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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 15 juin 1995

[Traduction]

.1106

Le président: À l'ordre! Je vois que nous avons le quorum.

Nous allons recevoir deux témoins aujourd'hui et passer ensuite à l'étude article par article du projet de loi ou, plus exactement, nous pencher sur le seul article de ce projet de loi.

Nous allons essayer de limiter l'intervention de notre premier témoin à 45 minutes et celle du second à 30 minutes environ afin de pouvoir examiner ensuite le projet de loi.

Notre premier témoin est Pierre Moncion. Il est président-directeur général de la Fédération canadienne des épiciers indépendants.

Je tiens tout d'abord à vous souhaiter la bienvenue, monsieur.

M. Pierre Moncion (président-directeur, Fédération canadienne des épiciers indépendants): Bonjour tout le monde.

Je suis ici ce matin en tant que représentant de la Fédération canadienne des épiciers indépendants et à titre de propriétaire d'une épicerie indépendante, la Pembroke Foodliner West, située à Pembroke, en Ontario.

La FCEI est heureuse d'avoir l'occasion d'exprimer son point de vue et de faire part de ses conseils au comité permanent des opérations gouvernementales. À titre d'association représentant des petites entreprises de tout le pays, la Fédération appuie les efforts du gouvernement fédéral pour réduire les dépenses et sabrer dans les coûts.

En tant qu'épiciers, nous avons été confrontés à une période économique difficile dans les années 1990 et nous sommes encore aux prises avec une faible relance. Nous comprenons donc qu'il importe de sabrer dans les coûts et de réduire les dépenses pour être viables à l'avenir. Cependant, nous demandons au gouvernement de ne pas déployer ses efforts dans ce domaine aux dépens des petites entreprises comme la mienne. Avant qu'on adopte la nouvelle pièce, nous souhaiterions qu'on étudie davantage des répercussions que cela aura sur les entreprises.

La Fédération canadienne des épiciers indépendants est une association commerciale nationale sans but lucratif qui a été fondée en 1962 dans le but de défendre les intérêts particuliers des épiciers indépendants au Canada. Notre organisation compte plus de 3 800 supermarchés d'alimentation administrés par des propriétaires indépendants, dans tout le pays.

Nos membres comprennent des franchisés de chaînes d'alimentation comme IGA, Super Valu, Knechtel's et Your Independent Grocer. Les membres du comité venant des régions vont peut-être aussi reconnaître des noms de chaînes entièrement indépendantes et très solides comme Thrifty Foods, Penner Foods, Stong's, Gaynor Foods, Galati Brothers, Commisso's, Lovsin's et Coleman's.

Nous sommes un organisme populaire, qui entend bien collaborer avec le gouvernement et l'industrie pour trouver des solutions efficaces à des problèmes courants. La FCEI a consulté tout un éventail de membres dans tout le Canada pour connaître leur point de vue sur la conversion du billet de 2$ à la pièce de 2$. Elle a également consulté un certain nombre de fabricants de matériel pour déterminer leur niveau de sensibilisation à la question et leur capacité de répondre à ce changement.

À partir de ces discussions, on a relevé les principales préoccupations suivantes au sujet de l'introduction de la pièce de 2$.

.1110

Les épiciers seront confrontés à certains coûts. Ce sont toutes les entreprises qui ont des caisses enregistreuses ou qui fonctionnent avec des pièces, qui devront supporter ces coûts.

Les tiroirs des caisse enregistreuses que l'on utilise à l'heure actuelle ne sont pas conçus pour recevoir une pièce supplémentaire. J'en ai apporté un et je vous invite tous à l'examiner un peu plus tard. Les compartiments pour les pièces du tiroir-caisse sont complètement pleins. Il ne reste de place que pour les billets.

En moyenne, les membres de la Fédération ont entre sept et neuf caisses enregistreuses, bien que certains épiciers indépendants en aient jusqu'à 15 ou plus. Le coût de remplacement des tiroirs varie de 150$ à 200$ pièce. Ainsi, les détaillants vont devoir supporter un coût important et inattendu.

Un certain nombre de membres de la Fédération, surtout dans les régions rurales, ont dit qu'à l'heure actuelle, ça va coûter beaucoup plus cher d'acheter des pièces que des billets aux banques. J'ai apporté un porte-documents pour montrer combien de pièces nous utilisons dans un journée.

La manutention des pièces a un coût nettement supérieur à celui des billets. Même si le tarif varie d'un endroit à un autre, l'épicier semble verser de deux à trois dollars pour chaque 100$ de pièces achetés, alors que dans le cas des billets de banque, le montant est bien inférieur à cela. La conversion prévue du billet de 2$ va accroître le coût global de manutention des pièces, puisqu'on va ajouter une autre pièce.

De nos jours, la plupart des détaillants utilisent des machines à compter les billets. C'est ce dont se sert le caissier ou la caissière en chef pour compter les billets. C'est une machine extrêmement rapide. Alors que nous allons utiliser davantage de pièces, les détaillants devront investir dans des machines à trier les pièces également. Les pièces sont déjà encombrantes et difficiles à manipuler pour les employés. Pour réduire le temps qu'il faut à l'employé pour faire la caisse, à la fin de la journée, cet investissement deviendra inévitable à la suite de la mise en circulation de la pièce de 2$. Les machines à trier les pièces coûtent entre 2 000$ et 10 000$, selon le volume de pièces manutentionnées.

Le gouvernement fédéral prévoit mettre en circulation la pièce de 2$ au début de 1996, ce qui n'est pas du tout réaliste pour nos entreprises. En discutant avec les représentants des principaux fabricants de caisses enregistreuses, nous nous sommes aperçus qu'ils n'avaient pas encore étudié la question. Ils ont dit que la plupart des fabricants de tiroirs se trouvaient aux États-Unis et qu'ils ignoraient qu'on entendait procéder à cette modification et ce, rapidement. Ainsi, il est irréaliste de penser que les détaillants seront capables de manipuler la pièce de 2$ en 1996.

De plus, les épiciers sont confrontés à l'heure actuelle au fardeau financier lié à l'élimination graduelle des CFC d'ici la fin de cette année. La plupart des détaillants sont en train de modifier leurs installations ou même d'investir dans du nouveau matériel de réfrigération pour utiliser les nouveaux frigorigènes coûteux. Ainsi, de nombreux détaillants devront dépenser des milliers, voire des dizaines de milliers de dollars pour respecter les règlements d'ici 1996. Nous sommes donc forcés d'investir beaucoup dans du nouveau matériel sur une très brève période.

La Fédération voudrait soumettre au comité les recommandations suivantes pour que l'introduction de la pièce de 2$ pose moins de problèmes aux épiciers.

Nous exhortons le gouvernement à reporter de 12 mois la mise en circulation de la nouvelle pièce pour que les fabricants d'équipement et les détaillants aient suffisamment de temps pour se préparer et installer le matériel nécessaire. On pourra également ainsi mieux répartir les coûts de conversion de l'équipement n'utilisant pas de CFC. Nous demandons donc qu'on ne mette pas en circulation la nouvelle pièce avant 1997.

Pour aider les détaillants qui doivent investir dans du nouveau matériel, la Fédération cherche à obtenir pour les épiciers un avantage financier semblable à celui qu'on a offert aux détaillants lorsqu'on a mis en oeuvre la taxe sur les produits et services, ce qui a exigé la mise en place de nouvelles machines aux points de vente. Cet avantage financier a pris la forme d'une déduction d'impôt qui a aidé les détaillants forcés d'acheter du nouveau matériel à supporter les coûts.

La Fédération est heureuse d'avoir l'occasion de présenter ces instances. Nous croyons que ces recommandations sont équitables et nous soulignons que nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement pour trouver une solution acceptable à ce problème.

Merci.

Le président: Merci, monsieur.

Monsieur Marchand.

.1115

M. Marchand (Québec-Est): Je m'oppose à la pièce de 2$ pour des raisons plutôt semblables aux vôtres, mais je crains que les députés libéraux ne se soient déjà prononcés en sa faveur. C'est regrettable, car vous soulevez d'excellentes questions en demandant, pourquoi on se presse tant. Pourquoi le gouvernement agit-il si rapidement alors que tant de questions se posent encore même sur la rentabilité de l'introduction de la pièce de 2$?

J'ai été frappé de constater que le coût de remplacement des tiroirs-caisses variait de 100$ à 150$ pièce.

M. Moncion: Oui, c'est très coûteux.

M. Marchand: Combien a-t-il de caisses enregistreuses au Canada?

M. Moncion: J'estime qu'il y en a de 300 000 à 500 000.

M. Marchand: À raison de 125$ pièce, cela représente 60 millions de dollars environ.

M. Moncion: Cela fait beaucoup d'argent.

M. Marchand: Les détaillants vont dépenser beaucoup d'argent.

À propos du coût de manutention des pièces de monnaie, vous affirmez qu'il est beaucoup plus élevé que celui des billets.

M. Moncion: Les banques incluent les coûts dans nos frais d'administration. Elles comptent, en fait, le nombre de liasses que nous leur achetons mensuellement et ces coût entrent dans nos frais d'administration.

Nous sommes dans le secteur de l'alimentation depuis longtemps. Je suis allé à l'université et j'ai toujours travaillé dans l'entreprise familiale. Étant donné que nous étions propriétaires du magasin, je me suis souvent rendu à la banque.

Je veux que les gens aient une idée du poids de ce porte-documents. Il s'agit du montant moyen de pièces que nous recevons quotidiennement, nous devons l'apporter à pied à la banque qui se trouve à une rue et demie de là environ. Nous pourrions confier cet argent à quelqu'un d'autre ou faire appel aux services de la Brinks. Pour nous, à Pembroke, si nous traitions avec la Brinks, il nous en coûterait 30 000$ de plus par an, et nous avons donc décidé de nous rendre à la banque nous-mêmes. Nous faisons nos propres dépôts et ramassons nos pièces nous-mêmes.

J'oserais dire que le poids de ce porte-documents constitue un danger sur le plan de la santé et de la sécurité. Je le sais, car je me suis blessé en transportant des pièces. Je n'ai pas pesé ce porte-documents, mais cela doit faire au moins 30 à 35 livres. Le poids supplémentaire de la pièce de 2$ va rendre cela pratiquement impossible à porter. J'ai déjà du mal à le faire. Maintenant, il va peut-être falloir envisager de se rendre à la banque avec une autre personne pour pouvoir porter toutes ces pièces.

Le coût des pièces pour les banques va être astronomique. Elles vont nous refiler ces coûts. Nous allons devoir supporter des coûts énormes à long terme. En fin de compte, c'est le consommateur qui paiera la note. C'est la seule façon pour une entreprise de demeurer viable. Nous devons rentrer dans nos frais.

Pour ma part, je suis d'accord pour que le gouvernement fédéral réduise ses coûts. Je n'ai absolument rien contre cela mais il doit s'agir de véritables réductions de coûts. Je ne vois pas d'un bon oeil les réductions de coûts lorsqu'on fait supporter tout cela à quelqu'un d'autre. Les coûts demeurent, on ne les élimine pas. On va les refiler aux entreprises du pays qui, à leur tour, feront payer la note aux consommateurs.

M. Marchand: Je suis d'accord avec ce qu'il dit, en fait. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes opposés à ce projet de loi, au moins pour exiger que le gouvernement fasse son travail, car il ne l'a pas fait en l'occurrence. Nos recherches au sujet de ce projet de loi nous ont appris que le gouvernement fédéral n'a même pas procédé aux enquêtes ou aux sondages voulus dans la population. Il n'a pas procédé comme il se doit.

J'ai lu encore hier qu'aux États-Unis, on avait effectué un sondage Gallup pour le compte de U.S.A. Today et du réseau CNN. Selon ce sondage, 77 p. 100 des Américains, soit plus des trois quarts, étaient opposés à l'introduction d'une pièce pour remplacer le billet de 1$ aux États-Unis.

Au Canada, nous n'avons même pas eu cela. Ni même pas eu de véritable enquête. Lorsqu'on examine l'enquête qui a été effectuée, on constate très clairement que le gouvernement a manipulé les chiffres dans une certaine mesure.

.1120

Il y a donc les objections du public et les préoccupations des entreprises, qui sont importantes. Comme vous le dites, en fin de compte, c'est le consommateur qui va payer la note. Il convient de se demander pourquoi les ministériels agissent ainsi et pour quelles raisons ils sont si pressés.

Je suis curieux au sujet des coûts bancaires, je suppose que vous ignorez à combien ils s'élèveront.

De quels autres coûts est-il question? Ainsi, vous allez changer les tiroirs-caisses, puis il y a le coût de manutention des pièces. Y a-t-il d'autres coûts, notamment en ce qui concerne le personnel, ou...

M. Moncion: Eh bien, j'oserais dire que dans l'ensemble, les transactions frontales deviendront moins productives. Je n'ai pas effectué d'étude moi-même, mais j'ai déjà été caissier auparavant. Lorsqu'il y a beaucoup de clients dans mon magasin, je donne un coup de main à la caisse. Chose certaine, il est plus pratique et facile de remettre la monnaie aux gens avec des billets qu'avec des pièces. Il n'y a aucun doute là-dessus.

De plus, c'est plus pratique pour faire la caisse à la fin de la journée. À l'heure actuelle, nous avons des machines à compter les billets, mais pas de machines à compter les pièces. C'est très encombrant.

