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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 17 octobre 1995

.1530

[Traduction]

Le vice-président (M. Comuzzi): La séance est ouverte.

Le Comité permanent des transports poursuit l'étude du projet de loi C-101.

Au nom des membres du comité, je suis heureux d'accueillir M. Tellier, président-directeur général du CN; M. Todd, vice-président, Affaires gouvernementales, qui n'est pas encore arrivé;M. Davies; et M. Cantin.

Soyez les bienvenus. Il me semble, messieurs, que vous êtes les gens de l'heure. Nous vous avons réservé une heure et demie.

J'ai bien l'impression que vous avez un exposé à nous faire, monsieur Tellier, après quoi les députés des deux côtés de la table vous poseront des questions.

Si cela vous va, vous pouvez commencer.

M. Paul Tellier (président-directeur général, Chemins de fer nationaux du Canada): Merci, monsieur le président. Je voudrais dire quelques petites choses rapidement et nous répondrons ensuite volontiers à vos questions.

Le projet de loi qui vous a été renvoyé est une mesure très importante et nous croyons savoir que son principal objectif consiste à résoudre les problèmes du réseau ferroviaire.

L'industrie des chemins de fer a effectivement connu de très graves problèmes depuis un certain nombre d'années et obtenu un revenu net très faible. Comme vous le savez, monsieur le président, depuis 1988, le taux de rendement des investissements a été très faible, inférieur au coût d'immobilisations; je vous fournirai volontiers davantage de détails là-dessus en répondant à vos questions. Le rapport d'exploitation a été très élevé, et ainsi de suite.

Ce n'est pas seulement ce que les sociétés ferroviaires ont constaté, mais ce que bien des gens ont confirmé après avoir analysé les problèmes; je songe notamment à la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux, en 1993, au Conference Board, et à bien d'autres.

Depuis trois ans au CN, nous avons élaboré un plan d'affaires très dynamique pour obtenir un revirement de la situation et nous attaquer à certains problèmes internes. Vous savez très bien que nous avons réduit nos effectifs. D'ici à la fin de l'année, nous aurons supprimé 11 000 postes. Vous savez aussi très bien que nous avons déjà fait beaucoup pour réduire nos frais généraux. J'ai, par exemple, supprimé plus d'une demi-douzaine de postes de vice-présidents. Nous avons ramené le nombre de niveaux hiérarchiques entre les simples surveillants et le PDG de dix à cinq. Nous avons réduit le nombre de bureaux régionaux et de sièges sociaux régionaux, et j'en passe. Comme vous le savez, nous avons conclu de nouvelles conventions collectives par suite de négociations et d'arbitrage. Nous avons fait certains investissements importants, comme le projet de 200 millions de dollars pour le tunnel de Sarnia, et il y en a bien d'autres.

À cause de cela, la situation a changé. Nous sommes passés d'une perte brute de 100 millions de dollars il y a trois ans à des bénéfices de 245 millions de dollars l'année dernière, en 1994. Nous croyons que l'année 1995 sera tout aussi bonne sinon meilleure que 1994.

Il y a certaines choses que nous pouvons aussi faire à l'interne.

Pour ce qui est du milieu externe et de la réforme réglementaire, puisque c'est là-dessus que porte le projet de loi, nous croyons qu'il faut apporter des changements importants.

La première chose que je veux dire à ce sujet, c'est que nous sommes très déçus du projet de loi. Ce n'est pas ce que nous avions espéré. En 1987, on avait fait un premier pas vers la déréglementation. Nous pensions que le deuxième pas serait pris maintenant, mais le projet de loi va beaucoup moins loin que la mesure de déréglementation adoptée dans le cadre de la Loi Staggers aux États-Unis en 1980 qui a donné lieu à un grand renouveau du transport ferroviaire dans ce pays.

La première chose que je veux dire, c'est donc que nous sommes très déçus parce que la réforme reflétée par le projet de loi semble très modeste.

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À part cela, la réaction des expéditeurs m'étonne et me laisse perplexe. Je dois être prudent en disant cela parce que, au CN, nous croyons toujours que le client a raison. Les expéditeurs sont nos clients. Je signale donc dès le départ que nous leur sommes reconnaissants pour chaque dollar de recette qu'il nous donne. Par ailleurs, leur réaction nous étonne un peu.

J'ai lu ce que certains des expéditeurs ont déclaré à vous-mêmes et à vos collègues, monsieur le président. J'ai longuement discuté du projet de loi avec nos principaux clients, surtout dans l'Ouest du Canada. Ces gens sont en affaires au même titre que nous-mêmes. Ils s'attendent à réaliser des bénéfices raisonnables. Il me semble donc que nous avons de bons arguments quand nous réclamons nous aussi des bénéfices raisonnables.

Les expéditeurs semblent oublier certaines choses. Je voudrais les énumérer pour que nous pussions en discuter.

D'abord, il existe de la concurrence sur le marché. On pense parfois qu'il n'y en a pas. Il existe une concurrence interne au sein de l'industrie ferroviaire. Lorsque nous perdons un contrat, au CP, par exemple, tous les employés du siège social du CN savent très bien le lendemain matin que la concurrence existe.

Je vais vous donner un chiffre. D'après nos calculs, le trafic est pleinement assujetti à la concurrence dans une proportion d'environ 70 p. 100. Il importe de le noter. Par exemple, si l'expéditeur a accès à deux chemins de fer, cela représente environ 50 p. 100 de notre trafic et le reste vient essentiellement de la concurrence intermodale, avec l'industrie du camionnage dans l'Est et avec le transport interferroviaire dans l'Ouest. Il y a donc concurrence selon le point d'origine.

Par exemple, s'il s'agit d'automobiles GEO transportées par la route, l'expéditeur n'aura pas besoin de nos services. Il y a donc de la concurrence et les chiffres le prouvent.

Deuxièmement, du point de vue des expéditeurs, le projet de loi à l'étude au Parlement que vous et vos collègues, monsieur le président, êtes en train d'étudier, contient encore une protection plus grande que n'importe quelle autre mesure législative en Amérique du Nord, pour n'importe quel moyen de transport. Vous connaissez les éléments de cette protection, mais je voudrais les résumer.

D'abord, il y a les obligations du transporteur public. Nous n'avons pas le choix. Le Canadien National ne peut pas décider de transporter ou de ne pas transporter les biens de quelqu'un.

Deuxièmement, il y a les prix de ligne concurrentiels. Si nous n'arrivons pas à nous entendre, l'expéditeur peut décider d'avoir recours aux dispositions relatives aux prix de ligne concurrentiels contenues dans la Loi de 1987 et confirmés par le projet de loi de 1995

Troisièmement, il y a la réglementation relative aux interconnexions. Selon certaines limites, on peut nous obliger à transporter des marchandises sur nos propres voies en utilisant notre propre matériel jusqu'au premier point d'interconnexion où la compagnie rivale ou l'autre chemin de fer, dans certains cas ce peut être un chemin de fer américain, pourra continuer le transport.

Enfin, il y a l'arbitrage. À la fin du compte, si nous, le transporteur, et eux, les expéditeurs, n'arrivons pas à nous entendre sur une tarification, l'arbitrage permettra à la meilleure offre, la nôtre ou la leur, de l'emporter. C'est une protection très complète.

Je voudrais aussi dire quelque chose de très important à propos de nos tarifs. Le PDG de Luscar a témoigné devant vous hier. C'est un de nos très bons clients. Le PDG est un bon ami à moi, mais nous ne pouvons pas discuter de tarifs. Depuis dix ans, nos tarifs réels ont baissé de 30 p. 100. Ils ont baissé en moyenne de 3 p. 100 par année. Si quelqu'un essaie donc de prétendre que les tarifs ont augmenté à la suite de la Loi de 1987 et de la déréglementation partielle dans le cas des expéditeurs, je lui signalerai que les tarifs ont baissé de plus de 30 p. 100 depuis 10 ans.

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Je voudrais faire quelques autres observations avant de répondre à vos questions. Il y a d'abord la question de partenariat. Nous ne comprenons pas très bien le raisonnement des expéditeurs. Pourquoi serait-il dans l'intérêt des sociétés ferroviaires, que ce soit le CN ou le CP, de ne pas reconnaître que nous formons un partenariat avec les expéditeurs, par exemple, et que si l'expéditeur n'est pas concurrentiel sur le marché de la laine...

Je vais donner l'exemple de Luscar Coal, étant donné que M. Ulrich était ici ce matin, je pense. Nous savons tous que le charbon canadien est vendu à 92 p. 100 sur le marché japonais. Si Luscar, Smoky River, Manalta ou un autre gros producteur de charbon n'est pas concurrentiel sur ce marché, il va cesser de produire du charbon et le résultat bien évident c'est que nous ne pourrons plus transporter ce charbon. C'est donc très important pour nous. En août, nous avons transporté 104 pleins wagons de charbon vers la côte ouest.

Si quelqu'un pense que, sans la protection prévue pour les expéditeurs, nous relèverions tout à coup nos tarifs, je lui signale que nous nous nuirions à nous-mêmes en faisant une telle chose parce que nous sommes dans une situation de partenariat.

Je sais très bien que si on additionne les tarifs de transport maritime et les tarifs ferroviaires pour transporter une tonne de charbon au Japon, le transport représente peut-être l'un des éléments clé, sinon le principal élément du prix de cette tonne de charbon au Japon. La question des partenariats est donc très importante.

Je voudrais dire deux autres choses avant de m'arrêter. La première porte sur une question différente, soit sur les droits de circulation. Certains expéditeurs vous demandent de modifier le projet de loi pour que les exploitants de lignes secondaires aient le droit de circuler sur nos voies.

Il importe pourtant de signaler que ces exploitants ne demandent pas, et je répète qu'ils ne demandent pas, des droits de circulation. Huit ou dix membres de l'Association des chemins de fer du Canada étaient dans ma salle de conseil vendredi dernier et je leur ai posé la question très directement: Quelle est votre position à ce sujet et qu'allez-vous dire au comité parlementaire là-dessus? Pas un seul exploitant de ligne secondaire à ma connaissance ne demande que le droit de circuler sur nos voies soit prévu dans la mesure.

Deuxièmement, nous croyons au CN que si l'on accordait ces droits de circulation, cela voudrait dire la fin de la politique du CN pour les lignes secondaires. Cette question resterait probablement en attente.

