plus de la moitié de son revenu à son loyer—une augmentation de 6 p. 100 par rapport à 1991. En tout, cela fait 125 000 foyers. Toutes ces familles risquent de se retrouver un beau jour sans logement car elles ne sont séparées de ces préavis d'expulsion que par le prochain chèque de paye.

• 1445

Les loyers sont systématiquement plus élevés en Colombie-Britannique qu'ailleurs au Canada. En moyenne, un appartement d'une chambre à coucher coûte 700 $ par mois. Nous avons également le taux d'inoccupation le plus faible au Canada, en moyenne 3 p. 100. Et dans certains quartiers de Vancouver, c'est moins de 1 p. 100. Il est intéressant de noter que moins de 40 p. 100 des résidents des basses terres continentales ont les moyens d'avoir une hypothèque.

Ces statistiques font voir que pour les locataires de Colombie-Britannique, la réalité est de plus en plus sombre, et le phénomène des sans-abri vient encore aggraver cette situation. Prenez n'importe quel soir à Vancouver; on estime qu'il y a 600 personnes sans abri. Il y a 21 abris dans les basses terres continentales, et l'un d'entre eux est toujours plein. Le phénomène des sans-abri n'est pas un problème exclusif à Vancouver, il existe également dans les banlieues et dans des villes comme Victoria, Prince George, les Kootenays et l'Okanagan. Ce n'est pas seulement un problème pour la grande ville.

Quelles en sont les causes? Évidemment, beaucoup de facteurs y ont contribué, comme les coupures apportées à divers programmes sociaux, la baisse de l'emploi et de l'assurance-emploi, la lenteur ou l'absence de construction dans le marché locatif privé et le fait que, d'une façon générale, les revenus en dollars réels diminuent. Toutefois, la principale raison est probablement le fait que le gouvernement fédéral a cédé ses responsabilités en matière de logement social au début des années 90, une chose qui a eu un impact désastreux.

En 1993, les activistes du secteur communautaire et les spécialistes du logement avaient déjà prévenu que si le gouvernement fédéral s'en remettait entièrement aux provinces pour le financement du logement social—ce qui s'est produit dans toutes les provinces sauf deux—il y aurait des gens qui se retrouveraient à la rue. En effet, il y a une corrélation directe entre ce que les maires des grandes villes appellent la crise des sans-foyer et le retrait du gouvernement fédéral dans le secteur du logement. Depuis ce retrait fédéral, la Colombie-Britannique a perdu 11 000 logements sociaux.

J'aimerais maintenant proposer certaines solutions et recommandations pour le budget. Pour commencer, la solution des 1 p. 100, dont vous avez déjà entendu parler ailleurs. TRAC, comme des centaines d'autres groupes dans tout le pays, s'est prononcé en faveur de la solution des 1 p. 100. Cette solution, c'est que tous les paliers de gouvernement consacrent 1 p. 100 de plus au logement. Pour le gouvernement fédéral, cela se traduit par 2 milliards de dollars par année, ce qui est à peu près équivalent à la coupure d'impôt de 50 cents par jour qui a été annoncée dans le dernier budget.

Grâce à ces deux milliards de dollars, il sera possible de rétablir les sommes destinées au logement qui ont été coupées entre 1984 et 1993, et ce qui est très important également, on pourra s'assurer que des dizaines de milliers de Canadiens vivront dans des logements de bonne qualité et à des prix abordables. Il faut absolument que, dans son prochain budget, le gouvernement fédéral s'engage à faire quelque chose dans le domaine du logement, et je vous supplie d'adopter cet objectif de 1 p. 100 en ce qui concerne le financement fédéral.

Deuxièmement, nous devons envisager des partenariats; s'il y a moins de sans-foyer en Colombie-Britannique qu'en Ontario ou même en Alberta, c'est en partie parce que le gouvernement provincial a continué à financer la construction de nouveaux logements sociaux. La province a en effet réussi à tirer un parti maximum de cet investissement grâce à des partenariats avec les municipalités, des organismes à but non lucratif et des coopératives, qui apportent une contribution, le plus souvent sous forme de terrain, qui permettent différents projets de logements. Cela réduit d'autant les coûts et permet de construire plus de logements.

Un peu plus loin dans cette rue même, la province et la ville de Vancouver se sont associées pour permettre la construction de logements locatifs sociaux, certains privés, certains publics.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Madame Geary, pourriez-vous terminer vos observations.

Mme Vanessa Geary: Oui, trente secondes.

Ces partenariats sont extrêmement intéressants, mais ils ne sont pas possibles tant que le gouvernement fédéral n'aura pas réintégré le secteur du logement et apporté une contribution financière.

Au sujet des impôts fédéraux, la Canadian Federation of Apartment Associations vient de publier une étude où des changements fiscaux sont réclamés. Le régime fiscal fédéral doit être reconsidéré à la lumière de toute une gamme de solutions, et il faut s'interroger sur la façon dont ce régime encourage ou décourage la construction de logements locatifs. En réalité, le marché privé n'a jamais construit de logements à l'intention des Canadiens à faible revenu, et ne le fera probablement jamais. Par conséquent, il faut absolument que le gouvernement fédéral s'engage à reprendre le financement des logements sociaux.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redmand): Merci, madame Geary.

Nous allons maintenant écouter Mme Mix, qui représente le Housing and Homeless Network de Colombie-Britannique. Vous êtes la bienvenue.

Mme Linda Mix (porte-parole, Housing and Homeless Network of B.C.): Merci, madame la présidente, honorables députés.

Au nom du Housing and Homeless Network of B.C., je vous remercie de nous avoir invités à vous faire part de nos priorités en ce qui concerne le prochain budget fédéral.

Le Housing and Homeless Network de Colombie-Britannique regroupe plus de 60 organismes communautaires, y compris des organismes qui fournissent des abris et du logement, des défenseurs des droits de la communauté et des particuliers qui sont terriblement inquiets de voir à quel point la crise des sans-abri au Canada s'accentue.

Chacun de ces groupes travaille en contact direct avec les sans-abri, ceux qui risquent de devenir sans-abri et ceux qui sont dans l'impossibilité de trouver n'importe quelle forme d'abri temporaire.

• 1450

Notre mandat est de travailler collectivement pour mettre fin à ce problème au Canada et, pour ce faire, nous avons accepté de collaborer avec d'autres organismes dans le reste du Canada pour persuader le gouvernement fédéral de réinvestir dans le secteur du logement destiné aux Canadiens à faible et moyen revenu. Personnellement, j'espère que ce réseau n'existera pas pendant très longtemps et que le prochain budget et les années qui suivront verront un nouvel engagement de la part du gouvernement fédéral à investir dans le secteur du logement.

Mon message d'aujourd'hui est donc clair: le gouvernement fédéral doit faire des investissements importants dès maintenant pour mettre fin au problème des sans-abri et apaiser la crise nationale.

Dans tout le pays, le problème des sans-abri prend des proportions très inquiétantes. Chez les locataires, 835 000 ménages pourraient se retrouver dans la rue du jour au lendemain. Voilà près de 20 ans que l'on ne construit plus d'édifices à logements en nombre suffisant au Canada. Comme l'a dit ma collègue, le secteur privé ne construit plus d'immeubles à logement et préfère construire des condominiums. À Ottawa, par exemple, 2 100 logements locatifs ont été démolis ou convertis en condominiums en 1998, comparativement à 23 mises en chantier seulement, la même année, de logements locatifs.

Depuis que le gouvernement fédéral a transféré aux provinces sa compétence en matière de logement social, en 1993, nous avons perdu plus de 75 000 unités de logement social qui auraient pu être construites. Les groupes où le nombre des sans-abri croît le plus rapidement sont les jeunes de moins de 18 ans et les familles qui ont des enfants. De plus en plus, les familles ont recours aux refuges. L'an dernier, le Lookout Shelter a dû refuser le gîte à 1 800 personnes, qui ont été ainsi privées d'un lit pour la nuit. À Prince George, il n'y a que 30 places en refuge, il y en a environ 35 à Kamloops et une seule à Terrace. Dans bien des municipalités, c'est la cellule de dégrisement qui est le seul abri. Les municipalités essaient de corriger la situation et de trouver une solution à la crise qui règne dans les rues des localités et des villes canadiennes.

Le problème des sans-abri est causé en partie par le manque de logements abordables. Pour mettre fin à la crise, il est essentiel d'offrir des logements abordables en nombre suffisant. Comment peut-on donc le faire, dans le contexte des consultations d'aujourd'hui et de celles menées partout au pays?

Vous demandez, dans votre première question, comment le Canada peut modifier son régime fiscal pour améliorer son efficacité et son équité, compte tenu des surplus financiers prévus pour les prochaines années. Le ministre des Finances, Paul Martin, a prévu des surplus budgétaires qui s'élèveront au total à 95 milliards d'ici l'an 2005. Ce surplus est directement issu des compressions effectuées pendant des décennies aux programmes, compressions qui ont contribué au problème des sans-abri.

L'une des solutions consisterait à modifier le régime fiscal en vue de stimuler la construction de nouveaux immeubles locatifs et de logements sociaux. La Fédération canadienne des municipalités a recommandé d'éliminer ou de réduire la TPS applicable aux matériaux et aux services liés directement à la construction de logements locatifs ou de logements sociaux en vue de réduire considérablement les coûts et de favoriser la construction de tels logements. Mais ce n'est qu'une des initiatives susceptibles de stimuler la création de logements abordables, dans le cadre d'un plus grand leadership fédéral.

Nous proposons également que le gouvernement fédéral adopte la solution du 1 p. 100. Dans notre réseau, nous avons appuyé cette solution, tout comme la Fédération canadienne des municipalités et des milliers d'autres Canadiens. Cette solution consiste à accroître de 1 p. 100 les dépenses fédérales au titre du logement, c'est-à-dire à doubler les dépenses. Cela représente pour le gouvernement fédéral une dépense supplémentaire de 2 milliards de dollars par année. Cette dépense coûtera 50 cents par jour aux contribuables.

L'inaction entraîne des coûts astronomiques. Des études montrent qu'un logement subventionné coûte de 30 $ à 40 $ par jour aux contribuables. Comparativement, il en coûte 124 $ par jour dans le système correctionnel et 360 $ par jour dans le réseau hospitalier. Il en coûte donc dix fois plus cher de placer une personne dans un hôpital que dans un logement subventionné.

Dans les conditions actuelles, le logement sécuritaire est un déterminant direct de la santé et du bien-être. Une fois logés, les gens peuvent travailler, étudier, résoudre efficacement leurs problèmes de santé et leurs problèmes familiaux et améliorer leur qualité de vie. En stimulant la construction d'immeubles locatifs et de logements sociaux, on stimule la productivité et on accroît la santé des Canadiens et celles de leur collectivité.

Le groupe Clayton Research a réalisé une étude pour la Co-Op Housing Foundation of Canada. Cette étude a révélé que pour chaque 1 000 nouveaux logements coopératifs construits, on crée 2 200 années-personnes d'emplois et on produit 45 millions de dollars en recettes fiscales. La solution est claire. Le logement est un investissement public qui peut créer de l'emploi et fournir des débouchés commerciaux.

Je vois que mon temps est écoulé.

Auparavant, le logement faisait partie du filet de sécurité sociale. Il faut considérer que le logement social et les logements locatifs abordables font partie de l'infrastructure sociale, au même titre que les ponts et que les aéroports. Le logement doit être inclus dans notre inventaire.

• 1455

Investir dans le logement social, c'est appliquer une bonne politique publique. Cela offre une multitude d'avantages, tant pour l'économie que pour les Canadiens.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, madame Mix. Merci également d'avoir conclu rapidement après que mon micro ait été allumé. Je suis impressionnée.

Nous entendrons maintenant Mme Corinne Lonsdale, maire du district de Squamish, qui représente l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique. Elle est accompagnée de Mme Harriet Permut, analyste principale des politiques.

Mme Corinne Lonsdale (maire, district de Squamish; Union des municipalités de la Colombie-Britannique): Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de me donner l'occasion de faire part à votre comité de nos préoccupations prébudgétaires.

Qu'est-ce que l'UMCB? Pour ceux qui ne le sauraient pas, l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique représente les 180 administrations locales, municipales, régionales et de districts de la Colombie-Britannique. L'UMCB est également membre de la Fédération canadienne des municipalités, ou FCM.

L'UMCB est dirigée par des représentants élus—c'est-à-dire des maires, des conseillers et des directeurs régionaux de districts—de toute la province. Je m'adresse à vous aujourd'hui à la demande du président de l'UMCB, Steve Thorlakson, de Port St. John. Je suis Corinne Lonsdale, maire du district de Squamish, et je siège à titre de directrice générale au sein de l'exécutif de l'UMCB.

Nous appuyons entièrement la proposition de la FCM pour la création d'un programme d'infrastructure de qualité de vie. Nous avons également constaté avec plaisir que le gouvernement fédéral a reconnu, dans le discours du Trône du 12 octobre, la nécessité de continuer d'investir dans l'infrastructure.

Nous avons également été heureux d'entendre l'appui exprimé par le ministre Anderson à l'égard de l'initiative d'infrastructure, dans le discours qu'il a prononcé en septembre, lors de notre congrès local. En sa qualité de ministre de l'Environnement, il a les mêmes objectifs que nous pour ce qui est des besoins en matière d'eau potable, de traitement des eaux usées, de sols non contaminés, de qualité de l'air et de systèmes efficaces de transport public. Ces choses-là ne sont pas seulement nécessaires pour créer un bon climat au Canada mais aussi pour le bien-être économique de nos citoyens. Il est essentiel que nous ayons une infrastructure matérielle bien développée pour la croissance et la diversité de notre économie afin que nous puissions suivre les progrès de l'industrie et créer des emplois pour nos jeunes, évitant ainsi qu'ils aillent se chercher du travail ailleurs.

Le renouveau du programme d'infrastructure municipale devrait être tripartite et les gouvernements des provinces devraient y apporter une contribution considérable. Ce programme devrait être à long terme—non pas limité à un an, mais peut-être sur une période de 10 ans—afin de garantir une bonne planification et une bonne prestation. Les investissements devraient être répartis de façon équilibrée entre les projets environnementaux, mettant surtout l'accent sur l'eau potable et le traitement des eaux usées, entre les projets de transport, y compris le transport public et les routes municipales et régionales, et entre les projets d'infrastructure de loisirs, surtout ceux qui répondent aux besoins de nos jeunes.

Il est extrêmement important que ce programme soit négocié au cours des prochains mois et que les municipalités aient vraiment leur mot à dire dans l'établissement des modalités. Les projets dirigés par les municipalités doivent être approuvés et lancés par les administrations locales, plutôt que d'être régis par les priorités des administrations principales, qui pourraient ne pas correspondre à celles des localités. Le programme doit être dirigé et géré par les trois ordres de gouvernement, et les administrations locales doivent participer aux comités de décision et de gestion.

Si l'on veut que le programme élaboré réponde aux besoins locaux, les administrations locales sont prêtes à faire leur part. Nous ne voulons pas de cadeaux, mais nous ne voulons pas non plus participer à des programmes qui ne correspondent pas à nos besoins.

Nous sommes d'accord avec la FCM sur le fait que le gouvernement fédéral confirmerait le sérieux de son intention de financer l'infrastructure en incluant un investissement dans ce domaine dans le budget de l'an 2000. De cette façon, on s'assurerait que les fonds soient immédiatement disponibles une fois l'accord final conclu à la fin de l'année, au lieu d'attendre le prochain cycle budgétaire pour financer les projets.

Nous souhaitons vous faire part également de nos opinions sur d'autres questions liées aux finances et qui touchent les administrations locales en Colombie-Britannique.

Nous voulons voir mettre en place un système de subventions fédérales plus équitable en remplacement des taxes foncières. Nous en avions d'ailleurs saisi le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux lorsqu'il était venu à Victoria l'année passée. Nous estimons que ces subventions devraient être calculées en fonction d'un système d'évaluation de la valeur foncière marchande des propriétés, comme celui que la Colombie-Britannique utilise depuis 1975. Un tel système permettrait sans aucun doute d'apaiser une bonne partie des différends qui surviennent en milieu urbain, tout en donnant la possibilité d'appliquer un régime spécial en régions rurales, dans le cas par exemple des parcs nationaux.

Nous nous rallions à notre gouvernement provincial qui réclame une stratégie nationale d'investissement dans le secteur des transports, en particulier pour offrir un financement stable au réseau routier national. En juillet 1998, les premiers ministres des provinces de l'Ouest réunis en conférence à Yellowknife ont reçu un texte qui leur indiquait que pendant l'exercice financier 1997-1998, le gouvernement fédéral escomptait percevoir en Colombie-Britannique 472,4 millions de dollars en taxes sur le carburant automobile, mais qu'il ne dépenserait dans cette même province que 4,81 millions de dollars pour la réfection des routes de compétence fédérale.

• 1500

Le budget de 1998-1999 allait être pire encore. Les prévisions de recettes faisaient état de 488,6 millions de dollars, alors que Transports Canada n'escomptait rien dépenser du tout en Colombie-Britannique. Il en allait d'ailleurs de même pour le reste de l'Ouest. Notre province compte environ 25 p. 100 du réseau routier national exprimé en kilomètres, or elle ne reçoit rien en retour du fédéral pour l'entretien de ces routes. Il y a manifestement là un déséquilibre à corriger.

Nous aimerions également que le gouvernement fédéral offre une assistance financière aux malheureux propriétaires des immeubles en copropriété qui connaissent des problèmes d'étanchéité. C'est un problème qui s'est transformé en une véritable crise pour bon nombre d'entre eux, mais qui a également porté préjudice au secteur du bâtiment dans de nombreuses localités. Pour être plus précis, nous demandons au gouvernement d'intervenir immédiatement a) en offrant une aide non négligeable aux propriétaires touchés, b) en faisant en sorte que le coût des réparations admissibles puisse être immédiatement déduit de l'impôt sur le revenu et le soit également à titre rétroactif, et c) en annulant et en remboursant l'intégralité de la TPS payée sur les réparations admissibles permettant aux propriétaires de puiser dans leur Régime enregistré d'épargne-retraite pour faire procéder aux réparations admissibles sans aucune pénalité, et en permettant aux fonds précédemment soustraits à un RÉER pour payer des réparations dans le cadre d'évaluations spéciales de faire l'objet d'un abattement fiscal rétroactif.

Nous appuyons la FCM lorsqu'elle demande une reconduction de l'intervention fédérale dans le financement du logement social et sollicite le concours du gouvernement fédéral pour venir en aide aux sans-abri de la province. La Colombie-Britannique est l'une des deux seules provinces qui est restée engagée dans le secteur du logement social, mais nous ne pouvons le faire seuls. Ce problème a une envergure nationale et il exige une reconduction de l'aide fédérale.

Nous demandons enfin que la GRC reçoive des ressources suffisantes pour se doter des effectifs dont elle a besoin en Colombie-Britannique. En effet, la GRC est le plus important corps policier canadien travaillant sous contrat pour les municipalités. Les pénuries d'effectifs y sont chroniques, de sorte que nous sommes de moins en moins en mesure d'assurer la sécurité publique et de faire respecter la loi dans nos collectivités.

Une fois encore, je vous remercie de m'avoir permis de prendre la parole devant vous, et nous répondrons maintenant volontiers à vos questions.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie, madame Lonsdale.

Nous allons maintenant entendre le maire Greg Halsey-Brandt qui représente la ville de Richmond. M. Halsey-Brandt m'excusera, j'en suis sûre, si je ne l'ai pas cité au début de la séance, même si son nom figurait bel et bien sur la liste.