J'ignore si l'un de vous a un pot de monnaie à la maison. Vous le videz tous les deux mois environ pour compter ce qu'il contient et placer cet argent à un compte en banque pour votre enfant. Fondamentalement, c'est ce que nous faisons à la fin de la journée, tous les jours, au magasin. On fait la caisse de toutes les caissières qui ont terminé leur quart de travail. On compte tout.

M. Marchand: Compter des pièces serait cependant plus facile que de compter des billets, il suffit de les peser.

M. Moncion: Non, car nous avons une machine.

M. Marchand: Vous ne faites que peser les pièces et vous savez exactement combien de pièces vous avez.

M. Moncion: Ces machines ne sont pas aussi précises qu'on le prétend et à l'heure actuelle, la plupart des magasins n'ont pas de machine à compter les pièces. Il faut donc trier les pièces. Je sais qu'on les trie maintenant, mais dans le cas de certaines de ces machines, il suffit de mettre les pièces dedans et la machine additionne les pièces, cependant, ces machines coûtent 10 000$ pièce.

M. Marchand: Ce serait un coût supplémentaire.

M. Moncion: Je n'ai pas besoin d'une machine à compter les pièces maintenant. Cela augmente les coûts.

M. Marchand: C'est juste. Ce que vous dites fondamentalement, c'est qu'à l'heure actuelle, compter des pièces exige plus de temps et de travail. Quelqu'un doit le faire.

M. Moncion: Mais oui.

M. Marchand: Vous devez payer une personne pour le faire.

M. Moncion: Bien sûr.

Le président: Avant que je ne donne la parole à M. Epp, permettez-moi d'essayer de tirer quelque chose au clair, si possible.

Vous n'êtes pas opposés, du moins en principe, à l'introduction de la pièce de 2$. Vous semblez également dire que vous êtes prêts à supporter les coûts que cela va entraîner, et qu'en tant qu'industrie, à titre d'entreprise, vous seriez mieux placés pour absorber ces coûts en 1997 qu'en 1996.

En quoi ces 12 mois sont-ils si magiques? Je n'utilise pas le terme «magique» de façon péjorative. Quelle est l'importance de ce délai de 12 mois? Pourquoi va-t-il vous être beaucoup plus facile de procéder à cette conversion si vous avez 12 mois de plus à votre disposition?

M. Moncion: Eh bien, tout d'abord, on ne peut acheter pour le moment un tiroir comme celui-ci pour recevoir une autre pièce.

Le président: On ne peut pas les acheter?

M. Moncion: Non.

Le président: Vous dites donc que ce n'est pas une question de coût mais de disponibilité.

M. Moncion: En effet. Lorsque j'ai discuté de ce mémoire avec la personne à la Fédération qui l'a préparé, en fait, nous avions des divergences de vue fondamentales. Elle n'administre pas un supermarché.

Je lui ai signalé que je ne m'opposais pas vraiment à la pièce de 2$ sans dire pour autant que j'étais pour. Elle m'a dit fondamentalement que la question ne se posait pas, que le processus était en cours, qu'on ne pouvait rien y changer, puisqu'il s'agissait d'un élément du budget et qu'au mieux, nous pouvions espérer faire modifier le délai.

Comme je l'ai dit ici, pour ma part, en tant qu'exploitant d'une entreprise au Canada, je suis tout à fait contre la pièce de 2$. Je préférerais qu'on élimine complètement le billet de 2$, comme les Américains l'ont fait, et qu'on conserve la pièce de un dollar avant même d'envisager l'introduction d'une pièce de 2$. Au besoin, je préférerais que les choses demeurent ce qu'elles sont et qu'on conserve le billet de 2$, mais si j'avais vraiment le choix, je voudrais qu'on supprime complètement ce billet de 2$.

Le président: En plus de la disponibilité, quel autre...

M. Moncion: À l'heure actuelle, la conversion à d'autres frigorigènes nous coûte de l'argent. Lorsque vous entrez dans un supermaché, chose que vous avez faite, j'en suis persuadé, vous constatez qu'il y a des congélateurs et des chambres froides. Or, on doit changer le gaz utilisé maintenant parce qu'il détruit la couche d'ozone. Beaucoup de détaillants doivent effectuer d'énormes dépenses pour se convertir à des frigorigènes plus écologiques.

Le président: Ainsi, vous essayez d'étaler les coûts d'immobilisation?

M. Moncion: Très juste. C'était là un de ses arguments: ne pas avoir toutes ces dépenses dans la même année.

Le président: Merci.

.1125

M. Epp (Elk Island): Je suis désolé, mais je suis arrivé en plein milieu de la discussion. Je ne peux pas être à la fois au four et au moulin.

Une ou deux choses m'intéressent. Le changement proposé dans le contenu métallique des pièces de monnaie vous inquiète-t-il?

M. Moncion: Non, pas du tout.

M. Epp: C'est ce qu'il me semblait.

J'ai une deuxième question. Avez-vous la moindre idée du nombre de billets de 2$ qui vous passe entre les mains?

M. Moncion: Oui.

M. Epp: Est-ce la plus grosse coupure que vous avez?

M. Moncion: Nous ne prenons pas les billets de 2$. Nous prenons habituellement les coupures de 20$, 50$, et 100$, et nous utilisons de 2$ comme monnaie. La plus forte coupure pour nous est le billet 20$, mais nous en recevons. Une des plus grande... dans l'ensemble pour ce qui est de la petite monnaie, c'est la pièce de un dollar. Le billet de 2$ est à peu près au même niveau. Nous encaissons environ 1 000$ par jour en coupures de 2$.

M. Epp: Si vous n'aviez pas de coupures de 2$, autrement dit, si ce billet devait disparaître, sans être remplacé par une pièce équivalente, quelles seraient les conséquences pour votre industrie?

M. Moncion: Nous verrions certainement beaucoup plus de huards - ça ne fait aucun doute - mais je ne pense pas que nous serions obligés d'utiliser un compteur à pièces. Je ne crois pas que nous serions pour autant obligés de modifier nos tiroirs-caisse.

Dans ce cas cela économiserait au gouvernement le coût de l'introduction de la pièce de 2$.

C'est une option viable. Il faudrait l'étudier davantage, mais comme commerçant je serais prêt à accepter l'élimination pure et simple du billet de 2$ s'il coûte tant.

M. Epp: Dans ce cas, je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question: que préférez-vous, le maintien du billet de 2$ ou sa disparition?

M. Moncion: Je préférerais garder le billet de 2$.

M. Epp: Vous préféreriez le garder?

M. Moncion: Certainement.

M. Epp: Pour quelle raison?

M. Moncion: Eh bien, il existe déjà, et je préfère remettre un billet de 2$ plutôt que deux pièces de un dollar.

M. Epp: Je vous ferais remarquer que nous n'avons pas de pièce de 2c. Dans la menue monnaie, nous passons de 1 à 5c.

M. Moncion: Exact.

M. Epp: Ne pourrait-on pas aussi facilement avec les dollars en donner un, deux, trois, quatre...

M. Moncion: Comme je l'ai dit, je serais prêt à accepter cette solution. Je crois que l'ensemble de l'industrie serait prête à le faire.

M. Epp: Malheureusement, je n'ai pas pu entendre votre déclaration liminaire; je présume que vous en aviez une. Avez-vous parlé de la prolongation du délai, et sinon, seriez-vous prêt à répondre à une question là-dessus? Je ne comprends pas très bien pourquoi vous avez besoin d'une prolongation en cas de changement.

M. Moncion: Comme je l'ai expliqué, les tiroirs-caisse actuels ne sont pas faits pour recevoir les pièces de 2$. Par conséquent, celles-ci devraient aller dans le carré; qui est réservé aux billets. Actuellement, on ne trouve pas sur le marché de tiroirs susceptibles de recevoir la pièce supplémentaire. Dans combien de temps seront-ils disponibles? Je n'en ai aucune idée. La plupart de ces tiroirs sont fabriqués aux États-Unis.

En tant que propriétaire d'un commerce, je ne souhaite pas devoir prendre des pièces de 2$, voir le billet disparaître, et être obligé de travailler avec ces tiroirs. Je suis sûr que ce n'est pas impossible, mais ce serait peu pratique et cela causerait un certain problème et des complications.

Si c'est ce qu'on souhaite faire, il serait bon de laisser aux entreprises le temps de se préparer à recevoir les pièces de 2$.

M. Epp: Ma dernière question touche d'éventuels changements futurs. Le huard a été introduit il y a sept ou huit ans et il est possible qu'il y ait d'autres changements à l'avenir.

Vu ces changements dans les monnaies, votre industrie va-t-elle adopter la carte à puce, la carte de débit? Dans quelle mesure celle-ci remplacera-t-elle l'argent comptant? Envisagez-vous un avenir proche dans lequel les pièces de monnaie auraient entièrement disparu?

.1130

M. Moncion: Non, je ne crois pas qu'on n'éliminera jamais l'argent.

En ce qui concerne la carte de débit et toutes les entreprises d'une certaine taille, je peux vous dire que nos deux supermarchés de Pembroke ont adopté le système dès qu'il a été offert. Je paie, par mois, 100$ pour la ligne téléphonique et 32$ par machine; comme j'ai 10 caisses enregistreuses, cela représente 320$ par mois pour la location des machines; puis il y a les frais de 10c. par transaction. Actuellement, le système nous coûte environ 1 000$ par mois.

Si nous l'avons adopté si rapidement, c'était pour réduire les chèques sans provisions, la fraude, et éliminer la manutention de l'argent comptant et sa détérioration, car il se détériore. Au bout du compte, nous avons trouvé qu'il valait la peine de dépenser 1 000$ par mois.

Dans l'ensemble, effectivement, notre industrie a adopté la carte de débit avec une rapidité incroyable. Elle commence à être acceptée. Je dirais que 10 à 15 p. 100 des achats sont actuellement réglés par la carte de débit; c'est loin d'être fabuleux. Je préférerais arriver aux alentours de 75 p. 100.

Mais les gens ont encore du mal à joindre les deux bouts. Ils viennent à l'épicerie le soir avant d'encaisser leur chèque de paye et ils payent eux-mêmes par chèque ce qui leur permet d'acheter l'épicerie un jour plus tôt. C'est comme ça.

M. Epp: Une dernière question. Sur une échelle de 0 à 10, quelle est l'importance pour vous de préserver le statu quo et de ne pas remplacer le billet de 2$ par une pièce?

M. Moncion: Je dirais 7.

Le président: Avant de donner la parole à M. Duhamel, j'aimerais vous poser une question. J'espère qu'elle n'est pas trop stupide, mais je sais que dans votre secteur, ce n'est pas l'imagination qui manque.

En attendant de pouvoir acheter de nouveaux tiroirs-caisse, ne pourriez-vous pas partager un compartiment en deux et y mettre deux pièces différentes?

M. Moncion: Je ne sais pas. J'y ai pensé. Mais je pense qu'un compartiment partagé en deux serait très étroit. Et il faudrait d'abord trouver quelqu'un qui fabrique les cloisons. Il faudrait que ce soit fait professionnellement et le compartiment serait alors trop petit.

Le président: Vous le pensez.

M. Moncion: Je pense que je préférerais utiliser un des compartiments réservés aux billets.

Le président: Bien.

M. Duhamel (Saint-Boniface): Je vous remercie de votre exposé. Avant d'entrer dans les détails, avez-vous une idée de ce qu'il vous en a coûté pour les nouveaux frigorigènes? De quel ordre sont les dépenses? Par curiosité.

M. Moncion: De 2 000 à 10 000$. Cela dépend. Pour une grande chaîne, des mécaniciens viennent et tout est fait d'un coup. Il faut compter environ 10 000$ pour la conversion.

M. Duhamel: Que pensez-vous de ce changement? Est-ce un embêtement, est-il nécessaire, qu'en pensez-vous?

M. Moncion: Bien sûr qu'il est nécessaire de remplacer les CFC si l'on pense à l'avenir de nos enfants. Nous n'avons pas la tête dans le sable.

M. Duhamel: Un instant, ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire. Je vous demandais votre avis de commerçant.

M. Moncion: Je n'aime pas dépenser de l'argent pour rien.

M. Duhamel: Comment ces coûts se comparent-ils avec ce que coûterait la conversion à la nouvelle pièce, si elle est introduite? Je voulais simplement me faire une idée. Je sais que cela entraînerait des coûts supplémentaires, et il est bien évident que tout commerçant souhaite les réduire au minimum. Je le comprends, mais je voulais simplement voir comment cela se comparaît. Est-ce possible?

M. Moncion: Je dirais que la conversion à la pièce de 2$ sera beaucoup plus coûteuse que l'élimination des CFC, et je vais vous expliquer pourquoi. Pour les CFC, vous le faites une fois. Les mécaniciens viennent, ils remplacent le frigorigène, changent l'huile et c'est fait. On repart comme avant.

L'introduction de la pièce de 2$ aura, selon moi, une incidence négative durable. Le coût de manutention de la pièce ne disparaît pas.

M. Duhamel: Bon.

Le président: Je crois avoir compris la situation, mais si je fais erreur, reprenez-moi. Jusqu'ici, presque tout le monde est favorable à l'introduction de la pièce de 2$. Certains ont des réserves sur la date d'entrée en vigueur parce qu'ils craignent de ne pas avoir suffisamment de temps pour s'adapter. J'imagine que c'est parce qu'ils sont dans d'autres types d'occupations. Ils y voient des avantages possibles, et vous y voyez des coûts.