Je vais vous donner un exemple. Nous avons créé une ligne secondaire en vendant 225 milles de voies entre Truro et Sydney, en Nouvelle-Écosse. Nous croyions que c'était une bonne idée pour le CN, mais ce qui est plus important, c'est que c'était aussi à l'avantage de la collectivité. Le ministre des Transports et le premier ministre de la Nouvelle-Écosse nous disent qu'ils sont satisfaits de ce marché, les expéditeurs nous disent la même chose et nous sommes satisfaits aussi au CN.

Qu'arrive-t-il dans une situation de ce genre? Nous voyons quels sont nos coûts et nos recettes sur cette ligne. S'il n'y a pas de bénéfices ou si les bénéfices sont très marginaux, nous nous demandons si on peut réduire la structure de coûts, réduire les dépenses et conserver une partie des recettes. Dans le cas des lignes secondaires en question, bien sûr, les clients et les expéditeurs sont mieux servis parce que Railtex peut faire le même travail avec de 50 à 53 employés que nous faisions auparavant avec plus de 100 employés. Les habitants de la Nouvelle-Écosse en profitent, les expéditeurs en profitent et nous en profitons nous aussi parce que nous partageons les recettes avec Railtex quand les marchandises arrivent à la ligne principale pour être transportées vers le centre du Canada.

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Si vous nous obligez dans la Loi à accorder des droits de circulation à Railtex, par exemple, nous allons vraiment nous demander si c'est une bonne chose de créer des lignes secondaires. Je vous incite donc à ne pas prévoir de droits de circulation obligatoires dans le projet de loi parce que cela nuirait aux localités à la fin du compte.

Je peux vous donner trois ou quatre exemples de cas en Ontario où nous sommes sur le point de créer des lignes secondaires à cause des changements apportés à la loi par le gouvernement deM. Harris et où ces lignes ne seraient jamais créées si la loi leur donnait des droits de circulation sur nos voies. Les localités le long des lignes risqueraient de perdre leur service ferroviaire.

La dernière chose que je veux dire concerne le paragraphe 27(2). J'en ai longuement discuté avec les expéditeurs et M. Davies et M. Cantin aussi.

Nous n'avons rien à redire au fait que les expéditeurs puissent demander une réparation ou une mesure corrective à l'Office canadien des transports, comme on l'appelle dans le projet de loi, mais nous croyons que ce devrait être à deux conditions. D'abord, il devrait s'agir d'un problème grave ou d'une réparation importante. Nous croyons donc que l'article contenu dans le projet de loi à l'étude est très raisonnable puisqu'il stipule que l'on doit prouver qu'il existe un préjudice important et nous irions même plus loin.

Comme vous le savez, nous avons recommandé dans le mémoire que nous avons déposé qu'il y ait une vérification obligatoire portant sur la situation concurrentielle. L'expéditeur devrait prouver qu'il est un expéditeur captif, qu'il est à la merci du transporteur, etc. Nous croyons que ce serait raisonnable.

Monsieur le président, je m'excuse d'avoir parlé pendant 15 minutes, mais cette question est très importante pour le Canadien National. Nous serons maintenant ravis de répondre à vos questions.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci beaucoup, monsieur Tellier. Vos collègues ont-ils quelque chose à ajouter?

M. Tellier: Pas pour l'instant, merci.

Le vice-président (M. Comuzzi): Je voudrais une précision au sujet du dernier exemple que vous avez donné pour la vérification de la situation concurrentielle. Les expéditeurs devraient prouver l'absence de concurrence avant de passer à la question de préjudice. Est-ce bien ce que vous voulez dire?

M. Tellier: Oui.

Le vice-président (M. Comuzzi): Monsieur Caron.

[Français]

M. Caron (Jonquière): Monsieur Tellier, dans la version française de votre mémoire, à la page 8, vous dites, à propos des chemins de fer d'intérêt local, que s'il y avait possibilité pour les CFIL d'utiliser les lignes du CN et du CP, le Canadien National serait peu enclin à mettre une ligne en vente si le chemin de fer d'intérêt local ainsi créé devait devenir un concurrent plutôt qu'un partenaire. De plus, il ne serait pas davantage prêt à envisager d'abandonner des lignes à rentabilité marginale, parce que le projet de loi C-101 exige qu'on mette une ligne en vente avant d'envisager son abandon.

Il y a des gens qui m'ont parlé de la situation des chemins de fer d'intérêt local et qui m'ont dit: Si on voulait que le Canadien National maintienne certaines lignes, par exemple la ligne Jonquière-Montréal que je connais bien, on forcerait le CN à entrer en concurrence avec d'autres et à continuer de faire fonctionner le chemin de fer.

Ne pensez-vous pas que cela pourrait être un argument pour ceux qui veulent que les régions éloignées soient encore desservies par le Canadien National au lieu de l'être par des CFIL?

.1550

M. Tellier: Nous pensons que le concept du chemin de fer d'intérêt local est basé essentiellement sur un partenariat entre le chemin de fer d'intérêt local et le chemin de fer principal.

Pas très loin de la région que vous avez mentionnée, on a vendu à des intérêts locaux la ligne de Québec à La Malbaie, soit 90 milles de voie ferrée. Essentiellement, ces gens-là se perçoivent comme une ligne d'intérêt local. Je pense qu'ils donnent un meilleur service que celui qu'on donnait. Essentiellement, ils alimentent notre ligne principale.

Comme je le disais il y a quelques minutes, si on nous avait forcé la main, nous n'aurions probablement pas vendu cette ligne aux intérêts que vous connaissez, ceux de Pierre Martin et d'autres, et elle serait probablement demeurée une ligne du CN. Mais comme elle était à peine rentable, il y aurait eu un déclin dans le service. C'est essentiellement ce que nous disons dans notre mémoire et c'est ce que j'essayais de décrire. On voit le chemin de fer d'intérêt local un peu comme les compagnies d'aviation régionales qui alimentent le réseau à un coût moindre.

M. Caron: Je comprends très bien, mais donnez-vous un genre de soutien aux CFIL? Je suppose que les chemins de fer d'intérêt local n'ont pas, au niveau de l'administration, la même expertise que le Canadien National. Est-ce que le Canadien National pourrait donner un soutien à ces lignes afin que ce ne soit pas un fiasco et qu'on ne se retrouve pas abandonnés et par le CN et par le chemin de fer d'intérêt local?

M. Tellier: Oui, tout à fait. Ce que vous dites là est très important. Il est très important qu'il y ait une bonne relation de travail. Quand on transfère une ligne comme celle-là, les arrangements concernant le personnel, le matériel roulant, etc. doivent se faire sur une base amicale. Votre question confirme un peu ce que je dis: si cela nous est imposé, c'est un mécanisme qui ne peut à peu près pas fonctionner. Il faut que ce soit basé sur une entente qui est jugée réciproquement profitable.

M. Caron: Je vous remercie. C'est clair.

[Traduction]

Le vice-président (M. Comuzzi): Monsieur Gouk.

M. Gouk (Kootenay -Ouest - Revelstoke): Bon après-midi encore une fois, monsieur Tellier. Je voudrais vous demander quelques précisions. Certaines de mes questions pourraient prendre un peu plus de temps et je les poserai peut-être quand mon tour reviendra.

Relativement au paragraphe 27(2), dois-je comprendre que, d'après vous, il faudrait établir qu'il existe un préjudice important pour pouvoir présenter une demande? Autrement dit, il faudrait une audience pour déterminer si l'on va tenir une audience officielle. Est-ce bien cela?

M. Tellier: Si un expéditeur invoque le paragraphe 27(2), il faudrait qu'il prouve qu'il subirait un tort important si la réparation ou la mesure correctrice qu'il réclame n'est pas accordée.

M. Gouk: Je voulais simplement en être certain.

Le paragraphe 93(1) comprend l'expression «assurance responsabilité réglementaire». Pouvez-vous nous dire comment votre société ferroviaire interprète cette expression dans le cas de cet article du projet de loi? Comment devons-nous interpréter cela?

M. Serge Cantin (avocat général, Chemins de fer nationaux du Canada): Je voudrais dire un mot là-dessus. Tout d'abord, je pense que le projet de loi demande au nouvel office de fixer le montant en question. Cela dépendra de ce qui se fait couramment. Je crois savoir que Transports Canada a créé une équipe spéciale d'experts qui conseillera le ministère des Transports à ce sujet.

Il y a deux élément en jeu. Il y a d'abord la question de savoir quelle assurance est suffisante pour une ligne secondaire sur son propre territoire et ensuite le cas où nous aurions convenu de droits de circulation sur les voies d'une autre compagnie, ou nous aurions invité une autre société ferroviaire à circuler sur nos voies. Cela dépendrait des circonstance. Tout dépend des circonstances.

M. Gouk: L'article 112 concerne les définitions et notamment celle de lieu de correspondance. D'après la définition, il s'agit simplement du lieu où se rencontrent deux lignes de chemin de fer. Si l'on modifiait la définition pour qu'elle dise plutôt «lieu où la ligne exploitée par deux compagnies de chemin de fer», est-ce que cela vous poserait un problème?

.1555

M. Cantin: Tout d'abord, depuis toujours, je pense depuis 1911 ou 1912, l'élément principal est la propriété des voies. Je pense que c'est surtout parce que chaque société ferroviaire propriétaire de voies doit respecter les obligations du transporteur public. C'est de là que vient cette définition.

Vous faites allusion à un cas qui a déjà été débattu devant l'office. Un expéditeur avait proposé que, chaque fois que nous invitions une autre société ferroviaire à utiliser nos voies, en lui donnant des droits de circulation - et il existe bon nombre d'ententes du genre qui sont justifiées sur le plan commercial - il y aurait aussi interconnexion.

Selon nous, de telles questions doivent être négociées. L'office a été saisi de cas où le contrat avait donné de tels privilèges d'interconnexion à la société invitée. Dans d'autres cas, ces droits n'ont pas été accordés et le tout a été négocié.

Selon moi, et cela correspond à certaines des choses dites par M. Tellier, s'il y avait interconnexion obligatoire chaque fois que nous invitions une autre société ferroviaire à utiliser nos voies, cela nous dissuaderait de conclure de telles ententes sur les droits de circulation.

M. Gouk: L'article 115 porte sur l'obligation des sociétés ferroviaires de fournir certaines installations aux expéditeurs. Je voudrais savoir si vous êtes satisfaits de cette disposition pour l'instant. Je n'ai pas entendu d'objections là-dessus et j'imagine donc que vous l'êtes, mais je voudrais vous l'entendre dire.