M. Greg Halsey-Brandt (maire de Richmond): Merci beaucoup, madame la présidente.

Pour gagner du temps, je vais me contenter de résumer chacun des quatre éléments que nous avons examinés étant donné que vous avez déjà ces textes sous les yeux. Encore une fois, je vous remercie de nous consacrer du temps cet après-midi.

Notre premier élément concerne la dette nationale. Certes, nous sommes très heureux que le déficit ait été jugulé, mais nous restons néanmoins très inquiets pour ce qui est du remboursement de la dette publique du Canada. Nous aimerions que le gouvernement se dote d'une politique qui préciserait publiquement un échéancier pluriannuel pour le remboursement de la dette publique. J'ignore s'il faudrait 15, 20 ou 25 ans pour rembourser l'intégralité ou la plus grande partie de la dette nationale, mais nous aimerions qu'un document public en fasse état de manière à ce que nous puissions demander des comptes à ce sujet au gouvernement au pouvoir.

Le deuxième élément que nous voudrions faire valoir concerne le programme d'infrastructure fédéral-provincial-municipal dont vous avez certainement entendu beaucoup parler par les représentants des administrations municipales pendant vos tournées au Canada. Les deux premières versions de ce programme nous ont beaucoup plu et—j'ai d'ailleurs entendu un peu plus tôt certains intervenants précédents poser une question à ce sujet—je pense qu'il a produit d'excellents résultats dans la grande région métropolitaine de Vancouver. La première grosse tranche de subvention que nous avons reçue était destinée au traitement secondaire des eaux usées, quelque chose qui nous intéresse tous, et nous avons, je crois, redistribué de façon très équitable cet argent à l'échelle de la région.

La seconde édition du programme n'a pas été aussi réussie. Le gouvernement provincial est intervenu et a, pourrait-on dire, détourné une bonne partie de cet argent pour le transport en commun, un secteur de compétence qui a toujours été provincial. Grâce à l'intervention de David Anderson, nous avons pu remettre le programme sur la bonne voie, mais nous demandons en l'occurrence que les administrations municipales soient présentes à la table lorsqu'il s'agira de déterminer le mandat et la raison d'être du programme.

Un des membres du comité a demandé il y a quelques instants ce qu'il en était de la différence de statut de nos administrations municipales par rapport aux deux autres paliers de gouvernement. À cela, je dirai simplement que le gouvernement fédéral ne devrait jamais accepter un programme sans que les administrations municipales aient été consultées au préalable, voire aient donné leur accord, par l'entremise peut-être de la FCM.

Le troisième élément à prendre en compte pour le financement devrait encore une fois être le secteur des transports; la chose a déjà été mentionnée auparavant. La FCM a souvent entendu les collègues des petites villes canadiennes intervenir en faveur d'un programme de construction routière, et c'est un point de vue auquel je puis facilement souscrire. Dans la grande région métropolitaine de Vancouver et je suis sûr qu'il en va de même à Toronto et à Montréal, le problème vise plus particulièrement le transport urbain par autobus et l'expansion du système de transport urbain rapide. Comme l'a dit Corinne, nous aimerions voir rétablir la taxe sur le carburant—dans notre région au minimum, voire une politique nationale en matière de transport qui soit axée sur le transport urbain et le transport en commun par autobus.

Le quatrième et dernier élément dont je voudrais vous parler est le relèvement du financement des forces armées et de la Gendarmerie royale du Canada.

• 1505

Comme vous le savez, le budget des forces armées est considérablement réduit depuis une vingtaine d'années. Nous avons été fort embarrassés, en tant que nation, lorsque nous avons eu du mal à réunir un contingent suffisant de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air, pour la mission au Timor-Oriental. Nous avions pris un engagement, mais nous avons été bien en peine de l'honorer cet engagement, alors que nous avons, je pense, dans le monde entier la réputation d'être prompts à participer aux opérations de maintien de la paix.

Nous devons faire en sorte que nos forces armées aient les ressources nécessaires pour pouvoir effectuer ces missions. Ainsi, la ville de Richmond compte un bataillon des services composé de membres de forces de réserve et qui offre des services de génie, d'appui technique et de soutien, mais nous constatons pour l'avoir vu nous-mêmes dans le cas de ce bataillon qu'il n'y a pas suffisamment d'argent pour l'entraînement et le matériel indispensable pour que les membres qui sont actifs dans les unités de réserve puissent honorer leurs engagements internationaux ainsi que leurs engagements au Canada.

Le dernier élément concerne la GRC dont Mme le maire Lonsdale vient de vous toucher un mot au nom de l'UMCB. Notre ville est en importance le troisième partenaire contractuel de la GRC au Canada. Nous souffrons d'une pénurie d'effectifs de 10 p. 100 en raison de la fermeture du dépôt, en raison du gel des salaires qui a duré entre quatre et six ans. Nous avons perdu une bonne partie de notre effectif au profit de la ville de Vancouver et d'autres corps policiers privés ou municipaux de la région. J'ai entendu dire qu'il manquait environ 500 policiers en Colombie-Britannique.

Il va falloir attendre la fin de l'an 2000 pour que l'effectif policier soit rétabli dans ma ville. Nous allons essayer d'obtenir 10 policiers de plus l'an prochain, mais nous ne les aurons pas avant 2001.

Nous aimerions donc demander que le Comité des finances fasse en sorte que le traitement des membres de la GRC postés dans les grands centres urbains soit comparable à ce qu'offrent les municipalités avoisinantes, et que les casernes qui servent à l'entraînement reçoivent un financement suffisant pour garantir la formation en nombre suffisant des policiers dont nous avons besoin.

Merci beaucoup. Cela termine mon exposé.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie, monsieur le maire.

M. Greg Halsey-Brandt: J'ai une réunion de comité à 16 heures, et je vais donc m'éclipser si vous le voulez bien. Je ne savais pas que vous alliez écouter tous les témoins avant de passer aux questions.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup.

Nous allons maintenant entendre M. Ken Cameron, directeur des politiques et de la planification, puis Mme la mairesse Beth Johnson, vice-présidente du conseil d'administration et présidente des transports et de la planification stratégique du Greater Vancouver Regional District. Bienvenue à vous.

Mme Beth Johnson (mairesse de Delta; vice-présidente, conseil d'administration, et présidente, Transports et planification stratégique, Greater Vancouver Regional District): Je vous remercie. Vous allez faire une bonne affaire parce que nous ne prendrons que cinq minutes au lieu de 10, et c'est moi uniquement qui parlerai. Je vous remercie.

Je m'appelle Beth Johnson et je suis la mairesse de Delta, en Colombie-Britannique, en plus d'occuper les autres fonctions que vous venez de citer. Je voudrais pour commencer ajouter ma voix à celles de tous les autres qui vous ont accueillis ici toute la journée sous le ciel maussade de la Colombie-Britannique.

Je voudrais vous dire que tous les Canadiens et toutes les Canadiennes sont reconnaissants au gouvernement fédéral d'être parvenu à une situation budgétaire excédentaire, mais nous savons également tous que cela a pu se faire grâce aux sacrifices, individuels et collectifs, de bien des gens partout au Canada.

Nous devons également admettre qu'il faut maintenant relever de nouveaux défis comme la réduction des émissions de gaz à effet de serre, en plus de remédier aux incidences négatives, notamment en matière de logement, comme la chose a déjà été mentionnée aujourd'hui.

Jusqu'en juin, j'ai siégé au comité exécutif de la Fédération canadienne des municipalités, et j'ai donc participé de très près aux travaux de celle-ci ainsi qu'à la rédaction des mémoires qu'elle a adressés au gouvernement fédéral. Je voudrais marquer mon appui à la note que la Fédération a envoyée au ministre des Finances sous le titre «Programme d'infrastructure pour la qualité de la vie», un texte qui reprenait un grand nombre des objectifs poursuivis par le Greater Vancouver Regional District au plan local. Comme de règle, la FCM est à l'écoute de ses membres, et vous avez sans nul doute constaté le soutien que tous les membres donnent à la Fédération dans les initiatives qu'elle conduit en notre nom.

La protection de la qualité de la vie et de la qualité de l'environnement fait depuis très longtemps l'objet d'une étroite collaboration sur le plan régional. En 1996, forts de l'appui officiel donné par les 20 municipalités et d'une loi habilitante adoptée par le gouvernement provincial, nous avons pu adopter un plan stratégique régional réalisable afin de gérer la croissance et les transports dans notre région dont la population passera de 2 à 3 millions d'habitants d'ici 25 ans environ.

Ce plan a ceci de remarquable qu'il est en étroite symbiose avec notre planification en matière de transport et, d'après ce que nous avons pu constater partout en Amérique du Nord, il n'a pas son pareil ailleurs en ce sens qu'il a réussi à intégrer ces deux niveaux de planification, celui des transports et celui de l'aménagement, afin de nous permettre d'aboutir à nos objectifs de qualité de vie.

Le gouvernement fédéral a d'importants intérêts dans cette région où se trouve le plus grand port du Canada et qui est véritablement la porte du Canada sur le Pacifique. Comme tout le monde le sait, la côte Ouest joue en cela un rôle incroyablement important même si, je le sais fort bien, nous sommes parfois un peu loin du centre du pouvoir.

Il est essentiel d'arriver à une gestion efficace de l'environnement de cette région urbaine pour espérer atteindre certains objectifs fédéraux comme la protection des ressources halieutiques dans le Fraser, le cours d'eau le plus riche en saumons du monde entier. Jadis, il est arrivé que ces intérêts produisent une coopération utile entre les trois ordres de gouvernement. L'exemple qui vous a été donné par le maire Halsey-Brandt est celui de l'usine d'épuration des eaux usées de l'île Annacis, et nous sommes d'ailleurs très fiers de dire que c'est là la seconde et dernière étape d'un plan d'intervention qui vise à assurer la protection du fleuve par rapport à la pollution produite par ces importantes sources ponctuelles.

• 1510

Les deux domaines dans lesquels nous souhaiterions demander l'aide du comité sont le maintien durable des transports urbains et les logements axés sur les besoins, qui sont les deux composantes essentielles de notre stratégie de gestion de la croissance. Ce sont aussi deux questions dont vous avez déjà entendu parler aujourd'hui, donc nous n'allons faire que renforcer une bonne partie de ce qui vous a déjà été dit.

Dans le domaine des transports, nous souhaitons empêcher la région de continuer à dépendre de plus en plus de l'automobile et fournir un appui accru à des modes de transport plus efficaces et moins nocifs pour l'environnement. Pour réaliser cette stratégie, nous avons mis sur pied, en partenariat avec la province, une nouvelle organisation appelée TransLink, qui est l'une des deux moitiés dont je vous ai parlé à propos des transports et de l'aménagement du territoire. Cette organisation est responsable des transports en commun, des routes principales, de la gestion des demandes de transport et des services de contrôle des émissions des véhicules dans toute la région.

L'essentiel des ressources de TransLink vient de sources liées au transport telles que les billets ou les taxes sur le carburant, ce qui est à notre avis essentiel pour que les gens voient bien le lien entre ce qu'ils paient et ce qu'on leur offre et qu'ils comprennent ce que coûte l'utilisation de véhicules privés et les répercussions que ces véhicules ont sur l'environnement. L'organisation peut imposer des redevances sur les véhicules, des péages et des frais de stationnement pour financer des programmes futurs.

Nous pensons que le gouvernement fédéral devrait appuyer cet effort en finançant des programmes de transport urbain durables dans les régions urbaines du Canada. Ce financement ne doit pas nécessairement provenir de la taxe sur le carburant. Que nous importe sous quelle forme il nous sera versé. J'ai récemment rencontré les responsables du Greater Toronto Services Board. J'y étais il y a deux ou trois semaines. Nous avions l'appui de Montréal, du Greater Toronto Services Board et, je crois, de Calgary, d'Edmonton et d'Ottawa-Carleton—c'est-à-dire de grandes régions du Canada qui estiment qu'il est temps que le gouvernement fédéral reconnaisse que ce financement en partenariat de nouvelles formes de transport est essentiel à bon nombre de ses objectifs aussi bien qu'aux nôtres.

Actuellement, comme on l'a dit, le gouvernement fédéral perçoit environ 4 milliards de dollars par an en taxe sur le carburant—environ 270 millions de dollars pour notre seule région—et pourtant les dépenses fédérales dans le domaine des transports pour l'ensemble du Canada ne représentent qu'environ 400 millions de dollars. Aux États-Unis, tout l'argent perçu sous forme de taxe sur le carburant est directement affecté au financement d'initiatives dans le domaine des transports.

Encore une fois, si le gouvernement fédéral n'est pas prêt à le faire, que nous importe que ce financement nous soit apporté sous une forme directe ou indirecte.

Nous estimons que la situation actuelle n'est pas à la hauteur de la situation internationale du Canada et des besoins de ses régions urbaines.

J'ai encore du temps?

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Non. Je suis désolée. Nous avons cinq minutes par groupe, alors si vous pouviez conclure...

Mme Beth Johnson: Oui.

Vous êtes sûre? Je me suis chronométrée quand j'attendais dans le couloir.

Le secteur des transports est responsable d'un quart des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

Les deux autres domaines sur lesquels je voudrais attirer votre attention sont l'initiative en matière de logement et la nécessité d'une intervention fédérale dans ce domaine. Le Canada est le seul pays du G-7 dans lequel le gouvernement national n'intervient pas en matière de logement.

Enfin, je voudrais parler des initiatives culturelles que nous souhaiterions voir se matérialiser. Nous sommes en importance la troisième province du Canada, la troisième zone métropolitaine, mais nous ne sommes que neuvième sur 10 pour ce qui est de l'aide fédérale au secteur culturel par habitant, c'est-à-dire bien en dessous de la moyenne nationale.

Merci de votre patience. Ces trois domaines sont très importants pour notre région comme pour d'autres régions du Canada.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup pour cette intervention.

Nous allons maintenant entendre M. Gerry Lloyd, président- directeur général, et M. Larry Legros, membre du Comité des aéroports—c'est bien cela?—du British Columbia Aviation Council.

Bienvenue, messieurs.

M. G.N. (Gerry) Lloyd (président-directeur général, British Columbia Aviation Council): Merci, madame la présidente et membres du comité.

Je vais laisser M. Legros parler en premier et je vous ferai un peu de publicité ensuite si j'ai le temps.

M. Larry Legros (membre, Comité des aéroports, British Columbia Aviation Council): Merci, Gerry.

J'aimerais tout d'abord vous remercier comme tous ceux qui m'ont précédé, de nous donner cette excellente occasion de parler d'une question dont nous nous occupons depuis deux ans dans le secteur de l'aviation.

Je voudrais vous parler d'un nouveau règlement sur la lutte contre les incendies dans les aéroports que le ministre des Transports a mis en place sans respecter les dispositions de la politique du gouvernement du Canada approuvée le 9 novembre 1995.

• 1515

J'aimerais commencer par un bref retour en arrière sur les événements qui ont précédé la présentation de ce règlement.

Le plan national pour les aéroports annoncé en 1994 par le ministre des Transports Doug Lewis, et mis en oeuvre par la suite par le ministre des Transports David Anderson, prévoyait la cession de 28 aéroports désignés sous forme de bail à des autorités aéroportuaires locales ainsi que la vente à des communautés locales des autres petits aéroports qui appartenaient au gouvernement fédéral.

Les casernes de pompiers de Transports Canada qui existaient à l'époque dans les petits aéroports ont été fermées afin d'améliorer la viabilité financière de ces aéroports et de faciliter leur prise de contrôle par la collectivité locale. Les 28 aéroports désignés par lesquels transitaient 94 p. 100 des voyageurs aériens du Canada sont tombés sous le coup d'une réglementation canadienne portant le numéro 303, qui concerne la lutte contre les incendies dans les aéroports et les aéronefs, et qui est entrée en vigueur le 1er décembre 1997. Ce règlement était justifié par une étude en cinq volumes sur la lutte contre les incendies et les services de secours en cas de catastrophes aériennes au Canada, qui avait été préparée par Sypher Mueller International Inc. pour l'inspecteur général de la sécurité des transports.

Le texte de l'analyse d'impact de cette réglementation précisait que le coût de ce règlement pour les 28 aéroports désignés serait d'un peu plus de 34 millions de dollars. On dit aussi dans cet énoncé que:

    [...] d'après l'analyse, les avantages de la sous-partie 303, qui concerne la réglementation des services de lutte contre les incendies dans les aéronefs dans 28 aéroports désignés, sont à peu près suffisants pour justifier les coûts.

Le ministre actuel des Transports, M. David Collenette, a proposé un nouveau règlement 308 sur les interventions d'urgence dans les aéroports, en vertu duquel on mettrait en place des services de lutte contre les incendies dans 294 petits aéroports. À la suite de vastes consultations dans ce secteur, on a finalement ramené le nombre de ces aéroports à 123, dont 20 en Colombie-Britannique.

Transports Canada estime actuellement que le coût de cette réglementation pourrait aller jusqu'à 38 millions de dollars la première année et dépasser les 222 millions de dollars au cours des 10 premières années. Les 123 aéroports prévus dans le règlement proposé ne représentent que 4 p. 100—et je le répète, 4 p. 100—du volume de voyageurs aériens au Canada. Il est bien évident que si les avantages du règlement 303 pour des aéroports qui assurent le transit de 94 p. 100 des voyageurs aériens ne justifient qu'à peu près le coût de 34 millions de dollars, les avantages du règlement 308, qui ne vise que 4 p. 100 de ces voyageurs, ne sauraient justifier un coût de 38 millions de dollars.

J'aimerais maintenant passer à l'annexe B de la politique de réglementation de novembre 1995, plus précisément à l'article concernant les normes de gestion de la réglementation. Je vais vous citer quatre exigences dont Transports Canada n'a pas tenu compte.

La première est la suivante:

    Les autorités de réglementation qui proposent de nouvelles exigences ou des modifications en matière de réglementation doivent avoir la preuve qu'un problème s'est présenté, que l'intervention du gouvernement est nécessaire et que de nouvelles exigences en matière de réglementation sont nécessaires.

Notre réponse est que Transports Canada n'a pas présenté la moindre preuve de l'existence d'un problème quelconque en matière d'urgence dans les 123 petits aéroports en question.

Les inspecteurs de la sécurité de Transports Canada qui accréditent les aéroports vérifient que ces aéroports ont des plans d'urgence faisant appel à des services d'urgence communautaires qui ont été approuvés par Transports Canada. L'intervention du gouvernement à laquelle nous avons assisté a été le résultat de l'impression injustifiée et sans fondement du ministre Collenette que la présence des pompiers était requise dans les petits aéroports.

Comme Transports Canada avait décidé de ne pas se servir des informations de la version de 1988 de l'étude de Sypher:Mueller pour essayer de trouver une éventuelle justification à la nouvelle réglementation que le ministre se proposait de mettre en place, l'Association du transport aérien du Canada, le Conseil des aéroports du Canada, divers aéroports individuels et le B.C. Aviation Council ont financé la réalisation d'un nouveau rapport.

On constate dans le rapport que le règlement qui est proposé est injustifié et ne repose sur aucune analyse logique. Il n'améliorera pas la sécurité, et c'est un piètre investissement dans la sécurité, peu importe qui paie.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Legros, pardonnez-moi de vous interrompre. Vous avez deux possibilités. Ou bien vous concluez votre exposé, ou alors vous permettez à M. Lloyd de faire sa petite réclame.

M. Larry Legros: Voulez-vous que je continue?

M. Gerry Lloyd: Oui, allez-y.

M. Larry Legros: Je n'en ai pas pour longtemps.

La deuxième exigence réglementaire est celle-ci:

    Le problème doit être [...] défini en termes clairs et concis. Le problème doit être analysé. Les parties intéressées doivent être consultées relativement aux solutions de rechange [...]