Ai-je bien compris?

M. Moncion: C'est exact, mais je pense aussi que la mentalité des Canadiens a complètement changé. Ils veulent lutter contre le déficit et réduire les coûts, et il est donc difficile à un entrepreneur de s'opposer à une mesure qui permettra de réduire les coûts du gouvernement canadien. Cela m'est difficile et me met mal à l'aise.

.1135

Je tiens également à faire remarquer à la personne qui me demandais s'il y aurait des coûts supplémentaires, que la plupart des supermarchés comme le mien possèdent un ou deux distributeurs automatiques. Je crois comprendre que l'on vous a présenté d'autres instances à ce sujet. Le coût pour modifier ces distributeurs se situerait entre 1 200$ et 1 500$ chacun, coût que le magasin aurait évidemment à assumer.

Nous avons un distributeur qui dispense des boissons gazeuses de la marque Le choix du président. Nous possédons ce distributeur, c'est pourquoi nous aurons à en assumer les coûts. Nous avons un autre distributeur qui dispense du Pepsi. Je ne sais pas si la compagnie assumera les frais ou si cela nous incombera également.

M. Duhamel: Avez-vous une idée, un chiffre approximatif, du coût que représenterait la conversion pour l'ensemble de l'industrie que vous représentez?

M. Moncion: Ce sera bien supérieur aux économies. J'ai vu dans le journal aujourd'hui que les économies représenteraient 250 millions de dollars sur 20 ans. Est-ce exact?

Au début, j'avais cru comprendre qu'il s'agissait de 250 millions de dollars par an. J'ai été très surpris de lire cela aujourd'hui.

Le président: Mettons les choses au point. Il y a deux sortes d'économies. Il y a l'économie que représente l'adoption de la pièce, soit 254 millions de dollars sur 20 ans, puis la question du seigneurage. Cela pourrait représenter des économies assez rapides, peut-être 18 mois, de 0,5 milliard de dollars. Il y a donc deux sources de revenus.

M. Moncion: Je n'ai certainement pas les ressources, et je pense que la FCEI n'a pas les ressources non plus pour faire une étude approfondie et pour engager des experts pour savoir exactement quels seront les coûts à long terme.

Je ne sais pas combien il y a au Canada de détaillants qui possèdent un magasin comme le mien, mais il me semble, d'après mon propre magasin, que nous allons continuer d'assumer des coûts qui se situent entre 10 000$ et 15 000$ par an au minimum.

M. Duhamel: Comment cela se compare-t-il avec l'argent que vous avez dépensé pour modifier vos systèmes afin de s'adapter à l'utilisation électronique de l'argent? Je ne sais pas quel est le terme exact; il s'agit des cartes de débit, de ce dont vous parliez il y a un instant.

M. Moncion: Ce coût est d'environ 12 000$ par an, mais comme je l'ai dit, cela s'accompagne d'économies pour le magasin. Nous éliminons la manipulation de l'argent comptant, de sorte que le personnel est plus productif. Cela réduit le nombre de chèques sans provision, et donc le temps que l'on consacrait à ce problème. Il arrive tous les jours qu'une carte de débit soit refusée, donc théoriquement, ce serait des chèques sans provision que nous aurions à retracer.

On ne peut pas vraiment comparer les deux. Le système des cartes de débit aide nos magasins à devenir plus rentables.

M. Duhamel: Non, mais je pense que c'est bien à condition de le faire correctement.

Si je vous ai bien compris, vous dites en réalité que les dépenses de conversion sont plus ou moins les mêmes, mais que dans un cas, elles s'accompagnent d'économies, puisque vous pouvez récupérer une partie de l'argent. C'est ce que je voulais vous souligner.

M. Moncion: C'est exact.

M. Duhamel: Bien.

[Français]

M. Marchand: J'aimerais revenir à la question des économies, parce que c'est toujours une question sensible. On prétend qu'avec ce projet de loi, on fait faire des économies au gouvernement. Comme vous l'avez dit, personne ne s'oppose à ce qu'on fasse des économies. Là, on parle d'une économie de 254 millions de dollars, mais sur 20 ans. C'est sûr que si le gouvernement éliminait le billet de 2$, il y aurait des économies.

Cependant, pour revenir à ce que vous avez dit plus tôt, en introduisant la pièce de monnaie de 2$, on ajoutera des coûts considérables à travers le système. Dans votre industrie, vous avez parlé d'un coût de plusieurs millions de dollars. On estime à 160 millions de dollars les coûts de conversion des machines distributrices, et on ne connaît pas encore les coûts que cela occasionnera aux banques. Cela représente des coûts considérables qui seront ultimement transférés au consommateur, qui sera désavantagé. Il n'y aura aucune espèce d'économie pour le consommateur moyen, le contribuable.

Pouvez-vous voir quelque part voir une économie dans cela?

M. Moncion: Non, je ne le peux pas.

.1140

M. Marchand: Dans le fond, il n'y en a pas. L'argument du gouvernement fédéral est que cela entraînera des économies, mais il n'y en n'aura pas. Théoriquement, pour la Monnaie royale canadienne, il y aura une économie de 254 millions de dollars sur 20 ans.

Mais, ultimement, cela affectera toutes les industries, les banques et même les municipalités qui devront changer leurs parcomètres pour qu'ils puissent accepter la nouvelle monnaie. Il y aura des coûts extraordinaires pour la conversion des machines distributrices. À long terme, comme vous venez de le dire, c'est encore le consommateur qui devra payer encore plus qu'il ne paie actuellement. Donc, il n'y aura pas d'économies.

Il ne faut pas se gêner pour dire qu'on s'oppose à ce projet de loi et suggérer au gouvernement que, s'il est tellement soucieux d'économiser, il pourrait tout simplement éliminer le 2$.

[Traduction]

Le président: Qui est le témoin, vous ou lui?

M. Marchand: Il est d'accord avec moi.

[Français]

Si on élimine...

[Traduction]

Le président: Par courtoisie envers le témoin, monsieur Marchand...

Cette personne se donne la peine de prendre le temps de nous donner des renseignements et vous lui faites un monologue.

M. Marchand: Oui, mais c'est vous qui prenez mon temps maintenant.

Le président: Allez-y.

[Français]

M. Marchand: C'est vrai qu'il n'y aura pas d'économies et que les coûts seront transférés au consommateur. Il y a des gens qui vous appuient, mais ils ne sont pas nécessairement du côté du gouvernement, dans votre idée qu'éliminer le 2$ serait plus économique à long terme, même si ce n'est peut-être pas ce que vous voudriez en ce moment. Si on était soucieux des conséquences de cela pour votre industrie, et donc pour les consommateurs, on attendrait au moins un an, ce qui vous permettrait d'adapter les tiroirs-caisses et le personnel. Au moins, on vous donnerait le temps de vous adapter à une transformation que vous ne désirez pas.

Je vous avoue que je n'arrive pas à comprendre, et c'est cela mon problème, quels seraient les aspects positifs de ce projet de loi. Je ne vois rien de positif dans ce projet de loi.

M. Moncion: J'aimerais aussi vous rappeler que quand les coûts sont élevés, cela réduit les profits. Nous payons des impôts sur nos profits. Donc, si nos profits diminuent, nous payons moins d'impôt.

[Traduction]

M. Bryden (Hamilton - Wentworth): J'aimerais remercier le témoin de son excellent exposé. Je pense que vous avez très bien défendu votre cause.

J'aimerais malgré tout vous poser une question. Vous êtes dans ce secteur depuis longtemps. Pour contourner le problème, pourquoi ne pas éliminer un élément? Par exemple, vous pourriez acheter des pièces de 10c. et ne changer que les pièces de 1c., 5c., 25c., un dollar et 2$. Pourquoi ne pas procéder ainsi?

M. Moncion: Rien ne m'en empêche, mais encore une fois, je ne crois pas que ce soit une option valable. Si je peux cesser d'utiliser des pièces de 5c., pourquoi ne pas éliminer les pièces de 5c. dans tout le Canada, si c'est une option valable?

M. Bryden: Peut-être est-ce la direction que nous allons prendre puisque le pouvoir d'achat de notre menue monnaie diminue continuellement.

Je vous fais remarquer que l'on pourrait facilement ne rentre la monnaie qu'avec des pièces de cinq cents. On a quatre pièces de 5c. pour deux de 10c. Je ne comprends pas. Si c'est un tel problème, pourquoi ne pouvons-nous pas procéder de cette façon? Je ne vois pas où sont les coûts. Je ne vois pas pourquoi le personnel ne serait pas en mesure d'y faire face. Je ne vois pas où est la difficulté de faire quelque chose d'aussi simple que cela.

.1145

M. Moncion: Le système monétaire actuel existe parce qu'il fonctionne. Il y a les pièces de 1c., 5c., 10c., 25c. et de un dollar. Si vous éliminez la pièce de 10c., vous devez utiliser deux pièces de 5c. Vous avez donc essentiellement le double de pièces.

M. Bryden: Je vous fais également remarquer que mon collègue du Bloc parlait du fait que les Américains n'aiment pas convertir les billets en pièces, mais je dois dire que la France utilise ce genre de pièces à valeur élevée depuis des années tout comme la Grande-Bretagne et bien d'autres pays européens.

Je ne comprends pas pourquoi si on le fait en France, on ne pourrait pas le faire ici. Avez-vous fait des comparaisons avec les pays européens?

M. Moncion: Non.

M. Bryden: Bon.

M. Moncion: Le système que nous avons actuellement fonctionne.

M. Bryden: Je n'en doute pas.

M. Moncion: Le problème est le suivant: quels sont les avantages de la conversion? En Europe, vous parlez de centaines et de centaines d'années de culture et d'histoire de la monnaie. Je ne vois pas très bien quelle est la logique d'avoir tant de pièces.

Mais il ne fait aucun doute que pour mon entreprise, l'adoption d'une pièce supplémentaire me coûtera de l'argent. C'est évident.

M. Bryden: Très bien. Merci beaucoup.

Le président: Nous allons essayer de terminer avec M. Epp.

M. Epp: Quelles seraient les conséquences si l'on retirait les pièces de 1c. de la circulation? Cela vous débarrasserait d'un type de pièce. On arrondirait les prix au montant de 5c. le plus proche.

M. Moncion: Je dois dire que l'élimination de ces pièces nous causera beaucoup de difficulté. Nous rendrons certainement davantage de monnaie que ce qui est dû. Si l'on doit 3c. au consommateur, on lui en rendra 5c.; ce sera un coût pour le consommateur.

Je ne peux pas imaginer une personne âgée ou une personne malentendante - ou n'importe quelle autre personne en difficulté - arriver à la caisse, en s'attendant à recevoir 98c. et n'en recevoir que 95. Cela ne serait pas acceptable.

Je fais 10 000 opérations de vente par semaine dans mon magasin. Cela veut dire que l'on doit ouvrir les tiroirs caisses 10 000 fois. Il y a des gens qui viennent souvent au magasin. Si je perds 3c. à chaque opération, cela va représenter des sommes considérables à la fin de la semaine.

M. Epp: D'accord, mais vous changeriez vos prix. Tous les prix dans votre magasin seraient modifiés au montant de 5c. le plus proche. Vous n'accepteriez que les pièces correspondant à ce prix.

Il faudrait que le gouvernement promulgue une loi pour éliminer les pièces 1c. Il y aurait une annonce selon laquelle après telle ou telle date, la pièce de 1c. n'aurait plus cours.

M. Moncion: Mais je vous dirais, monsieur, que nous avons plus de 10 000 articles dans nos magasins. Il faudrait donc que nous changions le prix de plus de 10 000 articles.

D'autre part, bon nombre de nos articles doivent être pesés. Nous n'avons aucun contrôle sur le prix de ces articles tant que le consommateur ne l'a pas acheté. Nous vendons de la viande au poids. Est-ce que nous allons l'arrondir au chiffre supérieur ou au chiffre inférieur?

Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point les agriculteurs qui viennent dans nos magasins pour vérifier si nos balances sont exactes sont pointilleux. Ce sont des mesures à 1c. près.

Nous enveloppons les poulets dans nos magasins. Il y a donc de l'humidité. Les inspecteurs viennent dans les magasins, enlèvent le poulet de l'emballage et le pèse sans l'humidité - l'humidité reste dans le plateau de la balance - et nous pénalisent en nous accusant d'essayer de profiter des consommateurs.

Le président: Heureusement, ce projet de loi ne crée pas ce problème.

M. Moncion: Dieu merci.

M. Epp: J'ai une autre question. Je sais que de nombreux magasins ont maintenant des distributeurs de monnaie. Les pièces tombent par une petite chute et il n'y a qu'à les ramasser.

Certains de vos membres possèdent-ils cette machine? Combien cela coûterait-il?

M. Moncion: Ces machines existent. Le problème c'est qu'elles ne sont pas tout à fait exactes. Je pense qu'elles causent plus de difficultés qu'autre chose.

.1150

Nos caissières sont responsables de faire la caisse. Il manquait de l'argent. Je n'ai jamais aimé les distributeurs de monnaie: il lui manque parfois 5 ou 10$ à la fin de la semaine. Je dois en parler avec la caissière qui va me dire que ce n'est pas elle qui rend la monnaie et qu'il y a peut-être un problème avec la machine. C'est une innovation qui n'a pas suscité d'enthousiasme dans l'industrie. Pour vous dire franchement, je n'en ai pas vu dans beaucoup de magasins.