M. Cantin: Nous pourrions dire toutes sortes de choses à propos de chacune des dispositions du projet de loi. Tout d'abord l'obligation du transporteur public ou du niveau de service existe dans la loi depuis le début du siècle et nous avons su nous en accommoder. C'est la première chose.

Deuxièmement, nous jugeons que la situation a changé beaucoup en 1987 parce qu'on ne peut pas vraiment modifier l'obligation du transporteur public lorsqu'on conclut une entente confidentielle. L'office est obligé de s'en tenir à cette obligation du transporteur public, ce qui veut dire que personne d'autre ne peut la modifier.

Ce que nous regrettons dans bien des cas relativement à la disposition sur le niveau du service, c'est que l'office a vraiment des pouvoirs exorbitants, puisqu'il peut vous obliger à faire des immobilisations, à dépenser beaucoup d'argent, et c'est certes le cas de notre concurrent, le CP, puisqu'il a dû reconstruire un pont au coût de 8 millions de dollars pour apprendre l'année suivante que le service voyageur sur ce tronçon de la ligne où il avait fallu construire un pont allait être supprimé. À mon avis, ces pouvoirs devraient être restreints.

La nouvelle stipulation prévue au paragraphe 27(2) impose certaines restrictions puisqu'il faudra interpréter les dispositions du niveau de service de façon raisonnable.

M. Gouk: M. Tellier, vous nous avez signalé que les sociétés ferroviaires ne s'efforcent certainement pas d'acculer leurs clients expéditeurs à la faillite et que nous ne devrions donc avoir aucune crainte quant au besoin de protéger la concurrence parce vous allez de toute façon proposer le prix le plus bas si c'est à votre avantage.

Il me semble que, même si les sociétés ferroviaires - et le contraire est vrai aussi - ne veulent pas au départ acculer leurs clients à la faillite... mais qu'il y a certains bénéfices à réaliser. Il s'agit de savoir si les sociétés ferroviaires veulent enlever 5 cents de plus aux bénéfices des expéditeurs pour les empocher et si, de l'autre côté, les expéditeurs veulent 5c. de plus de bénéfices au détriment de la société ferroviaire. Il ne s'agit pas de savoir si l'une ou l'autre partie essaie d'acculer l'autre à la faillite. Il s'agit de savoir qui va empocher les bénéfices.

Maintenant, passons à quelque chose d'un peu différent, en l'occurrence votre ligne entre Montréal et Halifax. Selon cette disposition, la société ferroviaire serait obligée de présenter un plan triennal et vous planifiez certainement pour de plus longues périodes aussi. Projetez-vous maintenant dans le cadre de votre plan triennal ou plus tard de prévoir aux termes de cet article l'abandon possible de la ligne entre Montréal et Halifax?

M. Tellier: La réponse est non, monsieur le président. Vendredi dernier à midi, j'ai rencontré le premier ministre de la Nouvelle-Écosse et son ministre des Transports pour discuter justement de cette question et pour leur dire que le port de Halifax, la Nouvelle-Écosse et la région de l'Atlantique continueront de faire partie de nos engagements à long terme pour un certain nombre de raisons.

.1600

Tout d'abord, nous ne voulons pas nous vanter, mais nous sommes très fiers que le Canadien national soit maintenant le seul chemin de fer transcontinental de l'Amérique du nord. Nous sommes la seule société ferroviaire à avoir un service d'un océan à l'autre. Le CP n'est plus transcontinental.

Deuxièmement, du côté des États-Unis, on assiste maintenant à toutes sortes de fusions pour essayer d'une façon ou d'une autre de créer un chemin de fer transcontinental. Nous considérons donc que c'est un atout pour nous.

Troisièmement, cet engagement n'est pas simplement théorique. Nous avons investi en conséquence. Vous savez, par exemple, que nous avons construit un réseau intermodal dans l'Est du Canada, ce qui a coûté très cher, mais nous croyons que c'est un bon investissement. Nous avons notamment un nouveau terminal intermodal sur les quais de Halifax dans lequel nous avons investi 17 millions de dollars. J'étais là en décembre 1993 pour ouvrir le nouveau terminal. Il fonctionne extrêmement bien.

Nous avons aussi construit un nouveau terminal. Nous avons de nouvelles installations un peu partout dans les Maritimes pour le réseau intermodal et, qui plus est, M. Gouk, nous avons investi 200 millions de dollars dans le tunnel de Sarnia pour pouvoir rivaliser avec le trafic maritime. Vous savez peut-être que grâce à ce tunnel, certains de nos trains à deux niveaux peuvent faire le trajet de Halifax à Chicago en 44 heures. Cela veut dire que nous pouvons prendre un conteneur dans le port de Halifax, le placer sur un wagon plat et l'acheminer sur Chicago, où il arrivera à peu près en même temps que le même conteneur serait arrivé à New York s'il était resté sur un navire.

Nous avons donc des engagements solides envers la région de l'Atlantique et nous considérons que cela offre énormément de possibilités. Ce pont terrestre offre vraiment un très bon moyen de transporter des marchandises vers le midwest américain à partir de Halifax.

M. Gouk: Je suis heureux de vous l'entendre dire. C'est ce que j'ai toujours pensé moi-même, mais ce n'est pas l'avis de tous mes collègues. Nous devrions donc bien le préciser aujourd'hui.

Dans les documents annexés à votre mémoire, à la partie qui porte sur le paragraphe 164(2), j'imagine que vous voulez dire que si un expéditeur n'est pas satisfait d'un prix et a recours à l'arbitrage, si il y a un autre moyen de transport à leur disposition, par exemple, une autre ligne ferroviaire, peu importe le prix que vous lui faites payer et peu importe le prix que demande l'autre société ferroviaire, l'expéditeur ne pourrait pas avoir recours à l'arbitrage.

Je vous signale que si vous passez devant un poste d'essence après l'autre en automobile, vous constaterez que tous les postes d'essence, par magie et sans la moindre collusion, vendent tous leur essence au même prix. Si les prix montent à un poste d'essence, par magie et sans collusion, tous les autres prix monteront aussi. Comment les expéditeurs auraient-ils accès à cette concurrence à ce moment-là s'ils ne pouvaient pas avoir recours à l'arbitrage?

M. Tellier: Voulez-vous répondre, Gerry?

M. Gerald Davies (premier vice-président, Commercialisation, Chemins de fer nationaux du Canada): Il y a deux choses à dire ici. D'abord, nous sommes encore assujettis à la Loi sur la concurrence. Deuxièmement, nous proposons qu'il y ait quand même une stipulation qui soit ajoutée pour que l'expéditeur puisse faire appel à l'Office en cas d'abus de pouvoir. Nous ne nous opposerions pas à ce que les expéditeurs aient accès à l'Office s'il semblait y avoir un abus de pouvoir.

Nous nous opposons à cette disposition pour la raison suivante. À l'heure actuelle, on pourrait demander l'arbitrage à propos d'un taux qui serait à peu près l'équivalent de nos coûts et, en cas de décision défavorable, nous devrions fixer un taux inférieur à nos coûts. Si un prix semble dépasser ce qui serait raisonnable, l'Office pourrait faire enquête et décider si le prix est approprié ou non. On pourrait prévoir une valeur maximale, comme le fait la Loi Staggers, par exemple, et dire que les prix qui sont supérieurs à 180 p. 100 ou à 200 p. 100 des coûts justifient la tenue d'une enquête par l'Office.

M. Gouk: Bien sûr, tant qu'il n'y aura pas eu d'enquête, nous ne aurons pas une telle situation se présente et, aux termes de l'amendement que vous proposez, nous ne le saurons jamais.

M. Davies: Sauf si l'on prévoyait une valeur maximal.

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M. Gouk: Mais il n'en est pas question ici. Tout ce que je vois c'est ce que vous avez soumis, à savoir que s'il y a un autre mode d'expédition, l'enquête n'est pas accordée, c'est tout.

M. Davies: Il y aurait la concurrence. En cas d'offre, il y aurait un prix concurrentiel.

M. Gouk: Oui, mais là encore, si on ne s'adresse pas à l'office d'abord, on ne saura jamais si le prix est ou non concurrentiel. Comment pourrait-on le savoir?

M. Tellier: Vous soulevez là une question tout à fait fondamentale et il est évident que l'on n'est pas forcé d'être d'accord là-dessus. Nous croyons que si les forces du marché réussissent, de façon générale, à déterminer la valeur de nos services, l'intervention gouvernementale n'est pas nécessaire. C'est essentiellement ce que nous disons.

La situation que vous décrivez est essentiellement une situation de concurrence. Pourquoi alors croirerions-nous, parce que dans une situation semblable on ne peut avoir accès à l'Office, que les deux chemins de fer s'entendraient malhonnêtement pour léser les expéditeurs?

C'est donc une question de principes. Soit vous faites confiance soit vous ne faites pas confiance aux forces du marché. Ce que nous disons c'est qu'il y a eu beaucoup de réglementation, soit sous forme de loi soit de règlements, dans le secteur des chemins de fer au Canada et que les résultats n'ont pas été très spectaculaires. C'est pourquoi nous pensons qu'il faut envisager une plus forte déréglementation.

M. Gouk: Voulez-vous poursuivre? Où en sommes-nous?

Le vice-président (M. Comuzzi): Vous êtes épuisé.

M. Gouk: En effet. Je me sens fatigué. Mais je vais me reposer.

Le vice-président (M. Comuzzi): C'est ce que j'ai conclu de votre dernière question.

Monsieur Fontana.

M. Fontana (London Est): Merci à M. Tellier et à ses collaborateurs de leur exposé.

Je dirais toutefois simplement que, contrairement à mon collègue réformiste, je ne pense pas que la question soit d'essayer de diviser les bénéfices. Ce n'est pas du tout ici la question fondamentale. Ce qui importe c'est de pouvoir contrôler les coûts.

J'ai cru comprendre d'après ce que nous ont dit les compagnies ferroviaires et les expéditeurs, que le fait que nous soyons un pays d'exportation et que nos clients aient ainsi besoin d'acheter nos marchandises cela veut dire que nous devrons leur livrer nos marchandises à des prix qui soutiennent la concurrence internationale.