Nous répondons à cela qu'on n'a nullement défini de problème, on ne fait qu'affirmer que le ministre veut un règlement. Les plans d'urgence actuels sont la solution de rechange logique, le statu quo.

• 1520

La troisième est celle-ci:

    Il faut prouver que les nouvelles exigences réglementaires vont régler le problème. Il faut également analyser les solutions de rechange réglementaires [...]

Il n'y a aucun problème à résoudre. Le rapport Sypher:Mueller affirme que «l'investissement de ressources rares dans les services d'urgence... n'est pas une manière efficace d'améliorer... la sécurité».

La quatrième est celle-ci:

    Il faut démontrer que les avantages des exigences réglementaires dépassent leurs coûts. Chaque fois que l'on propose un règlement, il faut effectuer une analyse coûts-avantages.

Il y a maintenant deux ans que j'assiste à des réunions sur ce règlement qui est proposé, et l'on n'a jamais présenté d'analyse coûts-avantages. Cependant, le président du comité technique de Transports Canada a déclaré à plusieurs rencontres «qu'une analyse coûts-avantages ne motive pas l'adoption d'un règlement, mais le ministre et les citoyens du Canada s'attendent à ce que l'on adopte un règlement».

J'aimerais citer en terminant deux passages de l'étude Sypher:Mueller. L'une portait sur le règlement de 1997 et disait ceci:

    On estime à 18,5 le nombre maximal de vies qu'auraient pu sauver les services d'incendie de tous les aéroports du réseau en 1994.

D'après l'étude plus récente de 1999:

    Dans tous les aéroports visés par [le règlement] 308, on pourrait s'attendre à ce que [les services d'urgence] réussissent à sauver des vies une fois entre 300 et 700 ans.

Voilà la conclusion de mon rapport. Il y a aussi un rapport écrit.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, monsieur Legros.

Nous allons maintenant entendre M. John Argue, directeur de programme du Groupe de travail concernant la pauvreté. Bienvenue, monsieur Argue.

M. John Argue (directeur de programme, Groupe de travail concernant la pauvreté): Merci beaucoup. Je suis heureux d'être ici. Je tiens à vous transmettre les regrets de Holly Whittleton, la présidente du Groupe de travail concernant la pauvreté. Elle avait un rendez-vous urgent à l'hôpital. Elle va bien, mais elle ne pourra pas venir.

Je dois dire tout d'abord que le Groupe de travail concernant la pauvreté est une coalition ou un réseau de groupes très divers, environ 150 en fait, qui sont répartis dans toute la vallée du bas Fraser, mais concentrés à Vancouver, et cette coalition s'emploie à remédier aux problèmes que pose la pauvreté chez les immigrants et les réfugiés. Nous avons constaté que le filet de protection sociale ne peut rien pour eux, et voilà pourquoi nous nous portons à leur défense.

Nous sommes nous aussi heureux de voir qu'il y aura un certain excédent budgétaire cette année, et voilà pourquoi nous invitons instamment le comité, de même que le gouvernement... Nous espérons que l'excédent budgétaire prévu pourra servir à établir une protection sociale garantie pour tous les Canadiens. Je vais vous donner plus de détails à ce sujet et faire état de certaines préoccupations.

Nous croyons, premièrement, qu'une protection sociale garantie devrait viser tout le monde, qu'elle devrait être universelle, et par conséquent assurer l'inclusion sociale, et tout le monde bénéficierait de cette protection sociale partout au pays, dans toutes les provinces. J'insiste là-dessus parce que les immigrants et les réfugiés ne sont pas protégés, et nous voulons que tous profitent des programmes sociaux fondamentaux de notre pays.

Nous sommes d'accord avec le Centre canadien de politiques alternatives qui, dans ses budgets alternatifs des quelques dernières années, a réclamé que l'on consacre davantage de crédits aux programmes sociaux, le Centre étant d'avis que cela en soi non seulement nous permettra de bâtir une infrastructure sociale dans le pays et aider les personnes qui profiteraient de ces programmes, mais créerait une base qui assurerait l'expansion économique du pays lui-même. Nous pensons que c'est très important étant donné que cet excédent budgétaire nous offre une certaine marge de manoeuvre.

Notre quatrième principe se résume en quelques mots à valoriser le partenariat. Nous croyons fermement, après étude de nos propres activités et de la situation du pays tout entier, que le gouvernement fédéral doit coopérer avec les gouvernements provinciaux et municipaux, ainsi qu'avec le troisième secteur, soit le secteur bénévole, où l'on retrouve une vaste gamme de groupes communautaires à but non lucratif partageant des buts communs, à savoir aider les Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Nous croyons que c'est un principe très important, et nous espérons que le gouvernement fédéral va l'appliquer dans ses activités aussi.

Voilà pourquoi je suis très heureux d'être des vôtres aujourd'hui, et je félicite le gouvernement fédéral d'avoir pris l'initiative de consulter les gens d'un océan à l'autre dans le cadre de votre comité. Nous pensons que c'est une bonne idée.

Je vais faire état de quatre programmes et les résumer brièvement parce que j'ai mis cela par écrit aussi. Nous allons d'abord parler des programmes pour les enfants.

• 1525

Nous songeons ici à Campagne 2000 et à toutes sortes d'autres groupes partout au pays qui réclament un budget axé sur l'enfant, où l'on consacrerait des crédits importants aux programmes pour les enfants, ce qui comprend la garde d'enfants et l'éducation préscolaire. On créera ainsi un contexte où l'enfant n'aura pas à vivre dans la pauvreté pendant ses «années d'enfance». Si un enfant se sort de la pauvreté, il ne vivra pas dans la pauvreté une fois devenu adulte, espérons-nous.

Deuxièmement, au sujet du logement, encore une fois nous faisons cause commune avec une vaste gamme de groupes partout au pays. Nous avons pris part à une rencontre nationale à Toronto en mars dernier, et ici à Surrey, à laquelle assistaient des partenaires locaux—qui sont assis à côté de moi aujourd'hui—et qui ont fait valoir auprès de vous la solution du 1 p. 100, ce qui se résume en un mot à investir plus d'argent dans le logement.

On réclame cela essentiellement parce que le logement est un élément tellement déterminant pour ces personnes qui sont aux prises avec des difficultés économiques dans notre pays, que nous jugeons tout simplement nécessaire de consacrer davantage de deniers publics au logement. Il faut remédier ainsi au problème des logements abordables et à ce problème plus aigu qu'est celui des sans-abri.

Troisièmement, toutes sortes de groupes dans notre réseau qui s'intéressent aux immigrants et aux réfugiés sont extrêmement sensibles au fait qu'il y a des limites dans les programmes de formation, tant au niveau des compétences linguistiques que de l'acquisition des compétences, limites qui se posent aux immigrants et aux réfugiés à leur arrivée. Nous prions instamment le gouvernement d'investir davantage dans l'assurance-emploi, au niveau des programmes et des prestations, de telle sorte que les immigrants et les réfugiés aient accès à ces programmes et puissent par conséquent participer plus rapidement à la société et à l'économie canadiennes.

Enfin, nous exprimons notre solidarité avec un autre groupe communautaire avec lequel nous sommes d'accord, soit le Conseil canadien pour les réfugiés. Cet organisme prie le gouvernement fédéral d'éliminer la taxe d'établissement, cette taxe de 975 $ par personne, pour les immigrants et les réfugiés. Il a été démontré, et c'est certainement ce qu'ils ont vécu, que cette taxe crée un obstacle sérieux qui constitue un acte de discrimination, de l'avis du CCR, pour les réfugiés en particulier, qui viennent ici à un moment dramatique de leur vie et trouvent très difficile, sinon impossible, de réunir autant d'argent. Ils contractent par conséquent un prêt qu'ils doivent rembourser plus tard. C'est un vrai problème qui, nous l'espérons, trouvera sa réponse dans l'excédent budgétaire.

En conclusion, nous vous prions d'inscrire partout dans le budget l'expression «protection sociale garantie» pour désigner ce genre de dépense. Je n'en ai mentionné que quelques-unes qui touchent les immigrants et les réfugiés, mais de toute évidence, la santé et l'éducation constituent des préoccupations sociales importantes qui nous intéressent aussi.

Nous concluons en espérant que l'on établira une protection quelconque par suite d'une consultation entre tous les partenaires partout au pays, tous les ordres de gouvernement ainsi que toutes les organisations.

Merci beaucoup.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur Argue. Vous avez pris à peine cinq minutes, et c'est très bien.

Je remercie tous les intervenants pour ces exposés bien pensés.

Madame Leung, avez-vous des questions?

Mme Sophia Leung: Oui, merci, madame la présidente.

Je tiens à vous remercier tous pour vos exposés. Il est bon de voir tant de gens que je connais. Je pense que certaines de vos préoccupations ont été très bien exprimées, et je partage certaines d'entre elles.

Au sujet d'une chose que vous avez en commun, à savoir le logement abordable, cette question a été soulevée et débattue à maintes reprises. Récemment, j'ai tenu des consultations prébudgétaires dans ma circonscription. En fait, j'ai invité l'un de vos amis à faire un exposé dans ma circonscription. Je voulais provoquer une plus ample réflexion sur cette question.

Maintenant, on a mentionné la solution du 1 p. 100, et encore hier à Calgary, on a mentionné la solution du 1 p. 100. Vous devez en avoir discuté entre vous, puisqu'on semble le mentionner par tout le Canada. C'est intéressant à savoir.

Avant d'aller plus loin, je veux répondre à John qui s'inquiète de la bonification des compétences pour les immigrants et les réfugiés. Comme vous le savez probablement, le gouvernement fédéral alloue chaque année un fonds spécial de 45 millions de dollars pour favoriser l'établissement. Je veux seulement que vous le sachiez. Ce montant a été doublé l'an dernier. Je pense que les crédits devraient provenir de ce fonds de préférence à d'autres.

• 1530

De même, pour ce qui est du Conseil pour les réfugiés, nous avons bel et bien discuté de cette taxe d'établissement au comité. On en reparlera, mais on ignore ce qui en adviendra; cela dépend d'une foule d'autres choses.

Nous avons également entendu plusieurs autres préoccupations et demandes, mais même s'il y a un excédent budgétaire, les crédits demeurent limités. On nous demande aussi d'abaisser les impôts, de rembourser la dette et d'investir dans la protection sociale. J'aimerais donc vous lancer cette question à vous. L'excédent n'est pas illimité. On ne peut pas tout financer.

J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

Mme Corinne Lonsdale: On vous fait toutes ces autres demandes, c'est vrai, mais si vous considérez ce que l'on recherche dans un programme d'infrastructure, nous demandons seulement au gouvernement fédéral de contribuer pour un tiers, la province un tiers et les municipalités un tiers. L'activité économique que ces crédits vont générer auront, je pense, pour effet de grossir vos recettes, de telle manière que vous pourrez aussi envisager d'abaisser les impôts et de faire certaines autres choses également.

Je crois que le programme d'infrastructure va générer davantage de recettes pour le gouvernement fédéral.

M. Gerry Lloyd: Dans l'industrie de l'aviation, si on abaissait la taxe sur le carburant, on ne serait pas ici aujourd'hui à s'inquiéter de la survie des Lignes aériennes Canadien, et d'Air Canada. En fait, les taxes que l'on perçoit sur le carburant aviation dépassent les pertes des lignes aériennes. C'est écrit dans mon rapport. On ne s'inquiéterait pas de cela si l'on abaissait la taxe sur le carburant.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Est-ce la petite réclame publicitaire que vous nous aviez promise plus tôt, monsieur Lloyd?

M. Gerry Lloyd: Voilà pour la réclame. Sa question portait sur les impôts et les réductions d'impôt, et nous voulons pour notre part que l'on abaisse la taxe sur le carburant.

M. Roy Cullen: Je croyais que vous alliez parler de la manière dont nous allions l'abaisser lorsque les Lignes aériennes Canadien avaient besoin d'aide.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Quelqu'un d'autre veut-il répondre à Mme Leung?

Monsieur Argue.

M. John Argue: Je pense que les divers groupes du Groupe de travail concernant la pauvreté admettent la nécessité pour le gouvernement d'abaisser la dette d'une manière quelconque et par conséquent d'équilibrer les dépenses. Bien sûr, ce sont les dépenses sociales qui nous préoccupent le plus. Nous croyons, et nous le rappelons, que les Canadiens tiennent à conserver leur réseau de protection sociale qui a fait la réputation de notre pays. C'est un souci primordial.

Divers sondages ont démontré au fil des ans que l'électeur ou le citoyen moyen accepterait que l'on dépense même plus pour les programmes sociaux—avec certaines limites, bien sûr. Je veux simplement rappeler le fait que la plupart des Canadiens de toutes les régions sont attachés aux programmes sociaux.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Madame Mix.

Mme Linda Mix: J'aimerais réitérer ce que John dit. Ne rien faire pour les sans-abri...

C'est une honte que dans des provinces comme l'Alberta, qui connaît le plein emploi et où les impôts sont bas, l'on manque cruellement de logements. On ne bâtit pas de logements neufs. Le secteur privé n'est plus présent dans le logement social en Alberta, et un grand nombre de personnes sont sans abri en Alberta.

Si l'on fait une analyse coûts-avantages, comme je l'ai dit dans mon exposé, une unité de logement social coûte énormément moins cher qu'un séjour à l'hôpital ou le recours au système correctionnel. Il est incroyablement rentable pour le contribuable de créer des programmes de logements sociaux et de construire. Je pense que c'est de ce côté-là qu'il faut regarder.

Mme Sophia Leung: Je veux seulement rappeler que la ministre Bradshaw a parcouru le Canada et qu'elle s'apprête à faire maintenant des recommandations. À l'automne, nous avons reçu la visite de la Portland Hotel Society, que certains d'entre vous connaissent. Donc nous avons des idées, mais je crois qu'il est important pour nous d'entendre ce que vous avez à dire.

Mme Linda Mix: Je pourrais peut-être ajouter seulement une chose. Je pense que nous devons considérer les idées à long terme, et non à court terme. J'ai entendu Mme Bradshaw à la radio l'autre jour, et elle parlait des refuges à court terme. Nous devons envisager des solutions pour au moins les 10 prochaines années à venir.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Mme Johnson.

• 1535

Mme Beth Johnson: Je veux seulement dire que chaque fois que le gouvernement fédéral dépense un sou, il faut évidemment tenir compte de ce que cela rapporte au gouvernement fédéral. Vous en avez pour votre argent, pour ainsi dire, si les dépenses sont intégrées dans les priorités locales de telle sorte que l'on peut tirer parti des crédits dépensés.

S'agissant de l'exemple du transport que nous avons mentionné, le rendement pour l'économie locale est considérable. Non seulement ça, l'économie nationale profite d'une meilleure circulation des biens, par exemple, si l'on résout les problèmes de transport au niveau local—étant donné la situation de ce port sur la côte Ouest.

Il s'agit de tirer parti de cet argent et de l'intégrer aux priorités locales. C'est ce que nous croyons important.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci.

Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Merci, madame la présidente.

Je remercie les témoins de nous avoir fait part de leurs réflexions aujourd'hui.

Si l'on me permet d'interroger d'abord Mme Johnson et M. Cameron, vous avez mentionné dans votre exposé cette organisation appelée TransLink. Pouvez-vous nous la décrire plus en détail? S'agit-il d'un organisme qui est responsable de la gestion des réseaux de transport?

Dans quelle mesure les réseaux de transport intelligent s'inscrivent-ils dans ce cadre? Il en a été question au Comité des transports à Ottawa. Est-ce que cela relève de cet organisme?

Mme Beth Johnson: Je laisserai à M. Cameron le soin de vous parler de la question du transport intelligent.

Je me contenterai de décrire cet organisme, dont la naissance est très récente; il n'a été constitué que le 1er avril cette année. Auparavant, le transport était assuré par la B.C. Transit Authority ou BC Transit. C'était une société d'État. Nous n'avions aucun contrôle sur le plan local, et l'on ne faisait aucun rapprochement avec l'aménagement du territoire.

Par suite de négociations avec le gouvernement provincial et de l'adoption d'une loi provinciale, il existe maintenant un organisme qui est géré par un conseil d'administration de 15 personnes, dont trois sont des membres du gouvernement provincial, et 12 autres étant les maires de la région. Ces 12 maires siègent également au conseil d'administration du Greater Vancouver Regional District, il y a donc un rapport très étroit entre la planification de l'aménagement du territoire au GVRD et la planification du transport chez TransLink.

Pour ce qui est de la planification et de l'exploitation des transports, la planification se fait au niveau de TransLink. Le réseau d'autobus est géré par une filiale. TransLink est responsable de tout, du Sea Bus au Sky Train, ainsi que du réseau d'autobus et du grand réseau routier de la région, ce qui est nouveau. Les plans de TransLink doivent concorder avec la planification de l'aménagement du territoire au Greater Vancouver Regional District, et ces plans doivent appuyer l'aménagement du territoire. Ces plans sont intimement liés; c'est une situation qui n'existe nulle part ailleurs en Amérique du Nord.

Ken voudra probablement répondre à la question sur le transport intelligent.

M. Ken Cameron (directeur, Politiques et planification, Greater Vancouver Regional District): Oui. Chose certaine, nous avons entrevu le potentiel réel des réseaux de transport intelligent dans notre région. Étant donné que notre région est un point d'entrée, il y a ici une circulation intense de biens et de personnes. Il y a des passages frontaliers dans la région et ainsi de suite.

TransLink a entre autres le pouvoir de créer des filiales qui se chargent de créneaux particuliers. Elle vient de créer d'ailleurs une filiale chargée des réseaux de transport intelligent, où l'industrie du camionnage et le ministère des Transports provincial sont représentés—et je crois qu'il y a aussi des organismes fédéraux qui y sont représentés.

À long terme, je pense qu'on peut mettre au point des transpondeurs et des systèmes de péage, etc., qui font partie intégrante des systèmes de transport intelligent, mais dans l'immédiat, il faut faire circuler rapidement les biens et les personnes par toutes les voies d'accès en utilisant ces systèmes, et nous y travaillons.

Mme Beth Johnson: Madame la présidente, puis-je ajouter brièvement quelque chose? J'ai oublié une chose qui me paraît importante.

Ce qui est extrêmement important, vu sous l'angle du gouvernement fédéral, dans ce que je vous ai dit, c'est que nous recommandons, en ce qui a trait à la participation du gouvernement fédéral au financement des transports, que les collectivités qui disposent d'un système leur permettant de relier les divers modes de transport, et notamment la route, le chemin de fer, l'autocar, etc., à la planification de l'aménagement du territoire et qui ont le pouvoir de se pencher sur toute cette question, sont celles qui mériteraient d'obtenir des fonds. En l'occurrence, vous auriez l'assurance que les fonds seraient dépensés à des initiatives visant à utiliser moins l'automobile et à créer d'autres possibilités.

• 1540

La proposition que nous avons faite au gouvernement fédéral porte donc que le genre de structure—ou quelque chose qui ressemble à ce genre de structure—dont nous disposons au GRVD soit une condition essentielle à l'obtention des fonds dont nous parlons.

Merci.

M. Roy Cullen: Madame la mairesse, dans votre mémoire, vous avez également parlé de la question des logements abordables et des sans-abri. Vous n'avez pas eu l'occasion d'en traiter pendant votre exposé.

Madame Geary et madame Mix, vous avez parlé du logement abordable et des sans-abri. Vous avez dit que le problème est apparu lorsque le gouvernement fédéral a renoncé—je crois que vous avez utilisé ce genre de terme—à sa responsabilité à l'égard du logement social. J'ai oublié le terme exact que vous avez utilisé.