M. Epp: Bon.

C'était là mes questions, monsieur le président.

Le président: Merci d'être venu comparaître, monsieur Moncion.

M. Moncion: Il n'y a pas de quoi.

Le président: Nous appelons maintenant M. Bruce Anderson. M. Anderson est un particulier de la région d'Ottawa. Il nous a écrit au sujet des pièces et de la monnaie. Il connaît bien le sujet. Il va nous parler de l'adoption de la pièce de 2$.

Il pourrait nous parler d'ailleurs de toutes sortes de choses, mais puisqu'il va être ici pendant une demi-heure seulement, il serait préférable de se limiter à la pièce de 2$. Après tout, c'est l'objet de ce projet de loi.

J'ai signalé à M. Anderson que s'il ne se limitait à 5 minutes pour ses remarques liminaires, nous aurions 25 minutes pour lui poser des questions.

Chers collègues, puisque M. Anderson ne sera ici que pendant 30 minutes, nous pourrions nous en tenir à 5 minutes au lieu de 8 pour la première ronde de questions. De cette façon, nous pouvons donner au moins...

M. Marchand: Pourquoi?

Le président: Si l'on passe 8 minutes pour chaque question, il n'y aura qu'une seule ronde de questions, c'est tout.

M. Marchand: Pourquoi nous limiter à 30 minutes? Peut-être aurons-nous beaucoup de questions intéresssantes à lui poser.

Le président: Eh bien, pourquoi ne commençons-nous pas par M. Anderson.

M. Bruce Anderson (présentation à titre personnel): Merci, monsieur le président, et membres du comité de m'avoir invité à vous faire cet exposé.

J'ai écrit «Réduction du coût des pièces: Six propositions de changement» lors d'un concours du Fraser Institute. C'est peut-être parce que ce document a suscité l'intérêt de ministres du gouvernement précédent et du gouvernement actuel ainsi que de fonctionnaires des finances, de la Banque du Canada et de la Monnaie royale du Canada que ces audiences sont organisées. En tout cas, ce document explique mon intérêt pour la question et prouve les idées suivantes dont je vais vous faire part.

Nous devrions passer à une pièce de 2$ car, d'après mes estimations, cela devrait rapidement faire entrer 750 millions de seigneuriage dans les coffres fédéraux au cours des cinq premières années.

Personne ne devrait être en faveur de cette conversion pour les 254 millions de dollars d'économies que l'on est censé faire au cours des 20 prochaines années. Avec cette pièce, tout comme avec la pièce de 1$, il n'y aura probablement aucune économie à faire au niveau des coûts de production pour le gouvernement.

Bien entendu, on évitera 20 ans de production de billets de banque. J'estime que cela représentera 4 milliards de pièces à environ 5c. la pièce, soit environ 200 millions de dollars. Je suis sûr que l'on vous a parlé de 6c., et c'est un coût global. En fait, c'est un coût très variable qui comprend les coûts affectés qui devront être transférés à d'autres billets de banque.

La production des pièces sur 20 ans va également coûter environ 200 millions de dollars. Environ la moitié doit être payée au départ. Les 300 millions ou 400 millions de pièces ne vont pas remplacer 250 millions de billets de banque en 20 ans. Il faudra un ratio de 2 à 1 ou de 450 millions en pièces de 2$ simplement pour commencer. C'est ce qui s'est passé avec la pièce de 1$ et c'est également l'expérience qu'ont faite d'autres pays.

Les pièces ne sont pas en circulation pendant 20 ans. En fait, je ne sais pas dans quel sens on dit qu'elles durent 20 ans. Il me semble que les pièces durent des centaines d'années. Mais pour ce qui est de leur circulation, c'est-à-dire avant qu'elles ne disparaissent, certaines étant perdues et la plupart conservées par les gens, elles durent environ sept ans. Donc il faut envisager 30 ou 35 millions de plus pendant une année pour toujours. Il faut calculer 550 millions de dollars de plus pour arriver à la vingtième année.

Je dirais également que les estimations de coût de la Monnaie royale du Canada sont suspects. On a dit que la pièce coûtera environ 16c. Or, la Monnaie royale a dit également que la pièce de 1$ coûterait 10,6 cents; c'est ce qui a été dit il y a 10 ans au comité chargé de cette question. Mais le prix du métal a chuté dans l'année et demie qui s'est écoulée entre le moment où ces estimations ont été faites et le moment où l'on a commencé à frapper la pièce. Et pourtant, les premières pièces ont coûté 13c. Mais en réalité, elles ont coûté 50 p. 100 de plus. C'est ainsi que 16c. peuvent devenir 24c.

.1155

Supposons que le prix augmente à 20c. Un milliard de pièces à 20c. pendant 20 ans représente 200 millions de dollars. Toutes les économies réalisées sur la production des billets seront consacrées à la conception proposée de la pièce.

Bien entendu, on peut réaliser des économies en concevant des pièces bon marché. J'ai dans ma poche - et peut-être que certains d'entre vous les connaissent, la pièce d'une livre britannique ou le dollar de Susan B. Anthony. Ce sont des pièces qui coûtent 5c. ou 6c. à produire et valent 1,40$ et 2,25$ respectivement. Si vous faite une pièce à ce prix, vous allez effectivement faire des économies à long terme. Je pense que c'est ce que nous devons faire.

La vraie raison pour laquelle nous devons adopter la pièce de 2$ tient aux 750 millions de dollars nets de seigneuriage qui seront créés dans les cinq premières années. Cinq cents millions de pièces à 2$ donnent un milliard de dollars de revenus moins 100 millions de billets de 2$ remboursés à un coût de 200 millions de dollars, moins 500 millions de pièces de 2$ produites à 20c. à un coût de 100 millions supplémentaires, plus un milliard de dollars de billets de banque économisé à raison de 5c. chaque pour 50 millions de dollars. Cela fait 750 millions de dollars.

La réduction du déficit est importante. C'est pourquoi j'ai écrit ce document. Bien que le seigneuriage soit presque un impôt, il donne de nouvelles recettes importantes en prenant, sans douleur, de petits montants dans toutes les poches.

Merci.

[Français]

M. Marchand: Monsieur Anderson, vous êtes ici à titre personnel. Le gouvernement est très pressé, mais vous, monsieur Anderson, vous êtes là à titre personnel. Représentez-vous une association? Non?

M. Duhamel: Parlez de votre grande affection pour les gens d'en face.

[Traduction]

Le président: J'ai remis le chronomètre à zéro, monsieur Marchand. Je ne voudrais pas vous voler une seule seconde.

M. Marchand: Cela vous ferait pourtant plaisir.

Des voix: Oh, oh.

[Français]

M. Marchand: Vous êtes là à titre personnel, donc, et vous ne représentez aucune association. Qu'est-ce qui vous motive à vous prononcer sur ce projet de loi?

[Traduction]

M. Anderson: De par le métier que j'exerce depuis 10 ans, j'en suis venu à réunir de nombreux renseignements sur la nouvelle pièce de un dollar. Il est devenu rapidement évident que tout cela ne pouvait être vrai, c'est pourquoi j'ai commencé à faire une enquête. J'ai lu les comptes rendus des audiences du comité. J'ai bénéficié de l'aide du greffier du comité à l'époque pour trouver l'ensemble des dossiers.

Au départ, je ne m'intéressais qu'à la pièce de un dollar, mais je me suis rendu compte qu'en fait, on faisait des erreurs depuis longtemps dans ce domaine. Je suis devenu un expert occasionnel et le Fraser Institute m'a offert l'occasion de publier ce que j'en étais arrivé à comprendre.

.1200

[Français]

M. Marchand: Donc, c'est par intérêt purement personnel. Quelles sont vos conclusions? Résumez-les un peu. Dans le fond, il y a eu beaucoup de gaspillage et vous vous opposez à l'introduction de la nouvelle pièce de monnaie de 2$.

[Traduction]

M. Anderson: Depuis 50 ans on sait que l'on pourrait accepter des pièces métalliques extrêmement bon marché. L'histoire des pièces est vieille de 3000 ans, et pendant longtemps, il est vrai qu'une proportion importante de la pièce devait contenir un métal précieux pour en garantir la valeur.

Le Canada a persisté dans sa tradition plus longtemps que d'autres pays. Ce n'est qu'en 1967 que nous avons abandonné l'argent. Même alors, nous avons adopté le nickel qui est relativement cher plutôt que le cuivre et le zinc meilleur marché que d'autres pays utilisent. En général, je recommande simplement que nous produisions des pièces meilleur marché.

[Français]

M. Marchand: Mais cela fait partie des buts du ministre ou de la Monnaie royale canadienne. En plus de ce projet de loi, dont le but est de remplacer le billet de 2$ par une pièce de monnaie, on veut aussi transformer le contenu métallique pour le rendre plus léger et moins coûteux. Actuellement, aussi curieux que cela puisse paraître, le «cent noir» coûte au gouvernement 0,016$, soit presque deux fois sa valeur. Vous savez que cela fait partie de...

[Traduction]

M. Anderson: Absolument. Cela fait partie des recommandations énoncées dans mon document du Fraser Institute. J'approuve tout à fait l'adoption de métaux meilleur marché pour les pièces de 5 c., 10 c. et 25 c. Je ne vois pas pourquoi nous ne le faisons pas pour la pièce de 1$. Et pourquoi nous envisageons un autre concept onéreux pour la pièce de 2$.

Mais j'approuve certainement certains des changements.

[Français]

M. Marchand: D'accord, monsieur Anderson, mais en ce qui a trait au 2$, qu'est-ce qui vous attire? Ai-je raison de dire que vous vous opposez à l'introduction d'une pièce de monnaie de 2$?

[Traduction]

M. Anderson: Non non, j'ai proposé l'introduction de la pièce de 2$ afin de créer des recettes importantes au titre du seigneuriage. Si l'on produit des pièces à peu de frais - et j'ai fait des propositions précises à ce sujet - nous pourrions faire des économies réelles, de petites économies réelles sur une longue période. Mais avec ce concept, nous nous engageons pour une longue série - probablement 50 ans...

On ne peut pas demander aux vendeurs de distributeurs de pièces de changer ces machines...

M. Marchand: Toutes les semaines.

M. Anderson: En tout cas même tous les dix ans. Cela ne fait que 10 ans, et cette fois-ci, ils ne sont pas d'accord.

Ils devraient pourtant l'être d'ailleurs; la pièce de 1$ les a sauvés. Vous devriez voir les chiffres de l'industrie des distributeurs automatiques depuis l'introduction de la pièce de 1$. Je suis certain que la pièce de 2$ leur permettra également de faire de nouveaux profits. Bien entendu, il est toujours agréable de venir recevoir 50 millions de dollars.

[Français]

M. Marchand: Donc, si je comprends bien, vous n'êtes pas opposé à la pièce de monnaie de 2$, mais votre suggestion...

[Traduction]

M. Anderson: Je pense que nous devrions adopter la pièce de 2$, mais pour les bonnes raisons. La bonne raison c'est que nous allons obtenir 750 millions de dollars au titre du seigneuriage. Nous sommes fortement endettés et nous avons besoin de cet argent.

C'est un genre de taxe universelle. En fait, c'est une taxe très intéressante si l'on y pense bien. Les gens qui payent réellement cette taxe sont ceux qui gardent leurs pièces de 2$.

On peut toujours éviter la taxe, la presque taxe qu'est le seigneuriage en ne possédant pas de pièces de 2$. Ainsi, vous n'avez rien payé au gouvernement.

Mais en réalité, on obtiendra rapidement la somme de 750 millions dans l'ensemble de la population et nous obtiendrons encore plus chaque année par la suite. À mon avis, c'est une contribution utile aux finances du gouvernement.

[Français]

M. Marchand: Donc, vous dites que l'introduction d'une nouvelle pièce de 2$ aura pour effet d'augmenter la consommation, ce qui va générer des taxes de quelques milliards de dollars pour le gouvernement. C'est cela?

[Traduction]

M. Anderson: Oui, bien entendu. Il y aura de nouvelles dépenses, ce qui est un bon stimulant pour l'économie d'une certaine façon. Mais ce n'est pas la raison pour laquelle je la préconise, et je ne crois pas que des gens responsables devraient dire que l'on va faire des économies importantes alors que ce n'est pas le cas. On devrait dire que c'est bien parce que cela permet d'obtenir 750 millions de dollars.

.1205

M. Marchand: Thank you.

Le président: Pensez-vous que de mettre dans une tirelire deux dollars, ce n'est pas de la petite monnaie? Je comprends qu'on mette des cents, des pièces de cinq cents et de 10 cents. Mais pensez-vous vraiment qu'on soit assez riches, si je puis me permettre l'expression, pour mettre de côté des pièces de deux dollars?

M. Anderson: Voilà comment je vois les choses. On a récupéré 150 millions de billets de un dollar. Il y en a en principe plus de 300 millions en circulation. Mais cela veut seulement dire que tous ceux que l'on a mis en circulation, moins ceux qui ont été récupérés... Quelle est la somme? Il s'agit du chiffre de 300 millions. On a récupéré seulement 150 millions de billets de un dollar.