La question est donc de savoir comment réduire les coût totaux dans le système et comment devenir concurrentiel de sorte que tout le monde ait des clients et que nous ayons des chemins de fer pour transporter ces marchandises? Sinon, personne ne fera rien.

J'aimerais revenir sur la question de la concurrence car je crois que c'est là l'essentiel.

Je sais que le CN, par sa filiale américaine, opère aux États-Unis. Évidemment, il nous faut comparer notre infrastructure de transport, notre infrastructure ferroviaire à celle des États-Unis. Vous êtes donc très bien placé pour nous dire comment se compare la situation aux États-Unis et au Canada. Il y a quelque temps, les États-Unis ont appris à remettre de l'ordre dans leur secteur ferroviaire. Nous sommes toujours à la traîne.

Peut-être avons-nous pris quelques mesures en 1987 en donnant à tout un groupe d'expéditeurs certains droits qui ont provoqué... Ils admettent que leur prix ont baissé de 30 p. 100. Évidemment, ils veulent que cela baisse encore, aux dépends des chemins de fer.

Pour ce qui est des règlements que nous avons au Canada et qui n'existent pas aux États-Unis, qu'est-ce qu'ils coûtent? Ces droits accordés aux expéditeurs coûtent évidemment très cher à quelqu'un et, dans ce cas, je dirais que c'est aux chemins de fer si l'on compare la situation au Canada et aux États-Unis. Pourriez-vous me dire le genre d'obstacles que ces règlements maintenus dans ce projet de loi continueront à représenter pour vous?

M. Tellier: Puis-je demander à M. Davies de répondre à cela? J'aimerais signaler queM. Davies a passé les 25 dernières années de sa vie à travailler pour les chemins de fer américains. Je l'ai recruté au Texas chez Burlington Northern. Auparavant il était chez CSX et, encore avant, chez Conrail. Je crois donc qu'il est très bien placé pour vous répondre, monsieur Fontana.

M. Davies: Tout d'abord, parlons du modèle de concurrence car le moteur du marché n'est pas nécessairement une concurrence féroce entre les chemins de fer au niveau des expéditeurs. En fait, c'est rarement le cas. Ce qui est important, c'est de s'assurer que les marchandises de nos clients sont concurrentielles au niveau de leurs propres clients. C'est la seule fois que nous transportons ces marchandises et c'est la seule fois que nous faisons de l'argent. C'est donc ce qui nous importe.

Prenons la houille, comme l'a signalé M. Tellier, notre concurrent n'est pas CP à la mine de Luscar; c'est la houille australienne débarquée à Kobe, au Japon, qui fait concurrence à la nôtre. Nous devons nous montrer compétitifs sur ce marché si bien que nous investissons pour réduire nos prix afin d'aider à maintenir la compétitivité de cette houille sur les marchés mondiaux. Nous voulons que Luscar reste en activité et se développe car c'est aussi la garantie de notre prospérité.

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Maintenant, j'en reviens à la raison pour laquelle ce projet de loi nous est néfaste. Considérons ce qui se passe en période de ralentissement économique. Nos clients voient baisser le prix de leurs marchandises, ce qui diminue leur marge de bénéfice et leur rend la vie difficile. Que font-ils? Ils se tournent immédiatement vers tous leurs fournisseurs, et en particulier vers les chemins de fer. Ils disent, il faut nous aider à demeurer compétitifs. Il faut donc que vous diminuiez vos prix et que vous supportiez avec nous une partie des pertes.

Savez-vous ce que nous faisons? Nous acceptons. C'est la raison pour laquelle nos prix ont chuté de 30 p. 100 en termes réels depuis 1984. Ce n'est pas une question de réglementation. Voulez-vous savoir pourquoi il y a eu très peu de cas de PLC et de AOF dans notre pays? C'est parce que ce sont les facteurs de concurrence qui ont poussé nos prix à la baisse. On a pas eu besoin de ces instruments.

Maintenant, qu'arrive-t-il lorsque les prix des marchandises remontent; lorsque le prix de l'aluminium double en 18 mois; lorsque le prix de la pâte à papier triple en trois ans? Est-ce que les tarifs ferroviaires sont multipliés par trois? La réponse est que dès que vous essayez d'en parler, on vous menace d'un AOF, ce que vous empêche de négocier. Cela vous empêche de relever vos prix au fur et à mesure où le prix de leurs marchandises augmente. Nous ne bénéficions pas de cette augmentation. Nous faisons toujours face à une menace d'AOF ou de PLC. Il n'est donc pas question d'obtenir une part de l'augmentation. La tendance est donc pour nous constamment à la baisse depuis dix ans.

Au cours des deux dernières années, nous avons finalement réussi à stabiliser les prix au CN, à les empêcher de baisser. Nous n'avons pas obtenu d'améliorations et regardez ce qui est arrivé au prix des marchandises sur le marché. Qu'il s'agisse du blé ou de l'aluminium, du cuivre ou de la pâte à papier, ils ont tous considérablement augmenté durant la période de reprise relativement modeste sur notre continent. Nos prix eux n'ont pas du tout augmenté.

Lorsque M. Tellier vous a parlé de la diminution de nos coûts dans ses observations liminaires, il a demandé jusqu'où l'on pouvait aller. Nous allons devoir continuer à faire baisser les coûts. C'est la seule façon qui nous a permis de rester rentable si bien que nous estimons que nous devrions pouvoir remonter nos prix lorsque le prix des marchandises augmente puisque l'on nous demande de les diminuer lorsque les autres diminuent. L'AOF, par exemple, nous en empêche.

M. Fontana: Puis-je vous demander comment cela sera possible si l'on maintient tous ces obstacles dans la loi actuelle?

Je vais vous donner un exemple. Qu'arriverait-il nous supprimions les PLC et les interconnexions, si nous supprimions tout cela pour parvenir à une véritable déréglementation? Tout le monde veut la concurrence et les forces du marché jouent de la même façon pour tous. Vous dites que la concurrence existe. Tout le monde n'est pas d'accord mais c'est à nous d'y réfléchir. Alors que penseriez-vous que nous nous débarrassions de tout cela et conservions seulement l'AOF comme principal mécanisme d'arbitrage entre un expéditeur et un transporteur et donc le client? Avez-vous besoin de tout cet appareil si vous avez en fait un mécanisme comme l'AOF qui pourrait régler toutes les questions de contrats confidentiels avec vos clients?

M. Davies: Si nous nous débarassons de tout le reste et gardions l'arbitrage, ce serait parce que cela nous simplifie la vie. Mais nous préfèrerions que l'on exige, avant de ménager cet accès à l'arbitrage, que l'abus a été en quelque sorte prouvé.

M. Fontana: Permettez-moi de poursuivre un peu. Est-ce à ce moment-là que vous parlez du paragraphe 27(2)?

M. Davies: Oui, c'est le genre de conditions que nous envisageons.

M. Fontana: Ma fois, nous avons le libellé du paragraphe 27(2) et, comme vous le savez, il ne s'agit pas d'un système à deux étapes. C'est mettre une condition à toute réparation et non pas à l'accès.

M. Davies: C'est exact.

M. Fontana: Ce que vous suggérez et ce que M. Tellier a suggéré c'est que nous envisagions en fait un genre de système à deux niveaux. D'une part une condition à l'accès, d'autre part la question de la réparation.

M. Davies: Oui. Et, par exemple, les dispositions actuelles du paragraphe 27(2) ne produisent aucun effet sur un mécanisme d'arbitrage.

M. Fontana: Non.

M. Davies: Il s'agit de voir si on a l'impression qu'il y a eu un abus - et là encore, pour revenir à la mesure que je suggèrais, 180 p. 100 de différence dans le coût de transport - il y a certains recours.

M. Fontana: D'accord. Je poserais simplement une autre question. Je sais que mes collègues reviendront sur d'autres points. Qu'est-il arrivé aux recettes du CN depuis 1987 et depuis ces fameux changements concernant les expéditeurs adoptés dans la LTN de 1987?

M. Tellier: Ma foi, monsieur, les recettes du Canadien National, en chiffres réels, ont baissé. En 1987, elles se situaient à 3,71 milliards de dollars. En 1994, soit notre dernier exercice complet, elles étaient de 3,70 milliards de dollars. Il ne s'agit pas de dollars constants mais d'une valeur nominale si bien qu'en chiffres réels, les recettes ont chuté.

.1615

M. Davies: J'ajouterais que ces recettes de 1994 représentent des volumes records. Pour ce qui est des volumes, en effet, nous étions à 8 p. 100 au dessus de notre record au CN alors que nous n'avions atteint que le chiffre de recettes de 1988.

M. Fontana: Donc, l'essentiel de vos bénéfices viennent d'une plus grande productivité, ce dont M. Tellier...

Encore une petite chose à propos des prix. Je sais que vous parlez dans votre mémoire de réinsérer la clause de caducité pour les céréales. Suggérez-vous donc en fait que l'on rétablisse la clause de caducité pour ce prix plafond?

M. Tellier: Tout à fait. Nous estimons que la déréglementation des céréales a commencé et que d'ici à l'an 2000, cette clause devrait ni plus ni moins supprimer le plafond. Ainsi pour cette marchandise, comme pour les autres, les forces du marché détermineraient le prix de nos services.

M. Fontana: Voulez-vous que je poursuivre?

Le vice-président (M. Comuzzi): Non. En avez-vous enfin fini?

M. Fontana: Oui. Et je ne suis pas épuisé.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci. Monsieur Benoit, s'il vous plaît.

M. Benoit (Vegreville): Merci, monsieur le président.

Je voudrais commencer par une question très générale. Dans votre exposé et votre mémoire, vous parlez de la situation très difficile dans laquelle s'est trouvé le CN. Vous signalez une réduction de vos recettes et dites que vous avez eu à opérer des coupes importantes dans vos coûts. Je dirai que vous vous fondez sur cet argument pour réclamer le maintien d'une protection dans la Loi.

En Nouvelle-Zélande, lorsque l'économie s'est écroulée pour de bon, on a réduit le nombre d'employés du secteur ferroviaire d'environ 75 p. 100. Ce sont des chiffres que j'ai entendus cités et, bien que je ne suis pas expert en la matière, certains de mes interlocuteurs néo-Zélandais m'ont dit que le système fonctionnait extrêmement bien.