Pourriez-vous expliquer au comité quand cela s'est produit. Je ne sais pas si c'était sous le gouvernement actuel ou sous le précédent. En général, lorsque la responsabilité de programmes est déléguée aux provinces, c'est parce qu'il vaut mieux que les programmes soient appliqués au niveau local. C'est une chose que recommandent les provinces et nous y répondons de temps à autre. En temps normal, nous transférons à la fois les responsabilités et les ressources. Vous avez laissé entendre qu'il y a eu transfert de la responsabilité, mais pas des ressources correspondantes. Est-ce exact?

Mme Vanessa Geary: Oui. D'après ce que je sais de l'historique du logement social, la responsabilité de la mise en oeuvre et de l'administration des programmes de logement social a été déléguée aux provinces vers le milieu des années 80 et, entre cette époque et le début des années 90, le gouvernement fédéral a maintenu cet engagement d'importance cruciale au niveau du financement. Il a en fait continué de fournir deux tiers des fonds qui ont permis la construction de nouveaux logements sociaux, ces coopératives d'habitation ou logements à but non lucratif gérés au niveau local.

Au cours des années 90, à l'époque du gouvernement conservateur, le gouvernement fédéral s'est retiré de ce programme ou a renoncé à sa responsabilité—quel que soit le terme qu'on veut utiliser—à l'égard du financement de la construction de nouveaux logements sociaux. Le problème, c'est que ces deux tiers de financement étaient d'une importance cruciale pour répondre aux besoins.

Même si toutes sortes de choses ont aggravé encore le problème des sans-abri par rapport au début des années 90, il n'en demeure pas moins que le gouvernement fédéral a cessé de fournir les deux tiers du financement pour la construction de logements, ce qui a provoqué directement une augmentation du nombre de sans-abri. Nous en sommes témoins. Il existe un lien direct entre le nombre de logements en Colombie-Britannique qui n'ont pas été construits et la liste d'attente de logements qui ne cesse de s'allonger en Colombie-Britannique.

M. Roy Cullen: Madame la présidente, tout cela est du domaine du passé et nous voulons nous tourner vers l'avenir, mais ce serait peut-être utile qu'un attaché de recherche vérifie ce qu'il en est, car on essaie de nous tenir responsables d'à peu près tous les maux de ce monde et il serait intéressant de savoir ce qui s'est vraiment passé... Je veux dire que les provinces fixent certaines priorités.

Il y a une autre question que j'aimerais approfondir. En fait, je voulais en parler ce matin quand le maire Owen était présent, mais il a dû partir tôt. Les sans-abri... c'est un problème très complexe qui, certes, il faut bien l'admettre, est directement lié à la disponibilité de logements abordables mais également à un certain nombre de questions de santé mentale. Le maire a dit qu'il y avait des centaines de gens dans les rues qui ne vont même pas dans les refuges. Le maire Lastman de Toronto m'a dit exactement la même chose.

Si ma mémoire est bonne, bon nombre de provinces ont fermé des hôpitaux psychiatriques et essayé de—et, dans une certaine mesure, elles l'ont fait—compter sur les systèmes de soutien communautaire, mais peut-être y a-t-il des lacunes dans ce domaine. Lorsqu'on examine le problème des sans-abri... en fait, Claudette Bradshaw se penche sur la solution à long terme, mais elle s'inquiète aussi de l'hiver qui arrive, car c'est un problème immédiat.

Lorsqu'on examine le problème et le rôle du gouvernement fédéral, il faut bien tenir compte de tous ces éléments. Quel rapport y a-t-il entre les problèmes de santé mentale et les logements abordables? Pouvez-vous nous en parler?

Mme Vanessa Geary: Linda va dire quelque chose à ce sujet. Selon les estimations—j'ai sous la main un feuillet d'information—une forte proportion de gens qui vivent dans la rue souffrent effectivement de maladie mentale, mais nous essayons ici de vous fournir des données de base. Peu importe de savoir qui est responsable de quoi. La réalité, si l'on pense à l'avenir, c'est qu'il faut conclure des partenariats et absolument joindre nos efforts pour trouver une solution au problème.

En un mot, nous avons tous constaté, la FCM au même titre que les groupes communautaires et les sans-abri eux-mêmes d'un bout à l'autre du pays, que sans la participation du gouvernement fédéral—et je veux parler de ressources financières proprement dites—nous ne pourrons pas résoudre le problème. Lorsque le gouvernement fédéral sera devenu partie prenante, la prochaine étape pour nous tous consistera à discuter pour savoir comment répondre aux besoins au niveau local. Toutefois, nous devons obtenir au préalable cet engagement.

• 1545

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Madame Mix, vouliez-vous ajouter quelque chose?

Mme Linda Mix: Jusqu'ici, je ne peux que me faire l'écho de ce qu'a dit Mme Geary.

M. Roy Cullen: Les Canadiens s'intéressent aux solutions, et ne se préoccupent guère de...

Je suis heureux d'apprendre que, au moins, on comprend assez bien le problème. L'an dernier, pour les soins de santé, nous avons débloqué 11,5 milliards de dollars de plus parce que nous avions les ressources financières voulues pour accorder des allégements fiscaux. Il faut peut-être donc agir à nouveau sur ce front dans l'intérêt des sans-abri. Qui sait?

Si je pouvais dire une chose à Mme Corinne Lonsdale...

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Vous serez extrêmement bref, n'est-ce pas?

M. Roy Cullen: Oui, ma question sera très brève.

Je suis un fervent partisan du programme d'infrastructure, mais certaines personnes sont plutôt sceptiques. L'objectif du programme est de financer de nouveaux projets, et pas simplement des initiatives qui auraient dû être prises de toute façon, afin de faire débloquer des fonds aux municipalités. Pourriez-vous me dire comment les choses se passent au niveau municipal, et comment se déroule le processus d'établissement des priorités?

Nous venons d'entendre un témoin qui nous a dit que nous devrions être plus fermes avec les provinces. En fait, M. Jones a plus ou moins convenu—vous pourrez peut-être parler pour vous-même plus tard—que nous devrions être fermes avec les provinces et leur dire qu'elles ne recevront pas un sou tant que les municipalités n'auront pas participé avec elles à l'établissement des priorités. En toute franchise, c'est un sentiment que je partage, car si les municipalités ne participent pas au processus d'établissement des priorités, comment le programme pourra-t-il donner des résultats? Pourriez-vous répondre à ces deux questions, soit l'effet d'entraînement et l'établissement des priorités?

Mme Corinne Lonsdale: Pour ce qui est de l'effet d'entraînement—et vous avez signalé que, en fait, ces projets doivent de toute façon être entrepris—je dois vous dire qu'en Colombie-Britannique à l'heure actuelle, les municipalités ont énormément de mal à trouver les fonds à investir dans l'infrastructure à cause de la délégation des responsabilités, pas seulement par la province mais également par le gouvernement fédéral. Il y a quelques années à peine que nous assumons la responsabilité à l'égard de nos ports et aéroports, et la province ne fait pas sa part. La province est en faillite et ne nous accorde ni fonds ni aide à cet égard.

Il n'y a qu'un seul contribuable, et nous sommes aux abois pour entreprendre les projets dont nous avons désespérément besoin dans nos municipalités, pour construire des usines de traitement des eaux usées et des projets d'adduction d'eau potable. Le réseau routier est un autre secteur où la province s'est déchargée de ses responsabilités sur les municipalités, au cours des deux dernières années.

Donc, c'est vrai, les projets existent. Ils sont couchés sur le papier. Toutefois, si nous ne recevons pas d'aide, nous ne pourrons pas les entreprendre. Nous avons besoin de cette aide, car nous ne pouvons pas agir seuls.

On peut envisager l'«effet d'entraînement» de deux façons. Nous demandons également un programme pluriannuel, car bon nombre des projets sont de très grande envergure et doivent se faire par étapes. Je ne sais pas si cela répond à cette partie de votre question.

M. Roy Cullen: Si, c'est parfait.

Mme Corinne Lonsdale: Quant à l'autre partie concernant les priorités, j'ai bien aimé ce que vous avez dit il y a un instant. Je ne veux pas que le gouvernement fédéral se présente à la table tant qu'il n'est pas convaincu que les municipalités établiront elles-mêmes ces priorités ou du moins auront leur mot à dire à cet égard.

En ce qui a trait aux deux précédents programmes d'infrastructure, le premier était formidable mais le dernier s'est révélé un véritable cauchemar. Grâce au ministre Anderson, qui s'est vraiment battu pour nous par le biais de l'UMCB, etc., nous avons finalement réussi à nous en sortir. Il est toutefois essentiel que les municipalités ou les districts régionaux participent dès le début à l'établissement des mandats et des priorités.

M. Roy Cullen: Très bien. Je vous remercie.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, madame la mairesse.

Je vais permettre à M. Jones de s'expliquer.

M. Jim Jones: Ce que je voulais dire, c'est que vous avez dit que Mike Harris refusait de participer au prochain programme s'il n'avait pas voix au chapitre. Je pense qu'il s'agissait davantage de la région métropolitaine de Toronto, où il y a de nombreuses municipalités et de nombreux maires. Cette région est également représentée par 42 députés. Lorsqu'on voit à quelles fins sont dépensés les fonds du programme d'infrastructure, c'est-à-dire les égouts, le transport en commun, le réseau routier, et d'autres choses du même genre, il faut beaucoup d'argent pour desservir ces secteurs. Bien souvent, il est difficile d'obtenir l'accord des maires. Ce que recommande Mike en l'occurrence constituerait sans doute une utilisation des ressources à bon escient si la province décide de les consacrer à cette fin. C'est ce qu'il voulait dire, je pense.

• 1550

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Est-ce là le petit message publicitaire que vous nous aviez promis plus tôt?

M. Jim Jones: Non.

De toute façon, je voudrais poser une question à Beth Johnson.

Lorsque vous avez parlé de la planification de systèmes de transport urbain durable, et j'y ajouterais «et la mise en oeuvre», que faites-vous dans ce domaine parallèlement aux logements abordables, par exemple? Comment ce genre de projet va-t-il être durable? Qu'entendez-vous par «durable»?

Mme Beth Johnson: Je regrette, je n'ai pas compris si votre question porte sur les transports ou le logement.

M. Jim Jones: Je vous pose une question au sujet des transports.

Mme Beth Johnson: Très bien.

M. Jim Jones: Comment est-ce durable, quand vous nous parlez de «transport urbain durable»?

Mme Beth Johnson: Si je ne réponds pas directement à votre question, dites-le-moi.

Au niveau régional, nous nous sommes penchés—et c'était une occasion unique de le faire à tous les niveaux; 20 municipalités s'étaient entendues sur ce point—sur une combinaison de planification des moyens de transport et de l'aménagement du territoire qui permettait d'utiliser au mieux notre région pour accueillir le million de personnes supplémentaires que nous sommes censés recevoir.

Voici comment nous avons procédé: nous avons tracé en pointillés la périphérie de l'espace vert, y compris des lieux de travail comme les exploitations agricoles, déterminé ceux qu'il restait et ensuite examiné les possibilités d'utilisation de ces terrains aux fins de transport, pour nous assurer que nous envisagions des modèles différents, que nous avions trouvé le meilleur modèle d'expansion pour la mise en place d'un réseau de transport public.

Par exemple, nous avons choisi ce que nous appelons «le modèle métropolitain compact» car, à notre avis, c'est celui qui est le mieux adapté, avec le moins de subventions, à des initiatives importantes en matière de transport comme ce que nous appelons le Sky Train, le système léger sur rail qui traverse le centre-ville, de façon à éviter une expansion tentaculaire. La population serait concentrée autour de ces couloirs de transport, de sorte qu'il y aurait moins de subventions des transports et que les gens auraient moins besoin d'utiliser leurs voitures pour aller au travail et en revenir. Nous avons également envisagé la création de groupements de secteurs où les gens pourraient habiter et travailler près de chez eux, de façon à ne pas avoir autant de distance à parcourir.

Puis nous avons examiné les façons de rendre la planification et la réalisation du réseau de routes principales compatibles avec la planification et la réalisation du réseau de transport public, pour qu'il n'y en ait pas un qui cannibalise l'autre, surtout pour que la planification du réseau routier ne se fasse pas au détriment de celle des transports publics.

Notre objectif était une croissance contenue et non une expansion tentaculaire, tout en améliorant la qualité de l'air. Nous avons par la suite intégré un autre objectif, bien entendu, à savoir la réduction des émissions de gaz à effet de serre car nous voulons faire notre part à ce chapitre, tout en favorisant une croissance qui réponde à nos besoins de transport pour des années à venir.

Cela répond-il suffisamment à votre question?

M. Jim Jones: Je voulais également savoir si, dans le cas de Richmond—je ne connais pas très bien cette région—et de Delta et d'autres endroits semblables, vous avez pris les mesures qui s'imposent pour éviter que la circulation se fasse toujours vers le centre-ville de Vancouver, mais pour vous assurer que cela se fasse dans les deux sens et aussi, qu'au lieu de construire des immeubles à appartements et des logements abordables sur des terrains à 30 millions de dollars l'acre, vous le fassiez sur des terrains à 500 000 $ l'acre, de sorte que ces personnes puissent utiliser les transports en commun et venir travailler à Vancouver. C'est, à mon avis, ce que signifie une planification durable d'aménagement du territoire et de transport urbain.

Est-ce ce que vous avez fait?

Mme Beth Johnson: Oui.

M. Jim Jones: J'aimerais revenir en arrière, dans ces conditions. Tous les maires ont refusé de participer au deuxième programme d'infrastructure. Quel était le problème si les fonds étaient consacrés au réseau de transport en commun, pour les municipalités, la province et le gouvernement fédéral? Si tout le monde s'entend sur une bonne planification d'utilisation du territoire et de mise en place d'un réseau de transport public, pourquoi s'est-on opposé à l'idée d'allouer les fonds aux diverses municipalités à cette fin?

Mme Beth Johnson: Je vais demander à Ken de répondre à cette question.

M. Ken Cameron: À l'époque, le transport en commun était du ressort de la province et les décisions étaient prises entièrement par le gouvernement provincial conformément à ses priorités politiques. Il n'y avait pas de lien évident entre ces priorités et le plan de gestion de croissance.

• 1555

M. Jim Jones: La question du transport en commun est donc réglée dans la région métropolitaine de Vancouver?

M. Ken Cameron: Oui.

M. Jim Jones: Pour en revenir au cas de Toronto, j'ai jeté un coup d'oeil aux plans en vue des Jeux olympiques de 2008 et tout se passe au centre-ville. La population va augmenter de deux millions d'âmes et, au lendemain des Jeux olympiques, nous devrions nous retrouver avec un bon réseau de transport en commun rapide. Ce ne sera possible que si tous les ordres de gouvernement se penchent sur la question de savoir comment faire pour permettre cette expansion et déplacer toutes ces personnes d'un coin à un autre. Si un programme d'infrastructure est mis en oeuvre dans la région de Toronto, il vaudrait peut-être mieux dépenser les fonds à l'égard des égouts, des systèmes d'adduction d'eau ou du transport en commun, ce qui ne relève pas entièrement de la municipalité.

Je voulais revenir à une chose qu'a dite John. Markham est un secteur en pleine expansion. La population augmente de 10 000 à 12 000 personnes par an. Il s'agit pour l'essentiel de nouveaux Canadiens, et je n'ai jamais entendu l'un d'entre eux proposer qu'on utilise les fonds de l'assurance-emploi pour les aider. À mon avis, le programme d'assurance-emploi est destiné aux personnes qui ont cotisé au régime, et non à celles qui n'ont jamais versé un sou à cet égard. D'où vient donc cette idée?

M. John Argue: Je n'ai peut-être pas été assez clair. Le problème qui se pose, selon moi, est le suivant: quand les immigrants veulent améliorer leurs compétences, sur le plan professionnel ou linguistique, la plupart des cours de formation et des avantages liés au programme d'assurance-emploi et les immigrants et les réfugiés n'y ont donc pas droit. Ils ne peuvent pas participer à ce genre de formation de façon à accéder au marché du travail. Ces gens-là viennent ici parce qu'ils souhaitent améliorer leurs compétences afin de trouver un emploi et de s'occuper de leurs familles, payer des impôts, etc., mais ils se heurtent à un obstacle avant même de pouvoir se faire engager du fait que la formation est liée à l'assurance-emploi. C'est donc un peu le dilemme de l'oeuf et de la poule. Ces gens-là n'ont pas pu travailler et cotiser à l'assurance-emploi de façon à avoir droit à la formation. Ils veulent suivre ces cours de formation pour pouvoir trouver un emploi et cotiser. C'est le problème dont ils font part. Les immigrants, d'après ce que je sais, ne souhaitent pas nécessairement être associés à l'assurance-emploi ou au chômage. En fait, ils désirent améliorer leurs compétences de façon à trouver du travail. C'est surtout le travail qui les intéresse.

M. Jim Jones: Je comprends ce que vous venez de dire, mais à mon avis, le programme d'assurance-chômage s'adresse aux travailleurs qui avaient un emploi et qui ont cotisé au programme. Lorsqu'ils sont mis à pied, ils doivent pouvoir participer à des programmes de recyclage.

Ce qu'il manque, c'est peut-être un programme pour aider les nouveaux Canadiens à s'adapter à l'économie canadienne.

M. John Argue: En fait, cela paraît tout à fait logique. J'avoue que le système est étrange.

M. Jim Jones: Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Monsieur Jones, voulez-vous dire un dernier mot? Nous n'avons plus beaucoup de temps.

M. Jim Jones: Non, ça va.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je tiens à remercier tous les témoins d'aujourd'hui qui nous ont présenté des exposés très intéressants, et leur donner l'assurance que nous en tiendrons compte en rédigeant notre rapport.

Nous faisons une pause de deux minutes.

• 1558




• 1605

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Nous reprenons la séance.

Merci beaucoup de votre présence. Vous savez sans doute tous que vous avez cinq minutes pour faire quelques remarques, après quoi les membres du Comité des finances vous poseront des questions.

Nous allons faire tout notre possible pour vous rappeler à l'ordre. Comme nous devons quitter la ville à la fin de cette réunion, il ne sera donc pas possible d'accorder la moindre prolongation. Nous écouterons avec beaucoup d'intérêt les remarques de chacun d'entre vous.

Nous allons entendre aujourd'hui le témoignage des représentants du British Columbia and Yukon Territory Building and Construction Trades Council, du Canadian CED Network, de l'Administration de l'Aéroport international de Vancouver, de l'Université de la Colombie-Britannique et de la municipalité de Nelson, du district régional Northern Rockies.

Nous allons donner la parole en premier à M. Joe Barrett, attaché de recherche, British Columbia and Yukon Territory Building and Construction Trades Council. Soyez le bienvenu.

M. Joe Barrett (attaché de recherche, British Columbia and Yukon Territory Building and Construction Trades Council): Merci. J'aimerais d'entrée de jeu remercier les députés qui sont présents. Il est regrettable qu'ils ne soient pas plus nombreux.

Je ne vais pas vous lire tout notre mémoire. Il est beaucoup trop long pour pouvoir le faire dans les quelques minutes qui nous sont allouées.

J'aimerais toutefois vous parler des normes de vie au Canada à l'heure actuelle. J'aimerais parler de la distribution de la richesse et de l'infrastructure sociale dans notre pays. En conclusion, je vais faire certaines propositions que les métiers de la construction ont déjà faites au comité, au niveau national.