On les a remplacés par 750 millions de pièces de un dollar. Où sont-elles ces pièces? Faites le compte en commençant par les caisses des magasins. Ces chiffres ne sont pas difficiles à obtenir et on peut évaluer le nombre de caisses qui existent. Il suffit d'évaluer les stocks que possèdent les banques et on constatera qu'on est bien loin du compte. Ces pièces sont dans les tirelires tout comme les cents, tout comme les pièces de 10 cents et tout comme toutes les pièces de toutes sortes. C'est le sort de toutes les pièces que de rester dans des tirelires pendant une grande partie de leur vie.

Le président: Il suffit d'envoyer un petit détachement et il reviendrait avec beaucoup d'argent.

M. Epp: L'idée du seigneuriage m'intéresse. Vous entendez simplement le seigneuriage comme la différence entre le nombre de pièces émises et le nombre de pièces en circulation.

M. Anderson: Non. Le seigneuriage représente le bénéfice que tire le gouvernement de l'émission de pièces. S'il en coûte au gouvernement 20 sous pour frapper une pièce et qu'il la vend 2$, il fait un bénéfice de 1,80$. Cette somme de 1,80$ s'appelle le seigneuriage.

Mais, dans ce calcul du seigneuriage net en l'occurence, il faut aussi prendre en compte le fait que certains billets de 2$ devront être remboursés. Je crois que ce chiffre devrait se situer entre 100 et 110 millions de pièces.

M. Epp: Vous dites que la population peut éviter le seigneuriage en ne possédant tout simplement pas cette pièce?

M. Anderson: Oui.

M. Epp: Ce n'est pas tout à fait vrai car quelqu'un doit l'avoir. Une fois que le gouvernement l'a émise, elle se trouve quelque part.

M. Anderson: Non, car le gouvernement l'émet simplement lorsque quelqu'un accepte de l'acheter. Par exemple, la Banque Royale dit: «Donnez-nous-en pour 10 millions de dollars», et la Banque Royale remet 10 millions de dollars. Il obtient alors ces 10 millions de dollars de personnes comme un commerçant. Celui-ci remet les pièces à ses clients à la caisse et ceux-ci les lui remettent a leur tour.

Si sur le marché, il n'y avait aucune demande pour cette pièce, et il y a des exemples... La Susan B. Anthony a été un échec retentissant; 550 millions de la production originale de 1979 se trouvent toujours dans les coffres. La demande n'existait tout simplement pas sur le marché pour cette pièce.

M. Epp: Si nous reprenions votre argument, alors ce que nous devrions faire, c'est produire non seulement des pièces de 2$, mais également des pièces de 5$, de 10$ et de 20$ car le seigneuriage sur ces pièces-là serait beaucoup plus important. J'imagine que le coût de production d'une pièce de 20$ ne serait que légèrement supérieur à celui d'une pièce de 2$, mais quel seigneuriage!

M. Anderson: J'ai les documents de planification de la Monnaie montrant que c'est ce qu'on prévoit. Vous constaterez que la Banque du Canada ne met pas d'hologrammes sur tout ce qui est inférieur à 20$. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais dans 10 ans, nous reviendrons ici pour avoir la même discussion.

M. Epp: Voilà qui est très intéressant.

Le président: Espérons que nous ferons encore partie du comité dans 10 ans, n'est-ce pas?

M. Epp: Eh bien, j'y compte bien; je ne sais ce qu'il en est pour vous, monsieur le président.

Le président: C'est certainement dans mes plans.

M. Epp: Alors nous serons tous les deux là.

M. Duhamel: Et vous serez toujours du même côté.

Des voix: Oh! oh!

M. Epp: J'imagine qu'on peut toujours intervertir pour que le côté du gouvernement se situe de ce côté-ci de la table.

Le président: Bon, revenons à nos affaires.

M. Epp: J'aimerais vous demander à combien vous évaluez le coût de la production. Pourquoi devrions-nous nous fier à vos évaluations du coût de la frappe d'une nouvelle pièce plutôt qu'à celles qui nous ont été données par la Monnaie, et par les fonctionnaires du ministère?

M. Anderson: Je crois qu'il suffit de lire le procès-verbal des audiences consacrées à la pièce de 1$ pour ressentir le scepticisme que j'affiche. Je ne sais bien sûr pas combien va coûter cette pièce. Je ne l'ai pas vue.

Voilà une question intéressante: Pourquoi n'avons-nous pas vu la pièce? Et il y a une autre question intéressante encore: Pourquoi la Monnaie ne publie-t-elle pas les chiffres relatifs aux coûts des pièces ordinaires? La Monnaie avait l'habitude de publier le montant total qu'elle recevait pour toutes les pièces. Cela n'est même plus le cas.

Mais je sais pour sûr...

Le président: Nous avons vu la pièce l'autre jour.

Y a-t-il quelqu'un dans la salle qui ait une pièce à montrer à M. Anderson?

M. Anderson: Je sais que vous l'avez vue. J'aimerais la voir.

Le président: Eh bien, monsieur Anderson, la dame que voilà va vous la montrer immédiatement - ou plus tard.

.1210

M. Epp: Pour ce qui est du prototype...

M. Anderson: La seule chose que je voulais vraiment dire, c'est que les représentants de la Monnaie ont parlé de 10,6c. Les prix des métaux ont chuté de sorte que le chiffre de 9c. aurait été plus indiqué; mais c'est 13c. qui a été annoncé officiellement pour le coût réel.

M. Epp: Très bien. Mais il s'agit là des coûts totaux.

J'aimerais aussi en savoir plus sur votre déclaration voulant que les pièces ne durent pas vingt ans comme on l'a prétendu. J'ai de nombreuses pièces que j'ai examinées, et il me semble que vingt ans constituent un chiffre moyen acceptable. J'aimerais que vous me disiez si vous avez des statistiques précises - ou s'il s'agit simplement d'une conviction intime quant à la longévité des pièces?

M. Anderson: En réalité, l'une des premières choses que j'ai effectuées, a été de constituer un échantillonnage très important de pièces. J'ai bien fait attention d'en prendre de petites quantités dans de nombreuses localités de l'Est du Canada et, dans la mesure où mes voyages me l'ont permis, un peu dans l'Ouest du Canada aussi. J'ai rassemblé des pièces de toutes sortes et j'ai constaté à ma grande surprise que les pièces, quelle que soit leur valeur nominale, avaient uniformément une durée moyenne d'environ sept ans. J'ai transmis ce résultat à certains agents de la Banque du Canada qui ont alors commencé leur propre étude de façon ponctuelle et qui m'ont confirmé par la suite qu'ils avaient constaté la même chose.

M. Epp: Dans votre étude, avez-vous travaillé sur la question d'une société sans argent et sur le remplacement de toutes les pièces et de tous les billets par des cartes à mémoire et des cartes de débit?

M. Anderson: Je n'ai pas vraiment fait de travail sérieux sur la question. Je ne la connais que de façon générale.

M. Epp: Je me demandais simplement si vous voyez dans votre boule de crystal que cette situation va se produire très rapidement dans notre pays.

M. Anderson: Je crois que le problème est de savoir qui détiendrait du flottant. Je crois que si la Banque du Canada agissait de façon dynamique en offrant un instrument de faible valeur et qu'elle détienne le flottant - cela ferait bien sûr du Canada le bénéficiaire - je crois que cela serait possible. Quant à savoir si la Banque aurait des plans suffisamment dynamiques pour influer sur la façon dont le monde fonctionne, je ne peux le dire. Il y aura certainement des acteurs importants comme les grandes banques, Visa, Mastercard et American Express qui rechercheraient tous l'important flottant que représenterait cette carte pour les achats courants.

Ces cartes existent dans des cas particuliers comme le service de transports en commun de San Francisco. Le Conseil national de recherches émet une telle carte pour l'utilisation de ses photocopieuses. Mais il s'agit là d'utilisation dans un seul but. Il faut une carte universelle.

Je ne suis pas expert en la matière.

M. Epp: Très bien.

Ma dernière question porte sur votre déclaration voulant qu'il faudrait avoir deux fois plus de pièces pour remplacer les billets actuellement en circulation.

M. Anderson: C'est le ratio couramment utilisé par la plupart des analystes.

M. Epp: Pourquoi?

M. Anderson: À cause des tirelires. Il ne s'agit pas vraiment de 2 pour 1, c'est en fait 4 pour 1, ce qui est surprenant. Lorsqu'on ne récupère que 150 millions de billets de 1$, cela veut dire que les 600 premiers millions de pièces de 1$ les remplacent en fait à raison de 4 pour 1. Il n'y a guère que les tirelires pour expliquer une telle situation. La population met ses pièces dans des tirelires.

M. Epp: Monsieur le président, je laisse la parole à ceux qui ont d'autres questions intéressantes à poser.

M. Bryden: Le facteur tirelire me fascine car on a l'impression instinctivement que vous êtes sur la bonne voie. Permettez-moi de vous poser la question suivante. Il semble que grâce au seigneurage, le gouvernement puisse faire de gros profits grâce à cette tendance à garder les pièces dans des tirelires - ou à amasser les pièces, ce que vous voulez en fait dire - ce qui nous ramène à l'origine des pièces. La conception et la qualité de la pièce en question ne sont-elles pas l'une des raisons qui font qu'on la mette de côté?

Autrement dit, si la pièce était faite d'un métal très médiocre, ce que vous proposez par mesure d'économie, la population ne voudrait pas l'amasser. Mais si nous produisons une très jolie pièce, dont vous allez voir un exemple ici, cela ne va-t-il pas pousser à les amasser, ce qui à son tour permettra au gouvernement de tirer un seigneurage et des bénéfices plus importants?

M. Anderson: C'est une excellente question et je pense que le mot-clé ici, c'est «amasser». Les gens amassent les choses qu'ils trouvent précieuses. Vous dites donc que comparé avec un vilain tas de métal de 5c. comme la livre britannique, qui vaut à peu près 2,40 dollars, une jolie pièce canadienne de 2$ qui a coûté 25c., une roue d'Ezéchiel aux proportions magiques...

M. Bryden: Quelque chose où il y aurait le drapeau canadien peut-être.

M. Anderson: Excellent. Eh bien, mettons-les dans les tirelires.

Mais ce n'est pas pour cela que l'on met des pièces dans les tirelires. Je ne veux pas dire qu'à la limite vous n'avez pas raison. C'est sans doute le cas. Il y a probablement des personnes qui les gardent parce qu'elles les trouvent jolies. Il y a eu des personnes, il est vrai, qui ont gardé ces pièces spéciales de 25c. canadiens qui avaient été émises et qui représentaient les provinces et les territoires. Mais on met surtout les pièces dans les tirelires parce qu'on les laisse traîner. Lorsque vous rentrez chez vous à la fin de la journée, vous videz les poches de votre pantalon, vous allez peut-être reprendre une ou deux pièces de 25c. pour les appels téléphoniques ou autres et vous mettez le reste dans le tiroir à chaussettes.

.1215

M. Bryden: Je vous fais remarquer, comme vous le savez sans doute, que la pièce d'un dollar en argent, une très belle pièce canadienne, était thésaurisée. Elles ont complètement disparu de la circulation parce que les gens les gardent. Alors j'estime que sur le plan financier, le gouvernement a peut-être raison de consacrer l'argent qu'il faut à la conception de cette pièce de 2$.

M. Anderson: Je crois qu'il est inexact de dire que le dollar d'argent a jamais circulé au Canada. C'était quelque chose que les grands-mères achetaient pour offrir à leurs petits enfants. Autrement dit, on les achetaient pour les garder. Votre argument serait peut-être plus valable s'il s'appliquait à la pièce de 50 cents.

M. Bryden: C'est exactement ce que j'allais dire.

M. Anderson: Cette pièce a effectivement circulé mais peu à peu les gens ont laissé tomber.

M. Bryden: Ils ne les ont pas laissé tomber, ils ont gardé ces pièces pour en faire collection. Je me souviens très bien de cette pièce.

M. Anderson: On les a tellement gardées qu'elles ont disparu.

M. Bryden: Tout le monde voulait une pièce de 50 cents parce qu'elle était tellement belle.

M. Anderson: S'il existait une demande sur le plan commercial, il faut croire que les banques les feraient circuler mais, je ne sais pas, il est très difficle d'obtenir des informations à ce sujet. Vous pouvez me croire, j'ai essayé.

M. Bryden: Merci.

Le président: Monsieur Duhamel, avez-vous une question?

M. Duhamel: Elle est très brève.

On m'informe qu'il est possible de savoir le prix de revient des pièces de monnaie. Je vais me renseigner parce que je crois que vous avez exprimé un intérêt à ce sujet. N'avez-vous pas déjà parlé du coût de production des pièces canadiennes?

M. Anderson: Oui, le chiffre manque pour les trois dernières années.

M. Duhamel: Ce qui m'intéresse le plus est la question du seigneurage. Existe-t-il un seigneurage dans le cas des pièces de 1, 5, 10, 25, 50c., 1$, 5$, 10$ ou 20$? Pouvez-vous nous dire de façon approximative à combien se chiffre la différence entre la valeur nominale et la valeur intrinsèque de ces différentes pièces de monnaie?

M. Anderson: Grosso modo, la pièce canadienne d'un cent rentre dans la catégorie de seigneurage négatif depuis 20 ans. Son prix de revient est supérieur à la valeur nominale pour laquelle elle est vendue.

Quant à la pièce de 5 cents, les deux valeurs sont presque égales. Autrement dit le coût de revient et de distribution correspond à peu près à sa valeur même s'il y a eu des années où on pu réaliser quelques petits bénéfices. Quand aux pièces de 10, 25 et 50 cents...