Le CN a fait des compressions de personnel mais certainement pas autant qu'en Nouvelle-Zélande. Je me demande en fait s'il n'y a pas énormément de choses à faire du côté des coûts et si vous avez là un argument légitime pour maintenir ou pour rétablir certaines des mesures protectrices dont vous parliez aujourd'hui.

M. Tellier: D'abord, à ce dernier sujet, nous ne demandons pas de mesures de protection. Nous souhaitons que s'exerce le jeu des forces du marché. Au cours de cet échange nous avons dit d'entrée de jeu que le projet de loi, le nouveau texte législatif, maintiendrait des mesures de protection. Toutefois c'est une protection pour les expéditeurs, et non pas pour nous. Comme l'a dit M. Davies, nous serions tout à fait heureux de nous défaire de tout cela.

Pour revenir au New Zealand Rail, la semaine dernière je m'entretenais avec des gens du Wisconsin Central Ltd. à ce sujet. Je ne peux ni confirmer ni infirmer le chiffre de 75 p. 100 dont vous avez parlé, et c'est pourquoi je ne vous contredis pas. La seule chose que j'aimerais dire, c'est que la situation est tout à fait différente. Le Wisconsin Central, la société ferroviaire américaine qui a acheté le New Zealand Rail, a essentiellement acheté les services de marchandises et de voyageurs, et ce dernier est encore fortement subventionné. Ce que je dis par conséquent, c'est que puisque nous n'assurons plus de services-voyageurs, comme vous le savez, nous ne sommes pas subventionnés, et c'est pourquoi la situation est tout à fait différente.

Quant à votre argument comme quoi il y a davantage à faire du côté des coûts, je vous assure que oui il y a beaucoup à faire. C'est pourquoi, dans le prospectus sur la privatisation du CN, nous disons publiquement que pour ce qui est de la restructuration, nous devrions pouvoir continuer de supprimer un millier de postes par an. Je suis convaincu qu'en matière de compression des dépenses, nous n'avons encore touché que la pointe de l'iceberg. Quant à réduire notre structure des coûts, je m'attends certainement à ce qu'au cours des trois prochaines années on accomplisse tout autant qu'au cours des trois dernières.

.1620

Nous en prenons bonne note.

M. Benoit: En plaidant en faveur de la déréglementation, vous dites qu'il y a concurrence. Bien sûr je reconnais, comme les réformistes reconnaissent d'ailleurs tous, que lorsque la concurrence agit le gouvernement ne devrait pas s'en mêler. Toutefois on peut soutenir que dans le système ferroviaire la concurrence n'est pas vraiment efficace et qu'il est difficile de concurrencer le système ferroviaire, notamment pour le transport en vrac de marchandises.

M. Tellier: Je me permets bien respectueusement de diverger d'opinion avec vous sur ce point. Ce n'est pas le cas. Par exemple, je n'aime pas revenir là-dessus, mais pour ce qui est des engrais, il n'y a pas si longtemps nous avons perdu un contrat très important justement à cause de la concurrence.

Pour la potasse, la concurrence est féroce. Pour les céréales, par exemple, des élévateurs à grain très importants comme celui de Camrose, en Alberta, ont une voie du CN d'une part et d'une voie du CP de l'autre, ou encore la voie de l'autre société ferroviaire se trouve à faible distance, accessible par camion. Une part très importante du grain au coeur des Prairies se trouve dans un rayon de35 milles de la voie ferroviaire concurrente.

Une voix: À 80 p. 100.

M. Tellier: C'est pourquoi j'ai dit au départ que la concurrence existe dans le milieu ferroviaire. Nous n'essayons pas de gonfler les tarifs et je ne sais quoi d'autre. Les tarifs diminuent et il y a concurrence âpre entre le CP et le CN.

M. Benoit: Mon collège a comparé cette concurrence visible ou pas au poste d'essence. Il est difficile de mesurer l'intensité de la concurrence.

Ce qui est regrettable au Canada c'est que la législation sur les coalitions et sur la juste concurrence n'a que très peu d'effet. C'est un fait. Nous l'avons déjà vu quand des sociétés productrices d'engrais ont été accusées de fixer les prix et que l'affaire a traîné devant les tribunaux pendant 10 ans. La législation s'avère tout à fait inefficace.

Pour qu'une économie de marché fonctionne bien, il est légitime que le gouvernement adopte des lois efficaces pour garantir une juste concurrence. Nous n'avons pas de telles lois au Canada. Nos lois dans ce domaine sont sans doute les moins efficaces de tout le monde industrialisé. Je ne pense pas que nous puissions compter sur la législation en vigueur dans ce domaine ni sur les tribunaux pour régler le problème.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci, monsieur Benoit. Il n'y a pas de réponse à cette question.

M. Benoit: C'était une observation.

Le vice-président (M. Comuzzi): C'est bien ce que j'ai pensé.

M. Benoit: Vous le saviez? C'est bien.

Le vice-président (M. Comuzzi): Monsieur Davis, en répondant à M. Fontana, vous avez dit essentiellement que quand le bois résineux se vendait 192$ le mille puis a atteint 500$ le mille en l'espace de 16 mois, le CN n'a nullement bénéficié de l'augmentation du tarif-marchandises.

M. Davies: Pratiquement pas.

Le vice-président (M. Comuzzi): Le grain se vendait à 2,90$ le boisseau et le prix dépasse maintenant les 5$. La situation est-elle la même?

M. Davies: Dans cet exemple, nous avons enregistré une diminution. Rappelez-vous que nos tarifs pour le grain sont réglementés. En 1994, nous avons perdu 2$ la tonne sur notre prix en raison du mécanisme de réglementation. Comme le prix du grain augmentait sensiblement, notre prix diminuait.

Le vice-président (M. Comuzzi): Le grain est un mauvais exemple. Le bois est un meilleur exemple d'un marché non-réglementé.

M. Davies: C'est du pareil au même. Prenez le charbon, le prix à la livraison a augmenté mais notre part, si vous voulez, a baissé. Pour ce qui est de l'aluminium, on ne peut même pas mesurer la variation du taux ferroviaire comparativement à la variation du prix de l'aluminium. Il en est de même pour le cuivre et le soufre.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci. Vous avez apporté une précision.

Mme Terrana.

Mme Terrana (Vancouver-Est): Bonjour et bienvenue.

J'entends des gens dire qu'en réalité nous n'avons pas besoin de ce projet de loi puisque nous avons la Loi de 1987 sur les transports nationaux qui nous sert bien. Pensez-vous qu'on ait besoin de ce projet de loi?

M. Teillier: Oui, beaucoup pour la simple raison que la disposition la plus importante de ce projet de loi vise à nous aider à restructurer le réseau. Par conséquent les dispositions du projet de loi qui nous permettraient soit de créer des chemins de fer d'intérêt local ou d'abandonner des lignes, amélioreraient nettement la Loi de 1987.

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Nous reprochons au projet de loi de ne pas aller suffisamment loin. Mais nous prenons bonne note de vos observations. Tout n'est pas mauvais. Nous nous réjouissons néanmoins du processus beaucoup plus rationnel et rapide que ce projet de loi nous permettra d'utiliser pour abandonner l'exploitation de lignes et créer des chemins de fer d'intérêt local.

Mme Terrana: Merci beaucoup de le dire. Je ne sais plus qui a tort ou raison.

Compte tenu de vos observations et recommandations, pensez-vous que le projet de loi va suffisamment loin ou aussi loin que nous pouvons aller pour l'instant? Ou souhaiteriez-vous qu'on fasse plus?

M. Tellier: Je crois que le ministre des Transports a dit devant votre comité il y a quelques jours qu'étant donné que vous, les sociétés ferroviaires, sommes très déçues et compte tenu du fait que les expéditeurs veulent beaucoup plus, il doit se montrer modéré.

Je comprends son point de vue. Mais vous comprendrez qu'il est de mon devoir à titre de directeur du CN de demander un meilleur cadre réglementaire. Si vous me demandez si ce projet de loi est un compromis, je laisserai à M. Young le soin de répondre.

Mme Terrana: Il peut répondre.

Vous avez aussi parlé de partenariat. J'aime le partenariat. J'en ai vu des applications dans d'autres modes de transport et il donne des résultats. Diriez-vous que pour l'instant les transporteurs et les expéditeurs sont des partenaires?

M. Tellier: Beaucoup plus qu'ils ne l'étaient auparavant, puisque comme vous le savez, autrefois, il y avait des tarifs et ainsi de suite. Gérald Davis, qui m'accompagne, y a consacré la majeure partie de sa vie, il rencontrait des clients, s'efforçait de comprendre leur marché et essentiellement ajustait les tarifs et discutait avec eux de la façon dont nous pouvions améliorer la situation.

Revenons à l'exemple du charbon, puisqu'un témoin de Luscar a comparu récemment. M. Gouk disait que c'était une question de partage des profits. C'est beaucoup plus que cela.

Nous savons que Lucar doit être concurrentielle, et nous nous sommes donc demandé comment nous pouvions l'aider à l'être davantage. Voici certaines des choses que nous faisons. Alors que nous chargions nos trains à 263 000 livres nous les chargeons maintenant à 286 000 livres. C'est environ 15 tonnes de plus.

Voici le premier point. Quand on change autant ces wagons, il faut renforcer les ponts, les structures et autres ouvrages.

Voici le deuxième point. Que faisons-nous? Nous utilisons de plus en plus des wagons en aluminium. Comment améliorons-nous la productivité avec des wagons en aluminium? Ces wagons sont plus légers, et on peut donc en mettre davantage sur la voie. On charge le wagon à 15 p. 100 de plus environ et comme le wagon est plus court, au lieu d'avoir un train de 100 wagons, il peut en compter 115. Ces wagons d'aluminium - Gerald pourrait vous en dire le prix - nécessitent un investissement. Nous avons investi.

Ce partenariat, qu'il s'agisse de Luscar ou de Smoky River ou d'autre, est monnaie courante. Si, par exemple, le dollar australien chute et que l'Australie devient plus concurrentielle parce que ses mines sont beaucoup plus près des ports, par exemple, nous essayons d'aider les producteurs canadiens.

Je ne dis pas que c'est parfait, mais je me trouvais chez General Motors - pour aller un peu vers l'Est - il y a environ 3 ou 4 semaines en compagnie de Gerald. General Moters est l'un de nos plus gros clients. Nous examinions à nouveau ce qui pouvait être fait au plus haut niveau pour nous assurer que la façon dont nous transportons ces voitures ou ces pièces de General Motors contribue le plus possible à sa compétitivité. C'est pour nous une occupation constante.