J'aimerais tout d'abord parler de la pauvreté au Canada. Comme vous le savez, le tableau est assez sombre. Plus de 12 p. 100 des Canadiens vivent actuellement dans la pauvreté, 17 p. 100 d'entre eux sont analphabètes, 9 p. 100 sont censés mourir avant d'avoir atteint l'âge de 60 ans et 1,3 p. 100 de la population active est touchée par le chômage à long terme. Ces données publiées par l'UN sont prudentes. Selon les estimations, près de 20 p. 100 des enfants canadiens vivent dans la pauvreté.

Dans les années 60 et 70, nous avons vu les différences s'estomper, mais dans les années 90, l'écart ne cesse de se creuser. Selon un rapport publié l'an dernier par Armine Yalnizyan du Centre for Social Justice de Toronto, lorsque les revenus du haut et du bas de l'échelle commencent à s'écarter, on a une société plus divisée. Pour citer un passage de son étude:

    Plus une société est regroupée [...] plus son expérience matérielle est commune. Cela représente une force unificatrice puissante.

Lorsque l'écart se creuse entre les deux extrêmes de la distribution de la richesse, on en arrive au résultat opposé. On commence à vouloir faire cavalier seul avant tout.

Il est regrettable que Statistique Canada ne présente aucune donnée sur la richesse. Je crois savoir que cela va se faire sous peu. Apparemment, toutefois, les résultats seront encore plus choquants: 1 p. 100 des Canadiens possèdent près de 50 p. 100 des richesses du pays. Nous n'en sommes pas certains. C'est difficile à évaluer, mais Statistique Canada va commencer à publier ce genre de données.

Dans le peu de temps qui m'est accordé, je voudrais traiter de certains mythes. Nous entendons dire et répéter que la fiscalité canadienne a pour effet de repousser l'investissement étranger car l'impôt est tout simplement beaucoup trop élevé. Le groupe KPMG a fait une étude, comme tous les ans, où l'on indiquait que le taux d'imposition des sociétés canadiennes est en fait l'un des plus bas du monde. Plus loin, on peut lire qu'au Canada, le taux combiné d'impôt sur les sociétés s'élève à 27,4 p. 100. Viennent ensuite la Suède, la France et le Royaume-Uni, où l'impôt sur les sociétés est légèrement inférieur à 35 p. 100. Les États-Unis, l'Allemagne et l'Italie sont les pays où l'impôt sur les sociétés est le plus élevé. Aux États-Unis, les sociétés payent 40 p. 100 d'impôt, en Italie, 54 p. 100 et en Allemagne, 60 p. 100. Bien sûr, étant donné que nous avons perdu la part d'impôt venant des sociétés, il a fallu compenser par l'impôt sur le revenu des particuliers.

• 1610

Il est vrai que notre taux d'imposition des particuliers est élevé au Canada, mais nous voulons envisager certaines solutions. Si l'on considère la solution de Mike Harris, qui consistait en réductions générales d'impôt sur le revenu des particuliers, les seuls à en avoir vraiment profité étaient les membres les plus riches de notre société.

Si on examine certaines statistiques, avec les réductions de 5 milliards de dollars, plus de la moitié des recettes perdues par le gouvernement ont été reversées aux 20 p. 100 de Canadiens qui se trouvent dans la tranche de revenu supérieure. Seulement 3,9 p. 100 de ces réductions ont profité aux 20 p. 100 des tranches inférieures de revenu. Autrement dit, les riches ont profité de diminutions d'impôt de 15 000 $ tandis que les familles dont le revenu était inférieur à 20 000 $ n'ont vu leur impôt diminuer que de 150 $.

Malheureusement, le temps file. J'aurais vraiment souhaité expliquer un peu plus en détail comment la stratégie de mondialisation—l'AMI et l'OMC—ne donne pas les résultats escomptés; tout cela se trouve dans le rapport.

Je voudrais conclure en disant quelques mots au sujet des stratégies qui pourraient donner des résultats. Lorsqu'ils sont arrivés au pouvoir, les libéraux se sont intéressés à l'infrastructure. Ce qu'il nous faut vraiment au Canada, c'est un véritable engagement à remettre en état le réseau routier dans tout le pays. Il ressort d'une étude effectuée l'an dernier que cela coûterait 17 milliards de dollars. Les États-Unis investissent plus de 200 milliards à la remise en état de leur réseau routier. En plus de redonner du travail aux gens, cela permettrait au gouvernement d'économiser des sommes considérables en soins de santé et en frais de transport. Si l'on parle d'améliorer les échanges commerciaux, la remise en état du réseau routier est l'une des meilleures solutions.

Les deux autres suggestions que nous faisons concernent le logement social. Il est assez effrayant pour chacun d'entre nous d'apprendre aux nouvelles que les sans-abri manifestent devant la Chambre des communes. Peu importe qui en est responsable, il s'agit d'un problème bien réel. On ne peut aller nulle part dans les villes canadiennes sans tomber dans la rue sur des sans-abri et des mendiants. J'ai grandi dans cette ville et je n'ai jamais vu cela, dans les années 60 et 70. C'est un phénomène nouveau.

Si nous nous consacrons à servir le public, comme vous l'avez tous fait—et c'est un grand sacrifice—l'une des grandes choses que vous pouvez laisser derrière vous, c'est un effet réel dans la lutte contre la pauvreté croissante au pays. Sur la façon de le faire, je vous renvoie à notre mémoire.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, monsieur Barrett.

Nous écouterons maintenant M. Mike Lewis et M. Doug Weir, ce dernier étant le directeur exécutif du Canadian CED Network. Bienvenue.

M. Mike Lewis (directeur exécutif, Centre for Canadian Enterprise et président, National Policy Council, Canadian CED Network): Merci.

D'une certaine façon, comme suite aux propos du témoin précédent, nous venons des marges, parler au grand public de ce que font les collectivités pour lutter contre la marginalisation, sans association avec les gouvernements des paliers supérieurs, mais en montrant quelles percées ont été effectuées et en tirant d'importantes leçons sur ce qui est perfectible.

Nos membres se trouvent dans les régions démunies de la grande péninsule nord de Terre-Neuve jusqu'à Revelstoke, où Doug est le commissaire à l'expansion économique, de même que dans le sud-ouest de Montréal, le long du canal Lachine et jusqu'à North York. Nous profitons donc de l'expérience de ceux qui travaillent dans les tranchées depuis 5 à 25 ans et des organisations qu'ils ont mises sur pied, pour opérer des changements.

Notre cadre de politique nationale n'est encore qu'une ébauche, mais il fait l'objet de discussions partout au pays entre nos membres et avec d'autres organisations. Nous estimons que trois choses sont essentielles pour obtenir de nouveau les succès que nous avons eus au cours des 15 dernières années.

• 1615

Il faut d'abord investir dans la capacité, et ensuite, dans des mécanismes permettant la création et l'accumulation de capitaux à l'échelle locale, pour fins de réinvestissement. Troisièmement, il faut investir dans la confiance envers nos leaders au sein des communautés et des organisations et, bien entendu, chez ceux qui sont marginalisés dans une communauté donnée.

Nous avons quelques illustrations de nos meilleures pratiques dans le mémoire que nous avons remis à la greffière. À Halifax, la stratégie d'affaires de l'Association de développement des ressources humaines a permis de soustraire 1 400 personnes à l'aide sociale, en 10 ans. Le rendement pour le secteur public, qu'il s'agisse du palier municipal ou provincial—dans ce cas-ci, il y a eu très peu d'investissements du fédéral—d'après des estimations prudentes, serait de 1,80 $ pour chaque dollar investi. L'association des objectifs sociaux et économiques et le recours à une approche globale et plus stratégique aux niveaux local et régional fait toute la différence.

Dans le sud-ouest de Montréal, ils ont été avantagés par l'obtention de fonds du fédéral, en partie, je crois, parce que Paul Martin était le ministre de l'expansion économique régionale. Cela a contribué à délier les cordons de la bourse fédérale, dont l'argent a pu être combiné avec celui des quartiers les plus pauvres de Montréal.

RESO, une autre société de développement communautaire, a été créée il y a 15 ans. En 1992, en pleine récession, Statistique Canada rapportait qu'on avait mis un frein au déclin des 25 années précédentes dans le secteur manufacturier. C'était le résultat de l'organisation et de la création par des gens pauvres de diverses coalitions avec le milieu des affaires, le milieu syndical, les organisations de personnes démunies, les institutions financières et les petites entreprises. On a vu là la structure d'administration et de gestion d'une organisation communautaire responsable.

Nous proposons de tirer parti de cette expérience et nous établissons des zones de prise en charge dans les parties les plus pauvres du pays, où peuvent être prises une série de mesures que nous avons décrites.

Je donne maintenant la parole à Doug, qui vous donnera un exemple qui vient de la Colombie-Britannique, et auquel il travaille depuis 15 ans, je crois.

M. Doug Weir (directeur exécutif, Canadian CED Network): Merci.

Un simple éclaircissement, madame la présidente. Je travaille actuellement comme responsable de l'expansion économique à Revelstoke, en Colombie-Britannique. Revelstoke compte 8 500 habitants et est situé sur le fleuve Columbia. C'est une région assez isolée de la province. C'est une communauté tributaire des ressources naturelles depuis 100 ans. Au milieu des années 80, nous avons été frappés par un très grave ralentissement économique. Historiquement, notre économie a eu des hauts et des bas, mais dans les 24 mois précédant 1986, 3 000 emplois ont été perdus dans notre petite localité. Notre taux de chômage était supérieur à 25 p. 100 et bien entendu, les gens étaient démoralisés comme jamais.

Nous nous en sommes remis, fort heureusement. Notre taux de chômage est typique pour la Colombie-Britannique, soit un peu moins de 10 p. 100. Nous avons acquis un grand nombre de biens communautaires et nous avons bon nombre d'organisations communautaires qui peuvent travailler au nom de la communauté. Le secteur forestier en Colombie-Britannique est en croissance depuis cinq ans, alors même que pour l'ensemble de la province, et pour de nombreuses collectivités, il y a eu une baisse du nombre de personnes employées par l'industrie forestière.

Comment avons-nous pu nous en tirer, en seulement 13 ans? Nous avons eu l'occasion, comme s'il s'agissait d'un projet pilote, avec certaines ressources, d'appliquer les principes du développement économique et communautaire: la communauté a décidé de se prendre en main, de s'appuyer un peu sur les ressources extérieures, mais de vraiment mettre au point un plan stratégique global, tenant compte de ses points faibles et tablant sur ses points forts.

Dans notre collectivité, nous avons mis en oeuvre un plan stratégique. Nous avons pu augmenter la capacité de la communauté. Le gouvernement fédéral est l'un des intervenants qui a beaucoup contribué à cet élargissement de notre capacité, grâce à un programme d'Emploi et Immigration appelé Développement des collectivités. Cela nous a permis de bâtir la capacité de la communauté, alors que dans la plupart des cas, il ne s'agit que de programmes d'investissement régionaux.

L'une des choses importantes que nous avons pu faire dans notre collectivité, pour la croissance de l'industrie forestière, a été dans le cadre d'un partenariat de recherche et de collaboration avec l'industrie, l'achat d'une concession de ferme forestière et l'exploitation de l'une des plus importantes sociétés forestières communautaires de Colombie-Britannique. Notre collectivité contrôle 20 p. 100 du bois prélevé dans notre région. Cela a beaucoup contribué à la stabilisation de notre localité. Il y a eu une croissance de l'emploi et une valeur ajoutée pour les produits forestiers.

• 1620

Du côté des capitaux et du financement dont parlait Michael, deux projets sont très importants. Nous avons un fonds de prêts communautaires de 1,5 million de dollars, dont les fonds ont au départ été consentis par Emploi Canada. On a pu le porter à 3,5 millions de dollars sur 10 ans, non seulement en réinvestissant dans notre collectivité, mais en trouvant ailleurs des fonds nous permettant d'augmenter notre caisse. Et enfin, notre caisse de crédit est devenue un partenaire important pour notre communauté, avec un actif de 60 millions de dollars. Sur cet actif, 30 p. 100 est investi dans la production économique pour la communauté, donc dans les prêts commerciaux.

Enfin, d'après mon expérience de praticien qui a observé pendant un certain temps l'évolution de ce processus, la mondialisation complique les choses pour les paliers de gouvernement supérieurs lorsqu'il s'agit de traiter de questions structurelles au niveau communautaire, ce qui fait que les interventions prennent de plus en plus de ressources. Le développement économique et communautaire soutient les prises de décision, la mise en valeur du potentiel et la mise en pratique à l'échelle locale. C'est un moyen rentable de renforcer l'économie et la communauté locale tout en tenant compte de la viabilité économique, sociale et environnementale.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur Weir.

Nous écouterons maintenant, au nom de l'Administration de l'Aéroport international de Vancouver, M. Gugliotta, le vice-président aux finances, M. John Korenic, directeur du développement des services aux lignes aériennes et aux voyageurs, et M. Joe Sulmona, directeur des politiques stratégiques.

Bienvenue, messieurs.

M. Tony Gugliotta (vice-président, Finances, et directeur des finances, Administration de l'Aéroport international de Vancouver): Merci, madame la présidente et membres du comité permanent. Nous apprécions cette occasion de formuler des observations au comité.

Je vous parlerai brièvement de cinq sujets: les paiements du bail foncier, la nécessité d'une nouvelle politique sur les zones franches au Canada, celle des arrivées hors taxe aux aéroports canadiens, celle d'un programme d'infrastructure nationale et la taxe d'accise fédérale sur les carburants. Le texte de mon exposé est annexé aux notes, et je ne vous en présenterai que les points saillants, pour respecter la limite de cinq minutes.

Comme vous le savez, l'Administration de l'Aéroport international de Vancouver loue l'aéroport du gouvernement fédéral. Nous sommes un organisme à but non lucratif qui gère l'aéroport au nom de la collectivité. L'aéroport fournit plus de 23 000 emplois, et de 1994 à 1997, 5 100 emplois y ont été créés—11 200, si on tient compte de l'effet multiplicateur.

En vertu de la structure locative actuelle, les aéroports au Canada sont censés payer 1,2 milliard de dollars de loyer au gouvernement fédéral au cours des cinq prochaines années. Ces loyers représentent la plus importante dépense des aéroports qui ont été cédés et risquent de saper la viabilité et la compétitivité de l'industrie du transport aérien.

La structure actuelle des loyers des aéroports a été fixée à l'époque où le gouvernement fédéral essuyait encore des déficits annuels importants, et un juste traitement de cette industrie a été sacrifié à l'autel de la réduction du déficit. La situation a changé et nous demandons que soit revue la structure actuelle.

En réponse à l'examen par le gouvernement fédéral des administrations aéroportuaires, le Conseil des aéroports du Canada a proposé que Transports Canada fasse participer l'industrie à l'élaboration d'un ensemble de principes clés visant une structure de loyers plus raisonnable et plus transparente. Nous espérons entamer bientôt ces discussions et souhaitons que vous fassiez part de votre appui sur cette question au Cabinet et à d'autres ministères.

Le Canada a besoin d'une politique sur une zone franche. Nous estimons que le développement de centres logistiques modernes serait utile pour toute l'économie de l'ALENA. Les règlements actuels ne permettent toutefois pas la création de tels centres de distribution au Canada. Au lieu de cela, nous ne pouvons que constater la croissance phénoménale des zones franches américaines.

Les changements que nous demandons sont décrits en détail dans l'annexe de mon exposé, mais en gros, ce que nous souhaitons, c'est que le ministre du Revenu national crée une nouvelle classification, celle de «zone franche» qui permette, pour un seul permis, d'entreprendre les activités prévues à la loi pour les entrepôts d'attente, les entrepôts de douane et les services d'exonération de droits.

Nous demandons au ministre des Finances d'éliminer le paiement à l'avance de la TPS sur les biens qui entrent au Canada mais qui seront éventuellement exportés de nouveau. Ces biens réexportés ne sont pas assujettis à la TPS, bien sûr, et l'élimination de la nécessité de payer et de se faire rembourser la taxe pourrait à la fois rendre le Canada plus attirant comme emplacement pour une entreprise de distribution et réduire les coûts de traitement interne pour le gouvernement. Le programme actuel est né de bonnes intentions, mais il est très contraignant et décourage l'établissement au Canada d'entreprises comme les centres de traitement des commandes par Internet et les centres de distribution.

Les lois fédérales actuelles ne permettent pas la vente de produits hors taxe aux arrivées au Canada. La création de zones hors taxe à l'arrivée, avant l'inspection frontalière à l'entrée, offrirait un meilleur service aux consommateurs mais, plus encore, rapatrierait les ventes hors taxe au Canada. Cette mesure pourrait créer 100 emplois directs au Canada, en plus des emplois indirects. Le gouvernement et les administrations aéroportuaires profiteraient de cette nouvelle source de revenu qui sont autrement cédés à nos concurrents étrangers ou perdus complètement.

• 1625

Des consultations préliminaires ont été menées auprès des intervenants de l'industrie et des gouvernements provinciaux, qui n'ont pas soulevé d'objection à cette proposition. La zone hors taxe à l'arrivée est conforme à la politique aéroportuaire nationale du gouvernement fédéral, qui encourage les aéroports à devenir autosuffisants et à demeurer viables à long terme.

À l'aéroport, nous sommes fiers des investissements que nous avons faits dans notre nouvel aérogare, nos pistes et dans l'entretien des installations existantes. Mais les installations aéroportuaires modernes doivent être assorties d'un accès routier efficace. L'accès à l'aéroport dans la région est actuellement menacé par la congestion urbaine.

L'Administration de l'Aéroport international de Vancouver appuie les efforts du Greater Vancouver Gateway Council visant à mettre sur pied un programme national d'infrastructure de transport. Ce programme doit être relié à des partenariats d'investissement provincial, local et privé, comme cela se voit aux États-Unis, afin que le capital nécessaire puisse être regroupé et concentré dans un effort national de modernisation des infrastructures de transport canadiennes.

Et enfin, au sujet de la taxe d'accise fédérale sur les carburants d'aéronef, les aéroports veulent un environnement concurrentiel. Nous sommes en concurrence avec Seattle, Portland, Los Angeles et San Francisco. Pourtant, l'une des grandes différences entre nous et nos concurrents de la côte Ouest, c'est le prix sensiblement plus élevé des carburants, chez nous. Cela est presque entièrement attribuable aux taxes plus élevées sur les carburants, au Canada. L'importance de notre taxe sur les carburants incite nos clients à se tourner vers les services des aéroports américains, plutôt que vers les portes d'entrée canadiennes.

Bien que les transporteurs internationaux n'aient pas à payer de taxes fédérales américaines sur le carburant, quand ils sont au Canada les frais nationaux sont d'à peine 1,5c. le litre. Au Canada, nos transporteurs paient 4c. le litre en taxe d'accise fédérale pour les vols nationaux. En 1998, les lignes aériennes ont versé un total de 75 millions de dollars en taxes fédérales sur le carburant, plus 160 millions de dollars en taxes provinciales sur le carburant. C'est un fardeau fiscal inutile qui a contribué aux coûts sensiblement plus élevés pour les lignes aériennes canadiennes, et au problème financier de celles-ci, si on les compare aux transporteurs américains.

La mission de l'Administration de l'Aéroport international de Vancouver est de servir la collectivité en construisant d'excellents aéroports pour le XXIe siècle. Nous voulons défendre notre région en faisant de l'aéroport de Vancouver une source de fierté locale et un moteur économique clé. Dans ce but, nous devons améliorer notre compétitivité par les moyens dont je viens de vous parler: une restructuration des loyers, une réforme des taxes sur le carburant, la capacité de produire de nouvelles sources de revenu avec des ventes hors taxe aux arrivées, la capacité de concrétiser le potentiel des services de distribution en zones franches et la création de meilleures correspondances dans le cadre d'un programme d'infrastructure national de transport.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur Gugliotta.