M. Duhamel: Y a-t-il une augmentation proportionnelle, c'est-à-dire deux fois plus de bénéfices sur une pièce de 10 cents que sur une pièce de 5 cents?

M. Anderson: Cela dépend du prix de revient de la pièce et je n'ai plus les chiffres en tête. Je crois que le prix de revient d'une pièce de 10c. est de 4 ou 5c., dans le cas des 25c., ce serait de l'ordre de 8 ou 9. Alors ça varie.

M. Duhamel: Donc il existe un potentiel d'énormes bénéfices dans le cas des pièces ayant une valeur nominale relativement importante.

M. Anderson: Si on arrive à les faire accepter par le public, très certainement oui.

M. Duhamel: Merci. Cela m'intéresse beaucoup.

[Français]

M. Marchand: Monsieur Anderson, j'apprends quelque chose concernant les pièces de monnaie. C'est un peu comme les timbres. La thèse que vous soutenez et que j'ai eu un peu de difficulté à comprendre tantôt, c'est que dans le fond, le gouvernement se trouve à faire un profit en produisant un pièce de monnaie qui coûte un montant x qui est peut-être le quart ou le dixième du prix de vente. C'est distribué sur une très large échelle et le gouvernement se trouve à faire de l'argent de cette façon-là. C'est ce que vous disiez au début.

[Traduction]

M. Anderson: Si seulement c'était vrai que le gouvernement fait des pièces qui ne coûteraient que le dixième du prix de vente. Malheureusement ce n'est pas le cas. Personnellement je recommanderais cette façon de faire.

[Français]

M. Marchand: D'accord. Je n'arrive pas à comprendre où vous trouvez le quart de milliard ou les trois quart de milliard de dollars de revenus générés pour le gouvernement à partir de la production de ces pièces de monnaie-là. Où trouvez-vous ces sommes-là?

[Traduction]

M. Anderson: Je suppose que vous allez recevoir la transription de mes commentaires, mais je vais les répéter ici. La monnaie frapperait environ 500 millions de pièces de 2$ pendant les cinq premières années. Le gouvernement va recevoir 2$ pour chaque pièce, ce qui revient à un milliard de dollars. Il devra payer 100 millions de billets de 2$; autrement dit, 100 millions de ces billets seront remboursés à 2$ chacun.

Cela veut dire qu'elle devra verser aux Canadiens une somme d'environ 200 millions de dollars. Il lui faudra produire ces 500 millions de dollars de pièces de 2$ à un coût disons de 20c. Cela représente une autre somme de 100 millions de dollars.

.1220

Nous avons donc récupéré un milliard, nous avons dépensé deux milliards et si nous dépensons un autre milliard, nous serons en déficit de 700 millions de dollars. Mais nous n'aurons pas à imprimer les billets de 2$ ce qui nous permet d'épargner 50 millions de dollars, ce qui nous ramène à 750 millions de dollars.

Voilà le calcul que j'ai fait. Il est évident que ces chiffres peuvent varier légèrement. Si la Monnaie réussit à les fabriquer pour 16c., il n'en coûtera alors que 80 millions de dollars ou quelque chose du genre.

[Français]

M. Marchand: Considérez-vous que c'est une façon cachée de taxer le public, les consommateurs? Les consommateurs en général ne sont pas conscients de cette ristourne-là. D'après vous, est-ce une façon de taxer les gens?

[Traduction]

M. Anderson: Je ne l'ai appris qu'en arrivant que le comité était déjà au courant de l'existence d'un seigneuriage aussi important. Je me disais en chemin que je vous apportais peut-être de bonnes nouvelles.

M. Marchand: Je vois.

M. Anderson: Les médias n'ont pas expliqué que c'était cela qui se passait. Ils ont plutôt parlé de l'introduction d'une nouvelle pièce de monnaie, qui permettrait de réaliser des épargnes de 250 millions de dollars au cours des 20 prochaines années. Cela est faux. Je voulais en venant ici aujourd'hui m'assurer que vous sachiez que cela est faux.

Ce n'est pas parce qu'il est impossible d'épargner certaines sommes mais il faudrait pour y parvenir fabriquer des pièces de qualité médiocre et l'on pourrait ainsi épargner une somme d'environ 100 millions de dollars. Il est impossible d'épargner 250 millions de dollars. Et, quels que soient les choix effectués, il faudra fabriquer toute une série de pièces.

Le président: Ai-je raison d'affirmer que M. Martin est parfaitement au courant de l'importance du seigneuriage et qu'il est sans doute en train de saliver à la perspective de voir de telles sommes entrer dans les coffres?

M. Anderson: Absolument. Je suis convaincu que cela est la raison d'être du comité mais je n'ai entendu personne le dire. Je n'avais aucune idée de ce qui se passait.

Le président: M. Martin a clairement déclaré dans son budget de février que c'était ce qu'il entendait faire.

M. Anderson: A-t-il mentionné à l'époque qu'il voulait un seigneuriage important?

Le président: Oh oui. C'est un élément du budget. Cela figure dans le budget de février.

M. Anderson: Très bien. Eh bien, j'ai également manqué cela.

Le président: Merci, monsieur Anderson. Je suis heureux que vous ayez pu venir.

M. Anderson: Le plaisir est pour moi. Merci de m'avoir entendu.

Le président: Monsieur Moncion, le temps qui vous était accordé est écoulé mais si vous le souhaitez....

M. Moncion: J'aimerais simplement revenir sur la question du seigneuriage, parce que je n'étais pas au courant. Mon expérience de comptable m'amène à penser que le seigneuriage ne constitue pas véritablement un bénéfice ou une recette pour le gouvernement. Cela constitue en fait un prêt. Le gouvernement ne peut en tirer des recettes que parce que la masse des pièces en circulation augmente. En fin de compte, c'est lui qui est responsable de ces pièces et lorsqu'on les encaisse, le gouvernement doit donner 2$ pour chacune d'elles. D'après mon expérience en comptabilité, je dirais que le seigneuriage est en fait un élément de passif pour le gouvernement et non pas une recette.

Je me demande si quelqu'un a des commentaires à ce sujet.

M. Anderson: Je crois être en mesure d'y répondre.

Personne n'a le droit de retourner les pièces de monnaie. Vous avez le droit d'encaisser des billets de banque, et je crois qu'en fait vous avez parfaitement raison. La comptabilité des billets de banque traite différemment le seigneuriage. C'est un élément du passif. Nous gagnons de l'intérêt sur les sommes que nous avons en notre possession. Cela représente un bénéfice pour le gouvernement et pour les Canadiens.

Par contre, avec les pièces de monnaie, il est exact qu'une fois vendues, il n'est pas possible de les rendre, de sorte que sur le plan comptable, cela constitue véritablement un bénéfice ou une recette sur le moment.

Le président: C'est pourquoi les banques font plutôt grise mine à l'idée de l'introduction de la pièce de 2$.

M. Anderson: Je ne vois pas ce qu'elles ont à y gagner. Il faut qu'ellent les fassent circuler. Elles ne peuvent les éviter.

Des voix: Oh, oh.

M. Anderson: Elles vous doivent tant par ailleurs que vous ne devriez pas les laisser trop se plaindre.

Le président: MM. Anderson et Moncion, je vous remercie.

.1225

Collègues, je pense qu'il est maintenant temps de commencer l'étude du projet article par article.

Qu'il soit consigné que M. Epp vient de tomber de sa chaise.

Est-ce que vous allez bien?

M. Epp: Permettez-moi de faire une déclaration. On devrait examiner la possibilité d'échanger des fauteuils de 700$ pour des chaises de 20$.

Le président: Est-ce que cela se rapporte au projet de loi C-82?

M. Epp: Cela devrait intéresser le gouvernement.

Le président: Que l'on indique que M. Epp a l'air fâché.

Article 1

Le président: Il vaudrait mieux donc que je mette la question aux voix. L'article 1 est-il adopté?

M. Epp: Je voudrais un exemplaire du projet de loi, monsieur le président. Et si on pouvait nous donner quelques minutes pour le regroupement, je vous serais reconnaissant.

Le président: Le projet de loi ne comportant qu'un seul article, le comité ne semble pas disposer d'une grande latitude. Ou bien on appuie le projet de loi ou bien on le rejette, mais je ne vois pas beaucoup d'autres possibilités.

Je reconnais que certaines appréhensions nous ont été exprimées, notamment par le secteur de l'alimentation et les machines distributrices. Essentiellement ils veulent retarder l'introduction de cette mesure pour la création d'une pièce de 2$ et gagner ainsi du temps.

Nous devons nous demander quelle recommandation nous pourrons faire au gouvernement. Il est souhaitable que l'introduction d'une pièce de 2$ crée le moins de perturbation possible, à cet effet il faudrait un arrangement qui convienne à toutes les parties, à tous les intéressés.

Si nous appuyons le projet de loi j'espère que le gouvernement tiendra compte des appréhensions exprimées par les différents témoins et comprendra l'importance accordée par notre comité à une transition sans heurts. Après tout, la petite entreprise nous tient à coeur. De nombreuses petites entreprises seront affectées par cette mesure et il faut espérer qu'elle se réalisera de la meilleure façon possible.

[Français]

M. Marchand: Si j'ai bien compris vos propos, vous avez bien écouté les témoins et que vous seriez ouvert à un délai, peut-être d'un an, pour l'application de ce projet de loi. Je trouve cela tout à fait raisonnable étant donné que tous les témoins, sauf peut-être le ministre lui-même, s'y sont opposés et ont des craintes.

Il me semble qu'il serait tout à fait raisonnable d'avoir un délai. Le gouvernement n'est absolument pas justifié d'introduire cette pièce de monnaie avec autant d'empressement, d'ici 1996. Cela n'enlève rien au projet de loi que de retarder son application d'un an et ça nous permettrait peut-être de gagner certains points auprès des associations qui sont malheureusement prises avec ça.

Si c'est votre opinion, si c'est ce que vous venez de dire, je suis tout à fait d'accord avec vous. Je trouve qu'il serait tout à fait raisonnable de suggérer au gouvernement de retarder d'un an la mise en oeuvre du projet de loi.

.1230

[Traduction]

Mme Chamberlain (Guelph - Wellington): Sans vouloir contredire le Bloc, M. Marchand n'était malheureusement pas là aux autres journées d'audience pour entendre ce qui était favorable. On a également exprimé une préférence pour un certain délai.

Je suis aux prises avec un véritable dilemme ici. Je crois que nous devons tenir compte des voeux des petites entreprises et de l'industrie. Cela ne fait aucun doute. Il nous faut en tenir compte lorsque nous prenons des décisions.

Je sais aussi que nous avons fait une promesse au peuple canadien. Cette question figurait précisément dans le budget. Nous devons nous en occuper. Nous devons tenir compte des gains que le gouvernement pourra obtenir tout en sachant que nous devons être en mesure d'atteindre les objectifs prévus dans notre budget, ce qui est important. Je ne crois pas que quiconque autour de la table souhaite que le gouvernement ne fasse pas ce qu'il a promis au peuple canadien. Il est apparu clairement au cours des élections que c'était l'une des choses que le peuple souhaitait. Il souhaite la réduction du déficit budgétaire. Cette mesure y contribuera en partie.

Monsieur le président, je ne connais pas la réponse. Y a-t-il des... On en a effectivement parlé l'autre jour. Les subventions sont hors de question. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre des subventions. Si nous allons de l'avant à cet égard, y a-t-il une déclaration ou quelque chose que l'on puisse transmettre pour dire que nous nous soucions des problèmes exprimés et qu'il en sera tenu compte lors de la mise en circulation de cette pièce?

Je dois aussi dire, car on a beaucoup parlé de l'apparence, du type, du poids et de la teneur en métaux des pièces, que celles que nous avons vues sont vraiment très belles. Reste à savoir quel sera le logo choisi en définitive, comme M. Bryden le sait fort bien, mais j'estime vraiment qu'elles sont très belles.

Il me semble que nous devrions au moins pouvoir faire une déclaration sérieuse par l'entremise du comité. Nous avons entendu les inquiétudes des petites et des grandes entreprises. Nous devons transmettre au ministre ces graves inquiétudes au sujet de la mise en circulation de la pièce.

Pour ce qui est de retarder l'opération, je ne crois pas que ce soit possible. Je crois vraiment que le gouvernement s'est engagé à aller de l'avant avec cette pièce et à obtenir le seigneuriage.

Le président: Avant que M. Bryden ne prenne la parole, je tiens à dire que je trouve qu'un comité comme le nôtre est placé dans une situation difficile parce que nous ne sommes pas le gouvernement mais un comité de parlementaires. Nous sommes chargés d'entendre des témoins. Ce que l'on apprend par ces témoignages, c'est que le principe de l'introduction de cette pièce de 2$ n'est pas vraiment mauvais. Reste à savoir, si le principe ne pose pas de problème, comment la pièce va être mise en circulation de façon équitable et réfléchie pour ne pas porter préjudice aux principaux intéressés?

Est-ce à nous, en tant que comité, de faire ce travail ou n'est-il pas plutôt l'apanage du gouvernement? Après tout, il est là pour administrer les affaires du pays. Si nous devions faire une déclaration à l'intention du gouvernement, il me semble que nous devrions transmettre ce que nous avons entendu pour que la mise en circulation de la pièce se fasse autant que possible en douceur et de façon équitable.