Mme Terrana: Ma dernière question a trait aux chemins de fer d'intérêt local. Ce matin, on nous a dit à nouveau que nous n'étions pas allés suffisamment loin en ce qui a trait à la vente des chemins de fer d'intérêt local parce que le transporteur ou les sociétés ferroviaires ont toujours la possibilité de ne pas les vendre s'ils ne le veulent pas. Si on ne veut pas les vendre, on ne les vend pas.

Le problème, bien sûr, tient au fait que trop peu de chemins de fer d'intérêt local ont été mis sur le marché quand c'était possible de le faire.

Quelle est votre expérience en ce qui a trait aux chemins de fer d'intérêt local?

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M. Tellier: J'aimerais répondre à la première partie de votre question d'abord.

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles nous n'avons pas créé davantage de chemins de fer d'intérêt local dans le passé. Et vous avez parfaitement raison; par exemple, dans le rapport de son groupe de travail, M. Nault en a parlé très précisément.

L'une des raisons est que le processus était très laborieux. Avant de conclure une entente avec Railtex en Nouvelle-Écosse, il nous a fallu une année entière. Les deux parties étaient tout à fait d'accord mais il a fallu un an pour y arriver.

Deuxièmement, en Ontario la Loi sur les droits successoraux a complètement paralysé l'exploitation des chemins de fer d'intérêt local.

Troisièmement, dans les provinces des Prairies, jusqu'au 1er août dernier, la restructuration des embranchements servant au transport du grain était complètement gelée.

C'est pourquoi nous n'avons pas tellement accompli de choses, et nous espérons que cela va changer très rapidement.

La deuxième partie de votre question avait trait à notre expérience. Or notre expérience est très bonne. La subdivision de Murray Bay, dont j'ai parlé en répondant à la question de votre collègue il y a quelques minutes, est essentiellement une expérience utile. Railtex aussi. Nous avons eu deux expériences avec Railtex, une en Ontario, Goderich-Exeter, et une en Nouvelle-Écosse, et dans les deux cas nous étions satisfaits.

Et bien sûr nous avons eu l'expérience de Central Vermont. Vous vous rappellez sans doute qu'aux États-Unis, la compagnie Central Vermont traversait le Vermont, le New Hampshire et ainsi de suite. Nous l'avons vendue il y a moins d'un an, encore une fois à Railtex, et nous sommes très heureux aussi de l'exploitation de ce chemin de fer d'intérêt local.

Mme Terrana: J'aimerais mentionner le chemin de fer d'intérêt local d'Okanagan. Comme qualifieriez-vous cette expérience?

M. Tellier: C'était une bonne expérience.

Je précise pour la gouverne de vos collègues qu'à la division Okanagan nous avons mis en place des mesures d'encouragement internes, nous avons accordé des primes et ainsi de suite. On l'exploite comme un chemin de fer d'intérêt local interne. C'est une très bonne expérience. Dans certaines régions du pays, cela peut être préférable à la vente à un exploitant de chemin de fer d'intérêt local de l'extérieur.

Nous avons aussi eu une très bonne expérience au Québec. Au Québec, nous avons quelque 2 600 milles de voie. Nous avons mis en vente la voie de tout le Nord du Québec, soit environ 1 100 milles et les syndicats sont venus nous demander si nous allions ralentir les démarches de vente s'ils parvenaient à une entente. Nous avons répondu que oui et nous avons négocié une très bonne entente avec tous les syndicats de ce district.

Par conséquent, nos coûts ont diminué de façon importante sur ce territoire de chemin de fer d'intérêt local interne, et nous avons décidé de ne pas le vendre et de créer plutôt une division interne qui n'est pas sans rappeler ce que nous avons dans la subdivision d'Okanagan. C'est une très bonne affaire pour tout le monde.

Mme Terrana: Nous tenons donc un bon système avec le projet de loi C-101. Merci.

M. Hubbard (Miramichi): Avec le changement aux chemin de fer d'intérêt local et la restructuration des sociétés ferroviaires, nous parlons d'employés qui auparavant étaient protégés par différents syndicats. Je pense particulièrement à l'Express du CN, tout les employés ont vraiment lésés. Votre société serait-elle en mesure de protéger les divers employés qui seraient touchés par la création de chemins de fer d'intérêt local?

M. Tellier: Tout dépend de ce qu'on entend par protection.

Je vais vous décrire le système en place maintenant. A la suite des négociations et de l'arbitrage qui ont suivi la grève du printemps dernier, nous avons maintenant en place des contrats de travail qui seront en vigueur jusqu'au 1er janvier 1998. En vertu des dispositions sur la sécurité, si nous abolissons un poste, et que l'employé soit prêt à déménager là où il y a un autre poste à combler, il obtient jusqu'à 90 p. 100 de son revenu jusqu'à concurrence de six ans.

Supposons que nous abolissions un poste à Québec et qu'il y ait un autre poste à combler à Calgary ou à Emonton. Si l'employé n'était pas prêt à déménager, il ou elle bénéficiera de ce qu'on appelle la sécurité d'emploi, auquel cas jusqu'à 65 p. 100 de son revenu serait protégé jusqu'à concurrence de cinq ans, selon le nombre d'années de services accumulées.

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Pour répondre à votre question précise, supposons que nous vendions un chemin de fer d'intérêt local en Colombie-Britannique. Son exploitant va alors se dire, par exemple, qu'il y a 100 employés dans ce territoire. Il va décider du nombre de nos employés qu'il souhaite garder. Supposons qu'il s'agisse des deux tiers. L'autre tiers acceptera de déménager là où il peut y avoir du travail et où ils seront protégés par la garantie d'emploi ou bien refusera, auquel cas, ces employés bénéficieront de la sécurité d'emploi, ce qui veut dire qu'ils pourront toucher 65 p. 100 de leur revenu jusqu'à concurrence de cinq ans.

Nous ne pouvons pas protéger absolument tous ceux qui peuvent être touchés, mais l'intéressé est protégé par la convention collective qui existe maintenant, à la conclusion des derniers contrats de travail.

M. Hubbard: Compte tenu de la quantité de voies qui sont sous-utilisées, avez-vous une liste de voies qui pourraient donner lieu à la création de chemins de fer d'intérêt local ou qu'on pourrait envisager de vendre?

M. Tellier: Oui. Nous disons dans notre prospectus que nous allons restructuration 4 000 milles de voies au cours des quatre prochaines années. Ces voies seront soit abandonnées soit transformées en voies de chemin de fer d'intérêt local, qu'il s'agisse de chemins de fer d'intérêt local interne comme la subdivision Okanagan et celle du Nord du Québec ou encore des chemins de fer d'intérêt local comme ceux qu'on a vendus à Railtex.

M. Hubbard: J'ai une dernière question, monsieur le président.

Les Canadiens s'intéressent beaucoup aux chemins de fer depuis plus de 100 ans. En ce qui concerne la cession des propriétés et des lignes secondaires, pensez-vous que l'intérêt public, c'est-à-dire l'intérêt du gouvernement du Canada, est protégé par le projet de loi C-101?

M. Tellier: Oui. Et nous pensons que cette disposition relative aux différentes étapes qu'il faut francher...

Comme vous le savez, nous annoncerions notre volonté d'avoir un plan à jour comportant tous les détails, y compris la liste de toutes les lignes que nous déciderons d'abandonner ou de vendre. En cas d'abandon, les syndicats, nos employés, les municipalités, la province, etc. en seront informés. Si nous n'avons pas d'acheteur, il incombera au gouvernement fédéral, provinciaux et municipaux, ou à un propriétaire adjacent de décider s'ils veulent acquérir le terrain.

Je pense que la procédure prévue dans le projet de loi protège effectivement l'intérêt public, et s'il existe une possibilité de sauver une ligne, nous allons le faire.

M. Hubbard: Monsieur le président, cela dit, je sais que vous répondez en ce qui concerne...

Le vice-président (M. Comuzzi): Vous êtes pire que Fontana.

Des voix: Oh, oh!

M. Hubbard: Une seule fois.

Autrefois, on cédait la propriété et pas nécessairement la ligne. Je pense à l'ancienne société que j'ai mentionnée. C'est effectivement ce qui s'est passé avec cette société et c'est la raison pour laquelle ses employés se trouvent dans une situation aussi tragique aujourd'hui.

Ce projet de loi protège-t-il la population, les employés et les Canadiens en général, et empêche-t-il qu'une telle situation ne se reproduise?

M. Tellier: Oui. Monsieur le président, je pense que l'honorable député fait sans doute allusion à la situation de CN Route. Cela s'est passé longtemps avant mon arrivée, mais comme vous, je déplore beaucoup les événements qui ont eu lieu dans cette situation.

M. Hubbard: Je vous remercie.

Le vice-président (M. Comuzzi): Nous avons respectivement M. Gouk, Mme Cowling etM. Nault.

M. Gouk: Je voudrais des éclaircissements sur un point. Le CN et l'autre principale compagnie de chemin de fer ont laissé entendre que la LTN de 1987 était une loi très favorable aux expéditeurs, et qu'elle a créé beaucoup de problèmes dans le secteur ferroviaire. Pourriez-vous nous en dire plus?

Je ne suis pas comptable. D'après les chiffres que vous nous avez donnés aujourd'hui, en 1986, c'est-à-dire un an avant l'adoption de la LTN, vous avez subi des pertes. Après l'adoption de cette loi favorable aux expéditeurs, vous avez réalisé des bénéfices en 1987, 1988 et 1989. Il en a été de même en 1994. Tous ces bénéfices ont été réalisés grâce à la LTN de 1987, mais les chiffres relatifs au secteur ferroviaire américain indiquent essentiellement la même tendance, sauf qu'il y a eu des pertes cette année, alors que les États-Unis n'ont pas eu de LTN en 1987. Pourriez-vous nous expliquer ce qui s'est passé et pourquoi la LTN de 1987 est préjudiciable au secteur ferroviaire?

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M. Tellier: Il faut examiner un certain nombre de facteurs. Premièrement, nos recettes diminuent. Notre secteur n'est pas en croissance. Deuxièmement, les tarifs diminuent; par conséquent, les bénéfices qui ont été réalisés pendant ces années provenaient d'une augmentation de la productivité.