Nous écouterons maintenant M. John Grace, du département de génie chimique et des ressources biologiques de l'Université de la Colombie-Britannique.

Bienvenue.

M. John Grace (Département de génie chimique et des ressources biologiques, Université de la Colombie-Britannique): Merci beaucoup. J'apprécie d'avoir l'occasion, madame la présidente, de m'adresser au comité. Je serai bref: mon exposé est aussi très court.

Je suis ici bien sûr à titre de membre du corps enseignant de l'université, mais aussi à titre de membre du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Je fais partie de ce conseil depuis cinq ans, et je suis aussi président du comité des bourses d'études et de recherche du CRSNG. C'est en partie à ce titre que je comparais aujourd'hui.

Vous, du gouvernement fédéral, avez beaucoup fait au cours des deux dernières années pour soutenir la recherche universitaire, et nous espérons que vous continuerez. J'aimerais parler brièvement des façons dont vous aidez la recherche.

D'abord, c'est une aide pour nos plus brillants et nos meilleurs jeunes étudiants, qui sont en fait l'avenir du pays. Si nous n'avons pas un enseignement de qualité supérieure au Canada, nous ne pourrons être en concurrence avec les autres pays, dans l'avenir. La recherche est donc vitale.

On a souvent tendance à négliger l'importance des étudiants diplômés pour l'avenir du pays. Les étudiants diplômés sont souvent oubliés. Ce sont les plus brillants, ceux qui travaillent le plus, et qui décrocheront un jour des maîtrises ou des doctorats. Sans eux, nous n'aurions pas autant de lancements de nouvelles entreprises ni autant de percées canadiennes, et la réputation de notre pays ne serait pas ce qu'elle est depuis quelques années.

J'aimerais beaucoup signaler le fait que nous avons un niveau d'enseignement exceptionnel pour les diplômés du pays, mais qu'il a souffert au cours des récentes années en raison de divers facteurs: l'endettement des étudiants, les compressions dans les programmes universitaires et, certainement, les augmentations des frais de scolarité.

• 1630

Au CRSNG, nous nous efforçons vraiment d'augmenter leur participation, en particulier celle des étudiantes. Nous avons mis sur pied un programme de postes universitaires pour les femmes, afin qu'elles puissent jouer le rôle de modèles et de mentors. C'est un tout petit programme, mais il a son incidence, et nous espérons faire davantage.

Nous espérons en particulier pouvoir attirer davantage de membres des communautés des Premières nations et de la communauté inuite au sein de nos universités en général, mais aussi dans le secteur des sciences et du génie, que soutient le CRSNG. Actuellement, leur nombre est extrêmement faible. Nous avons besoin de les former pour qu'ils reviennent dans leurs collectivités. Nous voulons aussi davantage de personnes handicapées formées au deuxième cycle, afin qu'elles puissent contribuer pleinement à la société. Nous avons besoin d'eux, nous avons besoin de modèles divers dans notre société.

Le CRSNG s'occupe donc beaucoup d'enseignement au deuxième cycle. Il s'intéresse aussi à la recherche, à la recherche fondamentale et appliquée, et à l'innovation, et c'est de ce sujet que je voudrais maintenant parler.

Je suis moi-même membre de la faculté de génie chimique, comme l'a dit. L'an dernier, par exemple, j'avais environ de 0,9 à 1 million de dollars en subventions de recherche. Seulement 10 p. 100 environ de cette somme provenaient du CRSNG; le reste venait de trois autres sources, des sources privées. Environ un tiers venait du Japon, de la Mitsubishi Chemical Corporation; un tiers, de Syncrude, une grande entreprise albertaine qui a de graves problèmes que nous contribuerons à régler; et environ 20 p. 100, d'ABB, une entreprise américaine et européenne de génie de la combustion.

Le CRSNG, comme je le disais, a fourni environ 10 p. 100, mais la part du CRSNG est extrêmement importante, puisqu'elle sert de catalyseur. Elle permet le lancement des projets qui une fois en marche, nous permettent d'avancer et d'acquérir la réputation nécessaire au soutien du groupe. Notre groupe compte en ce moment environ 30 personnes, et nous avons récemment créé une société dérivée qui, nous l'espérons, fournira l'hydrogène pour un processus très innovateur de mise au point de piles à combustible, dans la région de Vancouver. Comme je l'ai déjà dit, le rôle du CRSNG est petit, mais tout à fait crucial.

Je n'ai presque plus de temps, mais j'aimerais revenir sur le rôle de catalyseur du CRSNG. Il soutient des gens, il soutient l'innovation, il soutient les découvertes. C'est l'avenir de notre pays, et nous espérons vivement que vous continuerez à nous offrir votre appui dans l'avenir.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, monsieur Grace.

Écoutons maintenant M. Dan Gray, conseiller et directeur du Northern Rockies Regional District, pour la ville de Nelson. Bienvenue.

M. Dan Gray (conseiller/directeur, Northern Rockies Regional District, ville de Fort Nelson): Merci beaucoup. Il s'agit en fait de la ville de Fort Nelson.

Madame la présidente, honorables membres du comité, merci de donner l'occasion de comparaître devant le comité permanent, aujourd'hui.

Fort Nelson, dans le nord des Rocheuses, en Colombie-Britannique, exhorte le gouvernement fédéral à s'engager à mettre sur pied un programme de financement des infrastructures nationales à long terme, en partenariat avec les provinces, les territoires et les gouvernements locaux.

Nous appuyons le programme d'infrastructure pour la qualité de vie proposé par la Fédération canadienne des municipalités, visant le renouvellement des infrastructures municipales, et incitons le Comité permanent des finances à prendre au sérieux cette proposition dans ses délibérations.

Fort Nelson et le Northern Rockies Regional District sont situés dans le nord-est de la Colombie-Britannique, à 250 milles au nord de leur plus proche voisin. Nous avons une population d'environ 6 500 personnes, sur un territoire plus grand que celui de la Suisse.

Notre collectivité et notre région sont toujours aux prises avec les coûts associés à la construction et à l'entretien d'un réseau d'infrastructure de base, parce que nous avons des besoins considérables et des sources de financement limitées. Notre situation ne permet pas de citer des chiffres aussi élevés que ceux de Vancouver ou de Kelowna, par exemple, mais elle est certainement tout aussi grave.

À cause de notre isolement géographique et de notre petite population, nous ne pouvons demander à d'autres collectivités de nous aider ou de partager nos dépenses. Notre influence politique est minime lorsqu'il s'agit d'obtenir des subventions. Il y a moins de personnes, et par conséquent un bassin plus petit pour payer les solutions à nos besoins d'infrastructures. En outre, le coût de ces infrastructures est plus élevé à cause de l'emplacement, de la petite taille des projets, de la faible concurrence et des coûts de mise en place des chantiers.

Au cours des dernières années, nous avons vu des augmentations importantes des taxes foncières et de la dette nette, sans pourtant que notre approvisionnement en eau potable soit garanti. Des travaux de restauration importants de nos services de traitement des eaux usées sont nécessaires, puisque notre effluent ne répond pas aux normes provinciales et que le mauvais état du système signifie qu'on contourne l'usine de traitement des eaux usées lors de pluies importantes et qu'il faut faire des émissions d'urgence dans la rivière pour éviter que les eaux usées ne refoulent dans les sous-sols.

• 1635

La dernière fois qu'une telle situation s'est produite, la ville n'a pu réagir suffisamment rapidement. Plus de 50 résidences ont subi des dommages, et une grande quantité d'eaux usées non traitées ont été libérées dans la rivière. Les travaux d'amélioration coûteront 1,4 million de dollars. Notre réseau d'aqueduc a été installé dans les années 70, au moyen de tuyaux de fonte ductile. La chaleur du sol a été suffisante pour détruire ce réseau en moins de 20 ans.

Il y a dix ans, nous avons commencé notre programme de remplacement des conduites principales, mais en 1999 la moitié du réseau est encore en fonte ductile. Les problèmes sont exacerbés par le cycle annuel de gel et de dégel, et chaque année nous devons consacrer une part supplémentaire importante de notre budget à la réparation des tuyaux de fonte ductile endommagés.

Notre installation de traitement des eaux a été construite il y a trois ans, en réaction à la découverte du parasite lambliase, qui cause la giardiase, dans notre aqueduc. La giardiase est extrêmement dangereuse pour les enfants.

Les installations de traitement des eaux n'ont pu être construites que grâce à une subvention provinciale de 50 p. 100 pour les infrastructures, ce qui a tout de même causé une hausse des taxes foncières, de l'endettement et des frais d'utilisation. En revanche, la ville a pu offrir des services d'approvisionnement en eau potable aux réserves des Premières nations de Fort Nelson et à d'autres résidents du secteur rural.

Nous ne finançons qu'au minimum les programmes de rénovation et d'asphaltage des rues, de construction de trottoirs, de revitalisation du centre-ville et d'amélioration des parcs et boulevards. Ils restent sur notre planche à dessin, mais sont toujours une priorité inférieure à celle des services d'eau et d'égout et d'entretien des infrastructures routières.

C'est donc dans ces domaines que nous avons le plus gros déficit d'investissement dans les infrastructures. Les projets d'efficience énergétique, de protection des terres patrimoniales ou fragiles, de transport en commun, de logements à prix modique, de services de santé mentale et bien d'autres ne figurent même pas sur notre liste de priorités.

Au cours des cinq dernières années, les prélèvements fiscaux municipaux ont augmenté de plus de 50 p. 100, sans augmentation correspondante de la population. Il y a donc eu une augmentation des dépenses d'infrastructure pour les rues, les routes, et les services d'aqueduc et d'égout.

Les taxes sur la longueur de face, utilisées pour financer les paiements de débentures, sont passées de 2,36 $ le pied en 1993 à 4,86 $ le pied en 1999. Notre district régional est tout aussi touché. Ses coûts d'enlèvement des déchets solides ont augmenté de 1 000 p. 100 pendant la même période, à cause de nouvelles normes environnementales censées convenir à tous. Le budget est monté en flèche, passant de 90 000 $ en 1993 à plus de 900 000 $ en 1998 et 1999.

À cause du délestage fédéral, le district régional et ses contribuables ont assumé la responsabilité de l'exploitation de l'Aéroport de Fort Nelson en 1999, ainsi qu'un déficit d'exploitation annuel de 350 000 $.

Nous ne pouvions permettre la fermeture de l'Aéroport de Fort Nelson. Il est absolument nécessaire de le garder ouvert et en bon état. Sans aéroport, notre collectivité et notre région ne pourraient attirer une croissance commerciale et industrielle, ni soutenir l'économie actuelle. Notre viabilité économique aurait été déstabilisée à très long terme.

Mais l'aéroport, c'est aussi 4,4 millions de dollars en dépenses d'immobilisations à payer, dont certaines directement attribuables à la grave négligence de ses infrastructures et de son matériel à l'époque où Transports Canada l'administrait.

Le programme d'aide aux immobilisations aéroportuaires existe toujours pour les projets relatifs au transport aérien, mais il y a une grande demande, sans financement prioritaire, pour les projets relatifs aux services au sol.

Si l'on veut mettre sur pied un programme d'infrastructure rudimentaire pour Fort Nelson et ses environs, pour les cinq prochaines années, cela représenterait une augmentation de 90 p. 100 des taxes municipales.

Comme d'autres, notre municipalité a désespérément besoin de financement provenant d'un programme d'infrastructure nationale, pour offrir des services de base. La dispersion du pouvoir dans le cadre des principes du fédéralisme est essentielle à la structure du Canada, et nous considérons que ce financement est une façon responsable d'investir les recettes gouvernementales, un juste et stratégique retour des choses pour les régions et les citoyens qui ont si généreusement consenti à verser ces sommes au gouvernement, pour commencer.

La contribution fiscale actuelle de la Colombie-Britannique au gouvernement fédéral est d'environ 20 p. 100 supérieure à ce qu'elle reçoit en services, soit une contribution de 5 milliards de dollars par année, ou 4,5 p. 100 du produit intérieur brut.

Il est clair que les Canadiens s'attendent à avoir des normes nationales pour les infrastructures, comme pour les autres services. Il est clair aussi que ces normes ne sont pas uniformes, comme certains citoyens le croient, et ne le seront jamais, à moins que les gouvernements fédéral, provinciaux et locaux ne se penchent sur le problème.

• 1640

Nous exhortons encore une fois le comité permanent à étudier sérieusement la recommandation visant la création d'un programme d'infrastructure pour la qualité de vie à long terme, selon la proposition de la Fédération canadienne des municipalités.

Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci beaucoup, monsieur Gray.

Il nous reste encore un témoin qui a un exposé à nous présenter, mais son temps est limité, et il se joindra à nous à 17 heures. D'ici là, j'invite les membres du comité à poser des questions aux témoins.

Monsieur Cullen, voulez-vous commencer?

M. Roy Cullen: Merci, madame la présidente.

Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui, et pour leurs mémoires et leurs exposés.

Ma première question s'adresse à l'Administration de l'Aéroport international de Vancouver, M. Gugliotta.

Ma circonscription est située près de l'aéroport Pearson. En fait, je travaille en étroite collaboration avec eux sur cette question d'une zone, et je suis au courant du travail que fait le Conseil des aéroports du Canada à cet égard. Ce que nous cherchons à obtenir, plutôt qu'une zone de libre-échange, c'est une zone franche industrielle où, si j'ai bien compris votre proposition, l'accent est mis davantage sur la valeur ajoutée que sur un modèle de distribution. Est-ce bien ce que vous proposez, ou est-ce que vous songez également à la transformation à forte valeur ajoutée?

M. Tony Gugliotta: Nous sommes en train d'étudier le même concept, soit un centre de distribution qui fait également de la transformation à forte valeur ajoutée pour les marchandises qui passent par la zone franche pour être distribuées dans d'autres régions du pays ou exportées vers les États-Unis.

M. Roy Cullen: Très bien.

J'ai rencontré le ministre du Revenu à l'époque, Harb Dhaliwal—nous avons maintenant un nouveau ministre du Revenu—pour parler de ce concept. L'une des choses dont on entend constamment parler, certainement de la part de Revenu Canada, avec une certaine fierté, c'est ce Programme de report des droits. Je leur dis constamment qu'il s'agit là d'un excellent programme mais qu'il n'est pas tout à fait approprié, car, comme vous l'avez souligné, nous devons faire concurrence à certaines zones américaines. Il faut comprendre cependant qu'il y a une certaine réticence à aller dans cette direction à cause du Programme de report des droits qui a été lancé à grands renforts de publicité récemment.

L'une des questions que vous avez abordées, une question d'ailleurs qui était très claire lorsque nous avons fait une analyse comparative—et j'ai appuyé une étude de faisabilité et une étude préliminaire—lorsque nous avons examiné la question de la TPS... il semble qu'on pourrait prendre des mesures administratives, rationaliser et faire toutes sortes de choses, mais la TPS semble être une question cruciale. Est-ce ainsi que vous voyez les choses également?

M. Tony Gugliotta: Oui, nous estimons qu'il s'agit là tout simplement d'un autre obstacle qui fait en sorte qu'il est encore plus difficile d'intéresser les parties à mettre sur pied des centres de distribution.

Nous comprenons la raison pour laquelle il est justifié de prépayer et pour laquelle vous avez besoin d'une exemption, mais étant donné que l'on met l'accent sur le centre de distribution, nous croyons qu'il pourrait y avoir un autre processus pour faire en sorte que cela soit un peu plus praticable.

M. Roy Cullen: Très bien.

Vous pouvez comprendre que le ministère des Finances décroche en quelque sorte lorsqu'on parle de la TPS, mais ils examinent cet aspect.

S'il y avait des zones franches, je sais qu'à Toronto, où je suis, à l'aéroport Pearson, cela stimulerait énormément l'économie. En fait, nous avons des entreprises qui vont à Buffalo, et il y en a sans doute qui vont à Blaine et Bellingham et un peu partout.

M. Tony Gugliotta: Oui, et c'est pour cette raison que nous avons adopté cette position. Cela n'enlèverait rien au secteur de la fabrication au Canada. En fait, nous mettons l'accent sur la distribution et sur la valeur ajoutée qui se fait en fait au Mexique et aux États-Unis, non pas au Canada. C'est une façon pour nous d'essayer d'attirer une partie de ces activités au Canada.

Nous avons un avantage géographique naturel pour ce genre d'activités, particulièrement à Vancouver, étant donné que nous sommes plus près de l'Asie, mais nous n'avons pu profiter de cet avantage géographique relativement à la zone franche. Nous aimerions donc pouvoir le faire.

M. Roy Cullen: Très bien. Eh bien, vous avez un adepte ici, et nous verrons comment nous pouvons faire avancer ce dossier.

Monsieur Barrett, dans votre exposé vous nous avez parlé plutôt de l'échelon macroéconomique. Vous n'avez pas vraiment eu le temps d'entrer dans certains détails, mais en Ontario... et je conviens que l'économie ontarienne est assez forte et dynamique, tandis qu'en Colombie-Britannique ce n'est pas le cas, malheureusement. On nous dit qu'il y a une pénurie de gens de métier ayant les bonnes compétences, qu'il est nécessaire d'offrir de la formation, de donner un élan important dans ce secteur. Je ne vous ai pas entendu dire cela. Cela ne pose-t-il pas un problème en Colombie-Britannique?

M. Joe Barrett: Nous avons constaté une diminution réelle du nombre de gens qui participent aux programmes d'apprentissage, ce qui est attribuable en partie au fait que les métiers ont vraiment diminué. Notre part du marché—je parle du secteur syndiqué de l'industrie de la construction—est passée d'environ 80 p. 100 à environ 40 p. 100. C'est difficile, selon le secteur de construction, mais dans le secteur de la construction industrielle...

• 1645

De façon générale, ce sont les syndicats qui ont été la principale source d'apprentis. Nous nous assurons de ne pas accepter un apprenti à moins qu'il n'ait fait ses quatre années complètes d'apprentissage. Souvent, les entreprises non syndiquées qui embauchent librement prennent des apprentis simplement au niveau permis par le conseil de l'apprentissage, ou en prennent même deux ou trois supplémentaires.

Ici à Vancouver, nous avons vu des chantiers de construction où des apprentis de troisième année surveillaient des apprentis de première année. Souvent, ces apprentis ne suivront pas le programme au complet. Essentiellement, on les utilise comme main-d'oeuvre bon marché. Le taux de salaire des apprentis est beaucoup moins élevé que celui d'un compagnon.

M. Roy Cullen: Je ne voulais pas vraiment parler de politique syndicale, mais dans le contexte de l'infrastructure nationale j'ai même entendu dire que si nous mettions sur pied un autre programme d'infrastructure, on craint qu'il n'y ait une certaine pénurie de main-d'oeuvre spécialisée. Nous avons besoin d'une main-d'oeuvre avec certains types de compétences, et il y a aussi la question de quantité. Est-ce un problème?

M. Joe Barrett: C'est un peu comme l'oeuf et la poule. S'il n'y a pas de travail, alors on n'a pas la possibilité de recevoir une formation.

Le pays sort à peine d'une récession. Il est vrai que l'économie se porte peut-être un peu mieux en Ontario en ce moment-ci, mais la raison pour laquelle je me suis lancé dans un discours plus politique, c'est que ce n'est pas quelque chose qui se passe seulement en Colombie-Britannique, en Ontario, en Saskatchewan et en Alberta; cela se passe partout sur le continent. Il faut voir les choses dans leur contexte historique, mais il ne fait aucun doute que si le gouvernement continue tout simplement à privatiser et à ne plus s'occuper de l'infrastructure...