M. Bryden: Plus je participe à des comités, monsieur le président, de quelque côté de la barrière que je me trouve, plus je constate en entendant les témoignages que ce sont en fait des opinions que nous entendons et non des preuves tangibles. Ce ne sont pas des preuves sur lesquelles je peux fonder vraiment mes décisions.

Par exemple, nous avons entendu dire que la mise en circulation de la pièce de 2$ aura des répercussions négatives, mais nous avons également entendu qu'elle aura quelques répercussions positives. Je parle ici du milieu des affaires et non des avantages du gouvernement.

Ce que nous ne pouvons pas mesurer avec précision, monsieur le président, c'est l'importance de ces effets négatifs et de ces effets positifs pour savoir où se situent le plus ou le moins dans cette affaire. Cela semblerait aller dans le sens de la suggestion faite par mon collègue du Bloc qui demandait que l'on reporte la chose d'une année.

Rien dans ce que j'ai vu et entendu au cours des témoignages ne me permet de penser qu'une année constitue un délai magique. Six mois suffiraient peut-être pour ceux qui rencontrent des problèmes. Si c'est six mois, cela nous amènerait à janvier de l'année prochaine.

.1235

La façon dont nous devrions procéder en l'occurrence, lorsqu'on n'a pas les éléments qui nous permettraient de décider quels sont les avantages nets et les inconvénients nets, c'est de dire simplement que le gouvernement devrait prendre connaissance des inquiétudes qu'on nous a exprimées pour faire en sorte que la transition se passe en douceur, en prenant les mesures voulues.

Si cela veut dire retarder les choses de deux ou trois mois, il me semble que c'est au gouvernement de prendre cette décision en se fondant sur la réaction du secteur des entreprises qui nous est présentée dans le cadre des témoignages. Ce n'est pas à nous qu'il incombe de prendre cette décision.

Le président: Reste à savoir si nous devons croire que le gouvernement va faire preuve de bon sens pour cette phase de transition.

M. Epp: Monsieur le président, en écoutant les témoins et aussi compe tenu du mémoire que nous avons reçu de la part de personnes qui n'ont pas comparu devant le comité, mais qui nous ont écrit à nous les députés, à titre individuel, ou qui ont écrit au comité, d'après mes calculs, j'en arrive à la conclusion que l'opération ne représente pas une économie pour les contribuables. Elle a l'apparence d'une économie pour le gouvernement. Je veux bien l'admettre. Il semble que les chiffres présentés par le ministre correspondent à ces économies. Il y a les recettes du seigneuriage.

Mais, comme je l'ai dit l'autre jour, les économies pour les contribuables sont inférieures à ce qu'il en coûtera pour rééquiper les machines. En dehors de cela, le seigneuriage, autant que je puisse en juger, constitue en fait une taxe imposée au peuple canadien.

Autrement dit, ce n'est pas une économie, c'est une taxe supplémentaire. Bien que ce soit très subtil et tout à fait volontaire, on retire de l'argent au peuple canadien pour offrir ces recettes au gouvernement.

Je reconnais aussi, étant donné ce qu'a réalisé jusqu'ici le gouvernement libéral, que ce projet de loi va sans doute être adopté. Le ministre des Finances l'a dit. Je le dis avec respect, il va être adopté de force. Autrement dit, tous les députés de la majorité vont voter pour le projet de loi et il sera adopté.

Ceci étant, je pense que je vais recommander au Parlement de s'opposer à ce projet de loi et de ne pas l'adopter, mais sachant qu'il va sans doute probablement être adopté de toute façon, j'aimerais qu'on le rectifie.

Je me sens très frustré de voir que quelque chose d'aussi important doive être adopté de force en si peu de temps. Vous nous avez dit hier que nous allions procéder aujourd'hui à l'étude article par article. Si nous n'avions rien eu d'autre à faire, nous aurions certainement pu étudier les amendements. Étant donné le délai, nous n'avons pas eu la possibilité de nous adresser aux conseillers. Nous n'avons pas pu obtenir l'aide voulue pour proposer nos amendements en raison du très court délai. Parallèlement, je subis des pressions comme tous les autres membres de notre parti. Étant donné que nous ne sommes pas aussi nombreux que vous, nous avons de nombreuses tâches.

On nous dit maintenant que ces amendements ne sont pas recevables, je ne sais trop pour quelle raison. Je tiens à ce que ces amendements figurent au procès-verbal et si on me dit qu'ils ne sont pas recevables, je vais être très fâché et je vais peut-être encore une fois tourner les talons.

Mais je veux bien admettre que je dois respecter le règlement.

Le président: Le premier amendement, monsieur Epp.

M. Epp: Le premier amendement que j'aimerais proposer est le suivant: Que le projet de loi C-82 soit modifié par adjonction du paragraphe suivant après la ligne 11 de la page 1:

Cet amendement a pour objet de donner une plus grande stabilité aux personnes comme les témoins que nous avons entendus et aux entreprises qu'ils représentent.

Le président: Je comprends cela, mais le conseiller du comité m'a indiqué que cet amendement n'est pas recevable parce qu'il dépasse la portée du projet de loi. Il ne nous revient pas, du moins dans le contexte du présent projet de loi, d'imposer quelque chose ou d'informer de quelque chose de cette façon.

M. Epp: Monsieur le président, je vous demande de m'aider si vous le voulez bien. Existe-t-il un mécanisme auquel je puisse avoir recours pour en appeler de cette décision?

Le président: En appeler de la décision?

M. Epp. Oui.

.1240

Le président: J'imagine que oui. Je vais me renseigner et vous le dire dans un instant.

M. Marchand: Vous avez mon appui là-dessus.

Le président: C'est aussi simple que cela. D'après les experts, ma décision est que l'amendement n'est pas recevable.

M. Epp a contesté ma décision, il suffit donc que je demande au comité si ma décision est acceptée.

Des voix: Acceptée.

M. Bryden: J'aimerais cependant faire une observation sur cet amendement. Cela est-il antiréglementaire?

Le président: Non, allez-y.

M. Bryden: J'aimerais que mon collègue sache que je ne puis appuyer cet amendement. On commet la même erreur qu'aux États-Unis où l'on paralyse les gouvernements en adoptant des lois qui les empêchent de lever des impôts ou de procéder à des changements monétaires. Nous en voyons déjà les conséquences dans le comté d'Orange en Californie.

Je ne voudrais pas que notre gouvernement ou notre Parlement en arrive à lier les mains des futurs gouvernements. Nous ne pouvons pas contraindre les futurs Parlements. Nous devons laisser aux futurs Parlements le soin d'user de leur bon sens. Avec ce genre de choses, nous empêchons que cela se produise.

M. Epp: Je veux bien l'accepter et dans ce cas je suis sûr que M. Bryden serait également prêt à accepter que l'on annule la Charte des droits et libertés, qui lie les mains des législateurs et des juges de notre pays pour ce qui est d'agir avec équité à l'égard de notre système de justice.

J'ai un autre amendement, mais je suis d'accord pour que nous ne liions pas les mains des futurs gouvernements surtout pour des questions comme les régimes de retraite et autres choses du même genre.

Mon deuxième amendement est le suivant: Que le projet de loi C-82 soit modifié par l'adjonction de ce qui suit après la ligne 11 de la page 1:

Le président: C'est acceptable. Vous devez nous faire parvenir cet amendement par écrit, monsieur Epp.

M. Duhamel: Je ne comprends pas ce que nous sommes en train de dire ici.

Le président: Il s'agit de reporter d'un an l'entrée en vigueur de la loi.

M. Duhamel: Je veux être sûr. Monsieur Epp est en train de dire qu'il veut bien que le gouvernement perde plus de 100 millions de dollars de recettes du fait de cette motion.

M. Epp: Je suis prêt à reporter d'un an l'impôt volontaire que représente cette somme pour le peuple canadien. Pour permettre les travaux de recherche et de développement nécessaires, la production de prototypes, la conception de machines d'identification des pièces; pour qu'on ait le temps de changer les caisses enregistreuses; bref pour répondre à tous les besoins qu'ont souligné avec insistance les entreprises. Il me semble que c'est une demande raisonnable. Le 1er janvier 1996, c'est comme si c'était maintenant. C'est dans six mois. Ce n'est pas suffisant. C'est ce qui justifie ma demande.

M. Duhamel: Oui, mais le prototype est prêt et on est en gros prêt à lancer la production. Mais il nous faut une loi du Parlement pour aller de l'avant.

.1245

J'ai peut-être mal compris ce qu'a dit le président mais avant que nous nous lancions dans cette discussion générale, j'ai cru qu'il entendait indiquer au gouvernement qu'il faudrait tout d'abord ne pas poursuivre trop rapidement cette initiative et deuxièmement qu'il s'est fixé des objectifs budgétaires. Il faut demander au gouvernement ce qui peut être fait pour assurer une transition aussi souple que possible. Je crois que cela répondrait à la plupart des questions soulevées au lieu de fixer dès le départ un délai d'un an. Nous ne savons pas encore quelles seront les ramifications d'un tel délai. Est-il réaliste? Est-ce une bonne idée? Combien cela va-t-il coûter?

Je vous ai dit je crois que je ne voterai pas pour ce projet.

Le président: Monsieur Epp, pensez-vous que nous soyons obligés de choisir entre tout et rien?

M. Epp: Je n'aime pas beaucoup qu'on me dise qu'il n'est pas possible de me décider après avoir vu le prototype de la pièce. Bien évidemment, pour ce qui est de l'industrie, lorsqu'ils ont le prototype, ils peuvent s'occuper de concevoir et de produire les machines capables de reconnaître les pièces pour les distributrices automatiques, les distributeurs de timbres, les parcomètres et ce genre de chose. Cela prend du temps. Je crois qu'il est tout à fait irréaliste de penser que cela n'est pas un problème.

On vient me dire que je ne peux pas faire de la présentation de ce prototype une condition préalable. Je me suis dit: eh bien, je vais fixer une date et espérer que la Monnaie réussira à produire les prototypes de façon à pouvoir introduire la nouvelle pièce le 1er janvier 1997. Cela donnera le temps aux gens d'accepter ces pièces, et cela sera très bien, le gouvernement aura réussi quelque chose au lieu de présenter une nouvelle pièce avant que les utilisateurs soient en mesure de s'en servir, avec toutes les frustrations que cela représente. Si vous voulez faire adopter à tout prix ce projet de loi quelles qu'en puissent être les conséquences pour le public, eh bien, allez-y.

Le président: Pensez-vous qu'il appartient au comité d'imposer au gouvernement ce que l'on pourrait appeler une peine d'un an dans ce cas-ci...

M. Epp: Oui.

Le président: ... au lieu de lui dire qu'on nous a parlé de certains problèmes et que c'est à lui de régler ces problèmes de façon à ce que tous les intervenants soient relativement satisfaits de sa façon de procéder.

M. Epp: Excusez-moi, mais je pense que la réponse se trouve dans ce projet de loi, s'il est adopté sans cet amendement. Quand va-t-il entrer en vigueur? Quelle est la date prévue? Je ne la vois nulle part.

Le président: Il n'y a pas de date.

M. Epp: Il n'y a pas de date. Mais l'on y dit que la date visée est le 1er janvier 1995. Je peux lire cela.

[Français]

M. Marchand: Est-il possible d'avoir une copie de l'amendement? On discute de l'amendement, mais on n'a pas le texte. Avez-vous vu le texte?

[Traduction]

M. Bryden: J'aimerais préciser quelque chose à M. Epp, parce que ses remarques m'amènent à penser qu'il y a quelque chose qu'il n'a pas compris au sujet de ce projet de loi.

Ce n'est pas une autre taxe sur les consommateurs. Il s'agit en fait de vendre un produit et un service. C'est un service essentiel et un produit.

Notre dernier témoin vous a signalé que l'émission de cette pièce s'accompagnait d'un seigneuriage et que cela créerait beaucoup d'argent. C'est parce que les gens veulent acheter ce produit. C'est également un service essentiel comme les timbres-poste. On ne peut pas se passer de timbres-poste. C'est le gouvernement qui s'occupe de rationaliser ce service en particulier et de le faire payer par les consommateurs, mais il n'est pas possible de s'en passer.

Comme je l'ai déjà dit, nous ne pourrons pas fixer un délai au gouvernement mais nous savons que les Canadiens vont se rendre compte que le gouvernement gagne beaucoup d'argent grâce à ce produit et à ce service et il me paraît essentiel de procéder rapidement si l'on veut réduire le déficit.

Nous avons déclaré ici que nous avions déjà signalé ce problème mais cela ne veut pas dire qu'il faille lier le gouvernement et l'obliger à attendre un an avant de procéder à cette émission, car il risquerait de perdre de l'argent. Laissez-le aller aussi vite que possible pour qu'il gagne de l'argent mais n'oubliez pas que nous ne souhaitons pas que l'industrie éprouve des problèmes parce qu'elle a du mal à le suivre, mais, à long terme, des témoins nous ont déclaré que le monde des affaires allait en bénéficier.

C'est pourquoi je ne suis pas en faveur de votre amendement.

[Français]

M. Marchand: Je n'ai pas eu l'occasion de parler sur la motion elle-même, car je n'avais pas vu le texte de l'amendement. Les témoins que nous avons entendus, les associations, les gens d'affaires, Mme Chamberlain, que je respecte beaucoup, et M. Bryden, tous s'entendent pour reconnaître qu'il y a des préoccupations majeures face à l'adoption de ce projet de loi.