Vous avez certainement remarqué que, par exemple, nos gains l'année dernière s'élevaient à 245 millions de dollars, alors que nos recettes avoisinaient les 4 milliards de dollars. Ce taux de rendement ne suffit pas pour acheter, par exemple, les wagons en aluminium que je vous décrivais il y a quelques minutes. Par conséquent, chaque fois que nous proposons une dépense en capital au conseil d'administration, il est très difficile de la justifier en raison de notre faible taux de rentabilité. Cela sera encore plus difficile lorsque nous serons privatisés.

En calculant notre échelle de tarification, l'Office national des transports estime que notre coût du capital est de 13,6 p. 100, et le taux de rendement moyen de nos investissements est de 6 p. 100. Je suis sûr que vous n'investiriez pas votre argent dans ce genre de situation, et moi non plus. Telle est la situation dont nous parlons. Assurons-nous que les forces du marché déterminent le rapport qui devrait exister entre le CN ou le CP et leurs expéditeurs, et ainsi de suite.

M. Gouk: Je ne prétends pas que vous êtes une entreprise extrêmement rentable. De toute évidence, les chiffres indiquent clairement que tel n'est pas le cas. Cependant, vous avez eu des pertes l'année précédant l'adoption de la LTN de 1987, et après l'introduction de cette initiative favorable aux expéditeurs, vous avez réalisé des bénéfices pendant trois années consécutives et en 1994, contrairement à vos homologues américains. Ainsi donc, le marché est mou. Nous le savons.

Dans ma circonscription, il y a une fonderie de plomb et de zinc. Cette entreprise n'est pas rentable non plus, mais ce n'est pas la LTN de 1987 qui en est la cause. J'essaie simplement de comprendre comment il se fait, si l'on en croit les entreprises ferroviaires, la modification de la LTN en 1987 aurait été très mauvaise pour le secteur, que le CN soit passé d'une année déficitaire à trois années excédentaires consécutives. J'aimerais donc savoir où se situe ce problème, car on me dit que les entreprises ne sont pas rentables.

M. Davies: J'aimerais avoir les données dont vous parlez, car ce serait plus facile pour nous. Je ne sais pas où vous avez lu que les compagnies de chemins de fer des États-Unis ont accusé une perte en 1988 ou depuis, car il n'y en a pas eu.

M. Gouk: J'utilise les chiffres que vous nous avez donnés aujourd'hui.

M. Davies: Il s'agit de nos opérations ferroviaires aux États-Unis, et non pas des chemins de fer américains.

Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Ma première question porte sur les recettes du Canadien national. Vous avez dit qu'elles diminuent. Est-il vrai que les recettes du CN proviennent du secteur céréalier de l'Ouest du Canada?

M. Tellier: Je pense que près de 60 p. 100 de nos recettes proviennent de la région située à l'ouest de Winnipeg.

Mme Cowling: Est-il donc vrai que ces recettes ont été utilisées pour subventionner vos opérations dans l'est du pays?

M. Tellier: Non. On ne peut pas parler de subventions, car nous ne demandons pas aux expéditeurs de l'Ouest un tarif plus élevé pour compenser les pertes encourues dans l'est du pays par le passé. Si nous avions des tarifs moins élevés dans l'Est et plus élevés dans l'Ouest parce que nos recettes sont plus importantes dans cette région du pays, on pourrait alors parler de subventions. Comme je l'ai dit, nos tarifs diminuent considérablement dans l'ouest du pays; par conséquent, l'Ouest ne subventionne pas l'Est.

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Si vous dites que la situation financière du CN serait nettement plus mauvaise sans l'Ouest, je suis tout à fait d'accord avec vous.

Mme Cowling: Ma deuxième question porte sur l'abandon des lignes ferroviaires. Quand la liste sera-t-elle publiée? Le savez-vous?

M. Tellier: Je ne sais pas si le projet de loi prévoit un calendrier précis, mais nous pensons que quelques mois après l'entrée en vigueur du projet de loi, nous diffuserons cette information dans nos bureaux et à l'intention des députés fédéraux et provinciaux, et de toutes les provinces.

M. Davies: Avant de publier la liste, nous allons nous assurer que nos clients, les députés et nos employés, soient informés de nos intentions. Nous ne voulons pas que toutes les principales parties concernées apprennent la nouvelle dans les journaux. Nous publierons la liste dans les meilleurs délais, mais nous voulons nous assurer qu'il n'y a pas de surprise pour les intéressés lorsque la liste sera publiée. Nous voulons donc prendre le temps nécessaire pour préparer les gens.

Mme Cowling: Ma troisième question concerne les différents produits. Vous avez dit que les recettes provenant du charbon, de la potasse et du bois augmentent et vous les avez comparées à celles provenant du blé. Pensez-vous qu'il soit juste de comparer le blé à des produits comme le charbon, le bois et la potasse alors qu'en réalité, ce sont les agriculteurs des Prairies qui assumeront le coût de transport des céréales?

M. Davies: Je me suis peut-être mal exprimé. Si j'ai donné l'impression que les producteurs céréaliers des Prairies sont les seuls qui ont subi une réduction de tarif en 1994 alors que tous les autres expéditeurs ont connu une augmentation, je puis vous assurer que je me suis mal exprimé, car la concurrence joue encore sur le marché. À l'instar des céréales, bon nombre de produits ont vu leur prix baisser continuellement. Les prix de certains produits ont augmenté, mais il y en avait très peu.

M. Nault (Kenora - Rainy River): Vous avez dit que, depuis 1987, les tarifs moyens imposés aux expéditeurs avoisinaient 30 p. 100. Pourriez-vous me dire si, au cours de la même période, la situation était semblable sur le marché nord-américain et, en particulier, aux États-Unis.

M. Tellier: Oui, les tarifs ont baissé à peu près au même rythme aux États-Unis. En raison de cette baisse, il y a eu une érosion de la rentabilité ou de la marge partout en Amérique du Nord.

M. Davies: Étant donné que les États-Unis sont nos principaux clients en ce qui concerne les produits de base, nous devons être concurrentiels avec les transporteurs ferroviaires de ce pays. Quand ils baissent leurs prix, nous les suivons. Ainsi va la concurrence.

M. Nault: Il doit être évident pour les expéditeurs, les chemins de fer et tout le monde dans cette salle que les États-Unis constituent notre marché et que c'est là que nous devons livrer la concurrence.

Il semble y avoir une perception, du moins chez les expéditeurs à qui nous avons parlé jusqu'ici, que la LTN de 1987 était un bonne loi, et ils se demandent pourquoi nous tenons ces audiences.

Il est difficile, du moins dans mon esprit, de comprendre pourquoi les expéditeurs ne partagent pas l'idée selon laquelle le secteur ferroviaire éprouve de sérieuses difficultés et que si l'on ne remédie pas à la situation, nous allons tous en pâtir à un moment donné.

Pourriez-vous m'expliquer pourquoi il y a une perception, ne serait-ce que chez les témoins que nous avons reçus jusqu'ici, que ce que vous demandez en tant que compagnie de chemins de fer... et je conteste un peu l'argument sur le partenariat, monsieur Tellier. Compte tenu de ce que j'ai entendu jusqu'ici, ces gens-là ne semblent pas être vos amis.

Pourquoi les expéditeurs semblent-ils penser que les chemins de fer sont en bonne posture? Pensent-ils que le gouvernement va renflouer les chemins de fer, s'en occuper, et continuer de les subventionner lourdement afin que les expéditeurs puissent continuer à en bénéficier et à ne pas payer le juste prix du marché?

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D'où vient tout ce raisonnement? J'ai entendu et lu tout ce qui s'est dit ces derniers jours, mais votre attitude et votre philosophie semblent être aux antipodes de ce qui se passe au pays.

M. Tellier: Si j'étais expéditeur, je dirais que la loi de 1987 était tout simplement fantastique, et j'exhorterai les députés à ne pas y toucher. Au fond, les expéditeurs cherchent simplement à améliorer leurs avantages.

J'ai un certain nombre de tableaux. Celui-ci, par exemple, indique le nombre de tonnes de charbon que nous acheminons à Hydro Ontario, et ici, nous voyons l'évolution du tarif. Voici le charbon que l'on transporte vers la côte ouest, et voici l'évolution de nos tarifs dans cette région. En somme, il n'y a pas de tendance à la hausse.

Si j'étais PDG d'une compagnie houillère et non pas de Canadien national, ou si j'étais simplement exploitant de potasse ou de bois, je vous inviterais à ne pas toucher à cette loi parce qu'elle est tout simplement fantastique. Ne soyez donc pas surpris.

Quand je dis que nous essayons d'établir un partenariat et quand je regarde ces tarifs... De toute évidence, je ne peux pas vous donner de chiffres, car il s'agit de contrats confidentiels, et si je les dévoile, ces expéditeurs vont m'appeler demain matin pour me le reprocher. Permettez-moi de vous dire ce qu'ils font quand ils éprouvent des difficultés sur le marché.

En général, ils nous appellent pour négocier une baisse de tarif. Par exemple, ils viennent nous dire de voir de qui se passe dans la sidérurgie au Japon. Ils disent que les Japonais utilisent des techniques d'injection de carburant, des techniques d'injection de charbon, et ainsi de suite, et qu'ils n'ont plus besoin de charbon métallurgique de grande qualité comme par la passé, et qu'ils vont nous demander de baisser les prix.

Ces tableaux, par exemple, illustrent ce phénomène. Je ne pense pas que les députés doivent être surpris si dans ce domaine, nous ne sommes pas d'accord avec nos clients. Ils s'en tirent très bien à nos dépens.

M. Nault: D'accord; ainsi donc... Évidemment, l'objectif que nous visons est d'avoir un système intégré qui fonctionne efficacement et qui est rentable pour les expéditeurs, pour les chemins de fer et pour le pays. Au fond, voila l'objectif. Peu nous importe si les compagnies de chemins de fer ou les expéditeurs ne sont pas contents; l'essentiel est que le système fonctionne. Je ne sais pas si nous pouvons satisfaire les uns et les autres au rythme où vont les choses.

Ce qui m'intéresse, c'est ce dossier que M. Davies a abordé, à savoir l'Office même. Dans son intervention, il a mentionné le fait qu'il pouvait recourir à l'Office pour l'arbitrage. Il s'agit-là d'une menace que l'on a utilisée pour obliger les chemins de fer à baisser les prix.