Ce que vous avez dit au sujet de l'aéroport était très intéressant. L'expérience de Fort Nelson se répète partout dans la province, et je pense dans tout le pays. Si nous ne réinvestissons pas dans une infrastructure, ce n'est pas seulement d'avantages matériels dont nous parlons, mais de toute une série d'investissements sociaux qui les accompagnent.

M. Roy Cullen: Très bien. Vous n'avez aucun lien de parenté avec Dave Barrett?

Merci.

J'aimerais maintenant passer à M. Lewis et M. Weir. Votre proposition semble être très intéressante. Je suis un député de l'Ontario, mais j'ai vécu ici pendant 12 ans, de sorte que je comprends un peu ce qui se passe ici.

Dans le Nord de l'Ontario, avec le prix des produits de base qui est à la baisse, certaines mines ont dû fermer. Elles ont un peu repris leurs activités récemment, mais dans d'autres régions du Canada où il y a une importante migration de sortie, on est beaucoup inquiet, car la situation est quelque peu semblable à celle dont vous avez fait l'expérience à Revelstoke à l'époque.

J'ai regardé rapidement votre modèle à la Revelstoke Community Forest Corporation. C'est une façon ingénieuse pour vous d'aller chercher à nouveau une partie de ces ressources forestières, mais je suppose que vous avez dû entre autres obtenir l'appui du gouvernement provincial.

Pouvez-vous prendre ce modèle que vous avez là-bas et me dire comment il pourrait aider les gens dans le Nord de l'Ontario, ou dans des régions de la Nouvelle-Écosse, ou encore ailleurs au Canada, qui se retrouvent avec le même dilemme, disons, que celui des gens de Revelstoke, qui ont réussi à renverser la situation?

M. Doug Weir: Merci d'avoir posé la question. J'aimerais aborder deux aspects.

D'abord, la province de la Colombie-Britannique n'a pas beaucoup contribué à ce processus, sauf pour refuser la cession d'un permis à une société qui avait transformé le bois d'oeuvre récolté sur ses terres dans une autre communauté. Nous avons pu intervenir, parce qu'on ne répondait pas aux besoins sociaux et économiques de notre communauté, et nous avons pu créer un partenariat avec des fabricants de bois d'oeuvre locaux. Chacun des partenaires a investi jusqu'à concurrence d'un million de dollars. C'est-à-dire que la ville de Revelstoke a investi un million de dollars et nos partenaires de l'industrie ont fait de même. Ensemble, nous avons emprunté deux millions de dollars et en avons investi quatre. Nous nous sommes ainsi assurés un rôle clé à la table de négociation pour gérer la ressource.

Heureusement, nous retirons un revenu net de 400 000 $ par an de cet investissement. Ces profits servent à d'autres investissements communautaires et nous permettent d'éviter que n'augmente le fardeau fiscal des résidants locaux pour la prestation de services de base.

• 1650

L'autre point que j'aimerais aborder, c'est que pendant les quatre dernières années on a assisté à la fermeture d'une mine de cuivre située juste au nord de chez nous, et qui faisait travailler 150 personnes. Parce que nous avions la capacité, les organisations et les programmes voulus dans notre communauté pour faire face à ce genre de situation, tout s'est passé sans anicroche. Certains ont déménagé pour s'installer dans d'autres localités minières, certains ont suivi des cours dans un autre domaine et d'autres ont lancé de petites entreprises. Je peux vous dire que cette fermeture n'a pour ainsi dire pas laissé de trace, parce que nous avons pu y faire face localement.

M. Mike Lewis: Prenons le cas du nord-ouest de l'Ontario, si vous le voulez bien; j'ai travaillé dans la région de Kenora à l'usine de Trus Joist MacMillan dont il est question et relativement aux permis de gestion des forêts qu'attribue le gouvernement provincial.

L'aspect critique en ce qui concerne Revelstoke et tout ce qui a trait à l'exploitation des ressources naturelles, c'est le type de liens qui existent entre la communauté locale, les ressources et les utilisateurs de celles-ci. La propriété locale devient donc un facteur crucial. Face à ce qu'elle a vécu, Revelstoke était suffisamment organisée et disposait d'une assise suffisante dans sa propre communauté.

À l'étape de l'établissement de sa capacité, elle comptait 500 personnes dans son processus de définition d'une vision. Ce n'était pas qu'un processus bureaucratique. C'était un projet à grande échelle pour une petite communauté qui cherchait à faire participer les citoyens à l'établissement de priorités dans le cadre d'une vision communautaire globale. C'est pourquoi nous avons pu assurer cette mobilisation. C'est grâce à ces liens à l'étape de l'établissement de la capacité, grâce à leur capacité d'amalgamer des capitaux privés, publics et communautaires, et à l'appui de la province, après beaucoup de pressions politiques, qu'on a en fait obtenu le droit d'agir.

Cela dit, dans le Nord-Ouest de l'Ontario, surtout pour les communautés des Premières nations qui y vivent, c'est une question de politique provinciale: on parle de l'article 77, qui consiste à intéresser les Premières nations à participer, étant donné qu'elles représentent la majorité dans un grand nombre des régions d'exploitation forestière, et la grande question qui se pose là-bas est de savoir si l'on a la capacité de saisir les occasions qui s'offrent.

Il s'agit de voir ce qui vient en premier. Il faut avoir la capacité avant de pouvoir saisir les occasions. Si on ne peut pas saisir ces occasions qui se présentent, comment peut-on réinvestir localement pour faire face aux problèmes endémiques du déclin des communautés?

M. Roy Cullen: Vous avez cité des exemples du secteur forestier, et il s'agit là d'une ressource renouvelable. Sans vouloir minimiser l'importance de ce que vous avez réalisé, je dirais que dans certaines de ces communautés du Nord de l'Ontario, c'est une mine qui vient tout juste de fermer, et elle ne sera probablement sans doute jamais ouverte à nouveau. À Revelstoke, vous aviez déjà lancé quelque chose quand votre mine a connu des difficultés; vous aviez donc une base à partir de laquelle travailler. Mais que faire de ces communautés où la mine vient tout juste de fermer et où il n'y a rien d'autre?

M. Mike Lewis: C'est plus difficile. Ce n'est pas une ressource renouvelable. C'est tout ce qu'a la ville; c'est naturellement plus difficile. En ce qui a trait à la résistance de la communauté et aux facteurs qui lient ses membres ensemble et quant à savoir pourquoi certaines collectivités rurales survivent dans certains contextes, alors que, compte tenu de leur emplacement ou des ressources dont elles disposent, tout porterait à croire qu'elles devraient s'éteindre, et pourquoi d'autres disparaissent effectivement, la question demeure sans réponse. Il y a diverses variables qui interviennent. C'est lié à tout un ensemble de facteurs, que nous appelons la résistance communautaire. Le type de leadership, les organisations locales dont on dispose, les liens entre ces organisations qui font qu'elles collaborent à une stratégie et à une vision communes, tous ces facteurs jouent un grand rôle dans la survie ou la disparition de ces communautés rurales. Des recherches aux États-Unis et au Canada l'ont bien montré.

Cela dit, dans certains cas s'il n'y a qu'une seule communauté exploitant une mine et qu'elle est éloignée, il est difficile d'imaginer que ce genre d'économie puisse survivre quand un gisement minier est épuisé.

M. Roy Cullen: Merci.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci.

M. Fred Muzin, de la Hospital Employees Union, vient de se joindre à nous. Je vais donc interrompre la période de questions et lui demander de faire son exposé. Vous avez cinq minutes. Nous reprendrons ensuite les questions. Bienvenue.

M. Fred Muzin (président, Hospital Employees Union): Merci beaucoup.

Je m'appelle Fred Muzin, et je suis le président de la Hospital Employees Union. Notre syndicat représente plus de 44 000 travailleurs de la santé de première ligne qui travaillent dans des hôpitaux et établissements de soins et pour des organismes de services sociaux et de santé communautaire dans toute la Colombie-Britannique.

• 1655

Je me réjouis d'avoir l'occasion de vous communiquer notre point de vue sur les priorités du budget fédéral. Les politiciens fédéraux ont récemment reçu bien des suggestions sur la façon d'utiliser l'excédent budgétaire, qui ne cesse de croître. Faudrait-il s'en servir pour accorder d'importants allégements fiscaux ou pour investir davantage dans notre infrastructure sociale et économique?

La proposition qu'a faite le premier ministre, M. Klein, la semaine dernière va dans le sens de la privatisation des soins de santé publics en Alberta et porte le débat à l'avant-scène tout en soulevant de graves questions sur la crédibilité de ce gouvernement sur le plan moral compte tenu de la façon dont il défend l'assurance-maladie. M. Klein, ainsi que M. Harris, premier ministre de l'Ontario, ont accusé le premier ministre du Canada d'hypocrisie pour avoir d'une part critiqué les plans de privatisation de l'Alberta tout en retirant du système de santé des milliards de dollars.

La perte de crédibilité du premier ministre du Canada ne se fait pas sentir que du côté des politiciens provinciaux; elle est également ressentie par les simples citoyens, qui sont de plus en plus touchés par la hausse des coûts des soins de santé, lesquels devraient être couverts par les régimes d'assurance-maladie financés avec les deniers des contribuables.

En août, Statistique Canada a signalé une hausse très marquée des dépenses directes des familles canadiennes en soins de santé—15 p. 100 de plus en 1997 que l'année d'avant, et la hausse a été encore plus forte pour les familles à faible revenu. Il est bien clair qu'il faut de toute urgence que dans le prochain budget fédéral on prenne des mesures énergiques pour contrer le financement insuffisant de l'assurance-maladie, laquelle s'achemine de plus en plus vers la privatisation.

Malheureusement, l'augmentation des paiements de transfert annoncée dans le budget de 1999 a à peine permis de remédier aux torts causés par les compressions qui avaient été imposées à ces paiements de transfert. Au train où vont les choses, les paiements de transfert seront de 15 milliards de dollars d'ici l'an 2002-2003, soit 7 milliards de moins qu'en 1995-1996, si l'on tient compte de l'inflation et de la croissance démographique.

Nous demandons au gouvernement fédéral de rétablir les paiements de transfert aux provinces au niveau de 1994-1995 et d'assurer un taux de contribution fédérale de 25 p. 100 du total des dépenses en soins de santé, ce taux n'étant actuellement que de 10 p. 100. On se rappellera qu'à la création du régime d'assurance-maladie les coûts étaient partagés à 50-50. Nous en sommes maintenant bien loin.

Outre le rétablissement du financement, il faut qu'un programme législatif modernise et élargisse le régime d'assurance-maladie. De façon plus urgente encore, nous avons besoin d'une loi sur les soins à domicile et les soins communautaires qui repose sur des principes similaires à ceux qui régissent la Loi canadienne sur la santé et qui vise à tenir compte du fait qu'un nombre de plus en plus grand de services de soins de santé sont assurés hors des institutions et des cabinets de médecins.

Il nous faut également un régime national d'assurance- médicaments qui constituerait la première étape d'un plan d'intégration des médicaments d'ordonnance à titre de composante entièrement financée de notre régime public de soins de santé. Dans l'assurance-maladie, c'est le coût de ces médicaments qui augmente le plus rapidement.

Dans le budget de l'an prochain, il faut également compenser pour les investissements qu'on n'a pas faits dans le domaine social et qui ont une incidence sur la santé des Canadiens. Nous nous réjouissons de l'engagement qu'a pris le gouvernement dans le discours du Trône de s'attaquer à cette honte nationale qu'est la pauvreté chez les enfants au Canada; toutefois nous sommes très préoccupés par l'élargissement des mesures budgétaires de 1999 à des éléments comme la prestation fiscale pour enfants. Cela joue au détriment d'un grand nombre de familles pauvres, et ces prestations sont récupérées, dans la plupart des provinces, dans le cas des familles qui bénéficient de mesures de soutien du revenu.

Il y a des enfants pauvres parce qu'il y a des familles pauvres. Des mesures budgétaires doivent y remédier directement. Le gouvernement fédéral doit renouveler son engagement envers les enfants pauvres en faisant en sorte qu'aucun revenu familial ne tombe en deçà des 60 p. 100 du seuil de faible revenu de Statistique Canada, puis veiller ensuite à le hausser pour le porter à 75 p. 100 sur une période de cinq ans.

Notre syndicat appuie également les propositions du Congrès du travail du Canada qui visent à améliorer l'assurance-emploi en faisant en sorte que soient couverts 70 p. 100 des sans-emploi, qu'on augmente les niveaux de prestations pour les porter à 60 p. 100 des revenus hebdomadaires, qu'on supprime la formule du dénominateur et de l'intensité.

C'est de plus une question très sérieuse pour les femmes. Depuis 1996-1997, 26 000 femmes de moins, soit 10,7 p. 100 de moins, ont touché des prestations de chômage. On a en effet modifié le critère d'admissibilité et fait passer de 15 à 35 heures le seuil ouvrant droit à des prestations. C'est un problème bien réel, parce que ce sont les femmes qui ont le plus de responsabilités familiales—les soins de personnes âgées, les soins aux enfants. Pour les femmes de moins de 35 ans, on a enregistré une réduction de 16 p. 100 au titre de ces prestations.

Ce genre de politique est indéfendable, surtout quand on sait quel montant a été retiré de l'assurance-emploi. Il faut que les choses changent.

Il faut aussi que le gouvernement fédéral s'engage à assurer à l'échelle nationale des services de garde régis par des principes nationaux. Des spécialistes reconnaissent que des soins de garde de qualité améliorent de façon importante le développement des enfants et que c'est d'autant plus vrai quand ils sont offerts dans le cadre d'un programme d'accès universel plutôt que d'être destinés seulement aux enfants pauvres.

Nous demandons aussi instamment au gouvernement de veiller à ce qu'on corrige la situation honteuse qui existe en ce qui concerne l'itinérance. Libby Davies, députée de Vancouver-Est, propose dans un projet de loi dont le Parlement est saisi que 1 p. 100 des dépenses budgétaires servent à la construction de logements abordables. En tant que travailleurs du secteur des soins de santé, nos membres peuvent témoigner du fait que la crise actuelle en matière de logement réduit la durée de vie, étant donné la plus forte incidence de maladies et l'augmentation du nombre de malades chroniques. Le Canada doit tenir compte des déterminants sociaux de la santé si l'on veut avoir la moindre chance de préserver un régime d'assurance-maladie de qualité.

• 1700

Nous prions aussi le comité de résister à ceux qui réclament des allégements fiscaux généraux qui profiteraient dans une large mesure aux personnes à revenu élevé. Il est essentiel que le gouvernement maintienne son assiette fiscale et corrige et améliore les programmes sociaux. Nous appuyons plutôt la solution du contre- budget fédéral qui consisterait à accorder des crédits d'impôt remboursables, car on accorderait ainsi un allégement fiscal à ceux qui en ont vraiment besoin, qu'ils aient des impôts à verser ou non.

Enfin, je prie les membres du comité de demander fermement qu'on exclue la santé, l'éducation et les services sociaux des négociations de l'Organisation mondiale du commerce qui auront lieu à Seattle la semaine prochaine. Nous redoutons déjà vraiment que des efforts de privatisation ne donnent lieu à des incursions dans le domaine des soins de santé publics par des sociétés américaines qui se prévaudraient des règles du chapitre 11 de l'ALENA, et nous pouvons citer plusieurs exemples d'appels qui ont été interjetés en vertu de ce chapitre et qui ont entraîné la dégradation des normes environnementales et du droit qu'a le Canada de décider pour lui-même de ce qu'il veut faire en tant que pays. Les services de santé ne devraient donc pas être inclus, parce que nous y voyons une commercialisation de tout notre régime d'assurance-maladie.

Merci beaucoup.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Merci, monsieur Muzin.

Je vais donner la parole à M. Jones. Avez-vous des questions?

M. Jim Jones: Oui, j'en ai.

Je croyais que vous étiez le président de l'Association des hôpitaux, et vous n'avez pas abordé...

M. Fred Muzin: Je suis le président de la Hospital Employees Union.

M. Jim Jones: Très bien. De toute façon, ma question s'adresse d'abord et avant tout à Tony.

Je ne vois vraiment pas pourquoi il y aurait des boutiques hors taxes dans les aéroports canadiens. Qu'est-ce que cela signifie donc? Si j'arrivais des États-Unis, je pourrais m'arrêter à une boutique hors taxes et y acheter des biens à consommer?

M. Tony Gugliotta: C'est juste. Avant de passer par les services des douanes et de l'immigration du Canada il y aurait une boutique hors taxes où pourraient se rendre les passagers qui arrivent, et vous pourriez y acheter des produits hors taxes avant d'entrer au Canada. Ainsi, le voyageur canadien qui allait acheter ces articles hors taxes aux États-Unis ou en Asie, s'il savait qu'il peut les acheter au Canada avant de passer aux douanes, les achèterait au Canada plutôt qu'en Asie ou ailleurs.

En Asie, la plupart des pays ont des boutiques hors taxes pour les passagers qui arrivent. C'est très courant dans les aéroports du monde entier. S'il n'y en a pas au Canada, c'est qu'on craignait que les voyageurs qui arrivent n'y fassent des achats et n'achètent donc pas ces produits dans les magasins de vente au détail canadiens. Nous estimons pour notre part que les gens achèteraient chez nous des produits hors taxes que, sinon, ils se procureraient dans des aéroports américains ou asiatiques avant de revenir au Canada, si bien que nous perdons au profit d'autres aéroports des ventes qui pourraient être conclues au Canada.

M. Jim Jones: Très bien. Merci.

Monsieur Barrett, dans vos observations vous avez mentionné un taux d'imposition des sociétés de 27 p. 100, mais on nous dit que le taux d'imposition des sociétés au Canada est actuellement de 43 p. 100 comparativement à un taux de 39 p. 100 aux États-Unis. Je ne vois donc pas à quoi ces 27 p. 100 correspondent. Est-ce que vous parlez de l'ensemble des impôts qui sont perçus, et ce taux serait de 27 p. 100 pour les sociétés?

M. Joe Barrett: Vous savez, je ne suis pas économiste, mais s'il y a une chose que j'ai pu constater, c'est qu'il y a différents moyens de mesurer ces éléments dont on entend tout le temps parler—la productivité et les taux d'imposition des sociétés—et qu'il est possible que l'étude de KPMG mesure ces éléments autrement que l'ont fait les auteurs de l'étude que vous avez mentionnée.

M. Jim Jones: Le rapport Mintz.

M. Joe Barrett: Oui. Peut-être que c'est aux économistes de l'expliquer. Mais cette étude est un rapport annuel que KPMG publie pour montrer aux investisseurs étrangers qu'il est avantageux de venir au Canada, et les taux d'imposition des sociétés dont ils font état leur sont présentés comme étant les plus avantageux de toutes les démocraties occidentales.

M. Jim Jones: À l'approche du nouveau millénaire et surtout dans un contexte d'économie du savoir, les sociétés créent beaucoup d'emplois, mais elles vont s'établir là où le régime fiscal leur est favorable. Actuellement, de tous les pays du G-7, mise à part l'Italie, c'est le Canada qui perçoit le plus d'impôt. Les autres pays réduisent le fardeau fiscal des entreprises et des sociétés. Certains l'ont même récemment réduit jusqu'à 31 ou 33 p. 100. Aujourd'hui, surtout dans un contexte d'économie du savoir, l'argent n'a pas de conscience. On s'implante là où les investissements rapportent le plus.