.1250

Ces préoccupations sont fondées, elles sont vérifiables et elles touchent beaucoup de secteurs, principalement le consommateur. Il est franchement déplorable qu'on n'en tienne pas compte. Selon moi, la preuve n'a pas été faite que le gouvernement fera des économies.

Si le gouvernement fait des économies, si le gouvernement va chercher de l'argent, ce sera au détriment des consommateurs. Du moins, ces soucis ont été exprimés et les gens d'affaires bénéficieraient d'un délai quelconque.

Si je comprends bien, avant tout, les gens d'affaires demandent un délai, mais dans le fond, ils ne veulent pas ce changement. De leur part, c'est une large concession que de demander un délai, et il serait raisonnable de le leur accorder compte tenu de ce qui leur sera imposé. Les IGA et les Provigo devront tous changer leurs tiroirs-caisses, etc., dans des situations qui ne semblent pas réalistes. C'est le consommateur qui, en fin de compte, écopera.

[Traduction]

Le président: Monsieur Marchand...

[Français]

M. Marchand: Permettez-moi de terminer. Le Comité fait preuve d'une insensibilité évidente. Même si on nous dit qu'on aura de graves problèmes, on n'écoute pas. On ne réagit même pas et cela remet même en question notre rôle en tant que Comité. Au fond, pourquoi sommes-nous là?

Personnellement, je suis ici pour placoter dans le vide. C'est un peu l'impression que vous me donnez. Je sais que vous allez adopter le projet de loi tel quel et dire: «Nous sommes bien préoccupés par leurs soucis, leurs problèmes, etc.» Mais, au fond, vous ne changerez rien. La Monnaie royale canadienne, d'ailleurs, a déjà demandé des offres pour le 1er octobre.

Les choses roulent et on ne se préoccupe pas des gens qui sont venus, nombreux, devant nous. Le gouvernement est au service de qui au juste? Tient-il compte uniquement de sa volonté ou s'il tient aussi compte de celle des gens qui l'ont élu? Nous, nous protégeons les intérêts du gouvernement fédéral. Quant à vous, que protégez-vous? La Monnaie royale canadienne? C'est cela que vous êtes en train de faire. Vous protégez les intérêts de la Monnaie royale canadienne et non pas ceux des consommateurs en général.

[Traduction]

Le président: Monsieur Marchand...

[Français]

M. Marchand: Non. Permettez-moi de...

[Traduction]

Le président: Permettez-moi de signaler que l'amendement cherche à proposer un calendrier. Ce n'est pas que nous n'écoutons pas les préoccupations. Au contraire, nous disons au gouvernement qu'il faut en tenir compte si on veut que cette mesure soit bien appliquée.

Mais si nous cherchons à imposer un calendrier, le comité ne s'arroge-t-il pas une compétence administrative? Le gouvernement devra faire des négociations avec tous les intéressés. Il est tout de même clair que le gouvernement ne va pas proclamer cette mesure avant que tout soit bien réglé. Je ne sais pas si sera le 1er janvier 1996 ou le 1er juin 1996. Je pose la question: le choix d'une date ne relève-t-il pas d'une compétence administrative qui dépasse notre mandat?

[Français]

M. Marchand: Non. Je trouve que si...

[Traduction]

Le président: Je ne pensais pas que j'allais vous convaincre mais...

[Français]

M. Marchand: C'est un tout à fait raisonnable. Cependant, nous avons un job à faire ici, en tant que Comité, et c'est d'écouter les témoins et de conseiller le gouvernement. Des témoins on dit qu'il y avait des problèmes de fond, mais aussi des problèmes en ce qui a trait à la période de temps prévue pour la mise en oeuvre du projet de loi.

Non seulement cela coûtera cher aux consommateurs, mais on devra aussi changer les tiroirs-caisses, les parcomètres et les machines distributrices. Cela représentera un demi-milliard de dollars la première année.

.1255

En tant que Comité, nous ne réagissons pas du tout. Nous allons faire des recommandations au gouvernement, mais ce sera en vain. On sait très bien que le gouvernement ne se préoccupera pas de nos suggestions.

[Traduction]

Le président: Soyons justes, monsieur Marchand.

[Français]

M. Marchand: Écoutez, j'ai quand même le droit de parler, que vous soyez d'accord avec moi ou pas.

[Traduction]

Le président: Je sais que vous avez le droit. Nous vous écoutons mais d'autres personnes voudraient aussi parler.

Monsieur Bélair.

[Français]

M. Marchand: Laissez-moi terminer, monsieur le président. J'ai le droit d'exprimer mon opinion. Il me semble que mon point de vue est tout à fait raisonnable. Je ne fais pas la guerre ici. Je pensais simplement donner mon point de vue.

[Traduction]

Le président: Veuillez terminer.

[Français]

M. Marchand: Vous allez voir que quoi que l'on dise, quoi que l'on fasse, cela ne changera rien. Le projet de loi sera adopté tel qu'il a été proposé, sans aucun changement.

Comme j'étais en train de le dire, il y aura des mots flatteurs, mais cela ne changera rien. On ne réagit pas de façon constructive puisque la Monnaie royale canadienne est déjà allée en appel d'offres pour la production de la pièce d'ici le mois d'octobre. On ne se préoccupe pas du tout des Canadiens, des commerçants. On se fout d'eux. Cela est déplorable et je trouve cela malheureux. On joue les hypocrites ici.

[Traduction]

Le président: Monsieur Bélair suivi de Mme Chamberlain.

[Français]

M. Bélair (Cochrane - Supérieur): Jean-Paul, au risque d'ajouter à la frustration que vous venez d'exprimer, je ne crois pas que votre argument tienne.

M. Marchand: [Inaudible]

M. Bélair: Vous n'étiez pas ici hier.

M. Marchand: Hier?

M. Bélair: Non, vous n'étiez pas ici hier. C'est M. Brien qui était ici.

Nos deux témoins, hier après-midi, nous ont indiqué clairement que le mécanisme qui existe actuellement pour les machines distributrices n'aura pas à être modifié s'ils ne veulent pas l'adapter à la pièce de 2$. Ils ne seront pas forcés de le faire. Laissez-moi finir! Ils ne seront pas forcés de le faire.

[Traduction]

Ils ne seront pas forcés de le faire. Ils peuvent dire...

[Français]

donc, on pourra avoir le statu quo au niveau du mécanisme des machines distributrices.

Cependant, on dit qu'avec l'introduction de la pièce de 2$, ces propriétaires auront une occasion de faire de l'argent supplémentaire. Vous dites que les coûts seront refilés aux consommateurs. Ils ont expliqué clairement hier que le coût de recalibration du mécanisme est très minime au niveau technique. Le travail coûtera de l'argent.

M. Marchand: Quatre-vingt millions de dollars.

M. Bélair: On pourrait discuter du chiffre aussi. C'est loin de vos 400 millions de dollars en tout cas.

M. Marchand: Cela, ce n'est qu'un début. Parlez à ce monsieur du IGA qui disait que cela lui coûterait de 100 à 150 dollars pour chaque tiroir-caisse. Il y en a un demi-million au Canada.

M. Bélair: Le tiroir-caisse qu'il vous a montré plus tôt peut facilement être adapté sans modifier la caisse au complet.

M. Epp a souvent fait allusion aux personnes qui sont en affaires. Il faut quand même faire preuve d'un peu d'ingéniosité.

M. Marchand: Eh bien, non!

M. Bélair: Le point que je veux faire ressortir, c'est que...

M. Marchand: Lui, il est dans le métier.

[Traduction]

Le président: Monsieur Marchand, s'il vous plaît.

Avez-vous terminé, monsieur Bélair?

[Français]

M. Bélair: Non. Les propriétaires ne seront pas forcés de le faire, ni aujourd'hui, ni dans cinq ans, ni dans dix ans. S'ils veulent le faire, le coût sera quand même acceptable. On parle de changement, de progrès.

.1300

[Traduction]

Le président: Merci.

Madame Chamberlain.

Mme Chamberlain: Je me demandais si nous ne pourrions pas passer au vote puisque tous nos collègues ont eu l'occasion de se faire entendre sur cette question.

Je tiens simplement à formuler un commentaire en réponse à la déclaration alarmiste de mon collègue du Bloc sur l'effet que cela pourrait avoir sur le consommateur canadien. Je ne tiens pas à obtenir une réponse mais je voulais simplement indiquer que je me demande quel effet peut avoir sur les consommateurs canadiens un Québec séparé.

M. Marchand: Je serais ravi de vous répondre.

Mme Chamberlain: Je n'ai pas besoin de réponse.

Le président: Cela me paraît hors de propos.

Je pense que nous devrions passer au vote.

M. Epp: Je pense que cet amendement sera défait, parce que c'est ce qu'a indiqué la majorité des membres du comité. J'aimerais savoir - et peut-être que notre conseiller juridique pourra nous aider sur ce point - s'il serait juridiquement possible d'exiger que cela figure dans le projet de loi - qu'il y ait une date-butoir qui convienne aux entreprises...

Le président: Votre amendement est parfaitement acceptable, monsieur Epp. Nous allons voter à ce sujet. La date butoir du 1er janvier 1997 est acceptable. C'est celle qui a été proposée. Je vais en fait procéder au vote.

M. Epp: L'amendement sera défait.

Le président: Eh bien, il y a toujours un risque en politique. Mais c'est acceptable.

M. Epp: Je voudrais savoir comment nous pourrions éviter ce résultat.

Le président: Il faudrait peut-être faire des choses auxquelles je préférerais ne pas penser. Cela m'empêcherait sans doute de dormir.

Amendement rejeté [Voir Procès-verbaux]

Le président: Monsieur Marchand, vous êtes-vous abstenu? De toute façon, le vote n'était pas enregistré.

M. Marchand: Non.

Le président: Nous allons maintenant passer à l'article principal, l'article 1.

Article 1 adopté avec dissidence

Le président: L'annexe est-elle adoptée?

Des voix: Adoptée.

Le président: Le titre du projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: Le projet de loi est-il adopté?

M. Epp: Pourrions-nous procéder à un vote par appel nominal?

Le président: Très bien. La greffière va donner les noms.

M. Duhamel: J'aimerais obtenir une précision, monsieur le président. J'avais compris - et je vous prie de me corriger si je me trompe - qu'en tant que président du comité vous alliez vous charger de signaler les préoccupations exprimées par les divers témoins et tenter de déterminer si les principaux intervenants ne pouvaient s'entendre pour régler un certain nombre de ces problèmes. Est-ce bien exact?

Le président: Oui, je suis tout à fait disposé à le dire. J'ai entendu ces préoccupations. Elles me paraissent parfaitement légitimes. Je crois que le gouvernement devrait en être informé et qu'il devrait également connaître les opinions du comité. Il me semble que le gouvernement devrait tenter de régler tout cela de façon équitable pour tous les intervenants. Si cela l'oblige finalement à reporter la proclamation de la loi, qu'il le fasse. Nous aurons au moins servi de tribune et le gouvernement sait grâce à nous qu'il aura certains problèmes à régler avant de mettre en vigueur cette loi. En tant que président du comité, je suis tout à fait disposé à prendre cet engagement envers vous.

M. Bryden: J'espère que vous aurez également l'occasion de signaler que la date butoir choisie soulève...

Le président: Oui, très bien.

M. Bryden: ...parce que cela me paraît être la principale question. C'est la grande question et elle devrait être mentionnée à ce titre.

M. Marchand: Je voudrais ajouter, encore une fois, que cela me paraît tout à fait hypocrite de votre part de parler ainsi et de dire que vous allez faire ceci ou contacter un tel - Qui? je n'en sais rien, le ministre...

[Français]

M. Duhamel: C'est une accusation, cher collègue.

M. Marchand: Écoutez, vous avez parlé, et j'ai aussi le droit de parler.

[Traduction]

M. Duhamel: C'est contre le Règlement. C'est une accusation. Il m'attribue certaines intentions.

Je n'accepte pas que vous ou qui que ce soit me traite de cette façon, monsieur Marchand. De sorte que non!

[Français]

M. Marchand: C'est assez!

M. Duhamel: J'ai dit non!

.1305

M. Marchand: J'ai bien le droit de parler ici.

M. Duhamel: Vous avez le droit de parler, mais pas de faire des accusations.

M. Marchand: Eh bien, c'est évident!

M. Duhamel: Pas d'accusations, Marchand!

[Traduction]

Le président: À l'ordre.

[Français]

M. Marchand: On a le droit d'exprimer les soucis des gens qui sont venus à ce Comité. Ça ne changera absolument rien, on le sait bien, et ça n'affectera ni le temps de la disposition, ni la loi. On se fout des gens qui sont venus à ce Comité et de leurs soucis. Quand on dit qu'on va essayer de s'entendre avec eux pour adoucir l'impact de ce projet de loi, on sait qu'on n'admet aucune ouverture, de sorte que c'est véritablement de l'hypocrisie. Ce n'est rien d'autre.

[Traduction]

Le président: Nous étions en train...

Monsieur Duhamel, avant de partir, la greffière va prendre les noms. Finissons-en avec le compte. J'aimerais que la greffière appelle vos noms.

Projet de loi C-82 adopté: [Voir Procès-verbaux]

Le président: Dois-je faire rapport à la Chambre au sujet du projet de loi?

Une voix: Pourquoi pas.

M. Marchand: Avons-nous le choix?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci. La séance est levée.

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