Pourriez-vous m'expliquer - et nous allons inviter l'Office à en faire autant - ce qu'ils font là-bas? Si vous me dites qu'un expéditeur peut s'adresser à l'Office et obtenir un tarif inférieur à la normale pour le transport d'un produit donné, il est évident que quelque chose cloche à l'Office. Ce dernier est censé obtenir une entente et un arrangement acceptables et profitables pour les deux parties - c'est du moins ce que nous espérons.

Êtes-vous en train de dire, ici devant le comité, que parfois, quand on s'adresse à l'Office, il va offrir des contrats fondés sur l'arbitrage, et que vous perdez de l'argent en transportant le produit en question sur une ligne donnée?

M. Davies: N'oubliez pas que l'arbitrage ne se produit pas devant l'Office. Il intervient ailleurs.

M. Nault: Il s'agit d'un différent...

M. Davies: En effet; on va donc en arbitrage avec l'offre finale, et en vertu de la loi existante, l'arbitre est tenu de choisir l'une ou l'autre, c'est tout.

M. Nault: Dans le projet de loi - tout le monde pense au paragraphe 27(2) - pouvez-vous nous expliquer comment cette disposition peut aider les chemins de fer de façon tout à fait différente par rapport au passé? Les expéditeurs estiment que le paragraphe 27(2) met fin à la possibilité de conclure les bons arrangements dont vous parlez.

M. Tellier: Une fois de plus, pour expliciter ce que je disais tout à l'heure, nous ne voyons absolument aucun inconvénient à ce que les expéditeurs se présentent à l'Office pour demander une réparation, une correction ou quelque chose de ce genre. Par contre, nous disons que dans ce cas, il faut essentiellement deux tests.

Premièrement, cela doit se produire quand il n'y a pas de concurrence. Deuxièmement, cela doit se produire dans des situations où l'expéditeur peut démontrer que si la réparation qu'il demande n'est pas accordée, il subira un préjudice important. Telle est notre position; par conséquent, nous ne sommes pas du tout opposés à ce que les expéditeurs recourent à l'Office.

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Une fois de plus, à titre d'éclaircissement, l'Office n'intervient pas dans l'arbitrage. Dans les cas semblables, les deux parties présentent leurs meilleures propositions et l'arbitre choisit l'une ou l'autre.

M. Davies: En vertu de la loi, le paragraphe 27(2) ne s'applique pas à l'arbitrage.

M. Nault: Très bien.

Le vice-président (M. Comuzzi): Dernière question, monsieur Nault.

M. Nault: Ma dernière question n'a pas vraiment de rapport avec la précédente, mais je vais quand même la poser, monsieur le président. Elle porte sur certains groupes autochtones qui recourent aux tribunaux pour se plaindre de l'absence de progrès dans l'examen des revendications territoriales, en raison du fait que certaines lignes du CN traversent des réserves et, évidemment, en raison de la privatisation de cette compagnie.

Pouvez-vous nous dire ce que vous allez faire dans une situation semblable, quelles en seront les répercussions, et quel sera la rôle du gouvernement en ce qui concerne les lignes du CN traversant des réserves? Évidement, cela se produit dans toutes les régions du pays; j'aimerais donc savoir comment tout cela se dessine, car je pense que presque tout le monde dans la salle sera touché d'une façon ou d'une autre - je veux dire les députés.

Mr. Tellier: Monsieur le président, je tiens à remercier M. Nault d'avoir posé cette question.

Pas plus tard que ce matin, 11 heures, monsieur Todd et moi avons rencontré une alliance de certaines bandes de la Colombie-Britannique. La question se pose essentiellement dans cette province, où nos lignes traversent plus de 100 réserves, si j'ai bonne mémoire. Je pense que près de 36 bandes sont concernées. Leur préoccupation, qui est bien fondée, porte sur le fait que, à partir du moment où nous ne serons plus une société d'État, nous deviendrons une tierce partie dans leurs revendications territoriales, et cela pourrait nuire à leurs droits.

Je crois que les personnes que nous avons rencontrées aujourd'hui vont comparaître devant vous; vous pourriez donc leur poser la question. À mon avis, c'était une bonne réunion. Nous avons passé une heure et demie ensemble. Il y avait quelques chefs accompagnés de leurs concitoyens.

Nous nous sommes entendus d'abord sur le fait qu'en ce qui concerne les terres traversées par nos lignes, elles seront rétrocédées aux bandes lorsque les chemins de fer n'en auront plus besoin. Nous n'y voyons aucun inconvénient. Évidement, cela fait partie d'une procédure de revendication territoriale. Il incombe au ministre des Affaires indiennes et au gouvernement d'en décider. Quant à nous, au Canadien national, cela ne nous dérange pas de leur confirmer essentiellement ces... Pour nous, l'essentiel est de protéger l'intégrité de notre réseau. Mais ni nous n'avions plus besoin de ces terres pour exploiter nos lignes, nous les céderions volontiers aux autochtones. Voilà le premier point sur lequel nous nous sommes entendus.

Deuxièmement, les autochtones ont soulevé un certain nombre de questions. Je suis sûr que par le passé, les compagnies ferroviaires n'étaient pas aussi sensibles qu'elles le devaient à l'égard des autochtones. Autrefois, nous avons certainement pris des mesures qui portaient atteinte à leurs droits, et il reste un certain nombre de questions qu'il faut régler. Ce matin, nous nous sommes aussi entendus sur le fait que je vais désigner notre vice-président principal dans l'ouest du pays, monsieur Rick Boyd, pour participer à une réunion des deux parties pour créer un groupe de travail qui examinera des questions pratiques et terre-à-terre qu'il faut régler.

Troisièmement, je me suis engagé, à leur demande, à leur rendre visite avant Noël, et nous nous sommes entendus provisoirement sur les deux premières semaines de décembre.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci, monsieur Tellier. Nous avons un vote qui va durer 15 minutes, mais je vais essayer de conclure la séance avant d'aller voter.

Je vais prier Mme Sheridan et Mme Wayne d'être brèves.

Mme Sheridan (Saskatoon - Humboldt): Ma question sera très brève, car M. Nault l'a déjà abordée.

En ce qui concerne le paragraphe 27(2), vous avez fait quelques observations. A votre avis, le critère du préjudice important est un ajout utile à l'ancienne loi.

M. Tellier: En effet.

Mme Sheridan: Cependant, je voudrais connaître votre définition de ce terme, car il n'est pas défini dans la loi. Certains expéditeurs nous ont dit que c'était là l'un des gros problèmes. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie-t-il qu'une compagnie doit être au bord de la faillite pour se prévaloir de cette disposition et se faire entendre par l'Office? Vous semblez l'approuver. Que signifie ce terme pour vous?

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M. Tellier: C'est une très bonne question.

Dans un premier temps, je dirai que je suis sûr que l'Office serait compétent pour le définir.

Deuxièmement, il existe des critères, par exemple en vertu de la Staggers Act, l'ICC et ainsi de suite aux États-Unis, pour juger ce qui constitue une situation importante. Comme Gerald l'a déjà dit, tout dépend de l'utilisation, de la proportion des coûts qui dépassent le coût normal variable, et ainsi de suite. Il existe une formule à ce niveau.

Je pense qu'une telle formule pourrait être élaborée par l'Office en collaboration avec les expéditeurs et le ministère des Transports, et je pense qu'on pourrait le faire assez clairement.

Mme Sheridan: Mais il n'y a rien dans la loi qui le définisse de cette manière. Pourquoi cela ne vous préoccupe-t-il pas? Êtes-vous tout simplement quelqu'un de plus confiant que certains expéditeurs pour estimer que l'office trouvera une bonne définition? Si je peux me faire l'avocat du diable pendant quelques instants, qui sait ce que cela signifie?

M. Tellier: D'après le concept qui figure dans le projet de loi et que nous appuyons, et d'après l'autre que nous proposons, nous estimons qu'il s'agit d'un recours un peu exceptionnel ou extraordinaire. Au lieu de laisser un expéditeur et un transporteur décider du tarif que l'un va exiger de l'autre pour transporter ses marchandises, si on laisse de côté les forces du marché pour confier la tâche à l'office, il est normal que la décision ne soit pas frustatoire. Je sais que les expéditeurs n'aiment pas cela.

Par conséquent, dès le départ, ils doivent être en mesure d'établir dès qu'ils se présentent devant l'Office, qu'il n'y a pas de concurrence et que, si le recours n'est pas accordé, ils subissent un préjudice important. Voilà à peu près le raisonnement.

Mme Sheridan: D'accord. Je vous remercie.

Le vice-président (M. Comuzzi): Ainsi, il ne nous reste que peu de temps. Nous n'avons pas le temps de faire une déclaration. Veuillez poser uniquement votre question.

Mme Wayne (Saint John): D'accord, Joe. J'ai une question brève à deux volets.

Monsieur Tellier, vous avez dit, en réponse à un membre du conseil, que le port d'Halifax a reçu un engagement à long terme de la part du CN. Il y a un autre port dans l'est, et j'aimerais savoir s'il a obtenu aussi un engagement à long terme pour acheminer ces produits vers les marchés.

Des voix: Ho, ho!

Mme Wayne: La deuxième partie de ma question est la suivante: comment pouvons-nous garantir le maintien des normes nationales quand nous vendons des tronçons de chemins de fer à des exploitants des lignes secondaires?

Le vice-président (M. Comuzzi): Je pense qu'elle fait allusion à St. John.

M. Tellier: Je sais très bien que l'ancienne maire de St. John s'intéresse au port de sa ville, et je voudrais l'assurer que l'engagement s'applique aussi au port de St. John. Ajoutons que, quand le CP a décidé de se retirer de St. John et quand on nous a demandé si nous étions prêts à nous occuper des deux côtés du port, nous avons accepté. Par conséquent, notre engagement à cet égard existe bel et bien.

Mme Wayne: Je vous remercie.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci, Elsie. Vous avez obtenu la réponse à votre question.

M. Tellier, M. Davies et M. Cantin, merci beaucoup.

Certaines personnes dans cette salle pourraient avoir l'impression que le travail de M. Davies consiste uniquement à aller négocier des prix inférieurs à ceux que prévoient les règlements. Lui arrive-t-il de négocier des prix supérieurs?

M. Tellier: Monsieur le président, si tel était le cas, il ne resterait pas longtemps à son poste.

Le vice-président (M. Comuzzi): Merci beaucoup.

La séance est levée.

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