• 1705

Si nous passons notre temps à financer davantage de programmes sociaux au lieu de dire que c'est finalement une responsabilité individuelle que de payer pour ces types de programmes, plutôt qu'une responsabilité des sociétés... qui créent vraiment les emplois? Est-ce que ce sont les sociétés et les entreprises ou est-ce que c'est la population?

Voyons voir ce qui se passe aux États-Unis. L'économie américaine tourne à plein régime. Là-bas, on en est à 4 p. 100; nous en sommes à 7,2 p. 100 ou à 8 p. 100. On dirait qu'on est peut-être conservateur en citant un taux de 7,2 p. 100; donc c'est probablement plutôt 8 p. 100. Pour avoir notre juste part de la croissance, nous devons avoir une structure fiscale qui ressemble davantage à celle des États-Unis pour inciter ces sociétés en expansion à investir ici, qu'elles soient du secteur manufacturier—et je pense ici à l'économie du savoir—ou que ce soit des sociétés qui ont des installations de programmation et de recherche.

M. Joe Barrett: C'est très intéressant de discuter de cela, parce que je pense que c'est la question la plus brûlante au pays. Jusqu'où est allé le Canada pour constituer un filet de sécurité sociale et jusqu'où sommes-nous en train de reculer quand on songe au point où nous en étions dans les années 70 et à celui où nous en sommes maintenant, si l'on se compare aux pays scandinaves et aux États-Unis? Quand on aborde cette question, c'est une véritable boîte de Pandore. On ne peut parler d'impôts sans parler de l'effet qu'ils ont sur la qualité et le niveau de vie.

Il convient de noter qu'aux États-Unis les heures de travail ont augmenté en moyenne de 247 heures par couple marié entre 1976 et 1989. Les salaires des cols blancs et des diplômés du postsecondaire n'ont pas augmenté de 1989 à 1996. Il y a moins d'emplois stables et les avantages sociaux sont en diminution. Oui, le taux de chômage y est beaucoup plus faible qu'au Canada, mais quels genres d'emplois y trouve-t-on?

Au milieu des années 90, le nombre de pauvres aux États-Unis avait augmenté par rapport à la fin des années 80. Quarante p. 100 des pauvres aux États-Unis déclaraient un revenu de moitié inférieur au seuil de pauvreté. J'aimerais me référer à nouveau aux études sur la richesse. Statistique Canada examinera la question de la richesse dans des études à venir.

Je pense que le but recherché en ce qui nous concerne, étant de gauche, était d'abaisser rapidement les taux d'intérêt afin d'accélérer la reprise économique. Jim Stafford, l'économiste des TCA, a émis l'idée que nous avions canalisé beaucoup d'argent dans cette structure d'investissement—si vous regardez la situation dans laquelle nous étions dans les années 70 et 80—et que cet argent n'était pas véritablement investi dans l'économie; ce n'est que de la monnaie de papier qui est constamment recyclée.

Par les temps qui courent, il est plus rentable pour un investisseur d'acheter des obligations et d'autres effets plutôt que d'investir dans le démarrage d'une usine, d'acheter tout l'équipement nécessaire, d'embaucher le personnel et de le former. Vous obtenez un rendement de 5,5 p. 100 sur ce genre d'investissement tandis que vous pouvez obtenir un rendement de 8 ou 9 p. 100 en investissant dans des effets. Je ne suis pas économiste. Il y a quelque chose qui cloche au Canada. Peut-être que le problème est trop gros pour que le Canada s'y attaque seul. Le FMI nous fixe des conditions: nous voulons que vous fassiez ceci ou cela, sinon vous ne pourrez plus emprunter.

Je n'ai pas besoin de vous le dire, tout le monde peut voir que la situation a empiré depuis les années 60 et 70 en ce qui concerne la répartition du revenu. Je pense que nous devons faire tout notre possible pour renverser la situation. Parmi les principaux moyens d'y arriver, notons le programme d'infrastructure, le programme de la qualité de la vie dont parlent les municipalités. Ce que votre gouvernement a fait au cours des premières années... ils sont essentiels pour redonner espoir à la population. C'est un moyen sûr pour amener les gens à se recycler.

• 1710

Je ne peux pas réellement vous parler des autres mesures fiscales que vous pouvez instaurer. Il est possible que dans le cas de l'autre institution, à savoir les REER, il faille la réexaminer. Cela coûte 15 milliards de dollars par année, et seulement 30 p. 100 des Canadiens en profitent. La plupart des Canadiens n'ont pas d'argent à y investir à la fin de l'année.

Je reviens sur ce que j'ai dit à la fin de mon exposé: pourquoi êtes-vous là? Vous n'y êtes pas uniquement pour transmettre une idéologie venue d'en haut. Notre but à tous est d'assurer le bon fonctionnement du pays, pour tout le monde. Lorsque nous prendrons notre retraite après 30 ou 40 ans, j'espère que nous pourrons dire que nous avons aidé les Canadiens ordinaires à vivre un peu mieux.

Oui, il s'agit d'un problème difficile. Il y a quelques années, lorsque nous parlions du PIB et qu'on le comparait à celui des États-Unis, nous appliquions constamment la règle de 10 p. 100. Toutefois, lorsque l'on compare le PIB du Canada à celui des États-Unis, une fois converti en dollars américains; il se situe plutôt à 6 ou 7 p. 100 du PIB américain, c'est donc dire que nous perdons du terrain. Il y a quelque chose qui ne va pas. Je n'ai pas les réponses, mais j'aime bien cette question... et lorsque nous parlons de M. Klein, un des exemples qu'il a mentionnés était la privatisation des soins hospitaliers.

Cet hôpital se trouve à Markham, c'est-à-dire dans la circonscription d'Elinor Caplan. Je connais assez bien le dossier. Il s'agit de l'Hôpital Shouldice, lequel existe depuis 40 ans et effectue environ 3 000 arthroplasties de la hanche chaque année. Ces opérations se font comme si vous alliez à un hôpital ordinaire; elles sont facturées au programme d'assurance-hospitalisation.

S'il envisage de fournir ce genre de services au lieu d'envoyer les malades aux États-Unis, je crois que c'est une bonne chose. Je ne crois pas qu'il parle d'accroître les frais. Il parle plutôt de permettre au secteur privé d'être propriétaire de centres hospitaliers. Qu'est-ce qu'il y a de mal là-dedans?

M. Fred Muzin: Il y a plusieurs arguments contre. Le premier, c'est que le secteur privé a pour but d'enregistrer un profit. Il s'agit de l'argent des contribuables. Il ne doit pas servir à enrichir le secteur privé. Il doit être investi dans le réseau public.

Si l'on envoie des patients aux États-Unis, c'est que le réseau public est sous-financé, en grande partie à cause des compressions fédérales. Toutes les études ont démontré que lorsqu'un réseau privé existe en parallèle, le réseau public en souffre. En fait, vous avez un réseau uniquement pour les riches.

M. Jim Jones: Aujourd'hui, je suis monté dans l'ascenseur dans cet hôtel au 36e étage, et deux femmes s'y trouvaient déjà. L'une était la mère de l'autre. Je leur ai demandé ce qu'elles faisaient au Canada, et l'une m'a dit qu'elle était ici pour y subir une chirurgie oculaire. D'où venait-elle? De Dallas, au Texas. Si elle était venue au Canada, c'est que cette chirurgie au laser coûte quatre fois plus cher aux États-Unis.

Nous avons donc quelque chose que nous pourrions commencer à exploiter, pas en tant que service exporté, mais probablement pour attirer des gens ici, pour soigner les gens ici, et en tirer un profit. Qu'est-ce qu'il y a de mal à cela?

M. Fred Muzin: Premièrement, cela suppose que nous avons une capacité excédentaire dans notre réseau de soins de santé. Nous devrions investir dans le réseau public et réduire les listes d'attente, pour nous assurer que les Canadiens reçoivent les soins de santé qu'ils méritent.

Aux États-Unis, 44 millions d'Américains ne bénéficient d'aucune protection en matière d'assurance-maladie, et comme l'assurance-maladie est liée à l'emploi, il est plus probable que ce chiffre soit d'environ 66 millions d'Américains. Le pays le plus riche du monde n'arrive pas à fournir des soins de santé adéquats à sa population. Cette personne est donc très chanceuse de pouvoir venir se faire soigner au Canada, mais des dizaines de millions d'Américains ne seront jamais admissibles à un régime d'assurance-maladie—même s'ils restent dans leur pays—peu importe combien de temps ils attendent. C'est un problème de fond.

Nous ne devrions pas nous en servir uniquement comme d'un outil de marketing. Il faut faire preuve de conscience sociale. Si nous voulons avoir une société civile, nous devons entre autres fournir des soins de santé adéquats—sans parler des normes environnementales, de l'enseignement public, des pensions publiques, etc.

Mais dès que vous ouvrez le champ... et déjà, 30 p. 100 de notre réseau de soins de santé est privatisé. On prône d'étendre la privatisation aux soins à domicile. Ce problème résulte en grande partie d'un sous-financement public. Surtout lorsqu'il s'agit des soins prolongés et à long terme et des services sociaux... les personnes âgées sont les moins en mesure de se défendre. On ne peut se réjouir qu'une personne de 80 ans s'occupe à la maison d'une autre personne de 90 ans sans compter sur les soins à domicile.

• 1715

Nous avons beaucoup de problèmes dans ce pays, et nous devons trouver des moyens innovateurs d'améliorer et d'élargir notre réseau de soins de santé—bien avant d'envisager de vendre nos services à des Américains qui auraient probablement les moyens de se faire soigner chez eux.

M. Jim Jones: Je crois que vous avez dit quelque chose de fondamental: nous devons trouver des solutions novatrices. Nous disposons de budgets limités. Au début des années 90, surtout en Ontario, la situation dans le réseau de santé publique était intolérable. Nous ne pouvions nous permettre de continuer dans la même direction. Nous devons trouver d'autres solutions pour répondre aux besoins de la population.

M. Fred Muzin: Je pense qu'il faut examiner le genre de soins dont il s'agit. Il y a beaucoup plus de soins communautaires, certainement de soins à domicile... il faut tenir compte des données démographiques, du vieillissement de la population. Les gens ne veulent pas être contraints de rester dans des hôpitaux ou des établissements de soins. Ils préféreraient nettement rester à la maison, mais il ne sert à rien d'envoyer les gens chez eux ou d'avoir des hôpitaux express si vous n'avez pas les systèmes de soutien en place.

On aurait beaucoup de difficulté à nous convaincre qu'en 1999 le pays ne peut pas se permettre des soins de santé. Nous sommes plus riches et mieux instruits que nous ne l'avons jamais été. C'est une question de choix budgétaires. Je pense que les Canadiens tiennent à l'assurance-maladie, pour de bonnes raisons.

Il faut améliorer notre système et il faut absolument le changer et le réformer. Il n'aurait jamais fallu que le gouvernement capitule devant le projet de loi C-91, la Loi sur les brevets pharmaceutiques. Si vous êtes à la recherche d'argent, c'est un secteur où vous auriez pu économiser de l'argent.

Il y a aussi, comme vous le dites, les déterminants sociaux de la santé. Si vous voulez contrôler les coûts des soins de santé, alors il faut éliminer les situations où 20 p. 100 des enfants au pays vivent dans la pauvreté, où vous avez des gens qui vivent dans des boîtes de carton dans les rues de Toronto ou qui meurent de froid dans les villes. Ce genre de situation ne permet tout simplement pas d'améliorer les soins de santé. Au bout du compte, les gens qui se trouvent dans ce genre de situation économique coûteront beaucoup plus à notre système et seront un fardeau pour notre système parce que nous ne les traitons pas comme des êtres humains.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie, monsieur Muzin.

Je vous remercie, monsieur Jones.

Je vais poser une brève question à M. Gray, puis je céderai la parole à Mme Leung, qui posera les dernières questions.

Vous avez présenté des arguments vraiment convaincants en ce qui concerne Fort Nelson et les avantages que le programme d'infrastructure présente pour Fort Nelson. Avez-vous réussi par le passé à mettre sur pied des projets dans le cadre des programmes d'infrastructure?

M. Dan Gray: Oui. C'est la façon dont la plupart de nos projets ont été financés par le passé, mais bien entendu, ces dernières années, ce financement a été considérablement réduit. À l'heure actuelle, nous sommes en train d'envisager des hausses importantes dans un secteur de taxation seulement, celui dont disposent les municipalités, c'est-à-dire les taxes foncières.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Est-ce que Fort Nelson arrivera à contribuer le tiers s'il s'agit du même modèle qui a été proposé les dernières fois?

M. Dan Gray: Sans aucun doute.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Sans aucun doute?

M. Dan Gray: Tout à fait.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Sans augmenter vos taxes de 90 p. 100?

M. Dan Gray: Nous n'aurons certainement pas à les augmenter de 90 p. 100. Il faudra bien entendu que les taxes augmentent pour ces genres de dépenses, mais il s'agira d'une augmentation beaucoup moins importante et sûrement pas aussi lourde. Mais il ne fait aucun doute que les citoyens de notre municipalité ne seront pas contents.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je vous remercie.

Madame Leung.

Mme Sophia Leung: Je vous remercie, madame la présidente. Je voulais simplement poser une question à M. Muzin. Comme notre gouvernement fait preuve de compassion et s'intéresse à la santé des Canadiens, nous avons attribué 11,5 milliards de dollars au chapitre des soins de santé sur cinq ans. Le saviez-vous?

M. Fred Muzin: Oui.

Mme Sophia Leung: Et nous sommes aussi bien entendu préoccupés par la pauvreté et les sans-abri. Nous avons chargé Claudette Bradshaw de s'en occuper. Elle s'est rendue dans les différentes régions du Canada pour examiner les problèmes. Elle vient de formuler des recommandations et a travaillé étroitement avec les groupes touchés pour élaborer un plan réalisable. Personnellement, je m'intéresse de très près au quartier est du centre-ville et je m'y suis rendue à plusieurs reprises. Je tiens à ce que vous sachiez que nous travaillons tous dans le même sens: c'est-à-dire à améliorer la qualité de vie de la population.

J'ai une question à poser à M. Grace. J'ai examiné votre rapport. Vous êtes un ardent partisan de la R-D, de la recherche et du développement. Je pense que vous savez effectivement que le présent gouvernement a appuyé ce secteur. Bien entendu, vous savez que nous avons mis sur pied la Fondation pour l'innovation, dont le budget de départ était de 800 millions de dollars et qui a maintenant été augmenté de 200 millions de dollars, ce qui porte le total à un milliard de dollars. En passant, comme vous le savez, M. David Strangway, l'ancien président de UBC, en est le président. Nous avons aussi établi les instituts canadiens de recherche en santé, comme nous le savons tous.

Je partage votre préoccupation à propos des prêts aux étudiants. Nous tâchons tous d'apporter notre aide dans la mesure du possible.

• 1720

Vous avez fait des observations à propos des étudiants diplômés. Habituellement, ils peuvent travailler comme adjoints à l'enseignement. Est-ce que cette possibilité existe toujours?

M. John Grace: Le poste d'adjoint à l'enseignement leur rapporte environ de 2 000 $ à 3 000 $ par année. Cela les aide, mais en règle générale ce n'est tout simplement pas suffisant, et ce montant de 2 000 $ ou 3 000 $ leur serait versé en contre partie d'environ 12 heures d'aide à l'enseignement par semaine pendant deux sessions universitaires. Donc ce n'est sûrement pas un travail à temps plein, et, bien entendu, plus ils travaillent, moins ils ont de temps pour étudier. Il serait donc utile de prévoir plus de bourses et d'autres mesures de ce genre pour les aider.

En règle générale, à l'heure actuelle, les étudiants diplômés qui ont terminé leurs études ont des dettes pouvant aller de 50 000 $ à 100 000 $, et il peut leur falloir des années et des années avant de pouvoir les rembourser. Cela signifie que certains de nos étudiants les plus compétents ne font simplement pas d'études supérieures parce qu'ils craignent de s'endetter et qu'ils ont des responsabilités familiales, etc.

Mme Sophia Leung: Je vous remercie.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Pourrais-je vous poser une dernière question, monsieur Grace?

Il y a deux universités dans ma collectivité, et un représentant de WLU m'a indiqué que le corps professoral est en train de vieillir et que les universités canadiennes n'ont pas d'argent pour préparer la relève. Il ne fait aucun doute que cela concerne les étudiants diplômés, et c'est un problème à l'échelle internationale, pas uniquement un problème canadien. Je me demande si vous pourriez nous faire part de vos réflexions à ce sujet.

M. John Grace: Il s'agit d'un grave problème. Je me souviens qu'en 1990 on avait prévu que certaines des grandes universités comme la mienne allaient assister à un certain nombre de départs à la retraite avant l'an 2000. Eh bien, ces personnes ont pris leur retraite, mais très, très peu d'entre elles ont été remplacées. Le résultat, c'est que l'effectif du corps professoral a considérablement diminué. Tous les départements sont plus petits qu'il y a 10 ans, et bien entendu au cours de cette période le nombre d'étudiants a augmenté. Donc nous tâchons tous de travailler plus fort et de le faire avec moins de ressources.

Cela va se produire, et cela doit se produire, au cours des 10 prochaines années nous devrons certainement commencer à remplacer massivement ces gens. Donc il y a de l'espoir pour les étudiants diplômés, ceux qui voulaient occuper des postes au sein du corps professoral. Bien sûr, ce ne sont pas tous les étudiants diplômés qui vont en faire partie, seulement une certaine proportion d'entre eux. Les universités en accueilleront un plus grand nombre dans l'avenir, mais malheureusement je pense que ce sera un peu comme ce qui s'est produit dans les années 60: soudainement il faudra embaucher de façon massive, et nous allons tous nous bousculer pour les engager et nous n'engagerons pas nécessairement les plus qualifiés. Il y aura alors toute une génération perdue.

C'est pourquoi nous aimerions tâcher d'étaler l'embauche sur autant d'années que possible. C'est ce que nous avons commencé à faire en Alberta, mais c'est l'unique province où on procède à une embauche massive dans le système universitaire.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Il me semble que l'une des choses que le gouvernement a faites et qu'il peut continuer de faire, c'est d'assurer une forme quelconque de financement en matière de R-D. Vous parlez de subventions et de bourses à l'intention des étudiants diplômés afin de leur permettre de poursuivre leurs études, et à l'heure actuelle nous pouvons compter effectivement sur les éléments les plus brillants. Y a-t-il autre chose à faire, à votre avis?

M. John Grace: Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un problème répandu, parce que d'une part vous parlez de gens qui vont poursuivre leurs études et d'autre part nous devons pouvoir leur offrir les moyens de le faire, c'est-à-dire le meilleur équipement, etc., afin qu'ils reçoivent vraiment la formation qui leur permettra d'être à la fine pointe de leur domaine. Dans l'économie du savoir, si nous ne sommes pas concurrentiels, nous ne pourrons pas au bout du compte réussir à mener à bien un grand nombre de nos projets.

C'est donc un problème répandu. Il faut que nous puissions leur offrir des débouchés et des bourses qui leur fourniront une aide raisonnable. Ils ne s'attendent pas à être riches, mais ils s'attendent au moins à pouvoir joindre les deux bouts pendant ces années, afin qu'ils aient l'espoir de pouvoir obtenir les meilleurs postes et de vraiment contribuer à l'économie dans l'avenir.

La présidente suppléante (Mme Karen Redman): Je tiens à remercier tous les témoins qui ont comparu devant nous aujourd'hui. Nous ne manquerons pas de prendre en considération les exposés réfléchis que vous nous avez présentés, lorsque nous rédigerons notre rapport.

La séance est levée.